Lorsque nous visitions Abou Simbel, le Soudan n’était pas loin, les voyageurs de Mort sur le Nilpouvaient alors naviguer d’Assouan à Khartoum sur le fleuve. Au Musée de la Nubie d’Assouan, lesPharaons noirs étaient ils nubiens ou soudanais? Au retour de nos vacances égyptiennes, il m’a semblé logique de courir au cinéma voir ces deux films.
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TALKING ABOUT TREES
TALKING ABOUT TREES est un documentaire de Suhaib Gasmelbariqui a filmé avec humour, ironie et délicatesse les quatre cinéastes Ibrahim, Suleiman, Manar et Eltayeb, qui ont fondé le Sudanese Film Group . Rentrant d’exil, leur seule ambition est de restaurer un cinéma de quartier pour faire revenir le cinéma qui a disparu en 1989 avec l’avènement d’Omar el-Bechir et de sa dictature islamique.
Les quatre cinéastes vieillissants retrouvent les films qu’ils ont tourné jadis à l’étranger. Leur entreprise rencontre toutes sortes d’embûches, elle est même vouée à l’échec. Sans se décourager ils cherchent les autorisations, nettoient, bricolent et ont l’air de s’amuser comme des gamins. Et on s’amuse avec eux.
C’est un film de fiction récent d‘Amjad Abu Alala qui a reçu un Lion d’or au Festival de Venise 2019. C’est aussi le 8ème film de fiction soudanais.
Tu mourras à 20 ans ne m’a pas déçue! C’est une fiction s’inspirant d’un roman de Hammour Ziada.
Dans un village au bord du Nil, un enfant est présenté à sa naissance à un chef religieux au cours d’une cérémonie colorée et pittoresque. Le cheikh le baptise Muzamil et prédit qu’il mourra à 20 ans. Muzamil va vivre toute son enfance cette malédiction. Son père fuit ce destin inéluctable et prend la route de l’exil, sa mère revêt des vêtements de deuil alors que l’enfant est vivant et trace au charbon les bâtons comptabilisant les jours que Muzamil a déjà vécu et qui le rapprochent de l’échéance fatale. Tout le village voit dans Muzamil un mort en sursis, les enfants qui l’enferment dans un simulacre de cercueil, l’imam qui prêche la pureté et l’embauche pour servir à la mosquée et même Naima, une jolie fille qui en est amoureuse mais qui se fiance à un garçon promis à la vie.
Dans une maison anglaise, à l’écart du village, vit un réprouvé : Soleiman qui a parcouru (et filmé) le monde, qui boit et qui s’attache à Muzamil, essayant de le faire réfléchir par lui-même et échapper à ce destin mortifère.
Le film se déroule dans un décor naturel somptueux : maisons de terre, mausolée, beauté du paysage et des habitants, étrangeté des cérémonies. Tout concourt à un voyage magnifique.
Peut on échapper aux croyances? A un destin choisi plutôt que prédestiné?
Un hymne à la liberté.
THE LONGING OF THE DERVISH
J’ai été tant impressionnée par le film d’Amjad Abu Alala que je’ai cherché le roman de Hammour Ziada. De cet auteur, j’ai pu télécharger en anglais le livre The Longing of the Dervish, lauréat du Prix Naguib Mahfouz pour la littérature arabe 2014, traduit en anglais mais malheureusement pas traduit en français.
Les débuts ont été difficiles. Ce roman historique se déroule pendant les guerres mahdistes ( 1881 à 1899), entre turcs, égyptiens et anglais qui combattirent le Mahdi, j’ai commencé à me perdre. Ignorante également de la géographie du Soudan, j’ai eu bien du mal à me repérer. Sans oublier les noms des personnages…. Le plus difficile provient de la structure même du roman qui ignore la chronologie, flash-back ou changements de narrateur. Il se lit comme un puzzle dérangé : par pièces éparses que le lecteur doit imbriquer.
Le héros Bakhit Mandil est soit esclave, soit prisonnier (soit les deux à la fois). En prison, ses conditions de détention sont éprouvantes : il est enchaîné, parfois oublié. On fait parfois travailler les prisonniers qui se louent à la journée ou à la tâche. Vendu à plusieurs reprises, Bakhit entretient avec ses maîtres des relations variées. Quand il se libère, il devient dervish, c’est à dire soldat du Mahdi et il est entraîné dans des campagnes sanglantes. Mais la servitude qui le lie est la vengeance qu’il poursuit.
(c) Defence Academy of the United Kingdom; Supplied by The Public Catalogue Foundation
Au fil des chapitres l’histoire se construit, on apprend à connaître les autres personnages : Théodora la religieuse grecque réduite elle aussi en esclavage, et tous les compagnons d’infortune ou de combat.
Roman historique, c’est aussi un roman d’amour . Bakhit ne vit que pour cet amour, Théodora le compare à un héros shakespearien. Ce n’est pas la seule histoire d’amour du récit. Malgré la religion très prégnante, malgré la pudeur des femmes, malgré les combats qui occupent les hommes à temps plein pendant des années, des amours puissantes se nouent, des intrigues fleurissent.
Guerre de libération nationale du Soudan qui s’est trouvé sous le joug des Turcs, puis des égyptiens, des anglais, c’est aussi une guerre de religions. L’islam rigoriste du Mahdi est différent ce l’islam des turcs ou des égyptiens. Le Mahdi veut établir un califat au Soudan. Cet aspect des luttes est encore très actuel. Des milliers de jeunes hommes quittent famille, femme, affaires, pour le djihad, et se lancent dans des campagnes sanglantes où ils massacrent d’autres musulmans. on pense à Daech, à bokoharam. On pense aussi au dictateur Omar el-Bechir qui règnait encore l’an passé à Khartoum.
C’est donc un roman très riche, très prenant au fur et à mesure qu’on range les pièces du puzzle. Dommage qu’il ne soit pas traduit!
Theodora écrit dans son journal :
Bakhit Mandil isn’t like this city. If any of these memoirs were to be published in a book, it would have to mention Bakhit Mandil. He was different. He was an example that Western reader would be surprised to discover. Western litterature ought to write about changing ideas on love. He was like a lover from one of Shakespeare’s plays who had landed inadvertently in a savage country. If he hadn’t be black? If only he hadn’t been a dervish slave. The worst mistake is to become attached to anyone in any way. I don’t want to become like Bakhit.
