Les Reines – Normand Chaurette – Elisabeth Chailloux -Théâtre des Quartiers d’Ivry

CHALLENGE SHAKESPEARE 

NOUS SOMMES UNIES

VOUS ET MOI

DANS L’ANARCHIE

DES OMBRAGES

Le Théâtre des Quartiers d’Ivry réserve de belles surprises et malgré l’intitulé un peu étrange, je n’hésite pas à y faire le détour. Il est maintenant logé dans un très bel endroit : La Manufacture des œillets une usine désaffectée qui a gardé des locaux spacieux et une haute verrière.

Les Reines est l’oeuvre d’un auteur canadien qui est aussi un traducteur de Shakespeare. Les Reines sont celles qui ont gravité autour de Richard III – pièce fascinante – dont on a tiré des versions contemporaines intéressantes Looking for Richard d’Al Pacino et Richard III de David Gauchard (clic sur les liens) . J’aurais dû relire la pièce avant d’aller à Ivry et au moins lire le feuillet qu’on distribue à l’entrée du théâtre au lieu de bavarder avec Nicole. Mais je n’aime ni lire les critiques de films, ni les 4ème de couverture des livres, il me semble que cela gâche le plaisir de la surprise. Cependant dans le cas des Reines c’est indispensable de se situer un peu mieux dans l’histoire d’Angleterre, de la Guerre des Roses pour identifier les personnages .

 

Marginales chez Shakespeare, 6 Reines sont les héroïnes de la pièces :

  • La duchesse d’York (1415 – 1495): Cécile Neuville, épouse de Richard Plantagenêt
  • La Reine Marguerite (1430 – 1482) Marguerite d’Anjou, fille de René d’Anjou et de Provence, qui déclenche la guerre des deux Roses.
  • Elisabeth Woodville (1437 – 1492) mère de deux enfants assassinés par Richard
  • Isabelle Warwick (1451 -1477) mariée à George, duc de Clarence
  • Anne Warwick (1456 -1485) marée au prince Edouard puis épouse de Richard III
  • Ann Dexter (1439 -1476)  soeur des rois Richard et de George duc de Clarence.

J’ai  posé sur mes genoux l’arbre généalogique des famille Lancastre et York du feuillet de présentation pendant la pièce et je suis restée perdue malgré cette aide. De retour à la maison la présentation d’une autre mise en scène de la pièce m’a un peu mieux éclairée.

Peut-on jouir du spectacle en mélangeant tous les personnages? Il faut croire que oui, parce que la mise en scène est tout à fait originale et spectaculaire avec des effets d’éclairages très réussi et des actrices à la personnalité percutante.

On entre dans la salle dans un épais brouillard traversé par des faisceaux lumineux formant comme une colonnade. La scène est au milieu de deux rangées de gradins qui se font face. La pièce se joue dans ce couloir mais aussi au dessus de nous sur des balcons où courent les actrices qu’on ne découvre qu’ensuite.

Unité de temps:  un jour le 20 janvier 1483.  Unité de lieu, la tour de Londres. Un drame réel : le roi Edouard est à l’agonie.  Elisabeth cherche à protéger ses deux enfants de la menace de Richard. Climat d’épouvante. On entend des cloches, les pas claudicants de Richard qui rôde, le vent…

Si j’étais complètement perdue dans la salle dans le tourbillon des reines je me suis rattrapée ensuite par des retours dans cette histoire d’Angleterre et j’y ai pris plaisir.

Delacroix au Louvre

CHALLENGE ROMANTISME

Exposition temporaire jusqu’au 23 juillet 2018

Massacre de Scio

Est-ce bien nécessaire d’aller voir cette exposition Delacroix au Louvre qui possède les tableaux les plus fameux que chacun connaît comme la Liberté guidant le peuple ou les massacres de Scio, le grand tableau de La mort de Sardanapale est restée à sa place, de même bien sûr que le plafond de la Galerie d’Apollon!

Et bien oui! La présentation chronologique et pédagogique met en lumière d’autres aspects du peintre. Elle situe les peintures les plus connue dans le contexte de leur création. Esquisses qui précéderont les œuvres monumentales, études, petits tableaux : il y a deux petits formats de La mort de Sardanapale qui se font face alors que sur les murs on voit les études de carnation, des bijoux….

