le pays des autres – Leila Slimani – folio

MAROC


Mekhnès, 1946 – 1955, Mathilde, une jeune alsacienne, enceinte vient rejoindre son mari, Amine, qu’elle a épousé en Alsace à la fin de la guerre. Officier de l’armée française, prisonnier de guerre dont le rêve est de faire fructifier la terre que son père a acquis à 25 km de Mekhnès. Mathilde rêve d’aventure ; très amoureuse d’Amine, elle ne sait pas ce qui l’attend au Maroc.

La ferme est isolée, la terre ingrate, Mathilde se trouve bien solitaire. Etrangère dans la famille traditionnelle de son mari qui vit dans la médina. Moquée et méprisée par les Français de la ville européenne. Heureusement, Mathilde est inventive, pleine d’énergie et mère de deux enfants Aïcha et Selim. Aïcha étudie dans une école catholique, son intelligence aiguisée lui donne un statut de première de classe alors que ses petites camarades la snobent.

Au fil des années, la ferme se développe. Mathilde soigne les femmes dans une sorte de dispensaire. Amine a trouvé un débouché à l’exportation pour les fruits de ses vergers. La vie pourrait être plus douce si les luttes pour l’Indépendance ne devenaient pas de plus en plus pressantes.

« Il fut un temps pas si lointain où nous appelions terroristes ceux qui sont devenus des résistants. Après plus de quarante ans de protectorat, comment ne pas comprendre que les Marocains revendiquent cette liberté pour laquelle ils se sont battus, cette liberté dont nous leur avons transmis le goût, dont nous leur avons enseigné la valeur… »

Cette famille mixte ne sait plus où se situer. Comme les colons, ils ont un domaine et des ouvriers agricoles. Amine était fier de son statut d’ancien combattant .

« Non, à cet instant, ils appartenaient tous les deux à un camp qui n’existait pas, un camp où se mêlaient de manière égale et donc étrange, une indulgence pour la violence et une compassion pour les assassins et les assassinés. Tous les sentiments qui s’élevaient en eux leur apparaissaient comme une traîtrise et ils préféraient donc les taire. Ils étaient à la fois victimes et bourreaux, compagnons et adversaires, deux êtres hybrides incapable de donner un nom à leur loyauté. Ils étaient deux excommuniés qui ne pouvaient plus prier dans aucune église et dont le dieu est un dieu secret, intime, dont ils ignorent jusqu’au nom.. »

Cette ambiguïté, cette ambivalence se trouve aussi dans son statut de femme. Comment se définir parmi les femmes de la famille de son mari? Mathilde se sent proche de sa bonne, berbère, mais si différente, illettrée et peu soignée, elle voudrait aussi être l’amie de Selma, la petite sœur de son mari qui cherche à s’émanciper mais qui devra faire un mariage de convenance.

18. Rabat et Salé

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

rabat portes

 

Peu après cinq heures, le muezzin chante la prière de l’aube. Son chant répétitif  et lancinant dure une éternité. Comme nous sommes réveillées toutes les deux écoutons ses modulations sur des phrases inhabituelles. Pourquoi est ce si long ? Vers la fin, il lance le cri Allahou Akbar ! à plusieurs reprises . Silence, nous nous rendormons.

Le Monde à l‘étranger

Quand nous ouvrons les volets, le trottoir est mouillé, le ciel encombré de nuages nous incite à paresser. Je termine la lecture du Monde qui est un plaisir quotidien. Ici, le Monde arrive le matin sans aucun retard, il coûte même moins cher qu’en France dix dirhams seulement. L’actualité est pressante. Si on se borne à la télé, on dirait « qu’ils remettent tous les jours la même cassette » comme le dit Mohamed d’Erfoud. En revanche le Monde décrit chaque jour les évolutions qui malheureusement concernent plus les opinions publiques que les décisions du principal intéressé. Cela me fait extrêmement plaisir que les Britanniques s’opposent à Blair et que beaucoup d’Américains soutiennent la France et l’Allemagne. En tout cas, je ne veux rien louper.

La rue Ben Abdallah jusqu’à une grande mosquée située sur le terre-plein au milieu de Mohamed V,  se continue par des rues plus étroites. Les trottoirs sont plantés de magnifiques ficus avec des racines aériennes pendantes.Ils sont vides, de chaque côté de beaux murs blancs enferment de très beaux jardins qui cachent à moitié des ministères et des installations militaires. Devant chaque entrée, des plantons en arme interdisent même le trottoir.

Calme et silence à l’ombre de l’armée.

Musée

Le musée se trouve dans un quartier résidentiel de petits immeubles blancs avec de larges baies et des balcons. Architecture évoquant plus le Bauhaus ou l’Art Nouveau que l’Orient.

Le Musée est construit tout à fait Art Nouveau : l’architecture est remarquable, mais la muséographie pitoyable et vieillotte. Étiquettes blanches, jaunies, tapées à la machine sans grand intérêt. Vitrines vides. Pots cassés, outillage paléolithique… Je suis venue pour le Chien de Volubilis, posé par terre, dans l’ombre, magnifique, prêt à bondir.

Évidement, le gardien me suit partout. Heureusement, il m’ouvre la salle des bronzes, la plus intéressante. Ses commentaires sont tout à fait judicieux : il compare le profil de Caton, romain typique avec celui de Juba qu’il qualifie de Berbère. Cours sur la statuaire romaine. Le marbre vient de Carrare, il est donc rare, on ne change que les têtes gardant les bustes. Un buste de Ptolémée, fils de Cléopâtre Séléné, la fille de Cléopâtre.

Retour par Mohamed V, la Gare, les beaux bâtiments soulignés de grès blond comme en Espagne. Puis Mohamed V devient une rue commerçante aux boutiques vieillottes ressemblant à celles de notre enfance. Hier nous avons vu une enseigne « Le nain bleu », c’est bien une boutique de jouets comme autrefois.

Le graphisme des enseignes est celui de la France des années 50. On pourrait tourner un film d’époque rien qu’en supprimant les voitures trop neuves (on peut laisser les autres et les autobus).

rabat portes(2)

D me conduit sur les lieux qu’elle a découverts : un marché au poisson avec des sardines, des anchois des rougets, des petites soles en abondance. Sans parler des crevettes! Les prix sont marqués, tout est propre et net.

Mohamed V se transforme en une rue de souk : pendillocheries, CD cassettes et matériel hi-fi … A onze heures du matin les boutiques ouvrent, il y a peu de monde dans la rue. Nous traversons rapidement la médina .On rénove un petit théâtre plein de stucs et de miroirs. Nous arrivons aux cimetières entre la Casbah et la mer. Discret coup d’œil, c’est vert, aéré, poésie des cimetières marins.