Bakhit Mandil n’est pas comme cette ville. Si ce journal devait être publié dans un livre, il faudrait mentionner Bakhit Mandil. Il était différent. il était un personnage que le lecteur serait étonné de découvrir. La littérature occidentale doit écrire sur les idées changeante en amour. Il était comme un amoureux des pièces de Shakespeare ayant atterri par inadvertance dans une contrée sauvage. S’il n’avait pas été noir, Si seulement il n’avait pas été un esclave dervish. La pire erreur est d’être lié à quelque un de cette manière. Je ne veux pas devenir comme Bakhit, écrit-elle.
J’aurais pu copier le dialogue où les combattants, les dervishes se demande ce qu’il est arrivé de la pureté de leurs intentions, de leur foi après tant de massacres
La Saga Égyptienne se compose de deux gros livres : L’Egyptienne (688p.) et La Fille du Nil (456p) Cette saga au long cours se déroule pendant un siècle : de 1790, à la veille de l’Expédition en Egypte de Bonaparte (2 juillet 1798) elle se termine par l’inauguration du Canal de Suez (15 Août 1869) , l’épilogue final est le bombardement d’Alexandrie par les Anglais (11 juin 1882). C’est un roman historique très bien documenté. Gilbert Sinoué a écrit la biographie de Méhémet-Ali (1770- 1849) : Le dernier pharaon que j’ai lu et relu avec toujours autant de plaisir que d’intérêt.
Cette saga familialemet en scène une famille de riches propriétaires terriens : les Chédid dans leurs domaines, Sabah à Guizeh et la Ferme des Roses dans le Fayoum. Chrétiens, ils sont proches des Mamelouks qui règnent sur l’Egypte et fréquentent les négociants européens. Youssef et Nadia, les parents sont exemplaires, mais ils rejettent Samira leur fille aînée, qui s’éprend d’un officier turc donc musulman. Nabil est actif dans les cercles d’étudiants nationalistes qui prennent exemple dans la Révolution française. L’Egyptienne, l’héroïne qui a donné son nom au livre et que nous suivrons pendant toute la saga, c’est Shéhérazade, flamboyante, passionnée, intelligente. Amoureuse de Karim, fils du jardinier, mais musulman, ,elle épousera, Michel Chalhoub, chrétien à qui elle était promise qui lui donnera un fils Youssef. Son grand amour de maturité sera Ricardo, vénitien, proche de Mohamed-Ali….La Fille du Nil, Giovanna, fille de Shéhérazade et de Ricardo, est forte personnalité qui épousera le fils du Vice-roi, Saïd (une liberté que l’auteur a pris avec la grande histoire). Les grandes passions, les histoires d’amour, ne m’intéressent pas tellement celle-ci tient la route et porte le roman historique sans trop l’envahir
Le roman historique, est passionnant et tout à fait précis (il ne faut pas sauter les notes de bas de pages, très documentées). Nous comprenons comment les mamelouks règnent sur l’Egypte, presque indépendamment de la Sublime Porte, souveraine en titre. L‘expédition de Bonaparte est racontée par le menu. Abounaparte, aussi surnommé le joueur est décrit comme un conquérant sanguinaire peu soucieux de mission civilisatrice que parfois on lui attribue. Il n’en est pas de même pour Kléber qui apparaît plus sympathique . Et les savants de l’expédition, ceux qui ont décrit l’Egypte? On retiendra ici plutôt les ingénieurs. Bonaparte aura une influence indirecte : il servira d’inspiration à un autre conquérant : Mohamed-Ali , macédonien comme Alexandre le Grand, qui conservera au cours de son règne sa francophilie.
Le héros de la saga est Mohamed-Ali . Sa conquête du pouvoir est cruelle, machiavélique. Il ne se contente pas de régner, il veut moderniser l’Egypte : « nationalise » les terres pour rationaliser l’agriculture, se préoccupe d’irrigation, de canaux, barrages. Il fait venir des experts européens.
Arrivent les Saint-Simoniens les invités surprises du roman avec leurs idéaux progressistes, abolition de la corvée, féminisme, leur folklore et aussi leur quête un peu délirante de la Mère ou de l’Épouse.
On en arrive à Ferdinand de Lessepset enfin au Canal de Suez dont le projet occupe la deuxième partie de la Saga. Mais ce n’est plus Mohamed -Aliqui verra sa réalisation mais le Khedive IsmaÏl , son petit-filsqui l’inaugurera en présence de l’impératrice Eugénie.
En revanche, le rêve de Mohamed-Ali : l‘indépendance de l’Egyptene pourra pas être réalisé. Le jeu diplomatique des grandes puissances européennes hostile au démembrement de l’Empire ottoman mettra en échec tous les efforts, les guerres en Grèce, en Turquie des armées égyptiennes, même victorieuses. L’intervention britannique de 1882 fera de l’Egypte une colonie britannique.
« Mes plus belles heures je les ai passée à la grande carrière proche de la première cataracte. Là, un tailleur de pierre m’a enseigné l’art de manier le maillet et le ciseau, sans négliger l’usage des boules de dolérite; don l’usage répétitif permet de détacher le granite. Pendant que mes camarades s’amusaient, j’apprivoisais les outils et le matériau, ne me souciant ni de l’ardeur du soleil ni de la violence de certains vents. originaire d’un hameau proche du mien, l’artisan avait longtemps travaillé dans le nord à Dachour, où le pharaon Snefrou, aimé et admiré , avait érigé deux pyramides géantes, deux merveilles que mon maître ne cessait de décrire, déployant un enthousiasme communicatif »
D’Assouan à Guizeh…..
Pour rester encore à Guizeh j’ai téléchargé ce roman historique de Christian Jacq. Récit racontant les aventure d’un jeune tailleur de pierre pendant al construction de Chéops, il m’a appris beaucoup de choses sur la construction de la pyramide, la vie quotidienne des artisans, ce qui a suffi à mon bonheur. Même si l’intrigue est un peu simpliste, la psychologie manichéenne avec des méchants très méchants (le Profiteur) des bons très bons (le Vieux) des animaux très gentils et intelligents presque doués de la paroles (l’âne).
Un rêve.
Un rêve de gosse, si merveilleux qu’il effaçait tous les doutes. Un rêve en forme de pyramide, si ample que la journée ressemblait à une fête de l’esprit et de la main. Maintenant, j’assumais mon enfance, mon adolescence et ma vie d’adulte ; mes luttes, mes efforts n’avaient eu qu’un seul but : participer à la création de cette demeure d’éternité.
