LIRE POUR L’AFRIQUE

693 p. promesse d’évasion dans une région d’Afrique que je ne connais pas du tout. Avant de le lire je confondais Zambie et Zimbabwe. Un voyage aux chutes du Zambèze m’a tout de suite tentée.
« Victoria Falls. on dirait une phrase. Victoria chute. ou une prophétie. C’était en tout cas la plaisanterie que je faisais jusqu’à ce jour de 1901 où son Altesse Royale la Reine Victoria mourut juste avant que je ne débarque sur le continent. « (Incipit)
Le prologue commence très fort à la suite de l’expédition de Livingstone, un photographe britannique s’installe à proximité des Chutes Victoria. Du village d’Old Drift, il ne reste que le cimetière. Victimes des fièvres, de la malaria, des moustiques. Un indice pour le titre du roman?
1939, en Italie, nait Sibilla, une des Grands Mères, petite fille affligée d’un pelage assez monstrueux, fille illégitime d’une servante. Agnès, deuxième Grand Mère, championne de tennis anglaise perd la vue. Elle suit en Afrique Ronald, jeune diplômé zambien venu étudier en Angleterre. Matha, jeune africaine très douée apprend à écrire seule avec les garçons, au temps où les filles n’allaient pas à l’école. Protégée du maître, un révolutionnaire au temps de la décolonisation, elle devient « astronaute » dans un projet farfelu de conquête de la lune.
Ces trois Grands Mères, figures féminines atypiques, sont des révolutionnaires dans le mouvement de l’émancipation de l’Afrique anglophone. Fondatrices, elles sont les témoins de l’indépendance de la Zambie dans les années 60. Figures aussi ancrée dans le monde colonial : le mari de Sibilla est venu construire le barrage de Kariba. Agnès devra affronter le racisme avant de pouvoir épouser son mari noir. Je lis donc avec beaucoup d’intérêt ce roman historique qui va peut-être me donner les clés de la région. J’aurais aimé un peu plus de notes en bas de page pour comprendre le contexte politique et géographique.
Trois mères succèdent : Sylvia, la fille de Matha, élevée par sa tante, très jeune mue par un désir d’indépendance n’hésite pas à se prostituer puis ouvre un salon de coiffure. Isabella, la plus sage peut-être, se marie à un commerçant indien, ajoutant des origines exotiques à cette population mélangée. Thandiwe hôtesse de l’air, épouse le fils d’Agnès, médecin spécialisé dans la lutte contre le SIDA.
J’ai bien aimé les histoires originales et exotiques des mères et des grands mères, figures féminines inattendues. les personnages masculins ne brillent pas par leur courage ni par leur fidélité.
La troisième partie, celle des Enfants m’a moins intéressée. Le drame du SIDA est une véritable tragédie dans la région, les recherches d’un vaccin ou d’une réponse utilisant la génétique m’ont paru très confuses. La mise au point de drones m’a carrément ennuyée, même si l’idée de copier les moustiques (d’où le titre du livre) est assez intéressante.
La fin du livre se déroule en pleine science fiction : la population serait contrôlée par des implants de puces, contrôle consenti par l’accès gratuit à Internet. L’association d’implants de puces et d’essais de vaccin contre le virus du sida est peut être prémonitoire : l’édition en anglais est parue en 2019, avant l’épidémie de Covid et les campagnes des antivax ont brodé sur ce motif. Si ces thèmes sont actuels et intéressants, le traitement de données scientifiques est si fouillis et si invraisemblable que j’ai vite décroché et j’ai eu hâte de terminer ce gros bouquin.