Khiva : mosquées, mausolée et madrasa

CARNET OUZBEK

Mausolée Pahlavan Mahmoud (1247-1326)

la coupole verte du mausolée
la coupole verte du mausolée

Entrant dans la cour, une jeune fille en robe rouge rajuste son foulard assorti. On est dans un lieu de pèlerinage : Pahlavan Mahmoud est le saint patron de Khiva. les fidèles viennent boire l’eau du puits de la cour verdoyante. Pour éviter des queues on a récemment installé 3 robinets. Nassim nous conte l’histoire de ce grand soufi, poète ayant écrit des Rubaiyat (quatrains) philosophiques et religieux. Il était tanneur de son métier et avait pour conviction qu’un imam devait exercer un métier pour gagner sa vie. Il a souhait être enterré dans son atelier (qui est devenu un mausolée par la suite). C’était surtout un lutteur et même un champion. Un émir Indien lui demanda ce qui lui ferait plaisir comme prix de sa victoire dans une compétition de lutte. Pahlavan Mahmoud demanda qu’on libère autant de prisonniers Khorezmiens qui pouvaient tenir sur la peau d’une seule vache ? Faveur accordée ! Il découpa alors des lacets très fins et encercla 12 000 Khorezmiens.

la lutte
la lutte

Il convient de se déchausser pour entrer dans le mausolée et d’y être discret. Un groupe d’Ouzbeks étaient assis autour d’une table très basse sur laquelle ils avaient étalé du pain et un sac de riz. L’imam a chanté et tous ont prié avec ferveur. Après avoir filmé les décorations bleues et le lustre inattendu, j’ai croisé un couple qui arrivait avec une poule blanche, les pattes liées, sans doute une donation. L’imam se chargera de l’égorger et de distribuer la viande aux nécessiteux Le mausolée est coiffé d’une belle coupole verte. A l’arrière du mausolée les tombes s’accumulent se chevauchent.

madrasa Iman Khodja
madrasa Islam Khodja

La Madrasa d’Islam Khodja (1910)  est une des plus brillantes, Ses majoliques bleues étincellent et son minaret annelé (44.5m) se voit de toute la ville. une coupole vernissée la surmonte. Cette madrasa est de grandes dimensions, la façade est carrelée de bleu. Dans l’iwan, les majoliques florales ont des arabesques blanches sophistiquées. Dans les cellules on a installé le Musée des Arts appliqués. J’attendais avec impatience les salles des tapis présentant des tapis Boukhara 19ème et 20me pas tellement plus beaux (même moins) que ceux du Grand Père.

Non loin de là, un autre minaret est décoré d’anneaux verts et sa pointe est en briques beiges. J’ai d’abord confondu les deux, ce n’est qu’après la promenade du soir que je les ai différenciés.

Mosquée du Vendredi : foret de colonnes
Mosquée du Vendredi : foret de colonnes

L’entrée de la Mosquée du Vendredi ne paie pas de mine, on se faufile entre les étals des marchands de fourrure ou de foulards sans savoir ce qu’on va découvrir ? Notre guide nous précède de plusieurs pas et nous laisse découvrir une véritable forêt de colonnes. Deux puits de lumière éclairent des petits jardins fleuris. Des femmes jettent de l’eau pour rafraîchir l’air.

Nassim nous explique :

Il existe 3 sortes de mosquées  la Mosquée de Quartier édifiée par les habitants qui ressemble à une maison, la Mosquée du Vendredi beaucoup plus grande, financée par les autorités et la Mosquée des Fêtes bâtie à l’extérieur de la ville pour avoir plus d’espace. Du 8ème siècle au 19ème, la puissance du royaume s’évaluait au nombre de mosquées du Vendredi. Au fur et à mesure que les voyageurs de passage dans la ville offraient une colonne on agrandissait progressivement la mosquée avec le stock de colonnes. Elle en compte aujourd’hui 213.  80% des colonnes ont été changées mais il en restes quelques unes très vieilles usées et polies par les mains des fidèles. Toutes sont différentes et délicatement sculptées. Elles reposent sur une base e marbre. Un petit tapis de feutre au contact entre la base et la colonne aspire l’humidité et joue un rôle antisismique.