Mon équipe, la Vigoureuse, m’avait donné une âme, nulle épreuve ne la déliterait ; plus jeune que mes compagnons d’aventure, j’avais l’âge de ces pierres qui oubliaient de vieillir. Combien d’êtres étaient si pleins d’eux-mêmes qu’ils ne se remplissaient pas d’autrui? Je ne bâtissais pas sur l’humain, mais avec lui ; et parce que nous étions conscients d’œuvrer au-delà de notre courte existence, nous vivions. «
Saqqarah : la punition de la Justic
Je me suis revue dans la galerie qui descendait à la chambre funéraire de Dachour où j’ai descendu à reculons une rampe interminable. Les cavités autour des pyramides de Chéops et de Khéphren se sont peuplées de toute une foule de tailleurs de pierre, de tisserands, de blanchisseurs…de toutes les corporations… J’ai imaginé Memphis et j’ai prolongé le voyage.
Nous terminons notre séjour à Giza par une visite guidée privée organisée par le manager de l’hôtel. Taxi et guide francophone. 90$
A 9h, nos trouvons Zizou, notre guide qui se présente « égyptologue, professeur à la faculté de tourisme ». Le chauffeur est sympathique mais ne comprend que l’arabe.
Dans le taxi qui va à Saqqarah, notre guide nous parle de l’Egypte actuelle : Le Caire, métropole de 25 millions d’habitants. Il habite Dachour et doit parcourir plus de trois heures quotidiennement pour aller travailler et conduire ses enfants à l’école privée américaine. Au risque de nous déplaire, il annonce la couleur politique : il regrette Moubarak. La Révolution de 2011 l’a ruiné. Cela prendra le contre pied de ma lecture d’Alaa El Aswany. Il nous parle de la population rurale, souvent illettrée et traditionaliste. Nous croisons des femmes voilées de noir parfois cachées dans leur niqab. Pour lui, aucun rapport avec la religion : ce serait le mari jaloux qui ne tolérerait pas qu’elles montrent leur visage à d’autres hommes « même les laides » ajoute-t-il.
Sur le bord de la route : les poissons du canal
Nous suivons un canal d’irrigation creusé du temps de Nasser qui va jusqu’à Assiout. Dans cette campagne agréable et encore rurale, des villages misérables voisinent avec de riches villas appartenant à de riches Cairotes qui y passent les week-ends ou les vacances d’été. Il y a aussi des « écoles de tapis » qui ne sont pas des écoles mais des ateliers où des enfants tissent à la main. Nous voyons aussi de modernes universités privées. Les jeunes qui les fréquentent sont plus préoccupés de leur look (coiffures de footballeurs) et des réseaux sociaux, que de leur réussite scolaire, déplore Zizou.
Nous nous arrêtons devant une jeune vendeuse de poisson qui a deux bassines métalliques, dans l’une des perches du Nil (taille de nos dorades) et des poissons chats vivants d’au moins 50 cm de long dans un peu d’eau. Ils ont été pêchés dans le canal à l’aide de filets que les pêcheurs sur de petites barques ont déposés. Plus on s’éloigne du Caire, plus la palmeraie devient touffue. Parfois on voit une tour ronde percée de trous : un pigeonnier. Pour éloigner les serpents les trous circulaires sont bordés de céramique.
Palmeraie : un petit canal
Après la palmeraie, sans transition : le désert et Saqqarah !
Avant de visiter les monuments Zizou fait une introduction. Il met l’accent sur le rôle du Grand Prêtre intermédiaire entre Pharaon et le dieu, également intervenant dans la déclaration de guerres. Le Grand Prêtre fait fonction de 1er ministre. Il est également détenteur de pouvoirs magiques, des secrets de la momification et des hiéroglyphes. Vieillissant, il transmet son savoir à son fils qui lui succédera. Autre personnage important : le scribe qui comptabilise les récoltes, distribue les salaires, copie les décrets royaux ?
Saqqarah Pyramide ruinée
A Saqqarah se trouvent plusieurs pyramides. Celle de Teti(6ème dynastie), celle d’Ounas(2356 av JC) qui contient un texte complet : le Texte des pyramides.
La pyramide de Djoser ou pyramide à degrés est la 1ère pyramide construite. C’est plutôt un empilement de mastabas. En la longeant, on constate les rajouts. Le revêtement de calcaire poli ne concernait que le mastaba inférieur.
Saqqarah :Complexe de Djoser
Le complexe de Djoser comprend un certain nombre de constructions. La Grande Colonnade a été remontée (anastylose). Une allée couverte passait entre 42 colonnes faisant référence aux 42 provinces de l’Egypte, sous un plafond de rouleaux de calcaire fin poli rappelant les troncs qui soutenaient les plafonds. Zizou me fait remarquer le poli et la précision des découpes. Les blocs s’encastraient parfaitement sans ciment. Les colonnes, pour plus de solidité sont reliée au mur par des piliers.
Le temple de la Vallée au pied de la pyramide à degrés est un vaste rectangle bordé de chambres latérales et de la Maison du sud et de la Maison du Nord où le Pharaon changeait de robe et de couronne. Ces deux maisons symbolisaient l’unification de la Basse et de la Haute Egypte, comme les coiffes (rouge pour la terre fertile du delta et blanche pour le désert de Haute Egypte).
Un passage souterrain de 6 km découvert par l’IFAO reliait Saqqarah
à Abousir.
A Saqqarah on peut voir les différents stades d’inhumation au cours de l’Antiquité : l’enfouissement était le plus ancien. Le puits est très profond « attention aux lunettes et aux appareils-photos ! » prévient le guide.
Mastaba d’Idout : offrandes
Plusieurs mastabas se visitent, pour certains il faut payer un supplément (Mererouka). Le mastaba d’Idout (2360 av.JC) est la tombe d’un vizir. Desbas-reliefs de scènes de la vie quotidiennes sont très finement ciselées dans un calcaire très fin et très lisse. Dans les scènes de pêche on reconnaît les perches du Nil que nous venons de voir ce matin parmi les différents poissons. Des processions et offrandes avec des bœufs. Une scène originale : celle de la justice où les coupables sont punis.
Mastaba d’Idout : offrande d’un boeuf
La grande cour entre la colonnade et la Pyramide est le lieu où se pratiquait la fête du Jubilée : Hebsed où Djoser (et ses successeurs) prouvaient au peuple qu’ils avaient la force de gouverner en combattant un taureau (Zizou affirme que les Egyptiens ont inventé la corrida).
Sur la route de Memphis
Traversant une verte palmeraie, nous atteignons Memphis, l’ancienne capitale des pharaons (3200 av JC) où se trouvaient les palais et les temples, bien ruinés. Rien à visiter pour les touristes : ces édifices étaient destinés à la vie et non à l’éternité comme les pyramides. Les palais n’étaient pas conçus pour durer. A Memphis on vient surtout pour un parc de statues retrouvées dans les environs er surtout le colosse couché de RamsèsII abrité dans un musée. Il est habillé d’un pagne délicatement plissé. Son épée (poignard) est glissée dans une ceinture à motifs en zigzag (représentation de l’eau). De nombreux cartouches sont gravé sur la statue à son nom de naissance et à son nom de couronnement. Genoux, barbe sont aussi parfaitement rendus.
