Boukhara – Mausolée de Naqshbandy (1318 – 1389)

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Le mausolée de Naqshbandy se  trouve à l’extérieur de la ville de Boukhara.

Pour y arriver, nous dépassons la ville moderne très étendue, passons devant le grand parc dominé par un amphithéâtre pour les spectacles d’extérieur et une luxueuse salle de cinéma. De petits arbres ont été plantés sur les gazons, quand ils grandiront il y aura une véritable forêt ! Des vergers alternent avec ces nouveaux quartiers de maisons basses toutes pareilles, avec de petits centres commerciaux.  La vie de banlieue ?

Naqshbandi (1318-1389)

le puits
le puits

Le complexe religieux a été restauré en 2003 : entrée engazonnée, une rangée de pensée borde la pelouse. Aujourd’hui, vendredi, la foule se presse. Le portail ressemble aux iwans des mosquées, carreaux de majolique flambant neufs. Une allée dallée conduit à la cour où se trouve le tombeau du saint. Dès l’entrée, nous sommes saisies par la ferveur des pèlerins qui prient assis en fond autour du tronc d’un arbre – thuya ? –

Nassim nous fait un cours de théologie : 4 étapes caractérisent la vie spirituelle des soufis. La première est celle que chacun connait : la chaariat avec les 5 piliers : croire, faire la prière, le ramadan, l’aumône et le hadj à la Mecque. L’étape suivante taarikat exige du croyant qu’il fasse 5 fois la prière et qu’il étudie les sciences religieuses. La suivante ajoute les autres sciences aux sciences religieuses afin de pouvoir répondre à n’importe quelle question. La phase ultime Hakhriphat est l’état de vérité où l’âme peut se libérer du corps. Naqshbandy en atteignant cet état pouvait se trouver simultanément à Boukhara et à la Mecque. Quand des personnes de la Mecque venait le voir à Boukhara il les connaissait déjà. Cependant il est difficile de rester dans cet état.

grattant l'écorce
grattant l’écorce

Comme il revenait de la Mecque, ses voisins lui demandèrent ce qu’il avait rapporté : rien, sauf sa canne qu’il planta dans le sol ; il en sortit un mûrier. L’écorce de l’arbre séculaire était utilisée pour faire des amulettes. Maintenant l’arbre est mort, son tronc gis sous un autre mûrier, mais les pèlerins continuent à gratter de minuscules poussières d’écorce du vieil arbre avec leur ongles. Certains tournent 7 fois autour de l’arbre, se courbent pour passer en dessous. Autrefois, après avoir fait un vœu, ils accrochaient un chiffon, cette pratique est désormais révolue.

Tandis que Nassim semble adhérer à ces croyances, le guide Olizane écrit que le mausolée est le règne de la superstition. D’après Nassim, le soufisme de Naqshbandy est un Islam tolérant qui prône une croyance sans ostentation « croyant dans le cœur mais la main au travail ». Naqshbandy avait gardé son travail de graveur décorateur considérant qu’un imam devait avoir une profession pour gagner sa vie. Il oppose ce soufisme Naqshbandy au soufisme des Derviches tourneurs qui tournent, crient, hurlent leur foi et ne font rien d’autre.

Le tombeau est signalé par une touffe de yack suspendue à une hampe. Près du tombeau, dans la cour, se trouve également un bassin dont l’eau était potable (ou les gens moins regardants), maintenant, les gens tirent l’eau du puits et viennent se servir au robinet.  Comme nous l’avons vu déjà, le tombeau d’un saint est un lieu privilégié pour être enterré afin d’obtenir, dans la vie future, la protection du saint. Les souverains cheybanides sont enterrés non loin et un grand cimetière jouxte le mausolée

 

 

Boukhara – maison-musée Khodjaev

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Maison-musée Fayzoulla Khodjaev (1896-1938)

 

Faizoulla Khodjaev
Faizoulla Khodjaev

Fils d’un riche commerçant d’Astrakhan, ami de l’émir, Fayzoula part à Moscou faire ses études. Il propose ses services aux djerid et fonde e 1916 le Jeune parti de Boukhara. Il revient en 1920 après la fuite de l’émir. L est alors promu Chef de la République Populaire de Boukhara (d’après Olizane, Nassim a une autre version).

la table d'hiver, le brazero est caché
la table d’hiver, le brasero est caché

La maison familiale est un véritable palais avec une double cour, la cour des Hommes ouverte sur l’extérieur et sobre, la cour des Femmes beaucoup plus fastueuse dont on visite les appartements meublés. Dans le premier salon, on a dressé la « table d’hiver » sous la quelle on pouvait glisser un brasero. Le tout était recouvert d’une couverture mate »lassée. Chacun pouvait y glisser les pieds et se réchauffer. La « table d’été » était beaucoup plus basse. Traditionnellement, les Ouzbeks ne possèdent pas de meubles. Ils vivent par terre sur de somptueux tapis. Une nappe, un plateau remplace souvent la table basse qu’on peut débarrasser ensuite pour dérouler les matelas pour dormir. Les matelas minces, ou plutôt couvertures matelassées, en riche brocard étaient rangées dans l’épaisseur des murs des maisons anciennes. Ces murs épais garantissaient une bonne isolation du froid ou de la canicule. Ils étaient évidés pour faire des niches de rangement ou des vaisseliers. Plus récemment, comme dans la maison Khodjaev, on a acheté des coffres pour ranger la literie. Le coffre est recouvert de cuir fin.
Une autre pièce est encore plus richement meublée : la table basse longue est appelée « table royale » : khan takhta. Un « berceau d’été » est ouvert. Les objets existent presque tous en deux versions « hiver » ou « été » ce qui m’étonne toujours.
On cuisinait dans un bâtiment annexe, en contrebas de l’estrade. L’été, pour les fêtes on pouvait aussi utiliser une énorme marmite dans la cour. Le foyer en terre était rapidement construit. Dans la cuisine les petites marmites étaient posées sur de petits foyers de terre au sol.. Dans un coin, le four a pain a une curieuse ouverture de travers. Le feu était alimenté par au dessous. Quand les parois d’argiles sont chauffées à blanc on plaque les pains préalablement enduits à l’eau salée sur l’envers et à l’eau douce sur l’endroit, décoré par un tampon à pointes qui perce des trous pour empêcher le milieu de gonfler. J’ai vu cet objet au marché mais j’avais cru qu’il était destiné à carder la laine. Il serait bien utile quand on fait des tartes salées dont nous cuisons le fond au préalable avant de le garnir. On met du sel ou du riz, les trous seraient plus pratiques.