La mosquée n’est plus en activité : c’est un musée .

ouzbekistan mp2015 067 - Copie

Le minaret assure une triple fonction : l’appel à la prière, bien sûr, aussi phare pour les caravaniers (on y allumait un feu au sommet) enfin lieu des exécutions capitales. On n’appelle pas à la prière au micro en Ouzbékistan, je n’ai pas entendu le muezzin pendant ces vacances, les caravanes modernes ont des phares sur les camions et personne n’est plus précipité….Reste, la fonction de repère.

Khiva – palais et citadelle

CARNET OUZBEK

Le Palais Nurrulaboy (1912)

plafond russe? ousbek ou Art Nouveau? un peu de tout cela!
plafond russe? ousbek ou Art Nouveau? un peu de tout cela!

Situé à l’extérieur de la ville close, il faut construit par l’émir Isfandiar Khan, l’avant dernier khan de Khiva qui régnait en son palais mais dont la résidence entourée de jardins était hors les murs.  Isfandiar Khan souhaitait acquérir le terrain d’un riche commerçant qui y était très attaché et ne voulait pas s’en séparer. IL finit par céder à condition que le palais portât son nom.

Palais début 20ème siècle.  Importés de Russie (les khans étaient soumis aux Tsars et leurs payaient tribut) les beaux poêles en faïence qui chauffaient deux pièces mitoyennes, les doubles vitrages et le confort moderne.

La décoration fastueuse mélange les stucs colorés russes, les entrelacs et plafonds à caissons orientaux, et même les motifs végétaux Art Nouveau. La salle de réception est immense avec une salle du trône. Une pièce octogonale, revêtue de miroirs permettait d’examiner les visiteurs sous tous les angles. Une autre interprétation est que le paradis ayant huit portes, l’émir s’en rapprochait ainsi. On visite une bibliothèque et la chambre à coucher.

Place Régistan

citadelle Ark : remarquer les trois portes de taille croissante
citadelle Ark : remarquer les trois portes de taille croissante

Toutes les villes ouzbèkes possèdent leur place Registan, place principale où se déroulaient les évènements importants, le Bazar, des concerts mais aussi des exécutions capitales : on pouvait précipiter le condamné du haut du minaret, l’empaler, l’enterrer vivant la tête en bas, ou le lapider ; On réservait aux femmes un autre châtiment : on les enfermait dans un sac en compagnie de chats qu’on rendait furieux en les fouettant ; ils griffaient et mordaient jusqu’à ce que mort s’en suive.

Dans un coin du Registan se trouvait le Zindan, prison où le condamné restait jusqu’à son exécution. En 1717 on exécuta 3000 soldats russes et le Prince  Berkovich-Cherkasskiy.

Kounia Ark

majoliques
majoliques

Le Palais de l’Emir s’ouvre sur la Place Registan. A partir du 17ème siècle Khiva devient capitale du Khorezm à la place de Kounia Ourguentch (actuellement au Turkménistan) époque où fut creusé le canal de Khiva.

A l’intérieur de la citadelle, les archéologues ont mené des fouilles, abandonnées, elles ont été recouvertes d’un parquet de bois et d’une estrade où se déroulent  des spectacles et des fêtes. Dans la cour du Palais se trouve un puits. Le puits est l’attribut de Khiva, la nappe phréatique étant  très proche. Une légende prétend que l’un des fils de Noé avait creusé un puits sur l’emplacement de Khiva et avait trouvé l’eau bonne (maintenant elle est légèrement saumâtre). Devant une plateforme circulaire Nessim nous pose une devinette :

  • « savez-vous à qui elle sert ?  Aucun touriste n’a jamais trouvé»

Il s’agit de la base ronde pour monter une yourte. Le Palais est inchauffable en hiver, surtout l’Iwan . Le mot Iwan serait à rapprocher du français auvent. Il est plus facile de chauffer la yourte pour y recevoir ambassadeurs, commerçants ou autres visiteurs.

plafond aux couleurs chaudes
plafond aux couleurs chaudes

L’Iwan se trouve en avant de la salle du trône. Il était percé de trois portes de taille croissante. La porte la plus petite était celle du peuple, la moyenne celle des riches commerçants tandis que les ambassadeurs empruntaient la plus grande. Le Khan était donc averti de l’importance du visiteur. Les Iwans, salons extérieurs ou terrasses soutenues par des colonnes de bois sont tous orientés au nord pour que le vent venant de Sibérie rafraîchisse l’air. Les majoliques sont de toute beauté avec des motifs floraux délicats et très naturalistes. Les bases des colonnes sont en marbre. Les colonnes merveilleusement ciselées soutiennent un plafond rouge et orange, teintes chaudes.

