L’Hôtel du Bon Plaisir – Raphaël Confiant

LECTURE COMMUNE -SOUS LES PAVES, LES PAGES

« Ainsi vécut, trente-sept ans durant (1922-1959), un modeste bâtiment à l’origine destiné à soulager la
misère des guenilleux du quartier des Terres-Sainville, au beau mitan de Fort-de-France, capitale de la
Martinique, petite île à la topographie excentrique »

L’enseigne prête peut-être à confusion. Ce n’est pas un hôtel, encore moins un lieu de plaisir, mais un immeuble où habitent des « gens de bien ». Edifié  par trois soeurs « békées » trois célibataires, issues d’un couvent  au nom de « L’Hôtel de la Charité Saint François de Sales » afin de soulager la misère de ce quartier déshérité.  

« L’ex-avocat, nouveau propriétaire de l’Hôtel du Bon Plaisir, avait donc un roman en chantier. Un grand et
vaste roman. Celui des locataires, passés et présents, de son établissement. »

C’est donc ce roman qui se dévoile page après page. Il mêle les histoire de tous ces personnages et de leurs proches, histoires particulières, mêlée à la grande Histoire, celle de la Martinique, des souvenirs de l’esclavage, révolu depuis longtemps mais encore prégnant, jusqu’à ce que la Martinique ne devienne un département.

« Le soir venu, il notait tout cela dans des cahiers d’écolier dont les couvertures étaient de couleurs différentes. La rouge avait trait à Man Florine. La bleue aux sœurs de Lamotte. L’orange à Justina Beausoleil. La marron à Beausivoir, l’entrepreneur en travaux divers. La verte à Jean-André Laverrière, le clarinettiste. La blanche à Victorin Helvéticus. La jaune à la famille
Andrassamy. »

Un clarinettiste de jazz qui a joué au Bal Blomet. Un ancien instituteur décoré des palmes. Un entrepreneur. Une vendeuse de pistaches, ancienne charbonnière syndiquée à la CGT. Une famille indienne avec une nombreuse marmaille. Un avocat mulâtre. Un étudiant brillant mais un peu fou…un commerçant chinois… un gérant syrien …composent une société diverse ayant en commun le créole et une certaine déveine.

Des évènements à la limite du surnaturel surviennent, un incube vient importuner les femmes, deux meurtres non élucidés agitent la vie quotidienne de cette communauté où circulent les ragots et les jalousies, mais où la solidarité est la règle.

Au fond, si l’on considère l’Hôtel du Bon Plaisir comme un bateau, un paquebot plutôt, un paquebot échoué,
eh bien, mon naufrage n’est pas aussi absurde qu’il en a l’air. Dans cet immeuble bringuebalant se sont
rassemblés, comme par un fait exprès, des destins brisés, des existences secrètement gardées, des rêves
explosés ou tout simplement le plus terre à terre, le plus insignifiant des désarrois : celui de vivre sur une
terre où rien ne sera jamais possible. Que pourrait-on faire, en effet, d’une île où à la sauvagerie de
l’extermination des Amérindiens a succédé la barbarie de l’esclavage des nègres ? Deux tragédies
fondatrices, pontifie un penseur local qui vient de recevoir un prix littéraire à Paris ! Tu parles de
fondations ! Des fosses communes, oui. Ou plutôt des charniers à ciel ouvert. Du sang ! Du sang ! Voici les
cent pur-sang du soleil parmi la stagnation

Un roman très riche rédigé dans une langue pittoresque. J’ai pensé à Chamoiseau,  à Texaco où la vie d’un quartier est racontée. 320 pages qui se tournent toutes seules et vous emmèneront à la Martinique mais aussi à Paris pour votre plus grand plaisir. Seul bémol : l’enquête policière à la suite des meurtres reste en carafe. 

