le Musée du café de Vieux-Habitants, soirée aux Manguiers

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machine pour décortiquer

J’avais imaginé que nous visiterions le Domaine de Vanibel (café, vanille cacao). La visite est guidée et il faut s’inscrire par téléphone à l’avance.  Trop tard ! c’est complet.

A l’entrée de Vieux-Habitants, le Musée du Café  est installé dans l’usine de bonification du café Chaulet (depuis 1860). De premier abord, c’est tout neuf, il manque un peu le charme de la patine. Beaucoup plus tard j’apprendrai que le cyclone Fiona a fait de gros dégâts et qu’on a û reconstruire. Ce n’est pas vraiment un musée mais une entreprise où l’on peut sentir la torréfaction et entendre les grains aspirés dans des tuyaux. On ne voit pas grand-chose à part des sacs de jute dans l’entrepôt contigu. La visite commence avec la dégustation d’un délicieux café puis on visite seul en lisant des panneaux très détaillés.

Les opérations de bonification du café (Chaulet  est bonifieur)et les machines sont présentées, maintenant toutes sont électriques mais au début un moulin avec une roue à aube actionnait les anciennes machines.

Le café est cueilli de septembre à décembre  sous forme de cerises (drupes rouges) la première opération sera donc le décerisage pour débarrasser de la pulpe qui fermente rapidement, puis décorticage, lavage et séchage des graines, en fin  la torréfaction.

 

Un panneau raconte l’histoire de l’arrivée du café aux Antilles : Gabriel Mathieu de Clieu apporta les  deux premiers pieds d’Arabica provenant de Versailles dans une serre portable à bord du Dromadaire. Le bateau encalminé doit se débarrasser de ses réserves d’eau. Il faut partager l’eau restante entre les hommes et les caféiers. Lorsque les alizés reviennent un seul plant a survécu. La plan miraculé est replanté dans le domaine du Chevalier de Clieu. Il obtient une récolte miraculeuse au bout de 18 mois qu’il partage avec les maisons religieuses et certains habitants de la région. L’apogée de la fièvre caféière en 1777.

La plantation de café a subi les aléas des tempêtes : en 1928 un cyclone ravage la Côte-sous-le-vent et la culture bananière remplace celle du café. En 1992 l’exportation du  café de Guadeloupe est quasi-nulle mais Chaulet tient à maintenir la qualité.

Après les achats de fruits exotiques à Malendure , nous rentrons vers 17h heureuses de profiter d’une bonne heure de soleil dans notre beau jardin.

Aux Manguiers Otantik : de notre terrasse le Bakoua

Après dîner, Marie-Jo nous raconte l’histoire des Manguiers Otantik, propriété familiale octroyée à l’arrière-grand-père, ancien combattant de la Grande Guerre. Peu à peu la famille a défriché, embelli, construit les cases pour les visiteurs, familles et amis. Nous ne sommes pas dans un « village de vacances » de promoteur et notre hôtesse tient à maintenir une ambiance familiale. Elle nous parle des poules « sauvages » qu’il ne faut pas nourrir et qui assurent la propreté du terrain picorant les insectes et myriapodes désagréables comme les ravets (cafards), scolopendres et scorpions. Elle conte aussi l’adoption de ses chats, le premier, mal sevré, trop petit a été élevé par un autre chaton à peine plus âgé. Les deux complices sont joueurs et affectueux, ils s’amusent à effrayer les poules. La chienne Zelda est tranquille mais elle a un regard suppliant quand nous mangeons. Je la questionne au sujet de l’arbre fascinant avec sa « chevelure » bicolore ses nombreuses branches et ses racines aériennes comme celles des palétuviers qu’on compare parfois à des échasses. C’est un Bakoua, Pandanus sanderi. Ses racines souterraines s’étendraient très loin et maintiendrait le sol en cas de cyclone et de catastrophe. En Martinique, on confectionne avec ses fibres le chapeau traditionnel qui s’appelle aussi bakoua. Notre hôtesse nous montre aussi les crotons qui bordent les allées et la verveine blanche appréciée des colibris, les héliconias en buisson. Cette conversation en fin de soirée est très précieuse. Les échanges avec les habitants locaux sont essentiels au voyage.

 

 

 

Vers le Sud : Côte sous le vent de Pointe Noire à Vieux-Habitants, déjeuner à Rocroy

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l’habitation de  Grivalière

Le raccourci pour Pointe Noire par Beaugendre et Morphy (D22) est proche de la côte. Mais il monte et descend entre maisons et jardins. Pour la passagère, il est plus agréable à parcourir mais pas pour la conductrice stressée par le manque de visibilité et l’étroitesse de la route. Il rejoint la RN 2 à l’entrée de Pointe Noire nous passons entre les vieilles maisons de bois certaines ont un étage et un balcon rouillé qui semble branlant.

Malendure

La route suit de très près la côte entre Mahaut et Bouillante. Nous passons la très chic et très touristique station de Malendure, belle plage de sable. Des voiliers croisent au large. On pourrait faire un tour en mer dans la Réserve Cousteau ou observer des tortues. Les parkings sont pleins, la foule des touristes nous rebute. Sur la corniche des étals de fruits exotiques sont très appétissants, très bien présentés. Comme je rêve de papayes, de caramboles et d’ananas je suis comblée. Mais tant d’abondance est suspecte. Tant de jolis restaurants sont bien touristiques. Le soir, Marie-Jo notre hôtesse,  confirmera mes soupçons : pour elle Malendure « ce n’est plus la Guadeloupe mais la côte d’Azur », un repaire à touristes, trop riche, trop clinquant, les guadeloupéens ne s’y retrouvent plus.

Nous avions prévu initialement d’aller aux sources chaudes de Bouillante et au restaurant. Nous dépassons les Bains Thomas sans les voir.

Rocroy

la plage de Rocroy

Rocroy est une petite plage sauvage bordée de roches volcaniques. Un seul restaurant sur le sable : La Baie de Rocroy qui possède une belle terrasse couverte quelques tables sur le sable et des chaises longues. La plage est déserte – à l’exception de deux iguanes sur les rochers. Voici que Dominique me téléphone, la sonnerie fait fuir l’un d’eux, l’autre, monte dans les herbes sèches. Comme je ne réponds pas, elle rappelle et la deuxième sonnerie le fait disparaître. Je réserve au restaurant pour midi.

iguane

L’Habitation  Grivelière

L’Habitation Grivelière est une plantation de café dont la visite est très recommandée par nos guides. Après recherche sur Internet, j’         apprends qu’elle est fermée pour rénovation mais leur site propose aux visiteurs de monter pour se promener dans les alentours.

La petite route au-dessus de la Grande Rivière de Vieux-Habitants, tortille entre les maisons, prend de la hauteur jusqu’à un hameau très pittoresque aux curieuses maisons encastrées dans la pente. Un atelier d’artiste promet des bijoux de graines et autres réalisations naturelles. A la sortie du village, la route se rétrécit encore.

Un panneau original fait son apparition : « klaxon obligatoire ». Nous comprenons pourquoi : impossible de se croiser, tournants brusques, descentes effrayantes suivies de remontées raides (en première). La voiture grimpe péniblement. La nature est exubérante. On se croit en pleine jungle. Les troncs des grands arbres sont recouverts de lianes. Les grandes feuilles découpées des philodendrons se déploient à plusieurs mètres au-dessus de nous. Encore plus haut, les branches sont colonisées par les épiphytes : touffes de Bromélias qui ressemblent à des nids, Tillandsias (mousses espagnoles) qui dégoulinent. Pour laisser passer une voiture, nous nous garons : la paroi rocheuse est recouverte de Tradescantia (misère) qui rampe partout. Les Oreilles d’éléphant Alocasia macrorhizos . Je suis encore plus enchantée qu’au jardin  botanique. Six kilomètres de cette route sauvage nous conduisent au portail fermé (depuis 2011, bravo les guides !).On devine les toits de tôle de l’Habitation Grivelière parmi la végétation. Impossible d’imaginer la plantation et l’usine. A la suite de la route, une piste cimentée tout à fait carrossable pour les véhicules hauts monte encore plus loin. Ici on appelle « Traces » les pistes et les sentiers. Cette trace conduit à la Cascade Paradis. Dix heures, trop tard pour entreprendre une randonnée. Une femme très enceinte me le déconseille, il faut franchir à gué la rivière et c’est loin. Je me fixe 20 minutes, traverse sans difficulté le cours d’eau et grimpe une belle montée. Jusqu’à la rivière, je distingue des clôtures et bien cachées, des maisons. Les haies et les clôtures sont recouvertes de lianes fleuries : la Suzanne aux yeux noirs (Thunbergia alata), je la croyais africaine comment est-elle parvenue ici ? Il y a aussi de belles corolles violette des ipomées. Sur le chemin, des bouses de vaches.

La descente redoutée est impressionnante.

Vieux-Habitants

Le nom de la bourgade nous inspirait. Le pittoresque n’est pas au rendez-vous comme à Pointe Noire. L’agglomération de 7000 âmes fondée en 1636 est la plus ancienne paroisse de l’île avec sa grande église en basalte assez massive et peu ornée sauf le porche. Elle domine un vaste cimetière où les tombes sont souvent de véritables chapelles familiales souvent carrelées. Ici, la mort est minérale, le végétal n’a pas sa place. La Mairie est un bâtiment moderne. Un peu plus loin se trouve le grand stade avec des tribunes. Teddy Riner est statufié sur le socle une plaque célèbre ses victoires sportives. Il fait le pendant avec le monument aux morts avec sa liste des morts pour la France. Au milieu des constructions modernes il reste quelques cases de bois, l’antenne parabolique témoigne que celle-ci est encore habitée à côté d’autres vides,  presque ruinées.