La mort de Sardanapale (absente de l’exposition)

Je connaissais Delacroix, peintre de guerre, propagandiste partisan de l’Indépendance grecque : la belle Grecque sur les ruines de Missolonghi.

La Grèce sur les ruines de Missolonghi

C’est Delacroix romantique qui m’a le plus frappé pendant la visite, romantique en peinture, fréquentant Théophile Gautier, George Sand et Alexandre Dumas. Je découvre Delacroix très littéraire, consacrant de l’énergie à l’écriture, lisant et traduisant de l’anglais. Ses sujets d’inspiration sont tirés souvent de Byron (la Grèce, encore! le Giaour, Byron est mort en 1924, la peinture est datée 1926),

Combat entre le Giaour et le Pacha

Le peintre s’est inspiré aussi de Walter Scott : prenant pour sujet un épisode de Quentin Durward pour l’assassinat de l’évêque de le Liège, d’Ivanhoé pour l’enlèvement de Rebecca. Il lit Shakespeare, illustre Hamlet  tenant en main le crâne dans plusieurs versions, j’ai préféré la plus sobre. Je découvre aussi ses estampes surtout celles de Faust. Delacroix utilise la lithographie qui est à l’époque un procédé nouveau et qui permet une grande finesse dans les nuances.

Faust

Evidemment j’ai beaucoup aimé Delacroix orientaliste. Ses carnets de voyages sont très émouvants, rassemblant écrits, dessins, esquisses, aquarelles.

carnets de voyage

Delacroix a tout essayé : le portrait, les peintures animalières avec une prédilection pour les chevaux et pour les fauves.

combat de lions

Sans oublier de magnifiques bouquets, des peintures religieuses….

Cette exposition est vraiment complète!

Cymbeline

CHALLENGE SHAKESPEARE

CHALLENGE SHAKESPEARE

Fidèle au Grand Will, et au défi de Claudialucia, j’ai tenté l’expérience de Cymbeline. Aventure parce que les pièces que j’avais lues dans le Challenge Shakespeare étaient  des pièces connues. Je savais ce que j’allais trouver, bien sûr, j’y ai trouvé chaque fois beaucoup plus que mes idées préconçues, l’imagination du dramaturge va bien au delà  ce que je pouvais attendre. De plus, le plus souvent tout un corpus de textes, d’oeuvres accompagnait cette lecture : Verdi, films, contexte historique… et le mieux : la  représentation théâtrale.

Pour Cymbeline, rien de tout cela! Je n’avais jamais entendu le titre qui me suggérait une féérie, pour une fée, Cymbeline est un joli nom. Cette lecture sans aucun a-priori, avec pour toute recommandation le nom de Shakespeare a été une aventure.

Et il faut être aventureuse pour se risquer en Bretagne, envahie à grand peine et à nombreuse reprises par les Romains…à Rome au temps de l’Empire romain (qui ressemble à l’Italie de la Renaissance), et même dans une caverne des montagnes galloises (si j’ai bien compris). Il faut aussi ne pas craindre les invraisemblances, les enfants royaux enlevés, les poisons d’une vilaine belle-mère, les retournements de veste et les travestissements.  Ne pas être regardant en décapitation (même si c’est pour la bonne cause), en résurrections…

Shakespeare n’a peur de rien! Et c’est bien distrayant. Comme toujours, une pièce doit être vue au théâtre plutôt qu’être lue, et j’envie bien Claudialucia qui a déjà rendez-vous avec Imogène et Posthumus. (quels noms!)

La Nuit des Rois – à Ivry – Clément Poirée

CHALLENGE SHAKESPEARE 

la nuitdesrois

J’ai découvert la pièce à Ivry.

Des rois, je n’en ai pas trouvés. Ils sont nombreux dans les tragédies et les pièces historiques, mais ici, c’est autre chose, c’st la nuit de l’épiphanie, nuit d’hiver, nuit bien folle! Pour une comédie endiablée.

 

En Illyrie, après un naufrage, comme dans la Tempête? les jumeaux VIOLA et SEBASTIEN ont été séparés, chacun croyant l’autre disparu. Viola se travestit en homme, pour sa sécurité, et devient le page d’ORSINO. Gémellité, travesti, que de confusions réjouissantes pour une comédie!