Corniche

La corniche est minable, c’est le dépotoir. Dommage, derrière le phare, dans une échancrure dans le grès, les vagues se brisent donnant un spectacle magnifique. Feu d’artifice liquide .Les goélands ont colonisé un rocher tabulaire émergeant de l’eau blanche d’écume.

Nous nous installons sur la digue qui protège la plage et l’embouchure du Bou Regreg et restons une heure sous un franc soleil. Des surfeurs en combinaison barbotent, les rouleaux sont  trop atténués pour qu’ils nous offrent un spectacle intéressant. Deux baigneurs en maillot font trempette.

Midi passé et nous n’avons rien acheté pour pique-niquer;  quittons à regrets notre perchoir. Dans la médina nous ne trouvons pas les brochettes, seulement du poisson : sardines et daurades frites qui ne nous inspirent pas.

Salé

Un taxi bleu nous emmène à l’extrémité du périmètre urbain de Rabat, au Supermarché Marjane (qui ressemble à n’importe quel centre commercial français, on avait vu le même à Marrakech). Un bon kilomètre de marche à pied dans la campagne, le pont sur le fleuve, nous finissons par trouver les potiers de Salé chaudement recommandés par le collègue de D et les guides.

Déception, ils sont installés dans une sorte de centre commercial moderne avec cafétérias, parking, boutiques. J’imaginais cela tout autrement. Les articles proposés ne me tentent pas tellement. La qualité est assez ordinaire, épaisse faïence aux coloris sans recherche dans le tracé des décors, coloris criards. Tous les produits se ressemblent, variation autour du thème du plat à tajine, pots à épice. Cela manque de finition et de finesse. Les prix sont très attractifs mais cela ressemble trop à ce qu’on pourrait trouver dans les Pier Import ou même dans les supermarchés en France. Après maintes recherches nous repartirons avec due double mini tajine pour le sel et le poivre pour 15 DH, cadeau pas cher.

Comment retourner à Rabat ? Nous n’avons pas envie de recommencer la marche à pied. Pas de taxis, ni grands ni petits. Au hasard, j’arrête la première voiture qui quitte le parking qui nous prend à son bord. Ce sont des gens charmants, le père et les filles, français ou marocains ? Les filles habillées très mode, blondes ont l’air française, ils habitent Casablanca. Ils nous lâchent au bout de Mohamed V à la hauteur de la mosquée sur son îlot.

Derniers achats dans le souk

Fin de la journée dans la médina pour faire les derniers achats : un sac en cuir jaune et le porte-monnaie qui va avec. Tout me tente, je dois me gendarmer pour ne pas acheter un autre petit sac ou une sacoche, c’est tellement bon marché. D trouve pour son père un coffret en bois. J’ai envie d’épices qui compléteront la salière. La rue Suika est très encombrée, au milieu de la chaussée on  trouve des mixers, des batteurs, des fers à repasser, les marchands crient 20 Dirhams, 40 Dirham en montrant des lots de caleçons longs ou des culottes… On se pousse, on se presse. Je rentre avec soulagement à l’hôtel. Il faut faire les valises.

17. Rabat

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

Porte de la casbah des Oudaias
Porte de la casbah des Oudaia

On rend la Corolla

Nous avons égaré le contrat de location de la voiture. Hier soir j’ai défait trois fois ma valise, cherché dans toutes les cachettes du sac à dos,. On s’est endormies dans l’inquiétude. Combien Budget va–t il nous réclamer ?

Ce matin, il fait un soleil magnifique. Nous laissons la voiture derrière la Gare. On ne nous demande rien.  Abdou de Fès  utilisera l’empreinte de la Carte Bleue. !En tout cas, ici, tout se passe bien. Idem à Royal Air Maroc où nous reconfirmons le vol de dimanche.

Casbah des Oudaïas

Porte de la casbah des Oudaias (détail : coquille)
Porte de la casbah des Oudaias (détail : coquille)

Taxi jusqu’à l’entrée de la Casbah des Oudaïas. La porte est monumentale, gravée d’écriture coufique et curieusement de coquilles Saint Jacques.

Dans la Casbah, nous sommes éblouies : les maisons sont blanches soulignées de bleu. Les ruelles étroites se terminent en impasse  entrecoupées d’escaliers. On se croirait en Grèce !

bleu et blanc, les couleurs de la mer
bleu et blanc, les couleurs de la mer

Le bleu rappelle  la présence de la mer toute proche. Dans la lumière du matin, j’ai envie de tout photographier : collection de portes cloutées, encadrées de mosaïques ou de motifs sculptés.

du bastion, la vue sur la mer
du bastion, la vue sur la mer

Le bastion qui domine l’estuaire du Bou Regreg. Vers la mer : un phare blanc après un cimetière blanc et herbu. L’appareil photo tombe en panne. Nous sommes assez inquiètes : à Rissani, le couvercle m’est resté dans la main. Peut être ne fait il plus contact ? En rachetant une nouvelle pile, tout rentre dans l’ordre. Nous avons utilisé dix pellicules depuis Fès .Nous descendons les petites ruelles en escalier et je me laisse tenter encore par d’autres portes, de nouvelles échappées sur la mer et le ciel bleu.

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Café maure

rabat musée des oudaias
rabat musée des oudaias

rabat musée des oudaias

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Promenade paisible et ensoleillée qui nous mène au Café Maure ( terrasse admirablement bien située, zelliges et cornes de gazelle – pour ces dernières, c’est trop tôt )puis jardins andalous carrés aux allées pavées de petits galets formant des figures géométriques, hauts palmiers, orangers couverts d’oranges, lauriers roses. Le Palais des Oudaïais (XVIIème siècle) est en pierre blonde, les murs qui enserrent le jardin sont surmontés de jolis créneaux.

Bijoux et parures

Nous avons de la chance ! Après l’exposition des Arts du Feu de Fès, les Tapis de Meknès, voici la troisième exposition patrimoniale : Bijoux et parures, toujours très bien présentée.

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Les bijoux de l’Atlas et ceux du Sahara  m’ont fait la plus forte impression. Les parures d’or et de pierres précieuses citadines sont de toute beauté mais moins émouvantes : trop d’or, trop de pierres, trop travaillées, trop lourdes. En revanche, celles des tribus du désert avec les énormes fibules ornées de pierres et cloutées, parfois très lourdes sont impressionnantes. Le poids des boucles d’oreilles est également considérable. Heureusement, un dispositif permet de les fixer autour de l’oreille ou au diadème. Les matériaux employés sont très variés certains bijoux incorporent du cuir, des tissus mais aussi des clous de girofle, du gingembre à côté de perles d’ambre, de corail ou de turquoises. La base de ces bijoux : des pièces de monnaie : monnaie marocaine, cents américains, pièces espagnoles. De nombreuses pièces sont ornées de l’étoile de David. Les orfèvres étaient Juifs, on ne peut pas l’ignorer. Mais la fréquence des étoiles à six branches est très étonnante. Dans une salle, des costumes sont présentés permettant ainsi de comprendre comment ces parures étaient portées. Les lourds triangles en argent d’une dizaine de centimètres de hauteur étaient fixés sur la poitrine sur le vêtement.

Jardin andalou

jardin andalous
jardin andalous

Pause à midi dans le jardin andalou.  Nous pourrions y rester toute la journée. De nombreux étudiants révisent leurs cours. Les chats paressent (nous en avons vus beaucoup dans les ruelles ce matin).

Nous avions le projet d’aller à Salé de l’autre côté de l’estuaire du Bou Regreg. Les petits taxis bleus (ici ils sont bleu vif, à Meknès, bleu clair, à Fès, rouge) n’ont pas le droit de quitter le périmètre urbain de Rabat. Il faudrait affréter un grand taxi. Nous renonçons et traversons à pied la médina. Comme c’est Vendredi, toute activité a cessé à onze heures et demie pour la prière. Le musée a fermé ses portes, quand nous traversons la médina, les rideaux métalliques sont baissés. Nous trouvons quand même un sandwich aux brochettes de poulet et à la viande hachée.

Le  Parc Triangle de Vue est sous nos fenêtres. Il est très agréablement planté de toutes sortes d’essences, surtout des ficus mais aussi des yuccas qui ressemblent à des dragonniers.

Nous remontons la rue de l’hôtel : Ben Abdallah, puis une grande rue bordée d’un grand mur derrière lequel se trouvent des installations militaires (Méchouar), passons les portes de la ville pour arriver au Chellah.

Chellah

Le chellah, nécropole mérinide
Le chellah, nécropole mérinide

Le Chellah est enclos dans une muraille crénelée et s’ouvre sur une porte très curieuse où l’on remarque la même décoration que celle qui orne la porte de la Casbah des Oudaïais mais surmontée de petites tourelles très finement sculptées avec des alvéoles.Passée la porte, nous trouvons un jardin luxuriant et arrivons sur le site antique de Sala Colonia. Du forum, il ne reste pas grand chose mais c’est lieu de rassemblement des promeneurs. Dans un coin, des jeunes jouent des percussions et chantent. C’est vivant et pas désagréable à écouter .De nombreuses femmes sont assises en groupe ou en famille avec leurs enfants.

tombeaux mérinides dans un jardin fleuri
tombeaux mérinides dans un jardin fleuri

Volatiles

Nous choisissons des sièges sur des ruines antiques, je sors mon bloc et dessine les ruines de la nécropole mérinide, un très joli minaret coloré sur lequel est installée une cigogne, le mur et l’entrée d’une mosquée ruinée où se trouvent les tombes d’Habou Hassan et de son épouse Chams Ed Duna (Aurore). Plus loin sur les pentes s’étagent des koubas en coupoles rondes et surtout des perchoirs pour les cigognes, vieux arbres morts complètement colonisés par ces volatiles bruyants. Sur un arbre il peut y avoir jusqu’à trois nids de taille imposante de taille imposante, mais les cigognes n’y sont pas seules : des petits hérons blancs leur tiennent compagnie, leurs nids invisibles d’ailleurs.

cigognes et hérons blancs
cigognes et hérons blancs

A mesure que l’après midi avance, le forum se remplit, bientôt tous les murets toutes les pierres sont occupés. Une femme et sa fille s’installent auprès de nous. Elle est vêtue d’une très jolie djellaba turquoise. Deux gamins nous tiennent aussi compagnie, ils ont l’air polis bien habillés et sont discrets. Le soleil chauffe, je me suis même enduite de crème solaire et j’ai mis mon foulard turc.

Nous faisons une visite au bassin des anguilles censé faire des miracles guérissant les femmes de la stérilité. Un religieux vend des bougies aux fidèles qui nourrissent les anguilles.

Chellah mosquée
Chellah mosquée

Le spectacle n’est pas dans le bassin, les poissons sont invisibles, une horde de gamins effrontés se sont approchés, le saint homme les tance vertement, ils ne paraissent pas impressionnés. Pour aller contempler le coucher de soleil sur l’océan, nous traversons la ville en petit taxi qui nous ramène aux Oudaïais. Sur le bastion qui était tranquille ce matin, se trouve maintenant une foule paisible. Je suis ravie d’avoir découvert cet endroit ce matin dans la sérénité.

Les nuages nous privent de coucher de soleil, nous redescendons par la médina éclairée et très animée. Elle est très différente de celles de Fès ou de Meknès. Les artères principales sont couvertes de belles structures métalliques en pagodes ou en arceaux. A la place des petites ruelles, des rues larges et spacieuses, à la place des échoppes, de beaux magasins très vastes de tapis ou de cuirs. Nous arrivons dans le marché aux vêtements, quelques magasins proposent de jeans très mode, la plupart des chaussures ou des djellabas. Sur la chaussée des déballages de toute sorte. La foule est dense mais nous avançons sans encombre.

Vendeur d'eau
Vendeur d’eau

Retour à l’hôtel vers sept après une excellente journée.

Rabat nous impressionne favorablement. La ville est très aérée, beaucoup plus verte que Fès ou Meknès, plus tranquille aussi, plus ouverte, semble-t- il. Nous ne rencontrons ni faux guides ni commerçants trop zélés qui empoisonnent la vie des touristes . Beaucoup de femmes en cheveux aussi. Des mendiants encore mais pas d’enfants collants. Le beau temps a été de la partie. Pourvu qu’il se poursuive demain !

16. la mer, vers Rabat

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

 

 

 

kenitra

8h30,  sous le soleil de Meknès à Rabat par le chemin des écoliers, un peu au Nord sur la route de Tanger, jusqu’à Sidi Kasssem : campagne très verte, vallonnée, champs d’oignons, de fève et de blé pas très typiques. Une route forestière, repérée sur la carte traverse la forêt de la Maamora. Nous obliquons dans à Sidi Slimane, bourgade toute boueuse pleine de nids de poules et très animée. A notre rencontre arrivent des calèches tirées par des chevaux, des mules ou des ânes, des chariots, des plates-formes, portant des hommes, des femmes, des enfants en route vers le marché. Il en vient tans cesse, innombrables, et pas une voiture, pas un taxi.

Après Dar Bel Amri, village assez rudimentaire, nous devons trouver la forêt et la piste. Le paysage devient plus vallonné. Un oued coule le long de la route charriant une eau boueuse après la pluie. La terre rouge est ravinée. Des petits villages aux maisons de terre basses se fondent dans le paysage. Point de forêt, après 19 km nous rebroussons chemin.

Nous retrouvons la boue à Sidi Slimane et la route principale qui traverse une forêt d’eucalyptus plantés serrés, un peu monotone. Dans les carrés des coupes de très jolies fleurettes font un tapis violine, mélange de petites fleurs roses et violette.

La mer

A Kenitra nous trouvons la mer. C’est une surprise totale. Jamais je n’avais pensé à l’océan. Dans l’estuaire du Sébou de nombreux bateaux de pêche attendent, gros bateaux verts et bleus, on se dirait en Bretagne, petites barques orange. L’estuaire est très vaseux. Medhya plage est une station balnéaire dans les dunes. Les vagues font de beaux rouleaux. Le soleil est revenu.

Ornithologie

Derrière le cordon de dunes, dans un creux, une longue lagune est une étape pour les oiseaux migrateurs. Nous nous installons pour pique-niquer près de l’eau en compagnie d’un petit foulque qui plonge et réapparaît plus loin. Sur la rive opposée des canards, peut être des sarcelles, puisque la sarcelle marbrée est le « bijou » de la réserve. Des goélands arrivent, des busards des rivières planent.

Botanique

Sur le sentier pédagogique, les végétaux sont étiquetés, j’apprends le nom français d’un arbuste que je ne savais nommer qu’en hébreu « eilat mastic », c’est le Lentisque ou Pistacia lentiscus. Un petit arbuste porte des fruits, sortes de tomates et des fleurs violettes ressemblant à celles de la pomme de terre : la morelle de Sodome (solanum sodomeum) . Les genets blancs sont étiquetés Rétame.

Rabat 

Retour sur la route principale.  Nous approchons de Rabat : pépinières, poteries de jardins, puis habitat plus dense,  à Salé. Dans Rabat nous nous orientons facilement grâce au fleuve et aux murailles.  Après la tour Hassane, nous longeons la muraille des Andalous et juste après le jardin de Triangle de Vue, la rue principale Mohamed V.

 Royal Hôtel

vue e notre chambre sur la Mosquée des Andalous et le jardin du triangle de vue
vue e notre chambre sur la Mosquée Mouline et le jardin du Triangle de Vue

 Le Royal Hôtel nous convient. Dans un immeuble  blanc, l’hôtel est vieillot mais très propre et très confortable. Meubles foncés et murs blancs.  L’ascenseur est en panne mais la salle de bain – rénovée – est très classe avec son lavabo monumental. Le personnel est aussi désuet que le bâtiment : des vieux messieurs très gentils. Notre chambre a une belle vue sur une placette plantée de très beaux arbres très fournis, des ficus. De l’autre côté de la place une mosquée avec ses toits verts et son minaret carré (la mosquée Mouline) un peu plus loin, le Parc Triangle de Vue/

Nous sommes en plein centre à deux pas de la rue Mohamed V bordée de bâtiments officiels, la Gare, la Poste, un véritable palais avec de la dentelle de pierre, l’Hôtel des Impôts et de grandes banques…Tout près de chez nous, une très bonne librairie où se trouvent les polars d’Ann Perry et moi tout un assortiments d’auteurs marocains ainsi que de tous petits volumes d’une collection du Petit Mercure que je néglige d’acheter, je le regretterai ensuite, ils sont introuvables à Créteil.

La mer

Après notre installation, nous profitons de la Toyota, qu’il faudra rendre demain, pour aller à la mer. Le temps est calme, ensoleillé, sans vent et pourtant, l’océan est déchaîné, pire qu’au Cap Vert. La route borde la mer en corniche. Malheureusement pas aménagée, un peu dépotoir. Nous nous arrêtons à la sortie de la ville en direction de Casablanca.

l'Atlantique!
l’Atlantique!

La côte est découpée, rocheuse, les rouleaux se brisent avec une violence extrême. Les paquets d’eau fusent comme des gerbes d’étincelles. L’air est complètement saturé d’humidité, on se dirait dans le brouillard. Plusieurs rangées de rouleaux se succèdent, certains sont plus puissants et m’éclaboussent.

Le soleil baisse, l’eau se teinte d’or ; les nuages de l’horizon avalent la grosse boule jaune et nous privent de la fin du spectacle.

15. Meknes sous la pluie

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

Promenade au souk
Promenade au souk

 

 

 

Sous la pluie, les souks

Chaque circuit a son jour plus ou moins raté : la pluie nous a donc bien gâché notre programme!

9h15 – médina. Il fait gris, c’est tristounet.

Les commerçants n’en finissent pas d’ouvrir boutique. L’un d’eux nous explique :

          « on ouvrira vers dix heures, ce sont les vacances après l’Aïd

(cela fait une semaine que cela dure) pas de touristes, pour cause de guerre d’Irak, peu d’acheteurs locaux après la fête, le bazar est à moitié fermé.

 Meknès souk - Copie

Medersa Bou Inania

La petite medersa Bou Inania (beaucoup plus petite que la médersa visitée à Marrakech) Très ornée, très bien conservée, pas de photo, pour cause de vilaine lumière, cela ferait redite après Marrakech pour quelques clichés de toits de tuiles vernissées d’une charmante coupole découpée en tranches comme les côtes d’un melon. Il commence à tomber quelques gouttes.

Nous marchons au hasard dans les rues couvertes. La pluie tombe dru. Nous passons et repassons devant les échoppes de babouches et de djellabas pour marocains. Nous nous laissons tenter : je trouve pour moi de belles babouches jaunes, marchande pour le principe, et des vert pâles pour 50 dirhams, très décorées, très marocaines. Il pleut maintenant à verse nous nous replions vers la voiture, trempées. Retour à l’hôtel. Heureusement que nous sommes bien installées.

En voiture

Vers 15 heures nous reprenons la voiture (comme prévu, la veille quand il faisait beau) Nous retournons vers Volubilis. Nous essayons une route dans les champs vallonnés : oignons, fèves sur des parcelles de bonne taille, blé en herbe. Tout es vert vif mais pas de quoi dessiner. Direction Moulay Idriss nous nous arrêtons dans une oliveraie.

 

14. Moulay Idriss

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès

Moulay Idriss
Moulay Idriss

Avant de trouver le parking à Moulay Idriss, nous loupons l’entrée et faisons un tour de ville, retour au point de départ sur une place encombrée bordée d’échoppes dans des arcades de faïence blanche et verte qui serait jolie sans un bric à brac hétéroclite. Les portes du village sont monumentales, presque aussi grandes que celles de Meknès.

Moulay Idriss
Moulay Idriss

Dès que nous sortons de la voiture, on nous aborde « nous ne vouons pas de guide ! »mais dès que nous nous dirigeons vers l’entrée de la mosquée barrée d’une poutre interdisant le passage aussi bien aux animaux qu’au non-musulmans, c’est la limite que nous ne devons pas franchir.