Memphis : sphinx
Dans un jardin bordé de petites boutiques de souvenirs, un sphinx d’albâtre, d’un pharaon non identifié est de belle taille. Plus discrètes les statues de la triade de Ptah, Sekhmet et Nefertoum rappellent que Memphis était la ville de Ptah et qu’il y avait là son temple.
RamsèsII couché
Dahchour est encore plus loin dans la campagne. Nous passons un village admirons les étals des marchands de fruits très colorés.
Dahchour : fruits et légumes
Retour dans le désert, on s’approche des trois pyramides : la rhomboïdale (pyramide ratée, l’architecte a dû rectifier la pente en cours de construction), la rouge et une noire, plus loin qui semble un peu ruinée.
Dahchour : pyramide noire
Les deux premières sont l’œuvre de Snefrou, grand bâtisseur de pyramide puisque celle de Meidoum, lui est aussi attribuée. De Dachour on peut voir la Pyramide à degrés de Djoser et même au loin celles de Giza.
Dahchour : pyramide rouge
La pyramide rouge se visite. Evidemment je ne vais pas louper cette occasion. L’ouverture se situe en haut d’un escalier. Ensuite on descend une rampe en bois équipée de traverse (pour éviter de glisser comme sur un toboggan. Le gardien conseille de se retourner et de regarder plutôt vers la sortie. Si bien qu’on ne sait pas quand on arrive. Le plafond est très bas. Comme je suis petite cela ne me gêne pas trop. Le problème c’est plutôt de se croiser mais il n’y a pas foule. Je rencontre seulement une famille d’américains d’origine égyptienne avec deux enfants qui parlent Anglais. Quand la rampe est finie on n’est pas arrivé : un escalier de bois , un échafaudage plutôt, de deux ou trois étage conduit à une chambre où on arrive en descendant à nouveau. Pour m’occuper pendant la remontée je compte les marches et j’arrive à un total de plus de 600 aller et retour. Du sport ! Comme montées et descentes alternent je ne suis pas essoufflée ! Evidemment je n’ai pas vu grand-chose : cette pyramide n’est pas décorée. Il n’y a même pas de sarcophage. Seulement de beaux chevrons dans les chambres funéraires. Mais c’est plutôt pour l’expérience : j’aurai regretté de quitter l’Egypte sans avoir exploré l’intérieur d’une pyramide !
Zizou habite Dahchour, il nous demande si cela ne nous ennuie pas trop de rentrer seule avec le chauffeur. Bien sûr que non. On ne va pas lui imposer toute cette route et les embouteillages. Il nous quitte donc vers l’heure du déjeuner après nous avoir recommandé le restaurant Abou Shakra à Giza.
Dès notre retour à Giza, et sans monter nos quatre étages nous nous précipitons pour trouver Abou Shakra. Facile à trouver, tous les marchands, caléchiers et hôteliers connaissent : c’est presque en face de la billetterie, tout près de KFC et de PizzaHut. C’est sans doute à cause de ce voisinage que nous l’avons dédaigné hier alors que nous cherchions un restaurant !
Malgré le voisinage des fast-food mondialisés, c’est bien un vrai restaurant avec une belle salle avec vue sur les pyramides et en bas une salle bien décorée avec des photographies anciennes encadrées. La carte offre un grand choix de grillades : poulet, pigeon, agneau. ..Et je trouve ce que je cherche depuis des années : de la molokhia ! j’ai entendu parler de ce plat depuis mon enfance, dans les livres égyptiens et je n’y avais jamais goûté ! La molokhia est servie dans une sorte de cassolette de terre cuite avec deux morceaux d’agneau mijoté et un bol de riz renversé pour faire un petit dôme. Elle ressemble un peu à des épinards ou de l’oseille mais plus liquide et un peu gluant. C’est frais, acide. Renseignement pris, la plante s’appelle de la corette potagère, de la famille des Malvacées . Je viens de trouver la recette et un texte de Robert Solé sur le blog égyptophile
Giza : vol de pigeons au coucher du soleil
Les vacances se terminent. Il me reste encore un peu de temps pour traîner dans le quartier humer le crottin de cheval, voir passer cavaliers et dromadaire puis terminer l’après midi et la soirée sur la terrasse de Sunshine Pyramide View , et de regarder deux éditions du Sons et Lumières bien emmitouflée parce qu’il fait frais le 30 décembre !
Des nuages sont dispersés dans le ciel. C’est joli mais en-dessous, les pyramides sont un peu ternes. Petit-déjeuner original : une assiette de fruits : pommes détaillées en fines tranches, bananes une mandarine et des fraises, omelette et fromage jaune très salé. Les mandarines égyptiennes sont d’un très gros calibre, très parfumées mais pleines de pépins.
En calèche sur le plateau de Giza
La ruelle de l’hôtel est très étroite, recouverte de sable jaune très fin, entre de grosses maisons avec des arbres dans les jardins. Au bout de la rue : le site des Pyramides. Un homme nous hèle, il propose 3 heures de calèche et le tour du site. Nous nous laissons tenter. Monter dans la calèche est une épreuve pour Dominique. Une fois installées, nous laissons l’initiative au caléchier assis sur le marchepied de sa belle calèche orange. C’est un petit homme, plus très jeune, très tranquille, à l’écoute de son cheval, pas une brute comme celui de Louxor. Au pas tranquille du cheval, nous profitons du paysage sans être importunées par les vendeurs ou les chameliers. Seuls les gros cars qui nous frôlent sont une nuisance. Les calèches sont nombreuses, les caravanes de dromadaires harnachés de tapis colorés, les chevaux, aussi. Tous ces gens vivent du tourisme. Que se passerait-il si le tourisme était menacé. Je pense à leur réaction violente den 2011 lors de la bataille des chameliers lors de la Révolution de la Place Tahrir. Je viens de terminer le livre d’Alaa El Aswany qui occupe mes pensées.
Khefren
Nous montons d’abord vers Chéops, contournons Kephren pour nous arrêter au « panorama » le point le plus haut sur le plateau de Giza d’où l’on voit les pyramides de Saqqarah et de Dachour dans le lointain et Le Caire noyé sous la pollution. C’est le point de départ des petites méharées. Les Asiatiques sont les plus nombreux, ils improvisent des mouvements d’ensemble pour un selfie général. Aujourd’hui, les plus nombreux sont les Indonésiens, femmes voilées et tenues colorées. Nous nous approchons de Mykerinos et des ses petites pyramides satellites un peu ruinées. Nous multiplions les arrêts-photos pour faire durer la promenade. Dernière étape près du Sphinx.