Plage de Rocroy

J’hésite à me baigner : l’eau est agitée, un peu verdâtre et il y a des sargasses que le serveur dit urticantes(selon Internet il n’en est rien). On nous a installé une petite table sur la plage, à l’ombre. Dominique a commandé des moules thaï et moi, un tartare de saumon accompagné de riz et de salade et de fins copeaux de gingembre avec du wakame. Excellent et très fin. Les moules sont très pimentées, il y a surtout une herbe verte aux feuilles arrondies qui pique plus que le piment ; le serveur est étonné. Les Antillais mangent plus pimenté que nous.

Nous sommes conquises et reviendrons samedi, nous réservons.

En cherchant le sentier côtier entre Sainte Rose et la plage de Cluny

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Au programme de l’après-midi : le sentier côtier entre la Pointe Allègre et la Plage de Cluny, promenade recommandée sur nos guides.

Difficile de trouver l’accès à la Pointe Allègre, nous le dépassons et faisons demi-tour devant Leclerc de Sainte Rose et prenons le premier accès à la plage qui nous a mené à Vinty, nids de poules énormes, parking à moitié inondé. La mer est bien agitée, personne ne se baigne. Sous les arbres des couples d’âges divers ont installé pliants et chaises longues décidés à profiter du calme et de l’isolement du rivage. Un jeune sportif en tenue de footballer, arborant une grande croix argentée fait des allers-retours à grande foulée sur le sable à la limite de l’écume. Sur les troncs d’arbre je vois les marques jaunes du sentier du littoral. Je les suit jusqu’à ce qu’une grande mare me barre le chemin. Impossible de passer. Peut être à marée basse en suivant la plage ? Une vague plus puissante que les autres me dépasse et me trempe mon pantalon jusqu’aux cuisses. pas grave, il fait chaud.

La route suivante passe entre des maisons et devient rapidement une mauvaise piste. Nous interrogeons les habitants si c’est le chemin de la Pointe Allègre ? personne n’en sait rien.

Un peu plus loin, une vague piste traverse une prairie avec des vaches. Pas carrossable pour une voiture basse.

Nathalie, la vendeuse de sorbets-coco

Au coin du chemin suivant, une glacière-vendeuse de sorbets tourne énergiquement le manche de sa sorbetière : un mécanisme métallique avec des ailette fouette le sorbet au coco. Le tout est installé dans un tonnelet en bois qui fait penser à une baratte. Curieuse, j’achète un sorbet, le gobelet le plus petit  3 €. Cette crème glacée fond rapidement à 28°C. la vendeuse est aimable et de très bonne humeur. Je demande la permission de la photographier, elle me répond : « Oui bien sûr, je suis une belle négresse ! » . Nous lui demandons le chemin de la Pointe Allègre. Elle connaît, c’est au bout de la savane des bœufs mais il faut une grosse voiture, nous ne passerons pas avec la Kia Picanto.

Cap Allègre, c’est raté ! pour le sentier côtier, j’ai des doutes. Est-ce déjà l’érosion due à la montée des eaux qui l’a fait disparaître ou le mauvais entretien ? En tout cas je ne me lancerai pas dans la promenade même avec la recommandation des deux guides Evasion et Vert !

 

A défaut de randonnée, nous cherchons la Plage de l’Anse des Iles qui ressemble à Vinty. Une bande de sable très étroite bordée d’arbres. Le sentier côtier est balisé mais impraticable après quelques centaines de mètres. Des travaux de réhabilitation et de protection ont été effectués. On a replanté des arbres entourés d’un grillage, délimité avec des piquets et des fils de fer un cheminement pour éviter que le piétinement ne dégrade le rivage. Des élèves d’un lycée voisin ont réalisé un panneau signalant qu’on se trouve sur un lieu de ponte des tortues-luths ; ils invite à respecter la tranquillité des tortues. Sympathique initiative.

La plage de Cluny est très fréquentée. Le parking est bondé. Des roulottes vendant des jus de fruit, des boutiques de vêtement et articles de plage sont installés à l’arrière. Sur la longue plage les baigneurs sont nombreux sur le sable, beaucoup plus rares dans l’eau. Un impressionnant rouleau vient se briser près du bord. Seuls des hommes jeunes osent le défier et plonger dedans avant qu’il ne se brise. Je parcours la plage. Vers le sud, la barre s’amortit et des familles se baignent avec les enfants.

Coucher de soleil à Baille-Argent

Nous rentrons vers 17 heures à Baille-Argent, faisons halte à la marina, petite avec des bateaux de pêche et quelques bateaux de plaisance mais pas de yachts prétentieux. Un peu en retrait, le fond de cale, sous un remblai couvert de végétation basse trois palmiers se détachent. Nous attendons le coucher du soleil à 18h15. Une conclusion splendide à cette première journée de vacances.

 

 

 

Première matinée, courses à Pointe Noire et Jardin Botanique de Deshaies

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jardin botanique : Alpinia

On se lève de bon matin avec le décalage horaire. Par chance, en Guadeloupe, les boutiques ouvrent très tôt.