 » Esprit si c’est ton bon plaisir, mets-moi en bonne veine de folies », dit le BOUFFON

Twelfth_Night_-_Francis_Wheatley

Folie, bouffonnerie. Le bouffon du comte, père d’OLIVIA, joue un rôle important, il joue de la musique et égaie la maison d’OLIVIA. Mais il est loin d’être le seul fou. SIR TOBIE est fou de la bouteille et son acolyte SIR ANDRE ne vaut pas mieux. Folie d’amour d’ORSINO. Folie de deuil d’OLIVIA. Folie d’orgueil de MALVOLIO.

La bouffonnerie est aussi l’oeuvre des domestiques, de MARIE qui organise la mystification de MALVOLIO pour les plus grand plaisir de tous. On est dans la farce! « En bas jaunes et en jarretières croisées! » nous a tous mis en joie. 

La mise en scène de Clément Poirée nous fait entrer dans la sarabande avec un rythme endiablé. Les scènes se succèdent sans temps mort. Le final termine la comédie entraînante. Il est servi par des acteurs épatants qui n’épargnent pas leur peine pour nous faire rire. Seul bémol, le décor est tristounet, les lits évoquent un hôpital ou un pensionnat, les couleurs sinistres. pourquoi?

lire aussi ICICHALLENGE SHAKESPEARE25

 

 

Comme il vous plaira sur une citrouille – Expo Françoise Jolivet à Meudon

LA SÈVE ET LA CICATRICE OU COMMENT RUSER AVEC LA NATURE

comme il vous plaira.....
comme il vous plaira…..

 

Lecture commune de Comme il vous plaira avec Maggie et Claudialucia

Coïncidence, à la Maison de Rodin cette plasticienne expose ses citrouilles scarifiées, déshydratées, tannées. le résultat est surprenant.

Pour le plaisir, d’autres citrouilles :

juin 20140servon 046 - Copie

juin 20140servon 049 - Copie

 

Cité Rodin!
Cité Rodin!

 

Comme il vous plaira – Shakespeare

CHALLENGE SHAKESPEARE

Lecture commune avec Claudialucia et Maggie

CHALLENGE SHAKESPEARE

Le grand Shakespeare maîtrise tous les registres, de la tragédie historique, à la comédie en passant par la farce comme dans les Joyeuses commères de Windsor, la féerie du Songe d’une Nuit d’été. Comme il vous plaira est un joli divertissement, une pastorale qui se déroule dans une forêt des Ardennes accueillante.

« Notre vie actuelle, séparée de tout commerce avec le monde, trouve des voix dans les arbres, des livres dans les ruisseaux qui coulent, des sermons dans les pierres et du bien en toute chose »

comme-il-vous-plaira

Badinages sur le thème de l’amour et du mariage, travestissements,

Rosalinde,  chassée par le duc, va rejoindre son père dans la forêt des Ardennes en compagnie son amie Célie. Elle a pris un habit de jeune garçon pour cette équipée mais dès les premières fatigues soupire :

« j’aurais envie de déshonorer l’habit d’homme que je porte et de pleurer comme une femme ;mais il faut que je soutienne le vaisseau le plus faible : c’est au pourpoint et au haut-de-chausse de montrer m’exemple du courage à la jupe »

Le  travestissement causera des quiproquos savoureux : la naïve Phébé s’amourache de Rosalinde sous son costume masculin, tandis qu’Orlando soupire pour Rosalinde sans la reconnaître.

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Quiproquos et calembours (mais la traduction française en  perd la saveur). Le ton est léger même quand on philosophe sur le temps qui passe ou le bonheur.

« Revêtissez-moi de mon habit bigarré, donnez moi la liberté de dire ce que je pense, et je vous jure que, si l’on veut prendre médecine patiemment, je purgerai à fond le corps impur de ce monde infecté »

dit Jacques qui aspire à porter l’habit bigarré du fou.

Tout se termine bien, non pas par un mariage mais par quatre unions!

L’HYMEN

Silence. oh! je défends le désordre

C’est moi qui dois conclure

Ces étranges événements qui doivent se prendre la main

pour s’unir par les liens de l’hymen

Si la vérité est la vérité

Charmant désordre en vérité!