Khefren et le sphinx
Bien sûr, une ballade en calèche ne remplace pas une visite guidée, le MOOC de Harvard sur le Plateau de Giza attend dans l’ordinateur.
Après la calèche, je me dirige à pied vers le Sphinx. A ses pieds, se trouvent les vestiges d’un temple de Kephren en granite d’Assouan dont il ne reste plus grand-chose. Je photographie le Sphinx sous tous ses angles et remonte la rampe de Kephren en compagnie de 5 collégiennes en robe noire et voile blanc ou rouge, grosses baskets blanches ; elles cherchent à me parler. En haut de la rampe, au pied de la pyramide, encore un temple. Je fais le tour de Cheops jusqu’au Musée de la barque solaire et retrouve Dominique à 13h15.
Notre quartier : les écuries des Pyramides
Où aller manger ? Devant l’entrée des Pyramides KFC et PizzaHut nous servent plutôt de repoussoir. Nous cherchons quelque chose de plus typique. Pour rentrer nous nous perdons en essayant de couper par les ruelles, nous retrouvons dans des culs-de-sac. Il reste encore de la chère pizza d’hier, j’achète des fruits (oranges et goyaves). Après les agapes du bateau et les solides déjeuners de Nour El Gournah, quelques repas frugaux nous feront le plus grand bien. Je découvre que notre quartier est celui des écuries des Pyramides.
Derrière notre hôtel : les écuries des Pyramides
Partout dans la grande rue, sur la place, paissent des chevaux dételés, des dromadaires…les calèches orange stationnent un peu partout. La présence des animaux m’est très sympathique. Les grosses maisons sont bâties au-dessus des écuries ; partout, crottin et luzerne. On transporte de la paille, il y a des officines de vétérinaires, des marechaux ferrants, dans une ruelle on passe la tondeuse sur la robe d’un cheval, ailleurs on nettoie les sabots…Dans les ruelles des gamins galopent en brandissant des cravaches colorées.
Giza : pigeonnier et pigeons
Tourisme et village offre une coexistence sympathique. Presque toutes les grosses maisons ont installé leur « roof-top », ont construit un ou deux étages de chambres d’hôtes. Ces hôtels, comme le nôtre, ne paient pas de mine mais sont admirablement bien situés avec vue panoramique sur les pyramides. Si on se tourne vers le quartier, on découvre les hauts pigeonniers de bois de couleurs vive, sorte de cages peintes de motifs géométriques sur de hauts échafaudages de bois. Des vols de pigeons les survolent. Sur le toit le plus proche de notre terrasse un homme agite un drapeau égyptien pour faire des signaux aux pigeons. Parfois il tape avec la hampe sur le toit du pigeonnier. Dans la ruelle, une sorte de trompe attire mon attention : c’est le marchand de ballons de baudruche.
Sur une terrasse au 3ème étage d’un immeuble proche, il y a un mouton prisonnier. Des chiens invisibles aboient. Il y a même des coqs. Au coucher du soleil le muezzin appelle à la prière. Cette animation me plait beaucoup et j’ai plaisir à redescendre faire des courses.
Vu du Rooftop le son et lumières
Nous terminons la soirée devant le spectacle Sons et Lumières gratuit pour nous de la terrasse. Le pyramides s’allument unes à unes, puis le Sphinx. La musique est tonitruante et le commentaire pompeux. Je ne raterai aucune séance et resterai longtemps sur le rooftop. Nous sommes réconciliées avec l’hôtel.
Mahmoud a organisé pour nous un petit déjeuner à 6h30 et une grande boîte à gâteaux avec des œufs, des tomates, des concombres et des oranges pour déjeuner dans le train. L’hôtel de Giza a envoyé un whatsapp et me demande de photographier nos billets de train. Facile ! Ahmed Yousseph, le chauffeur est ponctuel.
Le trajet sur la Rive occidentale du Nil jusqu’au pont est très agréable. Nous bavardons gentiment, je lui demande des nouvelles de Karim « Christmas boy » âgé maintenant de 3 jours.
la montgolfière survole la « west bank » et accessoirement notre terrasse.
Un panneau Welcome to the West Bank ! me fait penser aux sites Internet de réservation d’excursions en Montgolfière. La traduction automatique a l’humour involontaire, de traduire « West Bank » par « Cisjordanie ». J’avais lu sur une publicité qu’un vol de 3 ou4 heures allait faire survoler la Cisjordanie. Merveilleux ! Traverser la Mer Rouge, le Sinaï, survoler Israël et revenir, tout cela en 4 heures, à bord d’un avion supersonique pourquoi pas ? En ballon c’était peu vraisemblable !
Louxor – Giza en 1ère classe
Arrivée à la gare vers 8h. Un porteur se propose pour les valises et nous conduit au bout du quai devant l’emplacement où la voiture 1 s’arrêtera. L’horaire du train est flou. Sur le ticket imprimé 8h38, mais tous les cheminots parlent du « train de 9h » en provenance d’Assouan. Il est donc « à l’heure » à 9h. Les premières sont très confortables, fauteuils »avion » de business class, rembourrés, inclinables, repose-pied et beaucoup de place pour les jambes
Nous traversons les champs de canne à sucre, des petits champs d’oignons de choux gigantesques où les hommes travaillent à la binette. Il y a aussi de la luzerne et des bananeraies ?
Le Nil à travers les stores vénitiens
Le train s’arrête tout le temps dans de petites gares que je n’arrive pas à identifier (c’est écrit uniquement en arabe. Quelquefois, il s’agit d’arrêts en pleine campagne. Je note les arrêts, les compte jusqu’à 19 puis me lasse.
Tahta 13h42, sur la carte, Tahta c’est encore bien aau sud.
Assiout 14h50 – je me suis assoupie entre Tahta et Assiout.
El Minia 16h30 El Minia est une très grande ville universitaire
Depuis Assiout, le train longe un canal ; la lumière est très belle ; les palmiers se reflètent dans l’eau, les jardins sont très verts. En même temps on passe sans transition par des zones très urbanisées. On sort d’une ville pour entrer dans une autre. Immeubles de briques rouges pas terminés (des ferrailles dépassent, pas de crépi) grandes mosquées et églises de ciment.
