LE MOIS ITALIEN D’EIMELLE

Ce challenge m’a donné l’occasion de découvrir D’acier de Silvia Avallone et de retourner virtuellement en Toscane , à Piombino plus exactement, en face de l‘Ile d’Elbe . Qui dit Toscane pense Florence ou Sienne, Renaissance italienne, peut être Chianti ou oliviers. On l’associe moins aux Monts Métallifères et à la sidérurgie. Nous avons visité les abords de Piombino, Populonia , ses tombes étrusques et le Parc archéo-minier de San Silvestro , depuis l’Antiquité, les Étrusques et les Romains on travaille les métaux dans la région.
Aciéries, face au paradis touristique qu’est l’île d’Elbe…. ce n’est pas le seul paradoxe de ce livre.
« la mer et le mur des barres d’immeubles, le soleil brûlant de juin, c’était comme la vie et la mort qui s’insultent. Pas de doute : vue de l’extérieur, pour ceux qui n’y habitaient pas, la via Stalingrado c’était une désolation. Pire : la misère »
« L’idée de la municipalité communiste, c’était que les métallos aussi avaient droit à un appartement avec vue »
Que puis-je ajouter aux 92 critiques, le plus souvent très élogieuses, publiées sur Babélio?
Les citations que j’ai soulignées sur ma liseuses, peut-être:
Le décor, est donc planté, la cité où vivent les familles d’Anna et de Francesca, leurs parents, Alessio et ses copains..
D’acier se joue aussi à la fonderie Lucchini
« Mais il y a encore trente ans, vingt mille personnes travaillaient là, le marché était en pleine expansion, l’Occident qi reproduit son monde et qui l’exporte Il n’étaient plus que deux mille aujourd’hui, sous traitants compris »
Récit de ces aciéries en crise, en sursis, attendant la délocalisation. Dans cette année 2001 quand le Parti Communiste a perdu ses troupes et ses mythes
« Son père avait le mythe d’Al Capone et du Parrain – celui de Coppola. Son frère avait sa carte au syndicat des métallos mais il votait Forza Italia. Parce que Berluscoi, lui, c’est sur que ce n’est pas un minable »
C’est l’histoire de l’amitié de deux filles de treize/quatorze ans qui brûlent leur adolescence, jouent comme des fillettes et découvrent la sexualité, l’amour, les garçons. Amitié-passion qui sera mise à mal quand les garçons interviendront…Ce roman se déroule à l’ombre du haut fourneau qui déverse ses coulées brûlantes, où des machines infernales se démènent au risque de broyer les hommes.
« »C’était un peu comme être dans un aquarium. la coulée du haut-fourneau la-haut enflammait le ciel, infestait de nuées et de poisons, et tu sentais ton corps fondre. Tu transpirais le cour battant la chamade. » […] on le sait bien qu’à l’intérieur de la Lucchini, dans ses viscères bougent des jambes, des bras, des têtes humaines, des êtres de chair. Mais personne , jamais, n’arrivera à prendre la mesure de ce labeur gigantesque… »
Pour survivre à ce monstre et – pire encore – à son extinction annoncée, les hommes sont violents comme le père de Francesca, ou ils se droguent avant, pendant et après le travail. Ils trafiquent ou s’abrutissent. .Sordides soirées dans les boites de nuit.Au bar d’Aldo, ils assistent à la chute des Tours jumelles, incrédules.
« Anna, en regardant pour la énième fois tomber les géants de béton au cour de Manhattan sentit que l’Histoire existait, que l’Histoire, c’était cette chose immense et incompréhensible dont pourtant elle faisait partie. Elle s’étonnait d’appartenir à l’Histoire, mais surtout elle se rendait compte que Francesca lui manquait… »
La grande force de ce livre est de raconter une histoire avec des personnages attachants et divers mais aussi de l’inscrire dans le monde, dans l’histoire, et non pas de façon abstraite mais avec la chaleur brûlante de l’acier qui s’écoule, avec la brutalité des engins de chantier gigantesques.