Le Songe d’une nuit d’été

CHALLENGE SHAKESPEARE

CHALLENGE SHAKESPEARE

Encore merci à Claudialucia de gérer le CHALLENGE SHAKESPEARE  depuis déjà de nombreux mois et c’est avec plaisir que je me joins à cette lecture commune en compagnie d’Eimelle et d’autres blogueuses (blogueurs)

Je préfère découvrir une pièce au théâtre avant de me plonger dans le texte. Une pièce est d’abord faite pour être jouée. J’ai donc cherché sur YouTube les vidéos disponibles et je vous livre une version très sixties, un peu hippy, un peu flashy, un peu BD qui m’a charmée: celle de Jean Christophe Averty 1969 avec jC Drouot (Oberon).

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Acte I, scène I  – Athènes a pour arrière-plan des motifs de vases grecs revus et corrigés par la Bande Dessinée. Un régal pour ce Thésée, duc d’Athènes solennel, mais peu crédible en amoureux (quand on sait comment il a lâchement séduit et abandonné Ariane…).

la Scène II – mise en scène de Pyrame et Thisbée a pour décor le Globe (maquette) et les comédiens sont les figures d’un jeu de Tarot.

Oberon, Titania and Puck with Fairies Dancing circa 1786 by William Blake 1757-1827
William Blake : Oberon Titania et Puck

Obéron et Titania se disputent dans un ballet psychédélique sur un arrière plan de miniatures indiennes toujours aussi coloré qui convient parfaitement à la féérie shakespearienne…je vous laisse découvrir les fées minuscules, les inventions graphiques.

midsummer

Retour au texte : un regret,sur ma liseuse  j’ai téléchargé à très peu de frais les textes qui ne sont plus concernés par le copyright, en français et en anglais. J’aurais préféré une version bilingue page de gauche en anglais/droite en français qui est l’idéal quand je la trouve.

La traduction ne fait pas apparaître les vers de la VO – dommage! mais la liseuse permet de souligner les citations, je vous livre mes préférées :

 

 

« Vous avez l’amour de son père, épousez le : mais laissez moi l’amour d’Hermia »

de Lysandre à Egée, qui m’a fait bien rire.

« L‘amour peut transformer les objets les plus vils; le néant même, et leur donner de la grâce et du prix. L’amour ne voit pas avec les yeux mais avec l’âme : et voilà pourquoi l’ailé Cupidon est peint aveugle ; l’âme de l’amour n’a aucune idée du jugement: des ailes et point d’yeux, voilà l’emblème d’une précipitation inconsidérée ; et c’est parce qu’il est si souvent trompé dans son choix qu’on dit que l’amour est un enfant »

Le Songe d’une Nuit d’été, est d’abord une comédie sur l’amour. Avant qu’Obéron, Puck, les fées ne s’en mêlent les amants sont déjà bien aveuglés!

D’ailleurs, qui est-il ce Puck, parfois comparé à Ariel de la Tempête?

« Ou je me trompe sur votre tournure et vos façons, ou vous êtes un esprit fripon, malin qu’on appelle Robin Bon-Diable. N’est-ce pas vous qui effrayez les jeunes filles de village, qui écrémez le lait et quelquefois tournez le moulin-à-bras n’est-ce pas vous qui tourmentez la ménagère fatiguée de battre le beurre en vain, et qui empêchez le levain de la boisson de fermenter? N’est-ce pas vous qui égarez les voyageurs dans la nuit et riez de leur peine? »

J’ai aimé aussi la rivalité entre Hélène la grande blonde  et Hermia la piquante petite brune après :

Hélène : « Toute cette confiance mutuelle,  ces serments de sœurs; ces heures passées ensemble, quand nous reprochions au temps de trop hâter sa marche et de nous séparer : oh! tout cela est oublié, et toute notre amitié de ‘école et l’innocence de notre enfance? Hermia nous avons, avec l’adresse des dieux, crée toutes  les deux avec nos aiguilles une même fleur sur su seul coussin chantant une même chanson du même air[…] c’est comme si nous avions grandi ensemble, comme deux cerises jumelles, en apparence séparées, mais unies dans leur séparation, comme deux jolis fruits attachés sur une même tige… »

Séparées par la jalousie, elles se disputent :

Hermia : « Suis-je donc si petite, grand mât de cocagne? Parle ; suis-je donc si petite. je ne suis pas encore si petite que mes ongles ne puissent atteindre tes yeux! »

J’aurais pu surligner la scène entre Titania et Bottom et sa tête d’âne, et d’autres encore, au risque de lasser.

titania et l'âne

L’heureux dénouement est inévitable, comme la Marche de Mendelsohn, sur la quelle je ferai l’impasse. J’attendais l’intermède de Pyrame et Thisbée. J’adore ces scènes de Théâtre dans le Théâtre

« Tragique et comique à la fois! courte et ennuyeuse! C’est comme qui dirait de la glace chaude, et de la neige d’une espèce aussi rare; Comment accorder ces contraires? »

Mendelssohn quand même!