Comment allons-nous reconnaître Giza dans la nuit ? Le préposé aux valises vient nous chercher – bien trop tôt ! – Devant la porte les valises s’accumulent, le train s’arrêtera-t-il assez longtemps ? Sur le quai : la foule et pas de porteurs. Il faut descendre l’équivalent de deux étages pour le souterrain et les remonter. Un militaire fait le malin et demande les tickets et puis il se moque de Dominique « miskina ! » quel sot personnage ! Il aurait pu donner un coup de main. Heureusement le taxi de l’hôtel nous a attendu malgré le retard du train.
Traversée de Giza dans la nuit : autoroutes, buildings, ville sans grâce aux constructions très hautes et très denses. Le taxi s’engage dans d’étroites ruelles où la voiture doit contourner touktouks et charrettes ?
L’arrivée de nuit à l’hôtel Sunshine Pyramids Viewest une claque. D’après le descriptif de booking.com nous avions imaginé un hôtel luxueux avec tous les services et le confort. On commence à monter à pieds 4 très hauts étages. Wifi déficiente, pas de lampe de chevet ni de drap du dessus…Un restaurant était annoncé sur le rooftop . 2 tables et des chaises mais pas de cuisine, juste un micro-onde pour réchauffer les plats achetés à l’extérieur. La pizza est livrée avec le carton 10$ la pizza ! Là je proteste ! Pour la moitié du prix, nous avons l’habitude d’avoir un repas complet avec salades, dessert et café. La pizza c’est un snack pas un repas et de toutes les façons le prix du menu annoncé sur internet était 8$.
Giza : son et lumières de la terrasse de l’hôtel Sunshine Pyramids View
En revanche, nous avons le plaisir de contempler les pyramides éclairées et même d’entendre le Sons et Lumières en Espagnol A tour de rôle Chéops, Kephren et Mykerinos s’illuminent, sans oublier le sphinx vert ou bleu.
La Vallée des Reines est située à l’écart de la route. C’est un endroit magnifique et sauvage dans la montagne, un étranglement dans la paroi rocheuse. Cependant, la sauvagerie des lieux est un peu gâchée par les installations, cheminements de ciment, entrées cimentées des tombes, grilles des bouches d’aération. En ce moment 4 tombes se visitent.
La plus célèbre : celle de Nefertari, la femme préférée de Ramsès II est au prix de 1400LE (70€) sans le droit de photographier (300LE) On ne peut rester que 10 minutes dans la tombe et il faut déposer ses affaires à la consigne. Des groupes asiatiques patientent devant l’entrée. Je zappe ! J’aurais dû prendre le Louxor Pass Premium ! mais il fallait le payer en devises et je n’ai plus que des livres égyptiennes.
La seule tombe de Reine ouverte est celle de Tyi, épouse de Ramsès X. J’ai visité deux tombes des Princes Khaêmouset et Amonkhepershef, fils de Ramsès III.
Khaêmouset
Ramses III conduit son fils enfant vers Anubis
Le prince, crâne rasé avec la longue mèche est pris par la main par le Pharaon, son père et mené à la rencontre des dieux du panthéon égyptien, de grande taille, colorés, vêtus de la tunique panthère des prêtres et souvent tenant à la main des couteaux aiguisés bleus.
Le gardien désigne chacun des dieux par leur nom : Ptah, bleu, Osiris, vert, Hathor avec la tête de vache, Khnoum, bélier…..
Dans les deux autres tombes on voit toujours ces processions mais les gardiens ne sont pas aussi bavards. Dans la tombe de Tyi, ce dernier joue avec son téléphone mobile et ne me calcule même pas. Il n’a rien eu !
11h j’ai toujours le ticket de la tombe de Ramosé. Suivant la route principale, cela fait une promenade agréable. Le jeunes au parking de la Vallée des Nobles me reconnaissent, goguenards me disent : « vous encore ! vous venez Je tous les jours voir Ramosé ! »
Ce matin, il y a du monde : un groupe d’Espagnols dans la tombe de Ramosé. Je trouve la fresque de la procession funéraire avec les pleureuses en blanc levant leurs bras au ciel ?
Ramosé : th-le amarnien aton envoie ses rayons
J’y trouve aussi les bas-reliefs amarniens avec les rayons d’Aton (soleil) terminés par des petites mains tombant sur Akhnaton et Nefertiti
Deux autres tombes se visitent avec le ticket de Ramosé.
Tombe de Khâemhat
Khâmenhat (T57) scribe royal d’Amenhotep III, « Gardien des greniers royaux » . Sa tombe est décorée de bas-reliefs dans le même style que ceux de Ramosé dans le même calcaire lisse un peu gris au grain très fin. Khamenhat est mis en scène dans des activités agricoles en relation avec sa fonction. Scène de battage du blé impressionnante, comme un ballet. Comptage du bétail mais aussi des scènes de guerre avec chars et chevaux et même navires.
Ouserhat, scribe royal d’Amenhotep II avait pour titre « scribe qui comptait les pains » c’était aussi le recruteur des soldats . Une scène de chasse est remarquable avec la présence de nombreux animaux.
mimosas colosse et montagne thébaine
C’est notre dernier jour à Gournah, je ne me lasse pas de dessiner au restaurant, sur la terrasse. Je m’accorde en fin d’après-midi une dernière promenade aux Colosses de Memnon et au temple d’Amenhotep III. Maintenant plus familier, il devient plus lisible. Je remarque les mimosas fleuris. C’est une belle conclusion à cette semaine !
Le muezzin fait du zèle ! Il a commencé à 4h45 tandis que les autres n’ont chanté qu’à 5h12. Je ne veux surtout pas rater le lever du soleil prévu à 6h34 face aux Colosses de Memnon. Pas de montgolfières aujourd’hui.
Je me proposais de rejoindre le village des artisans à pied mais voici que ma réserve de petits billets indispensables pour les pourboires est à sec. Le chauffeur du taxi 414 m’a déjà dépannée. Pour 20 LE il me monte au site et me donne un assortiment de 5 LE et de 10 LE.
L’entrée du site est équipée d’un auvent abritant des bancs pour les explications des guides à l’aide de deux maquettes : l’une de l’ensemble du village, l’autre d’une maison ainsi que de panneaux de l’IFAO (merci aux archéologues français soucieux de pédagogie).
Deir el medinq
Le village des artisans : Deir el medina est entouré d’un mur d’enceinte. Il est composé de 68 maisons mitoyennes d’environ 70 m2, seuils, linteaux montants sont en pierre, le reste en briques crues. Chaque foyer était composé de 8 à 10 personnes. Quand les hommes vont au travail dans la Vallée des Rois creuser et décorer les tombes royales, les femmes restent au village. Les vestiges sont un témoignage de la vie d’êtres humains ordinaires qui n’étaient ni pharaons ni prêtres. Lors de leurs congés les artisans préparaient leurs propres tombes .