La citadelle Ark vue dees terrasses
La citadelle Ark vue des terrasses

Par un escalier je parviens à la terrasse avec vue sur les coupoles et les terrasses de Khiva. A la montée j’ai peiné dans les marches hautes et tellement étroites que j’ai passé toute l’ascension à redouter la descente.

La mosquée est double, la mosquée d’été est aménagée en plein air sous l’Iwan, carrelée de bleu, le mirhab et le minbar sont revêtus de majolique.  Dans la Mosquée d’Hiver il y a une exposition consacrée aux savants : Ouloug Beg, Ibn Sina, Al Biruni,El Khorazmi

Un  petit  musée historique est installé dans la Madrasa Rakhim Khan présentant les derniers émirs de Khiva. Mohamed Rakhim II (1864-1910) fut le plus brillant (Nassim le compare à Louis XIV). Il développa le khanat de Khiva avec son Vizir Islam Khodja. Ses successeurs furent moins brillants, Isfandiar Khan, ivrogne et homme à femmes fut une marionnette dans les mains d’Islam Khodja dont il était le gendre.

Palais Tash Hovli (1831-1841)

plafond
plafond

L’émir régnant alors émit le souhait d’avoir un palais d’été. Pour plus de fraîcheur l’architecte imagina de faire des murs très épais garnis de pierre (tash). C’est un palais immense avec sa salle d’audience extérieure dont l’auvent est soutenu par une colonne unique, l’emplacement pour la yourte. Un labyrinthe de couloir mène à des salles de travail. Après nous y être perdues nous débouchons dans une cour avec la plateforme pour la yourte, l’auvent. Etrangement Nessim qui devait nous y attendre n’est pas là, et la marchandise a changé : des écharpes de mohair à la place des foulards en soie. Le palais est double, il y a deux patios identiques !

Harem

Proche du palais, la harem s’organise autour d’une cour où se font face deux corps d’habitation. Cinq terrasses  dont une légèrement rehaussée, logent l’émir et ses quatre femmes légitimes. En face, les concubines, belles femmes de toute origine n’ayant aucun droit dont les enfants n’étaient pas reconnus ; en hiver elles occupaient le rez de chaussée tandis que l’été elles se tenaient dans les galeries ouvertes de l’étage.

La décoration de majolique bleue est délicate et les motifs exquis. Entre les briques beiges, Nessim nous montre le « papillon zoroastrien » symbolisant les préceptes « bonne parole – bonne pensée – bonne action » dont le motif a plu aux musulmans qui l’ont utilisé largement dans la décoration un peu partout.

Dans la cour du Harem le vieil homme à barbe blanche
Dans la cour du Harem le vieil homme à barbe blanche

A côté du puits, un vieil homme à barbe blanche et turban fait tout un discours à un groupe de touristes anglophones ravis de la photographier. Que raconte-t-il, imprécations ? poèmes ? prêche ?

Je filme, il nous remercie et fait signe en traçant 80 sur la brique qu’il a 80 ans.

Au restaurant : pâtes à l’aneth

Midi, la mère de M (notre hôtelier que nous avons surnommé Manuel Valls à cause d’une vague ressemblance) tient un restaurant qui a une terrasse très bien placée à un carrefour au bas du minaret inachevé. Je commande des pâtes à l’aneth – spécialité du khorezme) comme on attend un long moment (sans doute qu’elle les cuise) j’essaie un croquis. Difficile, la basse du minaret est si massive qu’elle écrase monuments et coupoles. Les pâtes sont vertes, faites-maison, rubans cours de 2ou3cm de long, 3mm d’épaisseur, servies avec une sauce tomate, des carottes et des cubes de bœuf. C’est excellent. Pour boisson, du thé vert servi dans la théière de porcelaine bleue à fleurs blanches, filetée de doré. Thé en grande feuille. J’en consommerai des litres pendant mon séjour.