Courses à Pointe Noire

A 7h30, à Pointe Noire, le village s’éveille. Des dames avec leur sac à main marchent le long de la route, elles vont à l’église grand ouverte. Un boucher propose de la viande locale, des boudins et des plats cuisinés. Il y a affluence à la boulangerie qui offre une multitude de pains, des pâtisseries européennes et antillaises : chaussons aux pommes ou à la goyave, gâteaux à l’ananas. Nous achetons des friands au thon et deux rations de morue et de thon dans une barquette. Carrefour contact n’ouvre qu’à 8h. En attendant son ouverture, je fais un tour chez la marchande de fruits et légumes qui propose des melons, des pastèques, ananas et des oranges très vertes qui viennent de République dominicaine. Ce n’est pas la saison des mangues, les manguiers sont en fleur. A Carrefour, le rayon des légumes n’est pas engageant avec ses oranges vertes, ses papayes pas mûres et ses ignames et différents tubercules dont nous n’avons pas le mode de cuisson. Nous faisons le plein de produits de base et de crèmerie et rentrons au gîte pour le petit déjeuner.

La route côtière RN2 serait très pittoresque sans la circulation automobile désagréable. Les conducteurs klaxonnent, se collent au parechoc arrière. La route est si étroite avec tant de virages et pas de visibilité pour doubler qu’ils deviennent agressifs si on roule doucement. Dommage, j’aurais tant aimé flâner, regarder les belles maisons étagées dans la colline, les restaurants colorés, les échappées sur la mer.

Le jardin Botanique de Deshaies

jardin deshaies : porcelaines

Le jardin Botanique de Deshaies est signalé par un énorme panneau touristique, équipé d’un vaste parking (vite saturé). Le billet est cher (16€90).  10 heures, c’est l’affluence: touristes métropolitains, 3ème âge pour la plupart, familles avec de jeunes enfants et jeunes couples. Le jardin a autrefois appartenu à Coluche (son ancienne villa est proposée à la location). Le jardin a été aménagé par le paysagiste Michel Gaillard.

On aborde le parc par un grand plan  d’eau où grouillent d’innombrables carpes « koï » avec quelques jolis canards. Des flèches guident le visiteur en un parcours compliqué à travers les massifs.

Bakoua

Je suis fascinée par le Bakoua (Pandanus sanderi) et sa silhouette étrange : une pyramide de racines aériennes suivie des branches épaisses surmontées par une touffe formant une coupe arrondie de longues feuilles de l’ordre du mètre qui ressemblent un peu à celles des yuccas mais souples et fines dont on utilise les fibres comme textile. Je n’avais pas été capable d’identifier le Bakoua au gîte des Manguiers.

héliconia

Différentes variétés d’Heliconia, que j’ avais découvertes au Costa Rica. Je me perds et renonce à faire l’énumération des plantes ornementales magnifiques qu’on a l’habitude de voir en pot dans nos maisons. Presque toutes sont étiquetées avec leur nom scientifique en latin. Les plantes sont de provenances diverses : Asie, Amérique Centrale, Australie…je ne sais plus bien comment les classer. De plus on a remplacé les panneaux explicatifs par des QR-codes : manipulation fastidieuse quand le smartphone sert aussi d’appareil-photo. J’abandonne toute velléité botaniste et me laisse fasciner par les formes, les couleurs les associations étonnantes des épiphytes broméliacées et orchidées. C’est une promenade de touriste badaude ordinaire ébahie par tant de beauté et de couleurs. Les flamants roses dans leur enclos et les aras dans leurs volières font un peu zoo, mais c’est si joli !

Epiphytes : orchidées et bromélia

Je suis un peu déçue que cette visite n’ait pas répondu à mes questionnements sur la flore endémique et ses noms évocateurs découverts dans mes lectures de Maryse Condé et de Simone Schwarzt-Bart. Pas d’Acomat ni de Bois-savonnette ou de courbaril. Après tout nous disposons de trois semaines pour les découvrir !

Sur la route du retour au gite, nous ratons l’entrée de la Plage Leroux que nous avait recommandée Marie-Jo, notre hôtesse et c’est à la Petite Anse que j’inaugure mes baignades antillaises. Une vague Plus forte que les autres vient mourir tout près de mes tongs. J’ai juste le temps de sortir de l’eau pour les sauver avant la suivante.

Comme le gîte est tout proche et que nous sommes sous l’effet du décalage horaire, nous rentrons déjeuner au gîte et faire une courte sieste.

Arrivée à Pointe Noire, par la Route de la Traversée. Notre gîte : Les Manguiers Otantik

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Notre gîte : Les Manguiers

Selon le GPS, il ne faut qu’une heure de route pour rejoindre Pointe Noire à partir de l’aéroport d’abord sur une belle route, presque une autoroute puis par la route de la Traversée (D23) qui coupe Basse Terre (mal nommée ici) par les montagnes : Les Mamelles qui culminent à 785 m. Nous traversons des paysages verts luxuriants. Des fougères couvrent les parois en formant des murs végétaux. La forêt est très dense sur les collines que de nombreuses rivières et cascades irriguent. Malgré la fatigue du voyage et la hâte d’arriver au gîte, mon enthousiasme est intact. Je remarque en traversant le Parc National que de nombreux itinéraires de promenades sont fléchés.