Tombe de Sennedjem
Une étude exhaustive de la tombe de Sennedjem est disponible sur le site Osiris.net
Une visite virtuelle de cette tombe est aussi possible sur ce site : CLIC
Sennedjem était le chef des travaux sous Ramsès II. Les scènes sont toutes dessinées et peintes et non pas gravées comme les tombes royales mais elles sont extrêmement soignées et colorées. Je suis émerveillée par la diversité des scènes de la vie des champs, des paysages merveilleux avec des arbres portant des fruits, des scènes mythologiques se mêlent à la vie quotidienne.
Moins colorée que celle de Sennedjem elle donne des témoignages sur l’embaumement et nombreuses divinités que je ne connaissais pas avant de lire l’article ci-dessus.
Voyager avec le smartphone et une connexion wifi change beaucoup de perspectives. Je n’ai pas encore décidé si l’effet de surprise était le plus important pendant le voyage ou si cela aurait été mieux d’étudier les documents avant la visite.
Tombe d’Inherkat (sous Ramsès III et Ramsès IV) La tombe de Pachedou
Il faut un ticket spécial pour la visiter à acheter à la billetterie
La tombe de Pachedou est située encore plus haut dans la pente. Le gardien peine à monter.
Les couleurs sont très vives, les sujets sont souvent situés dans un environnement végétal merveilleux. La fresque la plus célèbre est l’image d’un homme courbé sous un arbre qui boit de l’eau à un ruisseau ; c’est mon interprétation personnelle parce que les égyptiens en donnent une autre : ce serait un homme qui prie avec la même posture que les musulmans.
Il m’est plus difficile de prendre des notes dans ces chambres exiguës. Depuis notre dernière visite, on peut prendre des photos au téléphone. Je me déchaîne et je filme !
Je longe les vestiges du village. Les 70 m2 annoncés doivent probablement tenir compte de l’étage, on retrouve l’emplacement de l’escalier et on peut imaginer la vie de ces gens, dans les chambres petites, mais aussi sur les terrasses. Le marchand d’objet en albâtre qui veut absolument me vendre un ibis que je n’ai pas l’intention d’acheter ne me lâche pas d’une semelle. Il commente :
« dans un mois égyptien il y avait 3 semaines de 10 jours, pendant les deux premières les artisans travaillaient pour la tombe du pharaon ; la 3ème était de repos. Comme les artisans n’avaient pas le droit de quitter le village de peur de révéler à des étrangers les emplacements secrets, ils consacraient leur temps à leurs tombeaux »
Une autre légende dit qu’on banderait les yeux des ouvriers pour qu’ils ne reconnaissent pas le chemin .
Vérité ou légende ?
Le petit temple d’Hathor
Au bout du village se trouve le Temple d’Hathor de l’époque ptolémaïque ( 3ème -2ème siècle av JC) du règne de Ptolémée Philopator. Ce temple est dédié à Hathor, Maat et Amenhotep.
C’est un temple charmant avec des chapiteaux aux nombreux pétales ouverts qui ont gardé leur couleur bleu turquoise. Des chapiteaux hathoriques sont aussi colorés ainsi que les vautours étendant leurs ailes au plafond.
J’avais oublié le puits des ostraca beaucoup plus profond que dans mon souvenir. J’ai distribué tous les petits billets aux gardiens des tombes. Le marchand d’albâtre réclame son dû pour ses commentaires. Quand je lui dit que je n’ai rien dans mon porte-monnaie, il est incrédule. Pas de problème ! il a de la monnaie et ne me rend que 60 sur 100 LE !
Je passe l’après-midi à dessiner tandis que Dominique s’est fixé un cadre dans les palmes ; Elle attend que sur la route passent des sujets pittoresques à photographier. Aujourd’hui, son attente est récompensée : une charrette, un homme à califourchon sur son âne, des familles…
Visiter Karnak en un quart d’heure à la sortie de la Croisière au pas de course relève plus de la plaisanterie que du tourisme !
J’ai donc prévu d’y retourner, l’après midi pour éviter l’affluence.
La matinée s’est écoulée tranquillement et studieusement sur la terrasse à dessiner et à peindre.
J’attendais les montgolfières, seulement deux en ce matin de Noël. Cette attraction n’a pas fait recette après le Réveillon !
Au petit matin, pas de brume comme hier. Les crêtes roses de la Montagne Thébaine sont nettes à l’horizon. En revanche, vers midi, une poussière brune est soulevée par le vent et noie le paysage. Le ciel devient brunâtre, les couleurs virent au beige et sépia.
A 13h30, j’appelle Ahmed Youssef, mon chauffeur qui m’emmène au débarcadère. Un petit neveu vient de naître qu’il appelle « Christmas boy ». Au débarcadère je descend dans le petit bateau à moteur qui se remplit vite (il faut au moins 8 passagers pour traverser) Arrive une équipe de foot, on grimpe dans le bateau d’à côté.
13h50 me voilà sur la Corniche ! 3 km séparent Karnak de Louxor La promenade me tente. Le vent est frais ; à l’heure de la sieste il n’y a pas de circulation. La corniche est fleurie, sur le fleuve sont amarrés des bateaux-restaurants. Des jeunes filles aux voiles colorés de rose ou de rouge marchent deux par deux. Après le Musée Archéologique (fermé de 14h à 17 h), la circulation automobile est interdite. Belle promenade tranquille !
obélisques
14h30, j’entreprends la visite de ce temple immense. Comme au Ramasseum, les archéologues français de l’IFAO ont installé des panneaux explicatifs détaillés (français/anglais/arabe). Je n’ai même pas besoin d’ouvrir le Guide Vert. J’ai laissé Gallimard dans la chambre (trop lourd). Ces deux guides donnent une description complète, illustrée. Pas question de les recopier ! D’ailleurs, je n’ai pas pris de notes.
Karnak est un site gigantesque. Ce n’est pas un temple, mais une série de temples enchevêtrés, imbriqués les uns dans les autres. Chaque Pharaon a ajouté sa touche pour sa gloire personnelle ou celle d’Amon, du Moyen empire à l’époque romaine, parfois aux dépens des monuments de leurs prédécesseurs. Ils ne sont pas construits selon un axe mais selon deux perpendiculaires. L’ensemble ne compte pas moins de dix pylônes.
Remonter le 9ème pylône
Du temple du Moyen Empire, il ne reste qu’une cour avec trois seuils de granite et un bloc d’albâtre. Thoutmosis III a fait disparaître une partie du temple d’Hatshepsout, sa belle-mère, Sethi 1er a commencé à bâtir la salle hypostyle, Ramsès II a continué l’œuvre de son père. Ramsès III a construit de côté un temple plus modeste que celui de Medinet Habou…Philippe, le Frère d’Alexandre le Grand s’est approprié un sanctuaire. Même les Romains ont laissé leur trace.
colosses
Avec les statues colossales je ne sais où donner de la tête, sans parler des obélisques.