Après avoir passé les heures chaudes (plus de 35°) sur la banquette de la cour de l’hôtel, je pars pour une dernière promenade dans Khiva. J’emprunte la double porte proche de l’hôtel, plutôt arc de triomphe qui me mène sur une esplanade ensoleillée bordée par l’Académie Mamoun en souvenir d’Al Khorezmi. Je traverse un petit canal et gagne les remparts et la porte nord. Les quartiers d’habitations sont construits de maisons modestes  basses. Dans les rues tranquilles et poussiéreuses les enfants arrosent consciencieusement le sol. C’est très propre, il n’y a pas un papier, pas un mégot. Les enfants m’appellent, ils jouent tranquillement dans ces ruelles sans voitures. Une bande de filles jacasse en surveillant un bébé, un groupe de garçons parade. Plus loin des femmes sont réunies sur une banquette devant leur logis.

Je passe au pied du minaret annelé de la Mosquée du Vendredi, devine les colonnes de la galerie. Juste derrière se trouvent les tombes de briques qui jouxtent le mausolée Palhavan Mahmoud avec sa coupole vernissée. Les petites feuilles de deux ormes semblent s’ouvrir d’heure en heure. Je dessine tranquillement les coupoles, les arrondis des tombeaux en ogive. Avant de rentrer je pousse jusqu’à la très décorée medersa Islam Khodja carrelée de bleu et son minaret géant aux anneaux multicolores dernier phare des caravaniers construit au début du 20ème siècle, peu avant que les camions ne détrônent les chameaux.

Khiva – Installation découverte de la ville close

CARNET OUZBEK

Khiva et kalta minor
Khiva et kalta minor, symbole de la ville

Khiva : notre hôtel Qo’sha Darvosa

Quo’sha Darvosa est situé à quelques pas de l’arche double marquant l’entrée de la ville. Il est installé dans une maison ancienne (1901) qui possède  sur une belle cour pavée autour d’un puits où s’ouvrent les portes d’une dizaine de chambres. Une grande banquette garnie de coussins colorés s’adosse au mur. Un escalier conduit à une terrasse : de là la vue est merveilleuse sur les coupoles turquoise. On nous y sert un thé accompagné de raisins secs, deux sortes, l’une dorés, l’autre presque bleus.

l'arche double
l’arche double

Notre chambre est crépie de beige imitant le torchis. Présence du bois brut : le plafond est soutenu par une douzaine de grosses poutres. Le bas des murs est habillé de bois à peine équarris. Le mobilier est en pin clair. Au sol cinq kilims modernes très colorés. Dans une niche, une photo ancienne est encadrée : des femmes en habit de cérémonie. Une bande de tissu coloré entoure le cadre.

L'hôtel
L’hôtel Qosha Darvosa

L’ensemble est simple, chaleureux, coloré. La télévision à écran plat est discrètement accrochée au dessus de la porte de la salle de bain.

Notre chambre bois et kilims
Notre chambre bois et kilims

La ville close

Entrée payante, 8000 soums de droits pour les photos

Les murailles qui ceignent la ville sont étrangement bombées, en pente douce, arrondies. Leur teinte est rosée lorsque le soleil décline.

Al Khorezmi devant les remparts de Khiva
Al Khorezmi devant les remparts de Khiva

Une grande statue accueille le visiteur Al Khorezmi, (780-850)mathématicien, inventeur des algorithmes, natif de Khiva qui remplaça les chiffres romains par les chiffres indiens. Le centre culturel était alors Bagdad, Al Khorezmi est devenu le directeur de l’académie Mamoun. Une académie Mamoun existe de nos jours à Khiva.

Un panneau mural représente la carte de la Route de la Soie, de la Chine à l’Ouest de l’europe, incluant la Russie et l’Inde.

On raconte que, au 3ème siècle av. JC, l’empereur de Chine envoya chercher des chevaux de Ferghana pour les échanger contre de la soie.