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La salle de banquets peut être louée par des voyagistes pour y organiser des spectacles. Sur u portant sont suspendues des robes de soieries des manteaux et même la parandja noire en crin de cheval, version ouzbek du tchador. Dès que les femmes sortaient de la cour, elles devaient revêtir un grand manteau qui les faisait ressembler à une tente, les manches ‘étaient pas enfilées ; cousues ou attachées elles désignaient une femme mariée, libres une jeune fille ; au bas des pantalons les femmes mariées cousaient une broderie. En 1925 les femmes ont brûlé la parandja sur la place Reghistan (Ella Maillard raconte qu’elle a vu le tableau de Benkov racontant cet épisode). Des photos anciennes de la famille complètent la décoration. Autrefois, d’après Nassim, les sunnites refusaient d’être photographiés.

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« Uzbek paranja2 » by Khushal.Khan.Nurzai – Own work. Licensed under CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons – http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Uzbek_paranja2.jpg#/media/File:Uzbek_paranja2.jpg

Une exposition 1935 rappelle cette année terrible pour les Ouzbeks. L’intelligentsia ouzbèke fut décapitée. En 1937, Khodjaev qui s’était insurgé contre la monoculture du coton « le coton ne se mange pas » , est arrêté par Staline. Un panneau détaille le nom et le nombre des victimes par famille. En faisant la simple addition, j’arrive à 70. Privé de ses dirigeants et de ses intellectuels, le peuple ouzbek « pouvait se laisser conduire comme des moutons ».

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Ce musée en l’honneur de Khodjaev a ouvert en 1990, un an avant l’Indépendance. Pendant la Perestroïka , l’Ouzbékistan a senti le souffle de la liberté. Selon Nassim, Gorbatchev est très apprécié ici (et mal vu en Russie).

Boukhara : une journée libre, synagogue, tapis, cigognes…..

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trictrac sur les tapis
trictrac sur les tapis

La perspective de ne rien avoir à visiter de précis m’enchante. Flâner, ne prendre ni photos ni notes, regarder les étals des marchands, retourner sur des sites visités avec le guide. J’adore ces révisions qui me permettent de retrouver des lieux, me les « approprier », les contempler à loisir plutôt que d’accumuler des connaissances éphémères.

Synagogue

Juif boukhariote peint par Benkov
Juif boukhariote peint par Benkov

La plupart des Juifs Boukhariotes ont quitté le quartier Juif en 1991, pour Israël ou ailleurs. Les ruelles sont très tranquilles : un caniveau central court, fine rigole de 5 cm dans le ciment, dans cette ville où il pleut si peu. Les gens du quartier nous guident vers la synagogue : une porte en fer, une cour. Sous un auvent deux hommes jouent au chech- bech . Une homme sans âge portant kipa parle hébreu. Il m’introduit dans la synagogue toute simple , bois laqué crème, velours sans ostentation.

  • « Reste-t-il des Juifs ici? »
  • « assez pour un minyan! »

Au moins dix hommes, l’office est célébré mais la Communauté est mince ! L’homme essaie de me vendre des CD. Nous partons, oubliant la donation qu’il réclame dans la rue à grands cris ! J’aurais dû laisser quelque chose.

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merci à l’auteur :http://international-photographer.com/fr/roadtrips/ouzbekistan-2010/jour-4.htm

 

 

Khanaka Nadir Divan-Beghi

Le khanaka est ouvert à la visite. Le grand espace vide où tournaient les derviches, est maintenant bien encombré par les vitrines d’une exposition hétéroclite de vaisselles, décors de maisons, photos et une maquette de la vieille ville. Nous nous attardons devant les photos anciennes : ‘une d’elle montre la place Reghistan grouillant de marchands et d’acheteurs si différente de l’esplanade vide que nous avons visité hier.

Mosquée Magori Attori – Musée de tapis

Dans la pénombre de la petite mosquée, les tapis sont déroulés, suspendus. De petites étiquettes renseignent de  la provenance ou de l’époque (19ème – 20ème siècle). Je suis déçue par la qualité. Les tapis du Grand Père sont plus beaux.

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avec la permission de l’auteur :http://international-photographer.com/fr/roadtrips/ouzbekistan-2010/jour-4.htm

 

De  la coupole du bazar des fourreurs,  après  le hammam 16ème siècle ouvert aux touristes, une rue moderne est bordée de grandes boutiques modernes de marchands de tapis, aux commodités occidentales (ordinateur et Carte Bleue). J’annonce d’entrée que je ne vais rien acheter que je possède des tapis persans et que je viens « pour le plaisir des yeux » . Le marchand est plutôt intéressé « voulez-vous les vendre ? ». Devant ma dénégation, il conclut « les tapis iraniens du 19ème siècle, il ne faut pas les vendre, il faut les garder pour les générations futures. « .

Plus loin, un bâtiment ancien (caravansérail ? mosquée ? ou marché ?) est entièrement consacré aux tapis anciens et aux susanis . Ici aussi, les vendeurs sont très amicaux et pas insistants. Je peux filmer à ma guise, traîner, comparer. Evidemment il n’y a aucun prix, ni indication de la provenance. Je demande si les tapis rouge au motif « boukhara » s’appellent ici aussi Boukhara, oui !

Berceau ouzbek avec l'emplacement du petit pot
Berceau ouzbek avec l’emplacement du petit pot

La rue conduit au Toki marché) Zargaron (des bijoutiers) où nous avons acheté des épices et où Nassim nous a expliqué les « canalisations du pipi » des bébés : on attache le bébé dans un berceau en bois décoré de nombreux anneaux rouges. Le berceau est mobile, on peut bercer facilement l’enfant. Sur le plancher du berceau, il y a une ouverture ronde de la taille du petit pot ; un tuyau en bois comme une petite flûte, garni d’un tuyau pour els petits garçons, d’une fente allongé pour les filles. Le pipi s’écoule dans le pot ; Le bébé n’a pas besoin de Pampers. La condition est que le bébé reste bien tranquille. Cette pratique qui me paraît médiévale est encore en activité. Je demande à Nassim : « on t’a mis ça ? » – « oui et mes fils aussi ! » répond-il.