 

 

 

Gümri : francophonie

CARNET ARMÉNIEN

 

l’école francophone de Gümri

Jack et Tatev ont appris leur français parfait à l’Ecole francophone de Gümri. La directrice nous reçoit dans son grand bureau. Autrefois l’école regroupait les classes de la Maternelle jusqu’au Bac. Les effectifs ont fondu et c’est la dernière année qu’elle accueille les Terminales. Je viens de la part du Comité de Jumelage de Créteil, porteuse d’un projet d’E-twinning. Créteil n’est pas officiellement jumelée avec Gümri mais établi un partenariat. Les gens de Gümri se souviennent très bien de la visite de la délégation cristolienne et sont très demandeurs de coopération. Cependant e-twinning est un projet européen assez contraignant . Il faudra travailler dur si on veut le concrétiser.

En attendant, nous visitons l’établissement . Les Terminales répètent dans la Salle de spectacle la chorégraphie pour la fête de la « dernière cloche » (on pense à la chanson de Sheila !). Ils dansent sur la chanson « Aux Champs Elysées ». Sur la vitre de leur salle de classe ils ont déjà peint une cloche (symbole de la fin de leur scolarité) à la manière  des troufions,, une quille.

Grenadier dans le hall

Un homme en uniforme qui passe dans le hall attire ma curiosité : c’est l’instructeur militaire. Pendant 4 ans les jeunes suivent un enseignement de préparation militaire. Très aimablement il propose de visiter sa salle, conforme aux instructions, et identique dans tous les lycées arméniens.

Peinture verte styles camouflage (très discret) . Un mur est occupé par les photos d’un vétéran arborant ses médailles de la 2de guerre mondiale, dans une vitrine, ses effets d’alors, y compris ses chaussures de foot. Un autre mur est consacré à la guerre au Karabagh(avec la liste des victimes originaires de Gümri) Un placard grillagé et cadenassé renferme les armes.

Dans ce lycée il y a un cabinet dentaire.

A côté de l’entrée sont placardés les portraits des meilleurs élèves.

Tous les halls et couloirs sont décorés de panneaux illustrés et colorés. Beaucoup en français racontent les voyages en France, la Classe d’Eau (2003). Il y a aussi des exposés d’élèves sur Paris, la France mais aussi la Journée des Femmes et d’autres sujets…

A 15h, nous sommes invitées du club des Francophones SPFA qui se réunit dans les locaux du lycée sous la direction d’Arévik Mkhoyan. Nous admirons la bibliothèque qui réunit toute une collection de la bibliothèque rose et de la bibliothèque verte. L’animatrice déplore que la lecture n’est plus très fréquente chez les jeunes. Chacun se présente, la plupart sont des lycéens de 10ème et de 11ème. Ils viennent au club pour le Français, bien sûr, mais aussi pour la guittare et l’informatique. Il y a également une écoute psy pour les adolescents et le club accueille aussi des autistes. L’été il organise des colonies de vacances à Vanadzor. Tous ont entendu parler de Créteil. Deux jeunes filles y ont même séjourné.

Nous parlons de jumelage, de pédagogie. J’apprends qu’il existe un groupe d’enseignants retraités qui se consacre à l’enseignement du français à l’étranger (GREFE) cela pourrait m’intéresser…pour plus tard !

Comme les jeunes ne participent pas trop au débat – sauf Sona qui termine ses études de pédagogie –  la rencontre se poursuit en chansons : Zaz dont Charles nous trouve immédiatement une version karaoké, Aznavour, puis des chansons arméniennes. Arrive à point le guitariste du club qui chante  aussi. Thé ou café ?on promet de graver le DVD de souvenir et de leur faire parvenir en souvenir. Une après midi chaleureuse ! Les échanges se poursuivront-ils ? Sous quelle forme ? J’aimerais bien que notre venue contribue à transformer le partenariat Créteil/Gümri en véritable Jumelage. Mais je n’ai pas la main là-dessus, c’est au comité de Jumelage, à la Mairie….aux officiels. Je n’oublie pas que nous sommes de simples touristes.

par  Youtube, un souvenir du passage des jeunes de Gümri à Créteil l’an passé: