Entre ciel et terre – Jon Kalman Stefànsson

ISLANDE

 

« Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d’autres des notes de violon. Certains sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires et que nous ne sommes peut-être ni vivants ni morts. Pourtant, à eux seuls, ils ne suffisent pas et nous nous égarons sur les landes désolées de la vie si nous n’avons rien d’autre que le bois d’un
crayon auquel nous accrocher. »

Entre ciel et terre est le premier tome d’une trilogie. J’avais été soufflée par Le cœur des hommes, lu avant notre voyage en Islande. j’aurais peut être dû lire les trois livres dans l’ordre (je viens de télécharger le tome suivant La Tristesse des Anges )

Dans les fjords du Nord Ouest de l’Islande, au mois de mars, le monde est blanc de neige. Le roman commence dans le Village de Pêcheurs, des baraquements sur une plage où sont posées les barques. Les pêcheurs ont souvent une maison et une famille ailleurs, mais ils logent ensemble avec une cantinière à proximité du rivage. Pétur est le patron de sa barque à six rames. Bardur lit Le Paradis perdu, tellement pénétré par la poésie, il en oublie sa vareuse.

«  Il est des poèmes qui changent votre journée, votre nuit, votre vie. Il en est qui vous mènent à l’oubli, vous oubliez
votre tristesse, votre désespoir, votre vareuse, le froid s’approche de vous : touché ! dit-il et vous voilà mort. »

la journée est prometteuse, il iront loin chercher le poisson:

« Ils rament et leurs cœurs pompent le sang, distillant en eux le doute sur le poisson et sur la vie, mais aucunement
sur Dieu, non, car sinon, ils oseraient à peine monter sur cette coquille de noix, ce cercueil ouvert, posé à la surface de la mer, bleue en surface, mais noire comme le charbon en dessous. Dans leur esprit, Dieu est absolu. Lui et Pétur sont probablement les seuls êtres pour lesquels Einar éprouve du respect en ce monde, parfois aussi pour Jésus, mais ce respect n’est pas aussi inconditionnel, un homme qui tend l’autre joue ne tiendrait pas longtemps ici, au creux des montagnes…. »

Cette journée de pêche qui tourne au drame est un grand moment de lecture.

« Le bonheur, c’est d’avoir à manger, d’avoir échappé à la tempête, d’avoir enjambé les rouleaux imposants qui
mugissent aux abords de la côte, »

La barque est revenue de la tempête chargée du poisson, mais Bardur est revenu gelé.

Le Gamin partageait le lit et la planche de rame avec Bardur ne retournera plus dans la barque et part sous la neige et le vent rendre le livre du Paradis Perdu au Capitaine Kolbeinn 

« L’enfer, c’est ne pas savoir si l’on est vivant ou mort. Je vis, tu vis, nous vivons, ils meurent.

Mourir est le mouvement absolument blanc, lit-on dans un poème.

L’enfer, c’est d’être mort et de prendre conscience que vous n’avez pas accordé assez d’attention à la vie à l’époque où vous en aviez la possibilité. »

Les pages de la marche dans la tempête de neige sur le plateau, entre vie et mort, entre enfer et poésie sont hallucinantes.

Le Gamin arrive dans la vallée de Tungudalur et s’évanouit à l’entrée dans la buvette  du bout du monde. 

le port de Höfn

Dans le village, je retrouve les personnages qui apparaissent dans Le Coeur de l’Homme. L’histoire prend alors une autre tournure et quitte le monde de la mer et des poissons. Un moment, je regrette l’âpre poésie des pêcheurs pour cette vie villageoise plus mesquine. La vie du petit port de commerce avec ses capitaines, ses maisons bourgeoises, ses entrepôts sont un autre monde que le gamin va découvrir et qui va lui donner peut être une autre raison de vivre. 

Et comme je veux connaître la suite de l’histoire, j’attends de lire la tristesse des Anges

Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

13 réflexions sur « Entre ciel et terre – Jon Kalman Stefànsson »

  1. On me l’a offert et je l’ai lu, j’ai adoré et j’ai très envie de lire les 2 autres volumes. Mais ils ne sont jamais en librairie, il faut que je les commande. Je pense que tu vas me doubler facilement. Ce sont des romans si forts et poétiques.

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    1. @Claudialucia : celui-ci je te le recommande mais surtout lis la trilogie dans l ordre et pas comme moi qui ai commencé par le dernier. Aurelia va faire des merveilles avec les lumières changeantes et souvent dramatiques

      8

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  2. Bonjour Myriam,
    Je suis bien contente de voir que nous avons en commun l’amour des livres de Jon Kalman Stefanson. Les deux premiers (Entre ciel et terre » puis La tristesse des anges) ont été un vrai choc. Une façon cosmique de décrire l’hiver, les tempêtes et en même temps, le réel est toujours là.
    Sonia

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