Décor madrasa Oloug Beg
Décor madrasa Oloug Beg

Nous arrivons donc sur la petite place entre les deux madrasas d’Oulough beg et d’Abdul Aziz Khan. J’évite le piège des marchande d’Oulough Beg. Je n’ai pas les moyens d’acheter le grand sosani. Dans la Madrasa d’Abdul Aziz Khan on trouve toutes sortes de marchandises du magnet à la miniature, du T-shirt au tapis. Toutes les marchandes sont sorties devant la madrasa et poussent de grands cris « Les cigognes ! ». Un vol tournoie autour de la madrasa (Une bonne soixantaine, de retour de la migration. Elles ne se poseront pas sur le nid au sommet du minaret, leur apparition a été éphémère ; Depuis qu’on a vidé la plupart des bassins dans les années 30 à al suite de l’épidémie de bilharziose elles ont déserté Boukhara. Les cigognes nous ont porté chance.

les cigognes planent au dessus de la madrasa d'Ouloug Beg
les cigognes planent au dessus de la madrasa d’Ouloug Beg

Juste après, j’ai trouvé la veste brodée de mes rêves à ma taille. La coupe est ajustée. Il me faut une petite taille à cause de la carrure d’épaules, mais il faut aussi que cela ferme devant. J’en essaie plusieurs avant de trouver la bonne.  On marchande un peu. Devant le bassin, le marchand en demandait 60€, ici 55€.

  • « c’est trop pour ma bourse ! »
  • « combien voulez vous en donner ?
  • -« 40 ! »

Ils sont très contents (trop peut être, on aurait dû demander 30). C’était le prix que nous nous étions fixé.

les marchandes devant la madrasa
les marchandes devant la madrasa

Nous essayons de suivre une promenade du guide Olizane mais personne ne connait. Tous nous envoient à la citadelle Ark. On aurait pu y visiter le Musée Historique fermé mardi. Il est bientôt l’heure de déjeuner. Nous amorçons le retour au jugé par un raccourci derrière le Grand Minaret et aboutissons aux marchands de tapis.

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Sadriddin Aini

 

Non loin du restaurant près du Bassin, se trouve la Madrasa Kokeldasti, peu visitée, peu restaurée. Elle a servi du temps des Russes d’entrepôt pour les engrais chimiques et d’école russe. La cour est occupée par un jardin planté de rosiers et de vignes. Des coquelicots fleurissent, c’est très calme. Dans un coin, la cellule d’un poète, relique d’un petit musée soviétique consacré à Sadriddin Aini.  . Ce poète était révolutionnaire, une photo montre son dos lacéré par le fouet sur ordre de l’émir. La cellule est meublée, tapis et couvertures. Une autre cellule est aménagée en exposition de photos, livres, portraits . Visite en russe par une dame très aimable, je ne saisis que quelques mots. Ce soir les deux français russophones m’expliqueront que ce poète est oublié d’abord parce qu’il était communiste et ensuite parce qu’il écrivait en tadjik et non en ouzbek.

Même menu qu’hier au restaurant du bord du Bassin mais une bonne surprise : on nous apporte la facturette, la « quittance » en russe, c’est beaucoup moins cher que nous l’avions calculé : 27000 soum avec le vin.

Galerie d’art

Benkov
Benkov : caravansérail

Dans un bâtiment du 19ème  de style russe, en brique avec de grandes fenêtres et des cours intérieures, la Galerie présente une exposition temporaire des peintres de la ville, des collections permanentes, et,en bas, des salles hétéroclites. Je suis la seule visiteuse, les gardiens sont nombreux. Une dame m’accompagne, déverrouille la grille et allume parcimonieusement les lampes le long de mon passage.

Un peintre sort du lot : Benkov qui peint les rues colorées de Boukhara autour de 1929, une topnnelle en automne et le portrait d’un juif boukhariote. Kurzin peint également des portraits de Tadjiks. Christov peint els rues de Khiva l’hiver et des paysages de neiges. Il y a aussi des chromos soviétiques de « paysage industriel », « ouverture d’une route » ou « récolte du coton », « transhumance ». j’ai peu de goût pour le réalisme socialiste mais cela renseigne sur la vie d’alors. En revanche une « récolte des pastèques » de Lunev me plait bien.

Défense de photographier ! Mais la dame est gentille, je peux donc mettre dans la boîte le Juif et un caravansérail de Benkov. J’ai eu la belle surprise de lire qu’ Ella Maillart avait vu Benkov peindre le 8 mars au Reghistan  à Samarcande quand les femmes ont brûle la parandja de crin noir. Qu’est devenu ce tableau, symboliquement il m’importe beaucoup, même si je ne l’ai jamais vu.

Les peintres contemporains sont moins intéressants : déconstructions cubistes colorées ou inspirations surréalistes rappelant de Chirico. Je retiens deux noms Razzakov et Avezova.

Au rez de chaussée les expositions passent du coq à l’âne : série de belle photographies en couleur, animaux empaillés poussiéreux, pour finir par un inventaire des productions industrielles : photos d’usines, flacon des diverses qualités de pétrole, portrait du Président Karimov agrémenté de slogans en vert, bleu et blanc, les couleurs de l’Ouzbekistan.

Caravansérail : galerie d'art et de photos
Caravansérail : galerie d’art et de photos

De l’autre côté de la rue, un caravansérail est occupé par deux galeries d’art, ouvertes mamis obscures. Personne n’arrive à ma venue pour allumer la lumière.

Nous passons les heures chaudes sur notre takhtan – banquette aux coussins dorés – Akbar vient me proposer « a cup of tea » avec un accent très britannique. A Boukhara ce n’est pas une tasse mais une théière ventrue bleue en porcelaine aux motifs fleur de coton que je vide petit à petit. Il apporte ensuite un dossier présentant l’Hôtel Hovli Poyon « where the emir used to stay ». J’en traduis rapidement l’essentiel :

Au milieu du 19ème siècle, un jeune Bek – noble – marchand du nom d’Urganchi, construisit pour son usage personnel et sa famille, une grande résidence dans ce qui est actuellement la vieille ville de Boukhara. Pour l’inauguration de la maison, il invita l’émir qui exprima son admiration pour l’architecture originale, le mélange de stuc et bois. Il fait aussi savoir qu’une telle splendeur ne revenait qu’à l’émir. Urganchi compris le message sous-entendu et répondit vivement : « Votre excellence, cette maison n’a pas été construite à ma seule intention ; toute cette beauté est en votre honneur, pour vous seul. » L’émir Akhad Khan fut satisfait, il enleva son manteau, le drapa autour des épaules d’Urganchi avec es insignes, les bijoux et toutes les distinctions et proclama « A partir de maintenant Hovli Poyon doit être considérée comme la Résidence Basse tandis que la citadelle Ark est la Haute résidence »

En 2011, Hovli Poyon fut restauré.