Il me restera le souvenir de cette grande salle hypostyle avec ses 134 colonnes. Celles qui bordent l’allée centrale sont beaucoup plus haute que celles des côtés. Leur diamètre est si grand que je n’arrive pas à faire des photos satisfaisantes.
Je me contente de retrouver les dieux, les symboles, Amon sous forme de Bélier ou humain coiffé de deux plumes…Partout des barques, des porteurs de barques, des reposoirs des barques…
Je n’ai pas retrouvé le « jardin botanique » décoré de bas-reliefs de plantes.
Partout de gros engins sont utilisés pour des travaux de restauration. Il faut bien une grue pour remonter le 9ème ou le 10ème pylône !
Le temps me manque, je veux rentrer avant la nuit.
Etrangement, il n’y a pas de taxis à la sortie du site, seulement des calèches. Le retour en calèche aurait pu être romantique si le cheval n’avait été une vieille carne, vieux cheval gris avec les os qui lui trouent la peau. Le caléchier n’est pas jeune non plus. Il est mal embouché et brutal avec le pauvre cheval à qui il donne des coups quand le vieil animal ralentit l’allure. Déjà, la course était chère (50 LE) mais il réclame un « cadeau pour le cheval ». je lui donne la somme convenue et saute rapidement du marchepied.
A la sortie du ferry baladi pas de taxi. Les locaux prennent des minibus à la gare routière. J’essaie un touktouk qui me propose un tarif de 60 LE ! C’est non ! Quel microbus choisir ? la direction est écrite en arabe. Au hasard je donne 20 LE, les autres passagers font circuler 2 ou 3 pièces et je descends juste après les Colosses de Memnon.
Le muezzin nous réveille dans la nuit, j’attend le lever du jour. Avec le lever du soleil s’envolent les montgolfières dont le souffle arrive jusqu’à notre chambre. J’en compte ce matin une vingtaine.
6h30, tout le monde dort, sauf les chiens qui montent la garde et m’empêchent de sortir. Ils sont grands, hérissés, sales. Comme je force la sortie ils m’accompagnent.
Le Temple de Mérenptah est à une centaine de mètres. De la route, je pourrais observer le site l’entrée se trouve près de l’hôtel où nous avons vu le dromadaire samedi. Ici aussi les chiens hurlent contre mon escorte. Je redoute de me trouver au milieu d’une bataille canine et renonce à Merenptah. Je reviendrai quand l’hôtel sera ouvert et les chiens calmés.
Plus loin, un autre chantier de fouilles se trouve entre le temple de Merenptah et le Ramasseum. Des colosses semblent sortis de terre. Ils n’étaient pas là à notre dernier séjour en 2010. Un panneau indique temple de Touthmosis IV
Ramasseum au soleil levant
Sur la route de nombreux minibus me doublent. Déjà les touristes ? Non ! ce sont les ouvriers en gallabieh grise qui se rassemblent sur les chantiers archéologiques. De touriste, il n’y a que moi. Les occidentaux en jeans et gros appareils-photos sont les archéologues qui supervisent le chantier. On fouille beaucoup, c’est une des justifications de la destruction du village de Gournah et de la stérilisation de terres agricoles. L’archéologie me passionne mais je privilégie toujours les Egyptiens vivants à ceux qui sont morts il y a des milliers d’années. Après l’arrivée des ouvriers c’est celle de la police qui circulent en gros pick-up.
Ramasseum
Ramasseum Ramsès et palmier
Le gardien me demande mon ticket et le déchire. Si je veux revenir, il m’en faudra un neuf !
Autrefois on arrivait par les champs et on entrait sans payer.
Merci aux archéologues de l’IFAO qui ont pensé à faire de nombreux panneaux explicatifs détaillés en français !
Le Temple des millions d’années de Ramsès II a été nommé Ramasseum par Champollion en 1829. Dessiné en 1738 par Fréderic Norden puis pendant l’Expédition d’Egypte des Savants de Bonaparte ; Belzoni en 1816 « enleva » le buste de Ramsès II qui se trouve maintenant au British Museum. J’aime bien ces histoires de savants et d’aventuriers.
Le 1er pylône est bien ruiné, on peut distinguer les gravures de la Bataille de Qadesh. Devant l’entrée du 2ème pylône étaient assis Ramsès et sa mère Touy. Les débris de la tête du pharaon en granite rose reposent.
la tête de Ramsès brisé
Dans la cour péristyle, il y a deux portiques avec des piliers osiriques. Derrière la colonnade, on retrouve la Bataille de Qadesh, il reste encore des traces de couleur. Les soldats sont en rangs serrés, le cercle représente-t-il la forteresse ? on devine la traversée du fleuve. Sur le registre du bas : une dizaine de chars au- dessus : la mêlée avec des soldats à terre, l’un d’eux a reçu une flèche dans l’épaule. Surdimensionné : Ramsès sur son char, le cheval cabré, il bande son arc. J’ai cherché le lion trouvé à Abou Simbel mais pas ici.
Ramasseum : chapiteau
La salle hypostyle accueillait les liturgies marquant la relation entre le Pharaon et le dieu Amon sous sa forme Min. Les chapiteaux sont polychromes et forment un calendrier(selon les explications).
La petite Salle des Barques est la plus belle. Elle est en pente douce. J’avais oublié le plafond astronomique et l’arbre Persea
sous l’arbre Persea
Enfin, on arrive à la petite salle hypostyle à huit colonnes.
Comme à Medinet Habou à l’arrière du temple et sur les côtés un ensemble de ruines en briques crues sont étudiés par les archéologues qui ont trouvé des magasins, une « maison de vie » ou école du temple où les cours étaient donnés en plein air comme le témoignent les ostraca. Cuisines, boulangeries occupaient près de 30 salles où se trouvaient des moules à pain, des pots, des coupes, des graines de céréales et de lin, des particules végétales et des charbons de bois.
autour du Temple : constructions en brique crue
Le site résonne des outils des archéologues et des ouvriers du chantier : le plus souvent balais, brouettes et paniers de caoutchouc. Mais on entend aussi cogner les masses pour sculpter les moellons, et même des disqueuses qui découpent des dalles. On a mouillé la terre pour confectionner des briques de terre et de torchis.
Un archéologue a épinglé une grande feuille de papier sur une table à pique-nique pour un relevé des allées et des murets. On sent la vie bourdonner !