Le Trajet d’une rivière – Anne Cunéo

 

Merci à  Claudialucia et à Dominique de m’avoir incité à lire cet ouvrage!

Roman historique retraçant la vie d’un musicien anglais Francis Tregian (1574 – 1620?) auteur d’une compilation de musiques de la Renaissance le Fitzwilliam Virginal Book, collectionnant la musique anglaise de son temps William Byrd, Thomas Morney mais aussi Monteverdi et des musiciens hollandais.

Quel personnage romanesque que ce gentilhomme musicien, latiniste et bretteur, catholique dans l’Angleterre de la Reine Elisabeth, la protestante, fils d’un proscrit,  catholique,  fanatique opposant à la Reine, musicien passionné, merveilleux interprète, facteur d’orgues et de claviers (appelés en Angleterre virginals)!

Roman de cap et d’épée, de chevauchées à travers toute l’Europe. Mêlé à diverses conspirations pendant les guerres de religion, catholiques contre protestants en Angleterre, mais aussi catholiques « politiques » contre Jésuites, Guise contre Navarre en France, conspiration des Poudres….guerre de Trente ans en Allemagne…Espion, ou franc tireur?

Francis aspire surtout à la liberté de conscience, à  celle de rester catholique sans pour autant trahir la Reine. Envoyé à Douai ses maîtres partisans du duc de Guise, il acquiert la   sympathie d’Henri IV, encore Navarre, et lui confiera même son fils à sa cour.  Liberté de servir son pays sans se laisser manipuler, par Philippe II d’Espagne ou par les Jésuites. Roman de la tolérance religieuse dans une période troublée par l’intolérance.

Mais c’est  la musique qui est la passion de Tregian. Il  rencontre  les plus grands musiciens de son temps. Il fut  l’élève de Thomas Morley. A Mantoue, il fréquente Monteverdi. A Londres il assiste à la première du Songe d’une Nuit d’été et collabore à la mise en scène d’Hamlet et fréquente Shakespeare. Un curieux parallèle s’établit entre le destin de Hamlet de celui du musicien.

Il croisera Rubens mais pas Montaigne bien qu’il emporte partout  le volume des Essais qu’on lui a offert. C’est d’ailleurs à Montaigne que l’auteur, Anne Cuneo fait référence dans le titre du livre Le Trajet d’une Rivière. C’est Claudialucia – grande amatrice de Montaigne – qui lève le mystère du titre. Je me demande toujours ce qui fait qu’un auteur choisisse un titre plutôt qu’un autre. Ce n’est que p. 543 que je trouve une allusion:

« Sur le frêle esquif de ma plume d’oie j’ai parcouru le long trajet entre Golden et Echallens. je me demande si je ne devrais pas profiter de ce que Dieu me donne force et vie pour, en une sorte de pèlerinage, le parcourir en sens inverse. […]Le moment est peut être venu de remonter la rivière de la vie en sens inverse »

Personnage romanesque, aventures inventées par le biographe? peut être pas tant que cela. Anne Cuneo s’est appuyée sur une longue étude des textes, des partitions, faisan t œuvre d’historienne. Dans un dernier chapitre, elle explique son travail. Et à la fin, une solide bibliographie permet d’étayer toutes les affirmations – ou presque….

 

Falstaff d’Orson Wells (DVD)

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J’ai rencontré Falstaff dans les Joyeuses Commères de Windsor (en lecture  commune avec Claudialucia et Maggie). Ce Falstaff est plutôt pitoyable, séducteur invétéré, balourd, capable d’écrire deux lettres identiques aux deux voisines. Ridicule avec sa bedaine. Borné, il tombe dans tous les pièges que lui tendent les commères. Caché dans un panier de linge salle on le verse dans la Tamise. Encore trempé, il mord à l’hameçon et retourne dans la maison du mari jaloux pour tomber dans un nouveau traquenard. Battu, il n’a toujours pas retenu la leçon et se trouve ridiculisé.