Vers l 18h, la grosse chaleur s’est estompée. Nous partons nous promener dans le quartier Juif suivant les indications du Guide Olizane. Les curiosités signalées dans le guide ont disparu. Partout des chantiers abattent les vieilles ruines, et reconstruisent derrière les murs.

Nous retrouvons notre table autour du bassin, renouvelons les consommations de la veille sauf que je remplace les parfums « aux fruits » bien chimiques et pleins de colorants par vanille et chocolat. Brusquement les grandes eaux, de puissants jets, s’élèvent dans le bassin. Avec le vent, nous sommes éclaboussées. La nuit tombe, le vent se calme mais le miroir qui reflétait hier la Khanaka est brisé, la lune est cachée par les nuages. Nous écourtons la soirée pour retrouver le calme de la cour de Hovli Poyon.

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Une table est dressée sur l’estrade. Le couple de Français russophone est attablé devant des raviolis parsemés d’aneth et d’herbes fraîches. Ils m’invitent à les goûter. Akbar apporte une chaise, une soucoupe et trois raviolis (mantys), excellents. Les deux jeunes travaillent à Moscou et parlent donc très bien le Russe ; Ils se débrouillent seuls sans guide. Leur conversation est très instructives. D’après eux, Boukhara serait une ville takjik, les gens préfèrant parler russe qu’ouzbek. Ils ont été invités à partager le repas d’inconnus chez eux. Privilège de parler Russe : mes 14 leçons du « Russe tout de suite » ne suffisent pas. Nous passons une bonne partie de la soirée à converser, de voyages, de la Russie, des pays de l’ancienne Union soviétique….

 

 

Boukhara – Au bord du Bassin et Mille et unes Nuits

CARNET OUZBEK

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Déjeuner sur le bord du bassin

Nous nous attablons dans le restaurant que j’avais négligé hier, rendez vous des touristes européens avec leurs guides mais aussi des familles ouzbèkes ; la plupart commandent des spaghettis sauce tomate avec des œufs frits, plat peu onéreux qui ne me dit rien. Nassim commande de l’ayran qui me fait envie mais me le déconseille : il est coupé avec l’eau du robinet. Je choisi du plov et Dominique des « côtelettes » qui sont des boulettes d’agneau haché très douces. Le plov est fait de riz long un peu gras, caché sous des carottes en longues lanières et des raisins secs. Les morceaux de viande en cube sont sous les carottes. C’est roboratif, gouteux et cela tient bien au corps.

En rentrant à l’hôtel,  nous passons devant un bassin où se baignent de jeunes gens. Nous passons une après midi tranquille sur les banquettes de l’auvent. Les coussins dorés et les stucs incitent à la paresse. Je prends du retard dans mes comptes-rendus ! Trop tentées par la cour nous ne faisons pas de vraie sieste.

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colonnes doubles, papillons zoroastriens de la mosquée Magori Attori

 

17h, la visite recommence par le bazar des changeurs Toki Sarrefon sous la coupole où est installé le miniaturiste. En se dirigeant vers l’hôtel Asia, nous découvrons la petite mosquée Magori Attori (12ème – 16ème ) qui ressemble un peu au Mausolée Ismaïl Samany : pas de versets du coran, des symboles zoroastriens. Un temple zoroastrien se tenait à proximité et fut détruit par les arabes. Les 2 colonnes doubles peuvent être interprétées comme symbole des 4 éléments. Comme le mausolée Samany, la petite mosquée fut ensablée avant l’arrivée des Mongols. Le sable a bien conservé la décoration Tamerlan lui a ajouté une coupole. A l’intérieur se trouve maintenant un Musée des Tapis.

Non loin de là, en face de l’Hôtel Asia, des fouilles archéologiques ont mis à jour les fondations d’un hammam et un caravansérail. Les archéologues ont rehaussé les fondations, rien n’est reconnaissable< ;

Un  peu plus loin : le Bazar des chapeaux Telpak où se tient le marché de l’Astrakhan. A Boukhara l’Astrakhan s’appelle karakul (lac noir) ce sont les Russes qui l’appellent Astrakhan dont la région froide importe des toques et des fourrures.

Bassin Labi Khaouz

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madrasa Divan Beghi : deux simurghs, encadrent le soleil de la connaissance, dans leurs serres, des hases

 

Il est encadré par 3 madrasas et un khanaka, 4 monuments magnifiques.

La madrasa NadirDivan Begi est cachée par des arbres immenses dans un petit parc gazonné où Nasreddine Hodja en bronze sur son âne est le centre d’intérêt des familles qui viennent se faire tirer le portrait. Nadir Divan Beghi était ministre des finances. Il avait conçu l’ensemble madrasa et khanaka qui portent son nom. Au départ il avait prévu un caravansérail qui devait lui rapporter des bénéfices. L’Emir a trouvé que » le bâtiment était une très belle madrasa ». Nadir Divan Beghi n’eut plus le choix que de contenter le désir pieux de l’émir. Madrasa et caravansérail sont conçus selon un même plan : une cour carrée et des cellules ou chambres pour les caravaniers, à l’étage, au rez de chaussée des entrepôts. La façade est décorée de deux grands oiseaux, phoenix ou simurgh, un soleil et plus curieux encore, des animaux étranges mi-chiens, mi-cochons , le guide Olizane précise que ce sont ds hases. Comme je m’étonne de la représentation d’êtres vivants, Nassim explique qu’au 16ème siècle les Chiites étaient alors nombreux et qu’ils étaient plus enclins à la décoration figurative. Le Phoenix représenterait la paix, le soleil, le savoir universel qui éclaire le monde, les étudiants seraient figurés par des animaux.

 

En face de la madrasa Nadir Divan Begi, le khanaka Nadir Divan Begi se reflète dans l’eau du bassin. Le Khanaka était l’ »hôtel des derviches » qui ne pouvaient être hébergés dans les caravansérails avec ls marchands parce qu’ils prient,  tournent toute la nuit et ne dorment pas. Deux petites tourelles rondes encadrent sa façade décorée de majoliques bleues à entrelacs géométriques surmontés d’un bandeau d’écriture coranique. Cinq mûriers rompent la symétrie

.