Jonction avec la N2 à côté de  Malendure, nous remontons vers le Nord en passant par Pointe Noire puis nous descendons une pente interminable pour trouver notre gîte à l’entrée de Baille-Argent à côté de la rivière Baille-Argent.

Les Manguiers Otantiks sont composés de plusieurs cases peintes de tintes vives jaune/vert qui sont dispersées dans un parc arboré et fleuri. Notre hôtesse est très accueillante. Le bungalow est parfait pour nous. Equipements intérieurs sans prétention. La terrasse est bien à l’ombre et aérée. Elle est meublée d’une table ronde, chaises et lourds fauteuils de bois massif qui rappellent la facture de la menuiserie africaine. A l’intérieur, une grande salle avec un lit sous une jolie moustiquaire. La chambre avec les lits superposés servira de débarras pour nos valises. La cuisine est très petite. Ce n’est pas grave, nous allons vivre sur la terrasse. Pourvu que les moustiques nous oublient.

A peine les bagages posés, je pars d’un bon pas à la recherche des boutiques pour faire les courses de base pour le petit déjeuner. Nous avons mangé dans l’avion et n’avons pas faim pour dîner. Je me suis trompée, au lieu de partir à droite sur Baille-Argent, je suis montée sur Morphy . la seule « épicerie » ouverte offre bien peu de marchandises en dehors du rhum et du vin et de quelques boîtes de sardines. Ni thé ni café, encore moins de pain et de yaourts.

Nous terminons la soirée en sirotant le jus de corossol maison fabriqué par notre logeuse.

Pas de moustique ce soir.

 

Voyage Orly-Pointe-à-Pitre, Vol Air Caraïbes

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aRRIV2E EN GUADELOUPE

Pour supporter les 8h40 de vol, Dominique nous a offert la Classe Caraïbe.   Seulement 2 sièges au lieu de 3 en économique, des fauteuils plus larges.  Un menu plus sophistiqué champagne ou Ti-punch), (tartare de saumon et Saint Jacques à la place du taboulé). Mais ce n’est pas la 1ère classe, les doses sont riquiquis et servies dans des barquettes en plastique. Ce n’est pas le grand luxe mais un confort appréciable.

J’aime ces heures perdues dans les fuseaux horaires. Parties à 11 heures nous arriverons à 15 heures : 5 heures gagnées en début d’après midi qui nous permettront de rejoindre le gîte de jour. 9 heures pour faire le vide, la coupure entre la routine à Créteil et l’aventure que nous nous préparons à vivre. J’ai apporté le  Guide Evasion, Hachette et le Guide Vert pour planifier nos visites des prochaines journées. Air Caraïbe offre la lecture numérique de la Mythologie des figures caraïbes : sur la page de gauche, des extraits de textes littéraires, en face des explications. Je reconnais Ti-Jean l’Horizon de Simone Schwartz-Bart  je suis en train de lire, Pluie et vent sur Télumèe Miracle et découvre Chamoiseau et Glissant que je ne connais pas. Le plus souvent mon esprit vagabonde, je somnole aussi.

les sargasses vues de l’avion

D’après la carte sur l’écran, l’avion survole la Mer des Sargasses. La couverture nuageuse s’est disloquée, je cherche les Sargasses. Malgré l’altitude de croisière – 12.000 m – je les trouve : guirlandes oranges, paquets parfaitement observables de l’avion, les bancs doivent avoir un ordre de grandeur approchant le kilomètre !

A l’approche de la Guadeloupe, l’avion amorce sa descente. Entre deux nuages, je distingue les côtes, les falaises, la frange d’écume.  Les haut-fond affleurent, la couleur de l’eau moirée est changeante. Enfin nous survolons la mangrove : la rivière du Sel. J’exulte. Je viens de terminer Traversée de la Mangrove de Maryse Condé.

la mangrove vue de l’avion à l’arrivée

L’arrivée à l’aéroport (plus grand que je ne l’imaginais) est un peu laborieuse. Les loueurs de voitures sont installés en dehors de l’aérogare. On les rejoint en navette. Tout se passe bien. A la descente du minibus, je me précipite pour prendre un ticket comme à la poissonnerie de Leclerc et nous sommes appelées les premières. Notre véhicule est une Kia Picanto blanche. Au moment de la démarrer, elle reste inerte. On cherche de l’aide : nous ne sommes pas à bord de notre Kia mais de sa voisine, comment l’avons-nous ouverte ? Mystère !

 

Traversée de la Mangrove (1989)- Maryse Condé

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C’est une veillée funéraire, sans famille éplorée ni pleureuses. Pendant que les femmes prient, les hommes boivent du rhum. Au cours de la nuit les voisins, habitants de Rivière au sel racontent :

« Qu’est-ce que les gens racontent sur Francis Sancher ? Il m’a regardée et ses yeux me brûlaient : — Il
t’intéresse ? — Est-ce qu’il n’intéresse pas tout le monde ici ? — Les gens disent que c’est un Cubain. Quand Fidel a ouvert les portes du pays, il est parti. »

Francis Sancher est vient de Cuba, a parcouru l’Afrique. Il  a débarqué à la propriété Alexis, lieu abandonné, peut-être hanté, il ne cherche pas à se lier avec ses voisins, exerce une certaine fascination surtout sur les femmes.

Roman choral.  Chacun livre sa version de l’histoire de Francis Sancher, et en même temps, se raconte. Diverses personnalités composent cette société métissée. Aussi bien, le propriétaire de la pépinière qui a l’ambition d’exporter ses fleurs jusqu’à la cour de la Reine d’Angleterre, Sylvestre le « zindien », Léocadie l’institutrice, Désinor le travailleur haïtien exploité qui rêvait de New York, Cyrille le conteur, Sonny le demeuré, Xantippe l’homme des bois, le sauvage, aussi bien que les intellectuels Emile Etienne l’historien, Lucien, le révolutionnaire….Les femmes souvent mariées très jeunes, femmes délaissées ou mères déçues, secrètement (ou pas) amoureuses de Francis Sancher. On devine de lourds secrets de famille. l’histoire et la politique affleurent dans les récits.

« Car dans la Guadeloupe d’aujourd’hui, ce qui comptait, ce n’était plus la couleur de la peau, enfin plus seulement, ni l’instruction. C’étaient nos pères qui s’échinaient pour pouvoir coller sur leurs cloisons des
diplômes de papier sur lesquels chiaient les mouches. À présent, les bacheliers, brodeurs de français-français,
assis sur le pas de leurs portes, attendaient leurs chèques de l’A.N.P.E. Non, ce qui comptait, c’était l’argent et elle, Vilma, en aurait à revendre. »

Il en résulte un livre passionnant, riche, qui soulève différents thèmes : le racisme toujours présent même si les sangs sont mêlés et les couleurs de peau nuancées, la lutte des classes, déclassement de l’ancien béké qui s’est allié à une femme noire, zindiens parvenus, allers et retours en métropole, en Afrique,  négritude ou créolisation?

Et décor naturel luxuriant aux flancs du volcan, cultures de canne ou de bananes….

« À quoi ressemblait son île avant que l’avidité et le goût du lucre des colons ne la mettent à l’encan ? Au
Paradis que décrivait son livre de catéchisme. »

[…]
Hélas, à présent la forêt était une cathédrale saccagée. Il fallait se contenter de piètres prises…

[…]

A mille mètres d’altitude, la forêt de Guadeloupe se rabougrit. Disparus, les châtaigniers grande feuille, les
acomats boucan, les cachimans montagne, les bois rouge carapate. C’est le royaume des côtelettes aux feuilles gaufrées d’un vert noirâtre qui ne s’élèvent guère au-dessus de deux mètres du sol. La terre se couvre de broméliacées aux fleurs violettes et sans parfum, d’orchidées blanches striées de veinules couleur robe d’évêque.

Un véritable coup de cœur pour le style inimitable de l’écrivaine!

pirogue dans la mangrove

« On ne traverse pas la mangrove. On s’empale sur les racines des palétuviers. On s’enterre et on étouffe dans la boue saumâtre. »

 

Moi, Tituba Sorcière… Noire de Salem- Maryse Condé

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Maryse Condé est une écrivaine, journaliste, universitaire guadeloupéenne. J’ai donc lu ce livre en prévision de notre prochain voyage : Guadeloupe! 

« Qu’est-ce qu’une sorcière ? Je m’apercevais que dans sa bouche, le mot était entaché d’opprobre. Comment
cela ? Comment ? La faculté de communiquer avec les invisibles, de garder un lien constant avec les disparus,
de soigner, de guérir n’est-elle pas une grâce supérieure de nature à inspirer respect, admiration et gratitude ? En conséquence, la sorcière, si on veut nommer ainsi celle qui possède cette grâce, ne devrait-elle pas être choyée et révérée au lieu d’être crainte »

Mais Moi Tituba… se déroule à la Barbade , île colonisée par les Britanniques aux Antilles, île à sucre où sévit l’esclavage. Tituba est  vendue à un pasteur  qui l’emmène à Salem au moment du célèbre procès des sorcières de Salem , sujet de la  pièce d‘Arthur Miller  (1692).

Faith Ringgold : slave rape

Comme Solitude, Tituba est née d’un viol sur le bateau qui faisait voile vers les Antilles. Sa mère Abena, achetée pour distraire la maîtresse blanche est rejetée à cause de sa grossesse, mariée puis pendue quand elle s’est défendue avec un coutelas en se défendant de son maître qui voulait la violer. Tituba est chassée de la plantation et recueillie par Man Yaya détentrice d’un savoir ancestral, guérisseuse et sorcière. 

« Man Yaya m’apprit les plantes. Celles qui donnent le sommeil, celles qui guérissent plaies et ulcères[…]

Man Yaya m’apprit à écouter le vent quand il se lève et mesure ses forces au dessus des cases qu’il se prépare à broyer. 

Man Yaya m’apprit la mer. les montagnes et les mornes.

Elle m’apprit que tout vit, tout a une âme, un souffle. Que tout doit être respecté. que l’homme n’est pas un maître parcourant à cheval son royaume »

Quand Man Yaya meurt, Tituba n’est pas esclave. Elle vit dans sa case, cultive son jardin, cherche les plantes avec lesquelles elles soulage les douleurs de ses voisins. Elle sait aussi converser avec les disparus, sa mère, Man Yaya. Elle serait peut être restée libre et  heureuse sur ses terres si elle n’était pas tombée amoureuse de John Indien, l’avait rejoint dans la belle demeure de Carlisle Bay puis s’était retrouvée vendue au Révérend Parris.

Bien  triste personnage ce pasteur qui fait vivre tout son entourage dans la crainte de Satan. Aussi  terrible que le pasteur luthérien des Graciées qui mena en 1613   une chasse aux sorcières en Laponie. Même composante raciste, les femmes samis étant soupçonnées, comme les noires à Salem. Et Tituba ne sera même pas nommée dans le procès de Salem, ni graciée en 1693 avec les autres accusées blanches. 

« Je sentais que dans ces procès des sorcières de Salem qui feraient couler tant d’encre, qui exciteraient la curiosité
et la pitié des générations futures et apparaîtraient à tous comme le témoignage le plus authentique d’une époque crédule et barbare, mon nom ne figurerait que comme celui d’une comparse sans intérêt. On mentionnerait çà et là « une esclave originaire des Antilles et pratiquant vraisemblablement le “hodoo” ». On ne se soucierait ni de mon âge ni de ma personnalité. On m’ignorerait. »

Pour payer les frais de son séjour en prison, Tituba est à nouveau vendue, à un marchand juif qui fera aussi l’objet de persécutions. Finalement elle pourra retrouver la Barbade et sa case. Et l’histoire ne se termine pas là….

 

 

la Mulâtresse Solitude – André Schwarz-Bart

LIRE POUR LA GUADELOUPE

Pour accompagner le voyage à  la Guadeloupe, j’ai choisi La Mulâtresse Solitude – figure emblématique de la lutte contre l’esclavage – évoquée dans ce roman historique. 

Née vers 1772 – pendue le 19 novembre 1802.

Son histoire commence de l’autre côté de l’Atlantique avec celle de sa mère Bayangumay, en Casamance..

« La grande ville des bords du fleuve, lieu d’ombre et de luxe, de tranquillité, portait encore le nom de Sigi qui
signifie : Assieds-toi. Mais depuis qu’on y embarquait les esclaves, elle n’était plus connue que sous le nom de
Sigi-Thyor : Assieds-toi et pleure. Et désormais, de proche en proche, des terres connues aux plus lointaines, qui vont au-delà du pays des Balantes, les peuples qui craignaient de devenir gibier se faisaient chasseurs, oubliant qu’une seule et même plaie s’ouvrait à leur flanc. »[…]
Et les Anciens comparaient le corps nouveau de l’Afrique à un poulpe cloué sur la grève, et qui perd goutte à goutte de sa substance, cependant que les tentacules s’étreignent et se pressent les uns les autres, et se déchirent sans pitié, comme pour se demander mutuellement raison du pieu qui les traverse de part en part. »

Fille d’une esclave africaine Bayangumay, violée sur le bateau négrier par un marin blanc,

« cette étrange coutume, la Pariade, qui avait lieu un mois avant l’arrivée au port, jetant soudain les matelots ivres sur les ventres noirs lavés à grandes giclées d’eau de mer. Les enfants de Pariade avaient souvent les traits qui se contrariaient, filaient dans tous les sens, les sourcils hésitants, les yeux entre deux mondes. »

Rosalie, qui se nommera plus tard Solitude est une métisse aux yeux vairons qui lui valent aussi le surnom « deux âmes« . Petite fille, elle est offerte à la fille du maître de l‘Habitation du Parc, à  Capesterre . Son sort est plutôt enviable tandis que sa mère s’enfuit malgré le sort amer qu’on inflige aux esclaves marrons 

« M. Mortier assurait avoir vu des nègres marrons traités aux fourmis, traités par le sac, le tonneau, la poudre au
cul, la cire, le boucanage, le lard fondu, les chiens, le garrot, l’échelle, le hamac, la brimbale, la boise, la chaux vive, les lattes, l’enterrement, le crucifiement ; et toujours parfaitement en vain ou du moins sans résultat
appréciable : le même sourire sur leurs lèvres maudites, la même façon lointaine de vous insulter, comme si vous n’existiez pas vraiment, à leurs yeux… »

Le livre raconte la vie dans les plantations à sucre. Vie des esclaves agricoles et de ceux qui servent dans la maison. Au delà de la biographie, c’est très intéressant. Rosalie qui  va prendre le nom de Solitude perd peu à peu la raison

 

« Selon une tradition orale, encore vivace à la Côte-sous-le-Vent, du côté des pitons de Deshaies, c’est vers l’âge
de onze ans que la petite fille de Bayangumay tourna en zombi-cornes. En ce temps-là, disent les vieux conteurs
créoles, 

[…]
Il y avait alors une grande variété d’Ombres dans les îles à sucre : nègres morts animés par magie, nègres vivants qui avaient chu dans un corps de bête, et d’autres, d’autres encore, dont l’âme était partie on ne savait où. Ces derniers portaient habituellement le nom de zombi-cornes.

[…]
les zombi-cornes étaient tout simplement des personnes que leur âme avait abandonnées ; ils demeuraient vivants, mais l’âme n’y était plus.

Et puis, survient la Révolution, tout d’abord la Révolution libératrice et c’est un des aspects les plus intéressants du livre. 

« Le 7 mai 1795, les troupes de la Convention débarquaient en Grande-Terre de Guadeloupe où elles répandaient le décret d’abolition de l’esclavage ; et le 12 mai suivant, grossies par les esclaves rencontrés en chemin, elles faisaient leur entrée dans les faubourgs de la Pointe-à-Pitre. 

[…]
Au  dernier instant il s’arrêta devant Solitude et murmura, d’une voix infiniment navrée : Et toi, pauvre zombi qui te délivrera de tes chaînes ? La jeune femme répondit en souriant : Quelles chaînes, Seigneur ? »

Libération des esclaves, mais aussi guillotine,

La guillotine avait quitté la Pointe-à-Pitre, elle hantait maintenant les deux ailes de l’île, escaladait les mornes
les plus raides, les plus abandonnés, à la recherche de citoyens qui ne comprenaient pas leurs nouveaux devoirs. Nombre d’entre eux, fuyant la liberté, l’égalité et la fraternité, gagnaient l’obscurité profonde des bois,

En 1802, l’esclavage est rétabli, les derniers combats opposent les marrons retranchés dans les forêts et les collines. Solitude s’est jointe à eux. Elle est une des héroïnes de leur lutte désespérée.

La Mulâtresse Solitude dans son square parisien, enceinte qui brandit le rouleau de la proclamation de Degrès (10 mai1802)

Solitude fut exécutée au lendemain de sa délivrance, le 29 novembre 1802.

Pluie et Vent sur Télumée Miracle – Simone Schwarz-Bart – Le Seuil

LIRE POUR LA GUADELOUPE

Dépaysement total!

« Tout contents qu’ils fussent de la nouvelle, les nègres étaient encore dans l’expectative, hésitaient à se réjouir
vraiment, attendaient d’avoir le cabri et sa corde en main pour s’éviter la peine d’avoir affûté en vain leur
poignard. Et comme ils épiaient voici ce qu’ils virent : Toussine coupait les herbes folles
[…]
les nègres attendaient encore pour se réjouir, la regardaient faire, de loin… Ils songeaient à la Toussine
d’autrefois, celle en haillons, et puis la comparaient avec celle d’aujourd’hui qui n’était pas une femme, car
qu’est-ce qu’une femme ?… un néant, disaient-ils, tandis que Toussine était tout au contraire un morceau de monde, un pays tout entier, un panache de négresse, la barque, la voile et le vent, car elle ne s’était pas habituée au malheur. Alors le ventre de Toussine ballonna, éclata et l’enfant s’appela Victoire, et c’était ce que les nègres attendaient pour se réjouir. »

Télumée m’a emportée dans sa case de planches juchée sur 4 pierres, au bord de la forêt non loin des champs de cannes. plongée dans l’inconnu d’une végétation tropicale  d’orangers à colibris, canne congo, cochléarias, makanga, malaccas, mombins, mahoganys, courbarils....Il faudrait que j’emporte cette liste dans un jardin botanique pour vraiment voir à quoi ces végétaux ressemblent . Le décor est exotique avec des parfums, des odeurs inconnus, une cuisine dont j’ignore les saveurs.

Le style de Simone Schwarz-Bart est différent de tout ce que je connais, imagé, riche de mots inconnus. Je découvre une langue qui ne m’est pas familière avec des tournures étranges, que je comprends (mais pas tout) d’une grande richesse et qui me transporte ailleurs. Ne pas tout comprendre, deviner, me ravit, un peu comme ces films en VO que j’écoute avec attention mais où des phrases entières m’échappent. Je suis sous le charme.

« Man Cia chère, à quoi peut bien ressembler un esclave, et à quoi peut ressembler un maître ? – Si tu veux voir un esclave, dit-elle froidement, tu n’as qu’à descendre au marché de la Pointe et regarder les volailles ficelées dans les cages, avec leurs yeux d’épouvante. »

Je découvre un monde, une histoire, héritage de l’esclavage qui  poursuit les gens à travers les générations.

Des personnages hors du commun me séduisent!

Une très belle lecture!