La Huitième Vibration – Carlo Lucarelli

LE MOIS ITALIEN

“Nous y sommes allés sans préparation, mal commandés et indécis et, ce qui est pire, sans le sou. En nous fiant à la chance, à l’art de s’arranger et à notre bonne mine. Nous l’avons fait pour donner un désert aux plèbes déshéritées du Midi, un débouché au mal d’Afrique des rêveurs, pour la mégalomanie d’un roi et parce que le président du Conseil doit faire oublier les scandales bancaires et l’agitation de la rue. Mais pourquoi est-ce que nous faisons toujours ainsi, nous autres, Italiens ?”

Comme Le Temps des Hyènes, La Huitième Vibration, raconte la colonisation italienne de l’Erythrée et la guerre contre l’Ethiopie en 1896 qui a abouti à la défaite d’Adoua le 1er mars 1896. L’action se déroule dans la ville portuaire de Massoua, sur la rive africaine de la Mer Rouge. 

Les personnages sont pour la plupart des Italiens militaires. Les officiers ont choisi (pas toujours) le service en Afrique, et pas toujours pour de bonnes raisons. Les soldats ne comprennent pas tous ce qu’ils viennent faire. Ils proviennent de différentes régions d’une Italie qui n’a été unifiée que depuis une trentaine d’années et qui ne se comprennent pas tous. L’auteur s’applique à jouer avec les différents dialectes, accents si différents que le berger des Abruzzes ne comprend pas ses chefs, et ne s’en fait même pas comprendre, que le carabinier sarde  né à Bergame, mélange les deux prononciations, Siciliens et Vénitiens sont aussi très différents… le traducteur s’amuse à différentier les différents parlers : c’est Quadruppani rompu à l’exercice quand il traduit Camilleri. Mon niveau en Italien ne me permettrait pas d’apprécier les nuances. 

Différentes origines sociales se croisent, se toisent. Il y a même un anarchiste pacifiste, réussira t il à ne pas tirer? Le journaliste cherche un scoop. Un carabinier cherche un meurtrier d’enfant, anonyme, il poursuit le suspect. Roman policier. Roman d’amour.

Les Africains, tigréens, éthiopiens, arabes vivent à la marge de la colonie. Les femmes sont le plus souvent des prostituées. Askaris, zaptiés, supplétifs de l’armée italienne. Espions de Ménélik aussi….

 

« Vous le savez comment on l’appelle, Otumlo ? – Non. – Minableville, on l’appelle. – Bon, d’accord. Et qu’est-
ce qu’il vend, le Grec ? – Les personnes. Il vend des sharmutte… des putains, des gamins, des ouvriers agricoles… autrefois aussi des esclaves, quand il y avait les Égyptiens. Maryam a dit à mon espionne que l’autre
soir un soldat italien est venu pour acheter un enfant. »

Il fait très chaud à Massoua. L’action s’englue. L’histoire se traîne  (c’est voulu) dans une atmosphère de corruption. Elles ne sont pas jolies, les colonies.

Quand les troupes partent en guerre des fiers-à-bras, des lâches, des idiots se révèlent

Non, ce n’est pas du patriotisme, non, par Dieu, d’envoyer de nouveaux soldats au massacre… ni de garder là-bas ceux qui y ont été envoyés, parce que vos erreurs, ce sont vos fils qui les paient… mais vous ne comprenez pas, oh, bande de crétins, que les patriotes, ce sont les Abyssins ?” Et il aurait même ajouté : Ribellione, d’Ulysse Barbieri, un grand auteur, mais le sergent s’était immobilisé d’un coup. »

Et le désastre est inéluctable.

Après Le Temps des Hyènes , l’effet de surprise ne joue plus. J’avais été bluffée par ce dernier livre. Je retrouve la même histoire ; policier, historique, africain. 

Une bonne lecture!

Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

6 réflexions sur « La Huitième Vibration – Carlo Lucarelli »

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