Les deux autres côtés du quadrilatère sont construits d’une part d’une série de boutiques, caravansérail, d’une part, de l’autre un restaurant borde le bassin tandis que la grande madrasa Kokel Dash (16ème s) est cachée derrière des arbres.

La madrasa Kokel Dash, pendant la période soviétique fut utilisée pour stocker des engrais chimiques puis comme école russe.

Le bassin a lui-aussi une légende : sur son emplacement une femme juive possédait une maison (le quartier juif est tout près). Elle ne désirait pas se défaire de sa maison. L’émir fit creuser au tour un canal et la maison s’effondra du fait de l’humidité. La juive vendit alors le terrain à condition qu’on construise une synagogue.

Les Mille et unes nuits

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Spectacle folklorique et présentation de couture dans la Madrasa Nadir Divan Beghi

Tous les soirs, à 18h, pour 25€ on peut y assister en dînant devant les danses ou prendre le thé (12.5€). les tables des dîneurs sont mieux placées. Ce spectacle est la surprise du jour. Sur le coup, nous décidons d’y aller, notre table est au deuxième rang. Si on se lève on pourra filmer.

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Le cadre de la madrasa est somptueux, l’atmosphère très détendue. Sur notre table avec la théière bleue nous trouvons une assiette de  bonbons fondants blancs à grignoter pendant le spectacle. Les musiciens sont assis sur une rangée de sièges : 3 joueurs de tambourin (qui feront une démonstration), un flûtiste (Ney), un violoniste « debout » – le violon est debout sur sa cuisse, un gense de psaltérion et un instrument à corde (rebab ?).

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Les danseuses revêtent des costumes des Mille et Unes Nuits : costume jaune avec une traine blanche attachée à la toque, manteau serré comme une redingote vert, et même à la fin, manteau de brocart orange faisant ressembler la danseuse à une tente cachant la danseuse habillée de grenat quand elle se dépouillera du manteau. Les mouvements de mains et d’épaule, très souples et très sophistiqués rappellent les dans es indiennens ; les bras ondulent, les poignets se cassent, parfois la danseuse s’immobilise et seules les mains sont en mouvement ; puis une pirouette, un tourbillon et les danseuses virevoltent. Folklore ou danse de cour ? On s’imagine invitées de l’émir.

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Des défilés de mode entrecoupent le spectacle. Cinq mannequins très grandes et très minces comme tout mannequin contemporain, quatre d’entre elles sont blondes et semblent être russes. Les robes, vestes et manteaux sont proposés à la vente. La coupe en est moderne. Il s’agit de vêtements que l’on peut porter, non pas de la Haute couture pour les stars. Les mannequins perchées sur de hauts talons actuels, parfois sont bottées de cuir souple. On ne s’ennuie pas une minute.

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A 19h15, nous prenons place à la tchaikhanna sur le bord du bassin, commandons des glaces, regardons le soir tomber et les lumières s’allumer. La façade du khanaka est comme une scène de théâtre où les ombres des passants dansent. L’eau est un miroir où se reflète le khanaka comme un palais des Mille et une Nuits. Les mûriers se détachent noirs sur la façade dorée. Dans la nuit noire comme du velours, un mince croissant de lune apparaît, féérique. Boukhara dans toute sa splendeur. Nous terminons la soirée à guetter les étoiles sur les banquettes de notre palis Hovli Poyon. Les banquettes de bois garnies de coussins dorés invitent à s’y cocher, s’y lover, s’agenouiller devant la petite table pour écrire. On regarde les étoiles, je lis Le Monde sur mon téléphone puisque il y a la Wifi au pays des 1001 nuits !

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D’humeur flemmarde je renvoie la rédaction du journal de bord à demain « journée libre ».

Boukhara – Mosquée Madrasas et Bazar

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entrée de la grande mosquée
entrée de la grande mosquée

Ensemble Poyi Kalan (au pied du Grand minaret)

Edifiée en 1127 par l’Emir karakanide Arslan Khan, la Mosquée du Vendredi pouvait contenir 12000 pratiquants, elle fut reconstruite par Tamerlan pour en rassembler 15000.

Décor de brique du Grand minaret
Décor de brique du Grand minaret

En 1220 Gengis Khan pénétra dans la Mosquée à cheval et la ravagea. Il voulut monter en haut du Minaret,  perdit son couvre-chef et dut se pencher. Il épagrna donc le minaret qui lui avait résisté et fait courber la tête. C’est le seul monument de la ville qui ne fut pas détruit par les Mongols.Huat de 47 m, sa seule décoration est l’agencement des briques.

L’émir Chaybanide reconstruisit la mosquée de Tamerlan à l’identique ;

la cour immense de la mosquée
la cour immense de la mosquée

Cette mosquée est immense. Sa décoration de briques vernissée rappelle un peu le canevas au point de croix. Les 4 Iwan sont ornés d’inscriptions du Coran et les coupoles vernissées de turquoise. Les arcades chaulées de blanc sont très sobres. Au fond le petit pavillon des ablutions cubique est élégant. Quand on se retourne on découvre les deux dômes turquoise qui brillent dans le soleil.

Bazar Taki Zargaron

instruments de musique u Bazar
instruments de musique u Bazar

C’est le Bazar des bijoutiers, quater axes convergent sous une haute coupole. Les boutiques sont installées dans les passages ; chez le bijoutier on voit les lourds bracelets indiquant le rang social de celle qui les portait. Un objet amusant : la sucette en argent qu’on remplissait de sucre, une chaînette en argent la reliait à un bracelet pour éviter que le bébé ne la perde. Le ferronnier façonne de curieux ciseaux qui imitent la silhouette d’une cigogne, ciseaux pour la broderie qui découpent des festons. Une autre spécialité boukhariote est un couteau à double manche et à lame unique – un peu trop grand pour moi !

Le marchand d’épice nous fait goûter une tisane parfumée à la menthe, la badiane et le safran, délicieuse mais je préfère renouveler les épices pour grillades je viens de terminer le mélange acheté à Gumri avec lequel je parfumais les grillades de porc. Impossible d’avouer cette finalité ; les Ouzbeks sont tolérants, ne bannissent ni bière ni vodka qui se trouvent sur toutes les tables des touristes ; mais il ne faut pas exagérer !

Madrasa d’Ouloug Beg (1536)

Décor de la Madrasa d'Ouloug beg
Décor de la Madrasa d’Ouloug beg

Le bazar s’ouvre sur une esplanade où deux madrasas se font face, celle d’Ouloug Beg, le petit fils de Tamerlan, le Prince astronome, mathématicien dont la façade est sobre. Deux bandes verticales bleues, une corde torsadée sur le rebord de l’Iwan, des briques vernissées dessinant des motifs sobres.

Madrasa d’Abdul Aziz Khan 1652)

majoliques en tapis de prière aux motifs délicats

L’Iwan est couvert de majoliques fleuries en forme de tapis de prièreaux stalactites de stucs colorés. Adul Azziz est mort avant la fin des travaux, sa madrasa est restée inachevée.

Un nid de cigogne coiffe le minaret. Autrefois els cigognes étaient nombreuse dans Boukhara. Elles trouvaient dans les nombreux bassins grenouilles et insectes pour leur pitance. L’assèchement des bassin a chassé les cigognes vers d’autres lieux.

Les madrasas ont toutes le même plan : une cour carrée, une mosquée, une salle des examens. Les deux sont investies par les marchands qui vendent des magnets 1€, ds T-shirt 5€, des sacs très dorés pour els touristes ouzbeks mais aussi des miniatures de magnifiques suzanis, ces étoffes de soie ou coton brodés de fils de soie aux fleurs et grenades  Dans la mosquée de la madrasa d’Ouloug Beg, la marchande qui prélève 2000 soums pour allumer la lumière me propose un discount sur un grand suzani qu’elle propose 200€, pour moi ce sera 150€ si je reviens.

Boukhara : Mosquée du Vendredi – Reghistan – citadelle Ark

CARNET OUZBEK

Mosquée du Vendredi près du bassin
Mosquée du Vendredi près du bassin

Mosquée du Vendredi Bolo Khaouz (à côté du bassin)

Elle est aussi appelée mosquée des 40 colonnes bien qu’elle n’en possède que 20 qui se reflètent dans le grand bassin octogonal. C’était la mosquée royale, face à la citadelle Ark. Chaque vendredi on déroulait les tapis é travers la place Registan ; la cour se déplaçait pour la prière. Les chapiteaux des colonnes sont sculptés formant des stalactites . le plafond est de toute beauté.

L’intérieur de la mosquée est plutôt sobre ; Les Sunnites évitent de décorer trop leurs mosquées pour ne pas être distraits tandis que les chiites ont plus le goût du décor. La présence de chiite explique le décor ; autour du mirhab peint de fins motifs.

A l'intérieur de la mosquée du Vendredi
A l’intérieur de la mosquée du Vendredi

Près du bassin, une hideuse tour métallique défigure la place, il s’agit d’un château d’eau qui était là quand Ella Maillart visita la ville en 1932.

Citadelle Ark

la citadelle Ark s'ouvre sur le Reghistan
la citadelle Ark s’ouvre sur le Reghistan

La place Registan se trouve – comme à Khiva – au pied de la citadelle et était le siège d’évènements importants, fêtes , bazar et exécutions. Le souverain assistait du haut des murs sous une petite coupole métallique tandis que les femmes se tenaient sur la galerie entre les deux tourelles gardant l’entrée de la citadelle.

La citadelle fut bombardée par les Russe en 1920, puis incendiée. Les remparts ont été remontés mais seulement 20% des bâtiments ont été restaurés.

On monte par une rampe couverte abritant des vitrines contenant des animaux empaillés, des armes et cottes de maille, différents vases…on arrive à la mosquée : mosquée d’été sous le péristyle, mosquée d’hiver à l’intérieur. La salle de réception occupe une vaste cour. Le trône d’or et de pierreries qui était au fond a été emmené en Russie. Il faut imaginer le sol recouvert de riches tapis turkmènes. Un frontispice cache l’entrée pour que le passage vers les écuries et les autres bâtiments ne perturbe pas la séance royale et aussi parce que l’étiquette ne permettait pas qu’on tourne le dos à l’émir (sous peine d’exécution capitale) les invités marchaient donc à reculons jusqu’à cette limite.

Barbe blanche à la Citadelle
Barbe blanche à la Citadelle

Sous la cour, deux lions de marbre gardaient la Trésorerie (il en reste un). Vingt wagons furent remplis pour être emportés en Russie mais l’émir dans sa fuite en Afghanistan emporta assez de richesse pour se construire un palais à Herat. Dans la salle des Salutations, les 3000 habitants de la citadelle venaient chaque matin apporter leurs respects au khan.

les remparts de la citadelle
les remparts de la citadelle

Nous marchons le long des murs bombés pour arriver à un marché : marché de l’or où l’on vend aussi des tapis. Bijoux de mauvaise facture, ce n’est pas la Place Vendôme ni le Bazar d’Istanbul ! les tapis, souvent modernes (il y en a même un très grand aux figures de Disney) n’éveillent aucune convoitise.

Boukhara – Mausolées d’Ayoub et d’Ismaïl Samany autour du Parc des Samanides

CARNET OUZBEK

 

mausolée chasla Ayoub
mausolée chasla Ayoub

Mausolée Chasla Ayoub

AyoubJob, aurait sauvé les habitants d’une terrible sécheresse. Il aurait fait jaillir une source en frappant le sol de son bâton et serait mort à Boukhara. D’autres villes revendiquent son tombeau. Le mausolée aurait été construit en 3 étapes : au 12ème siècle, une première salle sous une coupole conique, au 14ème Tamerlan ajouta une deuxième, puis les Chaybanides au 16ème . Le cénotaphe attire de nombreux pèlerins qui viennent boire l’eau.

gourde de cuir
gourde de cuir

On y a installé un Musée de l’eau avec des maquettes, d’une réserve d’eau couverte à côté d’un caravansérail (que nous visiterons) protégeant l’eau potable de la poussière. Des cartes expliquent l’alimentation de Boukhara par deux fleuves le Zaravchan (750km venant des montagnes du Tien chan et qui se perd dans le désert, son eau est douce et l’Amou Daria dont l’eau est légèrement saumâtre. Une carte montre l’emplacement des Hammams de Boukhara, l’un d’eux, encore en activité,  date du 16ème siècle. Enfin, carte des 114 bassins que comptait la ville où les habitants trouvaient de l’eau potable, et qui rafraîchissaient l’atmosphère de la ville. En 1935, une épidémie de bilharziose causa la fermeture des bassins. Ella Maillard qui visita la ville en 1932 les trouva fermés pour cause de ver de Guinée. Seuls quelques uns ont été remis en eau. Enfin dans les vitrines divers objets ayant trait à l’eau sont présentés : outres en cuir, gourdes….

ouzbekistan mp2015 096 - Copie

 

En face du mausolée d’Ayoub se trouve un monument moderne à la gloire d’Imam Al Boukhari qui a écrit les hadiths du Prophète. La statue est formée de deux parties : un croissant horizontal en béton et un livre ouvert

 

Parc Lénine – Parc des Samanides

Pour aller voir le mausolée Ismaïl Samany, nous traversons un parc verdoyant planté de cognassiers, chênes, ormes, peupliers, irrigué par un canal. Une grand roue soviétique dépasse.

Mausolée Ismaïl Samany

mausolée Ismaïl Samany
mausolée Ismaïl Samany

C’est un monument très ancien. La dynastie samanide a régné 120 ans jusqu’en 999, elle venait de Perse. Les tadjiks revendiquent Boukhara à cause des Samanides, leur monnaie s’appelle le samani. Le mausolée a été retrouvé par hasard en 1937 lors de la construction du Parc Lénine. Il était ensablé, soit naturellement (il est construit dans un creux) soit volontairement afin de la protéger de Gengis Khan. Il a été retrouvé intact, seul le dôme a été restauré. En analysant les brique on aurait retrouvé du lait de chamelle, du jaune d’œuf et du sang de taureau, éléments conférant à la brique sa solidité et donnant aussi à la brique la propriété de changer de couleur selon l’heure de la journée, en passant de jaune à rose à la tombée du jour.

 

Ismaïl Samany était zoroastrien. Le mausolée ne comporte pas d’inscription coranique. Le décor est assuré uniquement par la disposition des briques formant une dentelle de pierre. Quatre petites coupoles peuvent symboliser les quatre éléments vénérés par les zoroastriens : eau terre, air soleil. C’est aussi un lieu de pèlerinage pour les musulmans qui respectent Samany qui a assuré une ère de prospérité et de développement culturel à Boukhara. Le soleil zoroastrien est devenu le Soleil de la Connaissance éclairant le Monde.

Sur l’esplanade dallée du Mausolée d’Ayoub, de petits mûriers sont taillés comme des topiaires : un mince tronc surmonté d’une grosse boule. On y diffuse une musique très cool. Le musicien vient vendre son CD. Il est violoniste « debout ». Il suggère de l’utiliser pour sonoriser nos vidéo. Nous l’avons acheté à  cet effet !

Boukhara : autour du Bassin

CARNET OUZBEK

ouzbekistan téléphone 006

17h45, Nassim nous montre la vieille ville.

Une rue tranquille tout droit conduit à une petite place avec un bassin et un minaret trapu. On passe sous une arche où, dans petit bazar, on vend de très jolie marchandises sacs en kilim ou des  broderies, grandes pièces de tissus, soie ou coton, écrues ou blanches,  brodées de feuillages, grenades ou fleurs : ce sont les souzani  dont je ne me lasserai pas.

sous cette arche travaille le miniaturiste
sous cette arche travaille le miniaturiste

Nassim nous attend devant l’échoppe du miniaturiste. Penché sur son ouvrage, il souligne les visages d’un trait rouge, peint des bouches et des nez avec un très fin et très long pinceau. Je suis instantanément conquise par les miniatures que l’artiste commente pour nous. Il raconte la route de la soie, les caravaniers et fait figurer des personnages célèbre, Ibn Batuta, Ibn Sina (Avicenne), Marco Polo ou Al Khorezmi. Les scènes du harem sont aussi très élégantes : les concubines à la toilette pudiquement se maquillent, leurs babouches négligemment oubliées. Rectangles fleuris….

Jahongir a traduit des contes et proverbes ouzbeks que ce miniaturiste a illustrés, nous achetons un exemplaire à Nassim. Je m’attarderais des heures dans l’échoppe. Evidemment aucun prix n’est indiqué. Serait-ce une folie ?

Un peu plus loin se trouve la boutique du marionnettiste qui fabrique des marionnettes en papier mâché. Le voleurs et Ali Baba sont  les vedettes. En sortant de l’atelier du miniaturiste le travail des marionnettes me parait grossier. Plus que « route de la Soie » nous sommes dans l’univers des » Mille et Unes Nuits ».

Le Bassin est le cœur de la ville historique de Boukhara, il est bordé de cafés et restaurants. Le 21ème siècle reprend ses droits et les boutiques ont des enseignes lumineuses, il y a un château gonflable pour les enfants et des dromadaires en plastique.

Nous partageons un pot avec notre guide, prenant place sur les tables métalliques contemporaines au bord du Bassin. Mes réticences fondent devant la beauté des monuments autour du bassin, des arbres séculaires, ormes plantés au 15ème siècles. L’un d’eux est mort mais on a préservé son tronc noueux et quelques branches ; je sors le carnet moleskine. Les touristes ont remplacé les caravaniers et marchands mais finalement est-ce bien différent ? Boukhara est différente de Khiva, la ville-musée. Elle est plus animée, plus ouverte.

Pour dîner, j’ai snobé le restaurant sur le bord de l’eau (c’est une erreur) et Nassim m’entraine dans un bouiboui sans façons, sans carte, ni prix indiqué, ni clients.

– « Aimes-tu les poivrons farcis ? ».

On apporte bien des farcis, mais ce sont des choux

– « en cette saison, il n’y a pas de poivrons, on remplace par du chou et on appelle cela poivron ! » affirme-t-il.

Les feuilles de choux farcies, j’adore cela, j’en ai mangé en Roumanie (sarmale), en Bulgarie, en Arménie, j’en ai même cuisiné. Les farci ouzbeks sont honnêtes sans plus et affreusement chers. Après avoir mangé devant un feuilleton coréen en costume parlant ouzbek, Nessim annonce l’addition 21 000soum (7 €) qui me met en colère : les pâtes à l‘aneth délicieuses dans un beau restaurant n’avaient coûté que 10 000soum. J’ai le sentiment amer de m’être fait avoir.

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Dominique m’attendait sur les banquettes de l’estrade. Avec le mince croissant de lune, les étoiles, les petits  spots discrets dans les niches de stucs, notre palais est magique. Les coussins de la banquette sont dorés, les stalactites sont magnifiés dans les ombres et lumières. Les imperfections dues au temps gommées. Décor somptueux, douceur de la nit. On voudrait que cette soirée ne finisse jamais. Le retour des autres clients de l’hôtel rompra la magie. Vers 22h30 on se couche à regret.