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Un homme nous dit de contourner par la droite. Il nous emboîte le pas s’imposant comme guide. Nous grimpons des marches et des marches dans les ruelles blanches, passons sous des porches, prenons des passages dérobés, tantôt cela monte raide, tantôt nous redescendons… marches, impasses, les maisons s’emboîtent les unes dans les autres, épousent la colline, sans aucune logique. Certaines portes sont belles, cloutées, peintes en rouge ou en marron avec une main de Fatima. D’autres plus modernes sont encadrées par des carreaux, d’autres, simples plaques métalliques.

Moulay idriss0002

Le village est chaulé de blanc, mas sans soin particulier, ce n’est pas l’immaculée blancheur espagnole ou grecque. Ici, il y a des dégoulinades, des ordures par terre. Très peu de boutiques, rien que des maisons empilées et refermées sur elles mêmes Finalement nous aboutissons à la « vue panoramique ». A nos pieds : le mausolée entouré de nombreuses mosquées, même plan qu’à Fès : mausolée carré recouvert de tuiles vertes, salles avec des toits en pente comme la Karaouine. En face une colline pareillement recouverte de maisons. Notre guide nous fait tout un topo sur Moulay Idriss, venu au VIIIème siècle islamiser le Maroc. Il me montre les géraniums apportés au Maroc par Liautey. D’après lui, Moulay Idriss est la cinquième ville sainte pour les Marocains après la Mecque, Médine, Jérusalem et Kairouan. Les oliviers, richesse du village sont exploités par des sociétés religieuses qui utilisent le produit de la vente de l’huile pour entretenir le mausolée, acheter des tapis, aider les indigents. Ce qu’il raconte est bien intéressant mais cela nous coûtera 100dirhams.

13. Volubilis

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

 

Volubilis - Copie

Nous commençons la journée par des courses dans la ville nouvelle qui est assez dépaysante. Les avenues bordées d’arcades avec de petits magasins me font penser à Athènes. Si les immeubles sont modernes, les commerces sont désuets finalement plus proches de ceux de la médina que de ceux qu’on s’attendrait à trouver dans une ville européenne. Grands cafés avec des terrasses uniquement fréquentés par des hommes. Banques ultramodernes et boutiques de téléphones mobiles sont les seuls commerces du XXIème siècle. Pour se garer, pas d’horodateurs, on laisse la voiture le long du trottoir, un homme en blouse bleue apparaît, c’est le gardien à qui je donne 5 dirhams, ce qu’il a l’air de trouver trop peu. Nous ne restons qu’un petit quart d’heure –Nous commettons sûrement beaucoup d’impairs. Ici tant de choses reposent sur l’ « appréciation » du client. Il existe sûrement un « tarif » que nous ne connaissons pas.

Volubilis

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Volubilis se trouve sur la route de Tétouan, dans de très jolies collines dominant une plaine très verte en cette saison : champs de blé en herbe, verts vif. A flanc de colline de belles oliveraies sont limitées par des rangées d’agaves aux belles feuilles bleutées lancéolées ainsi que par des figuiers de barbarie aux grandes raquettes.

Le village de Moulay Idriss épouse les deux rochers et les cubes blancs s’étagent jusqu’au sommet se détachant sur toute cette verdure.

Volubilis labours - Copie

Volubilis se voit aussi de loin, alignement de ruines, colonnes, et arc de triomphe. Le site est vaste.Ce qui m’a tout de suite plu : ce sont les fleurs ! Fleurs oranges, sorte de soucis sauvages, moutarde jaune, lavande (la même que celle de Cerbère), des asphodèles prêtes à éclore. J’ai plus envie de photographier les fleurs que les ruines.

Nous avons visité assez de sites antiques pour nous sentir en pays de connaissance. Nous reconnaissons tout de suite le pressoir d’une huilerie (production essentielle ici, les oliviers sont la richesse actuelle de la région. En était il ainsi à l’époque romaine ? Nos documents font plutôt état de céréales, les Romains auraient déboisé pour faire de la Maurétanie un grenier à blé.

Orphée charmant les animaux
Orphée charmant les animaux

Nous trouvons les thermes (petits peu spectaculaires, nous avons vu mieux), le forum avec ses boutiques et la basilique.

Nelles, encore, est remarquable et guide notre visite. Toutes les villes romaines n’étaient pas identiques ! Ici, tout est bâti de pierre. L’appareil de brique et petites pierres typique de Rome n’a pas été utilisé .Autre surprise : la simplicité des chapiteaux et des ornementations. Les sites hellénistiques contemporains d’Ephèse et d’Aphrodisias semblent baroques par comparaison. Ici, la feuille d’acanthes simple, presque stylisée. Peut être que toutes les décorations sophistiquées on disparu pour être réemployés à Meknès ? Les jolies colonnes de marbre des palais et du Mausolée viennent de Volubilis.

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Nous voici reparties à notre jeu préféré : à l’aide du plan de la ville et d’écriteaux (bien faits, lisibles et discrets) nous localisons toutes les belles villas décorées des mosaïques. Celles-ci sont en très bon état et très variées, sur des thèmes de la mythologie : Orphée, Ariane à Naxos, les travaux d’Hercule.

Travaux d'Hercule le lion de Némée
Travaux d’Hercule le lion de Némée

Celles de Piazza Armerina  ou d’Istanbul étaient plus belles. Mais ici, dans leur site naturel, dans les fleurs et les ruines, elles sont tout à fait charmantes. Nous restons trois heures et demie très agréables. Les groupes de touristes nous dérangent un peu bien sûr, nous n’avons plus l’habitude d’en rencontrer. Dès midi, ils disparaissent du paysage. Le soleil chauffe, nous devons nous abriter à l’ombre.

Travaux d'Hercule : les oiseaux du Lac Stymphale
Travaux d’Hercule : les oiseaux du Lac Stymphale

Pique-nique dans un endroit charmant en contrebas du site près d’un ruisseau dans une oliveraie ? Nous déjeunons à l’ombre bien tranquilles. Un jeune homme fait semblant de réparer son  grillage près de nous. Un vieux passe avec son âne…Un peu plus loin, je peins les oliviers et les agaves bleutés.

bourricots de labour
bourricots de labour

12. Meknès

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

Meknès : porte
Meknès : porte

Nous suivons, pas à pas, l’itinéraire  p. 116 du le guide Nelles.

Garons la voiture sur la grande place devant Bab el Mansour, la porte la plus fameuse de la ville. L’air est vif et clair mais il est difficile de prendre des photos : les perspectives s’étendent sur de grandes places, la présence des voitures complique le travail du photographe .A 9heures, il est bien tôt, pour le Maroc, les boutiques de souvenirs sont en train d’ouvrir, les marchands des échoppes du marché à la laine commencent tout juste à sortir leur matériel.