Le Falstaff de Welles est celui de Henry V, l’ami du prince, le compagnon de beuverie, toujours aussi bedonnant, mais jamais ridicule. Truculent, vieillissant, roublard, parfois menteur et vantard, profondément humain.

 

La pièce, les Joyeuses Commères, est une farce. Le film d’Orson Welles a une dimension historique. Le scénario emprunte ses répliques à plusieurs pièces de Shakespeare que le réalisateur connaît parfaitement.  Le propos n’est pas de faire une captation de Henry IV.

C’est un film, pas du théâtre! En plus des scènes tournées en intérieur, au Palais  ou à l’auberge, les scènes d’extérieurs sont remarquables.

 

 

 

Le vol du trésor royal dans la forêt ressemble aux films de cape et d’épée, on pense à l’attaque de la diligence d’un western. La bataille avec chevaux, armures, archets, duel est spectaculaire. Esthétique des images, rythme, je l’ai visionnée deux fois (le DVD permet cela!) et l’ai chronométrée : 10 minutes effrénées. Émotion dans la scène entre le vieux roi mourant et son fils. Émotion aussi au couronnement, mais je ne veux pas tout raconter.

La distribution est prestigieuse: Gielgud est royal, Jeanne Moreau étonnante, Marina Vlady charmante. Mais surtout Welles est Falstaff, il le magnifie, en  fait un personnage d’exception.

 

 

Shakespeare – Antibiographie – Bill Bryson

CHALLENGE SHAKESPEARE

 

 

 

 

Merci à Maggie qui a bien voulu faire voyager ce livre et dont le billet m’a donné envie de le lire! ICI

Difficile d’écrire quelque chose de nouveau après ce dernier article et celui de Claudialucia, très détaillé comme toujours : ICI

J’ai lu avec beaucoup de plaisir cette Antibiographie  réjouissante.

Tout ce qu’on sait vraiment sur Shakespeare!

et tout ce que les distingués savants exégètes du grand Will ont pu inventer!

Les archives, même dépouillées passionnément par un couple d’érudits, compulsées par des générations d’admirateurs, ne livrent que très peu de choses. Avec humour Bryson raconte  les tentatives de faire de Shakespeare un catholique, un plagiaire, un amoureux, ou au contraire un indifférent, mari fidèle, infidèle, amoureux des femmes, des hommes dans ses Sonnets… chacun y va de sa théorie et met en œuvre des méthodes plus ou moins contestables. On compte l’occurrence de certains mots, on note les invraisemblances. On étudie à la loupe des portraits (peints après le décès du Barde) des panoramas en y cherchant les théâtres (après qu’il fussent partis en fumée). On scrute ses signatures (qui sont peut être fausses…..) Le résultat de ces recherches est fumeux mais conté de manière très réjouissante.

Si je n’ai pas appris grand chose sur la personnalité du grand Will, ni sur les circonstances dans lesquelles ses pièces ont été créées. En revanche j’ai beaucoup appris sur la vie en Angleterre  de 1550 à 1623 (date de parution du folio qui réunit ses pièces sous le règne de la grande Elisabeth 1ère et sous Jacques 1er qui lui a succédé. Bryson ne s’attarde pas beaucoup à Stratford-sur-Avon mais donne une foule de détail sur la vie à Londres. Épidémies de peste récurrentes, quartiers de la City, vie quotidienne…Et surtout les théâtres : leur construction, leur administration, le répertoire, prix des places 1penny pour être debout, un supplément pour une chaise, un autre pour un coussin, sans compter l’achat des pommes cuites pour bombarder la scène….Je ne m’étais jamais demandée d’où venait l’expression de Box-office, Bryson dévoile  ce mystère : la caisse des recettes(box) mise à l’abri dans une pièce (office). Marlowe, Ben Johnson, et d’autres dramaturge moins connus sont évoqués. La vie des acteurs aussi! C’est une réjouissante leçon d’histoire anglaise que Bryson nous offre, n’oubliant ni les conflits religieux, ni la Grande Armada ni la Conspiration des Poudres.

J’ai un peu décroché vers la fin dans l’histoire du folio de 1623, trop détaillée à mon goût, Bryson est-il tombé dans les travers qu’il a dénoncés?