Boukhara : notre hôtel Hovli Poyon

CARNET OUZBEK

 

notre palais : Hovli Poyon
notre palais : Hovli Poyon

Enfin la voiture s’arrête devant une lourde porte de bois sculptée mais très usée. On entre par une chicane dans une cour rectangulaire d’un véritable palais. Sur l‘estrade, 3 colonnes soutiennent un auvent de bois, au mur, des niches décorées de stucs blancs peints en bleu. Dans chaque niche, des stalactites, des mini coupoles surmontent des mini palais ou des mini mosquées, mises en abyme. Le palais est un peu délabré, les couleurs sont délavées avec ds salissures, des lézardes craquellent le stuc. La patine donne un charme supplémentaire. Deux banquettes sont garnies de coussins et d’une table basse.

les chambres donnent sur la cour (la nôtre a les volets ouverts)
les chambres donnent sur la cour (la nôtre a les volets ouverts)

En face, les chambres sont disposées sur deux galeries de bois superposées dans un bâtiment rénové aux murs lisses, blancs et aux volets de bois clair verni ; Les colonnes de bois de forme traditionnelle et sculptées sont neuves.

Un jardinet planté de rosiers, de roses trémières est encore hivernal. Le bel abricotier, en revanche a toutes ses feuilles. Une grande vigne grimpe à une tonnelle.

Thé de bienvenue (à la fin on a terminé les fruits secs!)
Thé de bienvenue (à la fin on a terminé les fruits secs!)

Le thé de bienvenue est servi dans une pièce qui fait suite à  l’auvent. Je suis époustouflée : la décoration est celle d’un palais, il y a même un piano (droit, vernis et moderne mais quand même un piano !), des petites niches dans l’épaisseur des murs aux ouvertures en forme de flacon, des stucs, des fresques florales et des arabesques. Tout m’enchante ! Le thé est servi dans cette porcelaine bleue et blanche qui a cours partout (service au motif de la fleur de coton) accompagné de quatre coupelles contenant des raisins secs bleus, des amandes dans leur coque friable, des pralines de cacahuètes et des noyaux d’abricots secs et salés au goût de pignon. Nous grignotons un moment en compagnie d’un couple qui a l’air russe, parle russe mais chuchote entre eux français et un autre couple alémanique grisonnant.

Notre chambre est bien fraîche derrière les épais volets de bois. Mobilier en bois clair, deux couvre-lits rouge et des beaux kilims épais et colorés.

De Khiva à Boukhara

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: Route de Khiva à Boukhara – 7h  – 450 km dans les sables rouges du Kizyl Koum

Désert ou steppe?  au fond l'Amou Daria
Désert ou steppe? au fond l’Amou Daria

Nous allons emprunter la Route de la Soie ! Pour la rejoindre, il faut d’abord retourner à Ourguentch – route connue, j’aime bien retrouver des repères pour me les approprier. Je n’avais pas remarqué les fils du Trolley-bus, 40km reliant Khiva à l’aéroport. A Ourguentch, d’élégants jardiniers sarclent les massifs fleuris du terre-plein séparant les voies de la route. Ce sont les étudiants du collège qui donnent quelques heurs pour embellir leur ville. Les garçons sont en costume de ville, sombre, la tenue du collège.

Nous traversons l’Amou Darya sur le pont fixe construit en 2012. Le « fleuve fou » ou « fleuve enragé » changeant sans cesse de lit, on n’avait jamais entrepris la construction d’un pont fixe. Jusqu’en 2012 on le passait sur des ponts flottants.

Nous roulons 100km dans la campagne verte, irriguée entre champs de blé, rizières ou champs labourés préparés pour le coton. Pakhtakor – le nom de la station de métro de Tashkent – veut dire champ de coton ce qui explique sa décoration florale. J’essaie d’en savoir plus sur le coton mais Nessim n’est pas très disert. Il me faudra relire Orsenna !

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halte pour voir un lac,  l’Amou Daria

 

C’est une véritable autoroute qui traverse le désert des sables rouges, autoroute de béton très roulante où il y a très peu de circulation. Elle longe le cours de l’Amou Daria qu’on aperçoit de temps en temps. L’ancienne route le long du fleuve est actuellement au Turkménistan. On construit une autre autoroute de la soie au Kazakhstan.

Le désert des sables rouges ne correspond pas à ce que son nom suggère. Peu de sables, pas de dunes, une étendue plutôt plate couverte d’une végétation de buissons ras. Plutôt steppe que désert. Maintenant, c’est le printemps, il y a même une herbe verte très tendre clairsemée et des fleurs qui font des nappes roses. Arrêt pour le plein de gaz : la voiture est hybride. La route est longue, le désert planté de buissons de saxaoul, monotone. Pour me distraire, j’imagine les caravanes de 1200 dromadaires et chameaux, les cavaliers mongols.

Un village, Nukus, est entouré d’arbres, de champs irrigués, de vergers.

Arrêt déjeuner dans un restaurant de plein air où de longues tablées sont installées pour les groupes en car. Les français se partagent les bouteilles de vodka en plaisantant lourdement et bruyamment. Au fond les brochettes sont cuites sur un barbecue. Je me faisais une fête des brochettes ! en entrée un Samosa, chausson farci de beaucoup d’oignon et un peu de mouton.

L’autoroute s’arrête. Le chantier se déroule sous nos yeux, apportant un peu de distraction dans la monotonie de la steppe (mais ralentissant l’allure). 145 km avant Boukhara, la route traverse une plaine couverte d’arbustes verts étranges :

sur une grosse tige 60cm de haut une touffe ronde je crois reconnaître les ombelles du fenouil mais en boule (Ferula foetida)..Les derniers 150 km dans la lumière lourde du début de l’après midi, sans ombre, sans rien pour accrocher le regard, sont terriblement ennuyeuses. Je lutte contre le sommeil. Non loin les installations gazières se détachent. Je consulte notre carte, le lieu s’appelle Kompressor. L’Ouzbékistan vend du gaz à la Russie et à la Chine. Cela fait diversion avec la construction d’un gazoduc du Turkménistan à la Chine autre client après al Russie  (30 Milliards de m3).

16h, enfin Boukhara ! C’est une grande ville. Les abords font désordre comme partout dans le monde. En Ouzbékistan les esplanades s’étalent tellement que la ville semble déstructurée. On contourne la vieille ville piétonnière où notre hôtel est situé, s’engage dans des ruelles étroites et sordides,