Meknès
Meknès

 

Mausolée de Moulay Ismaïl

Le Mausolée de Moulay Ismail est ouvert aux non-musulmans. Nous parcourons des salles couvertes, sol et murs en mosaïques, plafond de cèdre et stuc, colonnes de marbre, passons par des courettes dallées de zelliges, murs jaunes et portes en fer à cheval, fontaines de marbre sur des bassins sophistiqués. On se déchausse pour entrer. Les vieux gardiens, bien aimables, nous font les honneurs du mausolée. Curieux manège d’hommes pressés qui traversent la cour des sacs de sables sur l’épaule :  les fossoyeurs  déblayent le sable d’une tombe qu’ils sont en train de creuser.

Le Palais

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Longue promenade entre deux murailles très hautes qui longent le palais (Dar El Makhzen). Rien à voir , seulement des nids de cigognes qui se posent sur les murs, des moineaux installés dans les cavités, comme à Marrakech. Cette longue rue droite nous conduit au Méchouar(place d’audience), malheureusement asphaltée. Un coin est agrémenté d’arcades recouvertes de tuiles vertes vernissées, des palmiers aux troncs courts et renflés comme des ananas et des orangers sont plantés le long des murs. La présence des voitures, même rares, dépoétise le lieu.

Dar El Ma

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Toujours le long des murailles beiges, nous arrivons au Dar El Ma (la maison de l’eau), citerne, greniers et écuries, un véritable palais-silo. La partie couverte est impressionnante,  vide mais charmante.

Meknes0005Des dégoulinades végétales tombent des ouvertures sur le ciel. Les traces des coffrages en roseaux sont visibles. Une belle porte en cèdre représente un soleil en l’honneur de Louis XIV, le contemporain de Moulay Ismaïl, véritable parallélisme entre le fondateur de Versailles et celui de Meknès (voir le livre d’Edith Wharton). Enfin pour le soleil, c’est peut être une interprétation abusive selon d’autres sources. Une partie de l’édifice a perdu sa couverture pendant le tremblement de terre de Lisbonne, et se trouve donc à ciel ouvert. Elle nous offre des perspectives de colonnades et d’arcades. La végétation a colonisé les grandes salles, palmiers oliviers et monstrueuses « mauvaises herbes ». Un petit pêcher est en fleur.

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Agdal

Tout proche, le bassin de l’Agdal, bassin rectangulaire où s’arrêtent quelques hérons. Sur les bancs, de nombreux étudiants révisent leurs leçons. Nous y faisons une courte pause.

Mellah

Sur la grande place, nous achetons un sandwich. Il faut attendre 3 heures l’ouverture du musée. Le Mellah, est situé, comme à Fes à proximité  du palais, et reconnaissable à ses larges fenêtres garnies de ferronnerie, ses balcons proéminents. Comme à Fes, il est devenu un bazar où tout se vend, cuvettes en plastique bleu, pruneaux, dattes et raisons secs en cônes, planches à laver en bois, manches de pioche, valises, laine et toiles à matelas que le cardeur utilise sous nos yeux mais aussi fruits et légumes frais, petits pois, cardons, artichauts, salades tomates et courgettes. Rien ne rappelle les anciens occupants. Depuis plus de quarante ans il s’est vidé de ses Juifs. Je cherche la trace d’une mezouza, mais plus rien. Au fond, un cimetière avec les tombes blanches en demi-cylindre dans une jungle de mauvaises herbes.A côté, flambant neuve une zaouïa, où exceptionnellement des jeunes allemands genre hippies sont installés (leur camping car est garé non loin.

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Dès 3 heures, je me précipite à Bab el Mansour où se trouve une partie de l’Exposition des Tapis. Cette grande exposition patrimoniale temporaire, sur le même principe que les Arts du Feu à Fes, regroupe des pièces provenant de tous les musées du Maroc. Peu de pièces exposées mais beaucoup de panneaux explicatifs, une bonne pédagogie. La plupart des tapis ne sont pas très anciens et datent du 20ème siècle. Les plus sophistiqués, les tapis de Rabat (tapis citadins s’inspirent des tapis turcs et persans) ne soutiennent pas la comparaison avec leurs homologues orientaux : il sont  plus grossiers, aux coloris moins vifs, leurs bordures (ou plutôt les bordures, certains en ont cinq à six) envahissent tout le tapis et témoignent de moins d’imagination. Les tapis berbères sont beaucoup plus intéressants. Un lexique des principaux symboles est placé sur un tableau : l’œil, l’oiseau, le grain d’orge, la rose. J’essaie de retrouver les dessins, j’en découvre d’autres, des bonshommes, des dromadaires, des tortues… La symétrie n’est pas respectée, grande liberté dans la fantaisie. Les coloris sont très chauds, orange, marron beige. Les points peu serrés. La facture semble très moderne .Mes préférés sont découpés en carreaux séparés par des bordures très fines.

Palais Jamaï

Nous nous reposons très dans  le joli Palais Jamaï. Les pièces sont extrêmement décorées, belles portes de cèdre, zelliges, fontaines. Encore une fois, nous disposons d’un Palais rien que pour nous. J’écris du jardin andalous original les deux fontaines font face au bâtiment le jardin comporte deux rectangles au lieu des quatre habituels,  un bananier fleuri, un palmier très haut trois orangers et deux cyprès.

11. la journée des trois saisons

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du

 

Eté : après l'orage dans la palmeraie inondée
Eté : après l’orage dans la palmeraie inondée

Grêle.

La voiture est recouverte d’une carapace de glace : un fort orage a réveillé Dominique, il a grêlé. La palmeraie d’Erfoud est inondée. Je photographie les palmiers qui se reflètent dans l’eau (cela me fait penser à la crue du Nil). Toute cette eau me réjouit : ils en ont tant besoin !la route est inondée par endroits, la voiture soulève des gerbes d’eau marron. Jusqu’à Errachidia, la route est bien connue, je me souviens de tous nos arrêts à l’aller. La lumière est très belle, l’air comme lavé après la pluie, les couleurs vives. Mais après Errachidia, l’eau du barrage a pris de sales couleurs. Un vent terrible soulève de la poussière, il y a tempête dans le lac nous avons toujours autant de plaisir à traverser les gorges du Ziz : montagne rouge, couches géologiques visibles, joli oasis…
La circulation des très dense, les vacances sont finies, de nombreuses voitures chargées retournent vers le nord et les grandes villes.

Hiver

Hiver : la route passe un col à 1907m
Hiver : la route passe un col à 1907m

A la sortie des gorges, une bonne surprise nous attend : les sommets du haut Atlas sont tout blancs barrent le défilé. Quand nous arrivons au défilé de N’zala, la neige est là. Elle saupoudre la végétation rase du désert. Le vent la soulève, de petites congères se forment derrière les touffes d’herbe .Juste avant le col(1907m), une caravane de mobil-homes et de 4×4 vient à notre rencontre, roulant au pas nous faisant de grands signes. La chaussée est gelée, par endroits, la neige tient encore, le plus souvent elle fond au soleil. Nous roulons donc à petite allure profitant ainsi de la vue magnifique sur le Djebel Ayachi et plus loin sur le Moyen Atlas. Les cèdres et les thuyas tortueux sont soulignés par la neige.

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Arrivée à Midelt vers 11h30. Nous achetons un poulet rôti et des yaourts.
45 km après Midelt, il faudra décider si nous continuons la route principale que nous connaissons déjà. Par ailleurs la route P21 est bien encombrée, avec la fin des vacances de l’Aïd, les voitures sont bondées, de nombreux marocains attendent sur le bord de la route avec leurs valises, sacs, paquets ou baluchons, le car, le grand taxi ou font de l’auto-stop. Tous ont visité leur famille pour la fête du Mouton et retournent travailler lundi. Leur conduite est anarchique, ils doublent sans aucune prudence, les lignes continues sont là pour la décoration si nous essayons un itinéraire qui nous conduira à Khénifra La route secondaire est peut être coupée par la neige de plus cela rallonge…
D veut quitter cette circulation, je n’ose pas me prononcer, ce n’est pas moi qui conduis ! Si jamais on nous fait rebrousser chemin cela risque de nous retarder sérieusement.
Nous avons donc 45 km pour décider en traversant le Plateau de l’Arid qui porte bien son nom, steppe plate et ennuyeuse.

Neige sur les villages du Moyen Atlas
Neige sur les villages du Moyen Atlas

Neige

A la bifurcation, nous demandons à un policier si la route est coupée :
– « non, il y a de la neige, mais on passe ! »
Nous tentons donc l’aventure.
La barrière de neige est à moitié fermée, le gardien sous fait signe de passer.
La route suit d’abord l’Oued Moulouya dans une large plaine labourée par un énorme chantier, une mine à ciel ouvert ? De gros tas de remblais rouges jonchent le bas côté, ce qui défigure le paysage. Insensiblement sous nous élevons et la neige blanchit complètement le sol. D’épaisses congères de neige s’accumulent. Derrière nous plus au Sud, la grande barre du haut Atlas avec ses forets et ses sommets. Un chasse neige passe. L’oued devient petit ruisseau dans la neige. Des maisons aux murs de terre rouge très bas soutenant un toit qui dépasse.

journée des3 saisons0006 Les villageois sont sortis : avec des pelles ils débarrassent la neige des toits. Les ânes sont bien utiles. Toutes les pistes et petites routes sont  sous une épaisse couche de neige, cela ne les gène pas. Ils sont très photogéniques. Je photographierais tout : les maisons rouges qui se détachent, les ânes et les âniers, le minaret rose qui se détache sur le ciel bleu. Les gens d’ici sont très occupés avec cette neige et ont mieux à faire qu’à nous importuner.

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Dans le dernier tronçon de montée jusqu’à 2070 m  Nous traversons une forêt givrée de très gros chênes verts et de quelques cèdres. Le feuillage des arbres est pris dans la glace.

Printemps

Printemps
Printemps

Avec le soleil, c’est magique !
La descente est rapide, un petit lac noir se détache, nous voilà dans une vallée de roches rouges très ravinées, l’herbe ou le blé en herbe vert très vif tranche sur cette terre rouge Dans les vergers, les amandiers sont en fleurs ! Nous avons traversé trois saisons d’une année en une seule journée : l’été éternel de la palmeraie avec son soleil brûlant, l’hiver et les neiges du Moyen Atlas et nous voici au printemps dans les arbres en fleurs !
Après Khénifra, la campagne est très prospère, grands champs de céréales, maraîchers, troupeaux de vaches paissant dans les prés
Nous quittons l’axe Marrakech-Meknès très fréquenté par une route secondaire qui nous mène dans une campagne encore très différente. La terre n’est plus rouge mais beige, les collines hérissées de rocs déchiquetés, l’herbe rase comme en moyenne montagne, plus de champs, des prairies et des moutons.

Meknès

Arrivée sur Meknès, hangars, maisons en désordre et station-service, nous voici revenues en ville.
Notre hôtel est réservé par l’hôtelier d’Erfoud, mais il n’a pas de restaurant. Nous en essayons un autre, au hasard. Le prix est raisonnable, les chambres agréables.

 

 

 

10. Rissani

2003 – De Fès à Rabat en passant par la vallée du Ziz et Meknès.

 

La palmeraie du Tafilalet
La palmeraie du Tafilalet

Hier soir, l’hôtelier, commentant les nuages avait dit :
–    « les nuages sans pluie, c’est comme un match sans but ».
Ce matin, Erfoud est toute lavée, de grandes flaques dans les rues, il a plu une heure cette nuit.

Crevaison

La Toyota est garée près de l’hôtel, devant un petit atelier réparant les pneus. Un noir, pointe notre roue, à plat.
–    « C’est peut être la piste, peut être le goudron, peut être tu as rencontré un clou ».
La coïncidence nous fait douter, l’hôtelier nous rassure, il est honnête. La réparation nous coûtera 40DH et une demi heure d’attente. Il retire le clou, mais l’électricité est coupée dans le quartier, comment gonfler le pneu sans compresseur ? Tout s’arrange, les marocains sont débrouillards, un camion possède un gonfleur.

Nous retournons dans le Tafilalet. Les palmiers sont moins poussiéreux et se détachent sur un beau ciel bleu. Je suis toute heureuse de cette pluie ? Mas cela ne suffira sans doute pas, cette palmeraie est un crève-cœur avec ses jardins abandonnés et ses palmiers malades. Il faudrait beaucoup plus qu’une heure de pluie pour que le sol reverdisse ?

Rissani
Rissani

Rissani : mausolée de Moulay Ali Chérif

Rissani est beaucoup plus calme qu’hier soir. Quand nous arrivons au Mausolée de Moulay Ali Chérif, le fondateur de la dynastie alaouite, la dynastie actuelle, la place est vide, les portes monumentales fermées. Un jeune homme à grande allure, djellaba bleu nuit très élégante fait signe à un soldat en faction qui nous ouvre les portes. Il nous fait un topo sur le mausolée (tout neuf, il a été reconstruit dans les années 1950 après une crue du Ziz, puis rénové en 1997), nous explique les différents motifs des décors en stuc : la Main de Fatima, spécialité des artisans fassis, dans les zéliges, les deux carrés entrelacés de la Mecque, bleus. Nous ne pouvons que jeter un œil au patio et au jardin (quatre carrés représentant les quatre saisons), le tombeau et la zaouia restent cachés aux non-musulmans .C’est un lieu de pèlerinage, ceci explique l’affluence hier, vendredi d’après l’Aïd. Le jeune homme ne demande aucun pourboire, c’est un commerçant qui nous invite pour le thé après la visite de la casbah voisine.

La Casbah de Rissani

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Devant la casbah, un jeune en blouson propose ses services. Seules, nous serions importunées (on s’en doute, on a l’habitude) Il parle bien français, le choix est vite fait, sinon nous n’aurions rien d’autre à faire que repartir. Nous l’engageons donc.

Rissani : couloirs, passages couverts et secrets
Rissani : couloirs, passages couverts et secrets

Nous traversons des passages couverts étroits avec un caniveau au milieu, rempli d’eau après la pluie. Grâce aux bonnes œuvres d’Hillary Clinton, cette casbah bénéficie de l’électricité et de l’eau courante (à la fontaine). Malheureusement, le puits profond de 60 m est à sec, le seau en caoutchouc à pneu est encore suspendu mais lorsqu’on se penche, on ne voit pas d‘eau.

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Une femme nous fait les honneurs de sa maison autour d’une cour. Bien restauré, cela donnerait un riad très chic. Le mobilier est rudimentaire, quelques nattes, un placard vitré dans lequel sont exposés quelques beaux plats. Nous déclinons l’offre du thé disant qu’on en a déjà bu quatre. Je prends des photos, par politesse  puisque nous avons refusé le thé et laisse quelques dirhams pour la photo.
Après la visite de la première casbah, nous en trouvons une autre plus décorée, qui fut autrefois un palais royal. Les portes sont décorées avec des motifs arabes d’une extrême finesse, on nous montre la mosquée, le hammam.

Les ruines de Sijilmassa
Les ruines de Sijilmassa

Cet ensemble  de casbahs, de palais de terre et bien d’autres que nous verrons plus tard sont les restes de l’ancienne capitale Sigilmassa, qui accueillait les riches caravanes, l’or, l’ivoire, les tissus, les plumes d’autruches…elle était peuplée de 100 000 habitants du temps de sa grandeur. De cette ville fantôme de terre, il ne reste partout dans la palmeraie que ces casbahs parfois encore habitées, parfois écroulées, argile crue retournée à la terre, murailles fondues avec le temps les intempéries ou les caprices de l’oued Ziz. Difficile d’imaginer les splendeurs de cette étape caravanière.

Sigilmassa
Sigilmassa

La boutique de Driss

les trésors de la boutique de Driss
les trésors de la boutique de Driss

Nous retournons à la voiture sur la place du mausolée. Driss, dans sa boutique nous attend pour le thé.  Il commente les richesses de sa boutique. Sur un tissu bleu turquoise sont accumulés toute une foule d’objets en argent, en os, en perles : des boites rondes des nomades se transforment en bracelets, coffrets en os de dromadaires, miroirs reflétant des étagères chargées d’autres trésors.  La Croix du Sud berbère est une sorte de boussole, ou de sextant pour se diriger aux étoiles dans le désert et trouver la direction de la Mecque.

D refuse le thé, c’est très mal vu, le jeune qui nous a servi de guide dira méchamment qu’elle a du couscous dans les oreilles. Je m’assois avec eux pour boire deux verres.

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kilim

Un homme plus âgé m’entraîne dans une autre pièce pour me montrer les kilims berbères ou touaregs. Chaque tapis raconte une histoire : au centre la femme fait un losange qui symbolise l’œil, le sien sur le monde, mais aussi talisman contre le mauvais œil. Les broderies en zigzag  représentent la caravane avec les races des pas des chameaux, les triangles sont des tentes. D’autres triangles sont des plats à couscous. Le liseré du bord : la ceinture de la mariée. C’est extraordinaire de penser que chaque kilim est unique qu’il raconte une histoire à qui veut déchiffrer les motifs géométriques. J’explique que nous sommes au Maroc pour seize jours et que partout, il y a de merveilleuses choses à acheter. Malgré mon refus, il continue à être très aimables. Nous remontons en voiture quittons la place, puis nous ravisons. Nous sommes décidées à acheter un kilim pour en faire une tête de lit, nous avons mesuré les dimensions, qui sont impératives .Ces gens ont été si gentils, leurs kilims sont beaux, nous achèterons chez eux si ils ont la bonne taille.

On nous déroule tous les kilims, on va chercher un mètre, nous en trouvons plusieurs qui nous conviennent dans la dominante bleue qui est celle du papier peint de la chambre. Difficile de faire baisser les prix, de 750, il consent à descendre à 700, avec en prime une petite croix du sud. Je veux connaître l’histoire que raconte notre kilim. Le losange central est partagé en deux par un trait blanc, ce serait la frange du haïk qui partagerait l’œil en deux regards ( ?) la ceinture de la mariée évoque des motifs religieux, les cinq piliers de l’Islam, les quatre livres. C’est un tapis touareg et non berbère, les touaregs seraient plus pieux.

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Pique-nique dans la palmeraie devant le ksar d’Oulad El Halim,
l »Alhambra du Tafilalet ». L’hôtelier a ajouté du cumin aux œufs durs, c’est une excellente idée. Je dessine en compagnie de petites filles qui m’offrent des fleurs, de pissenlit, mais ici, c’est une rareté. Les enfants veulent nous faire visiter le Palais « venez voir les jardins », il y a certes un petit jardin d’arbustes rachitiques  fleuri de fèves et de pois mais plein d’oiseaux.
Nous faisons tout un circuit dans la palmeraie du Tafilalet, découvrant, tantôt des ruines imposantes, tantôt des ksours habités. A l’horizon, des montagnes déchiquetées violettes ou pourpres. Qui étaient sur notre gauche se retrouvent à droite ; nous avons fait une boucle sans nous en apercevoir et nous retrouvons à Rissani.
Dans la soirée, virée sur la route de Ouarzazate, palmeraie, ksours, mais la terre est beaucoup plus rouge. La pluie a inondé la route.

Hammam

Hammam : c’est la douche. C’est l’heure d’affluence. Les femmes sont en culotte avec du henné ou de l’argile sur le visage. Tout le monde remplit son seau (plastique noir très laid) au robinet. On me prête un tabouret bas en plastique. Les filles sont étonnées que je ne me lave pas les cheveux, l’une d’elles me tend son shampooing. J’explique à celle qui parle français que je me suis mis de la crème, elle comprend crème défrisante ! Je distribue les échantillons des produits Daniel Jouvance apportés pour cette occasion. Le sachet du peeling marin passe entre toutes les mains. En échange, un petit sachet contenant du savon noir
L’hôtelier nous a refait de son délicieux couscous.