Le musée berbère de Monji Bouras à Tamezret

CARNET  DJERBA ET SUD TUNISIEN

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Notre programme étant chargé j’avale quelques dattes avant de me lancer dans le village de Tamezret à la recherche du Musée berbère de Monji Bourras sous la mosquée. La mosquée chaulée de blanc se voit de loin mais les ruelles forment un labyrinthe et je perds de vue le minaret. Des flèches à la peinture bleue me conduisent chez Mangi qui, prévenu par Patrick, nous attendait.

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Visite polyglotte, en Français, Anglais et Arabe. Sa maison est à moitié troglodytique : on a évidé la montagne en prenant appui sur un banc de roche épais et solide puis déblayé les matériaux qui seront utilisés pour les façades. On ne devine pas tout de suite que des grottes se cachent. Le moulin familial est à l‘entrée de la grotte, tout près le mortier, creusé dans le sol. Sur le linteau de la porte de la chambre,  Monji lit une inscription en langue berbère, apparentée aux langues celtiques, selon lui. Cette chambre est située juste sous la mosquée. Ici débouche un tunnel communiquant avec la maison voisine construite sur le même banc de roche. On a déblayé par le tunnel les roches plus minces entre plancher et plafond. Dans la Réserve, les provisions, surtout le grain, sont stockées ans des jarres géantes, si la conservation excède un an, il vaut mieux enterrer la jarre qui sera mieux isolée, la forme pointue d’amphore convient le mieux à ce mode de stockage.

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Le plafond de la cuisine est noir de suie, un système de collecte des fumées les conduisait à une cheminée parfois très éloignée des habitations enterrées, indétectables d’un ennemi éventuel.

Les Berbères achetaient parfois des esclaves noirs, leur donnaient leur nom de famille, leur devaient protection mais les esclaves n’avaient aucun droit à l’héritage et les mariages mixtes étaient proscrits. La chambre des esclaves se trouvait à l’écart, un tunnel leur permettait de fuir.

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Avant la conquête par les Arabes, les Berbères étaient chrétiens juifs ou animistes. On retrouve des traces dans la symbolique berbère après l’islamisation forcée. Le poisson, symbole de la multiplication, symbole chrétien, figure à l’entrée des maisons, les commerçants enterraient un poisson sous le seuil de la boutique pour attirer la prospérité. Une coutume dans le mariage est le saut au dessus d’un poisson, sept fois, mais le sept serait  un symbole juif.

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Les voiles des femmes portent ces symboles. Le drap de laine est d’abord trempé dans la chaux pour être ainsi feutré. Il est ensuite trempé dans la teinture jaune en premier, puis rouge puis indigo. On l’a noué à la manière du batik en des points précis pour obtenir des points rouges ou jaunes figurant 3 croix (le Christ et les deux larrons) ou les 4 éléments terre, feu, eau, air). Le voile est ensuite rebrodé/ La teinture est l’affaire des femmes mais les hommes brodent. On retrouve d’autres symboles syncrétiques, les zigzags pour la Trinité,  l’étoile de David…Une autre technique consiste à utiliser au tissage coton et fil de lin blancs. Le motif n’apparait qu’après teinture : le coton devient rouge tandis que le lin reste blanc.

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La légende de la Reine Berbère, la Kahina qui résista enfermée dans le Colisée d’El Jem est encore vivante dans les motifs de certains voiles et dans les parures de la mariée imitant les arches du Colisée.

Monji raconte avec passion la culture berbère, la langue berbère. Après la Révolution, son fils fut le premier enfant à porter un prénom berbère. Après la visite de la maison-musée, un plateau et une théière sont arrivées comme par magie. Un jeune couple reste, très sympathique. Lui est Irakien et vit à New York. Il parle Arabe mais a des yeux verts et une peau très claire : il est Turkmène. Monji le questionne sur la langue utilisée par les Turkmènes, sur la situation en Irak avec Daech. La conversation est amicale. Nous avons oublié que nous visitons un musée, devisons entre amis en sirotant un très bon thé aux amandes.

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Le soleil brille par intermittence. Sur la route du retour vers Matmata, des maisons blanches dans la montagne attirent notre attention. Une route y conduit, défoncée par endroits mais encore carrossable. Je découvre des troglodytes effondrées, d’autres discrets encore occupés, des jardins cachés, des palmiers. On arrive à un oued ? Surprise agréable, pas spectaculaire, un endroit paisible.

Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

6 réflexions sur « Le musée berbère de Monji Bouras à Tamezret »

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