Les  12 000 km séparant Xian de Venise étaient parcourus par des caravanes de 500 ou 600 chameaux, à leur tête le Caravan Bashi avait une armée avec des éclaireurs de la route. Ils se guidaient au soleil et d’après les étoiles et parcouraient de 50 à 60 km par jour, s’arrêtant dans les caravansérails. En Ouzbékistan un seul caravansérail est aujourd’hui conservé mais nous en avons visités en Turquie et en Arménie. Boukhara et Samarcande se trouvent au croisement de la route Est/Ouest et de la route Nord/sud allant de l’Inde à la Russie apportant des épices, des pierres précieuse. C’étaient donc des centres culturels importants.

Les remparts 2200m entourent un quadrilatère avec quatre portes. 3000 habitants seulement vivent actuellement dans la ville close.

Nous entrons par la parte de l’Ouest qui est la porte principale.

Nassim nous raconte l’histoire du minaret inachevé  Kalta minor– symbole de Khiva –qui devait être le minaret le plus haut de l’Asie Centrale et atteindre 70m . Ses fondations ont donc un diamètre très large. L’émir qui en était le commanditaire est mort avant la fin des travaux, il est resté inachevé car on n’aimait pas continuer après la mort de celui qui devait en tirer gloire. Une autre légende dit que l’architecte avait promis un minaret semblable à l’émir de Boukhara et que le khan de Khiva l’aurait précipité du sommet Il mesure 26m de haut et il est recouvert de belles céramiques vernissées turquoise avec des motifs colorés variés. .

Au pied du minaret, une énorme  madrasa et la mosquée qui lui fait face, ont été transformées en hôtel et en restaurant pour touristes. L’authenticité est perdue. Les groupes français et italiens caquetant, je ne leur ai pas trouvé de charme.

le minaret inachevé
le minaret inachevé

La rue qui parcourt  la ville d’ouest en Est et qui passe sous le minaret inachevé est très passante, elle est occupée par les étals des marchands de souvenirs. En plus des chaussons tricotés, des foulards en soie (ou en coton), des lutrins pour le coran, des corbeilles à fruits en bois télescopiques, ou des planches à découper les légumes finement ciselées, les plus spectaculaires sont chapkas, toques, coiffures traditionnelles. L’Astrakhan est le plus renommé. La fourrure d’un agneau mort-né fournit l’Astrakan de la meilleure qualité mais les agneaux nouveau-nés donnent aussi de la belle fourrure. Il a pris le nom de cette ville de Russie, très froide qui importait beaucoup de fourrures d’Ouzbékistan. Les Ouzbeks le désignent par un autre nom : karakul. Les bergers et paysans revêtent des bonnets à longs poils de mouton qui leur donne la même silhouette que les Juifs religieux avec leur schtreimmel. On peut préférer le renard ou la fourrure de chat.

Fourrures et coiffures
Fourrures et coiffures

Nassim nous abandonne et nous déambulons au hasard par les ruelles, les passages, les cours des madrasas, les places bordant des palais. Les touristes sont nombreux mais ils ne sont pas tous européens, ou japonais. Il y a beaucoup d’Ouzbeks venus pour passer le dimanche, de la région et parfois de très loin pour visiter le vieux Khiva ou pour un pèlerinage.

 

menuisiers
menuisiers

Les cours sont le plus souvent occupées par les marchands, on laisse donc entre les visiteurs dépourvus de billet (Nessim a pris les nôtres pour les visites de demain). Dès qu’il s’agit d’entrer dans les bâtiments on me chasse gentiment. Certains monuments sont occupés par des artisans : des menuisiers fabriquant des objets d’art ciselés, des portes magnifiques me laissent admirer leur travail, tout comme ceux qui sont spécialisés dans les tables et els bancs. Scies électriques voisinent avec burins et ciseaux. Cette rencontre a été pour moi le clou de la promenade.

18h30, les visiteurs se font rares. Les habitants de Khiva sortent de chez eux. Des femmes sont assises devant les maisons sous la lessive qui sèche. Des gamins font des tours à vélo. Alors que partout ailleurs les gens étaient ravis de poser pour la photo, les femmes font signe que « non ». Elles doivent en avoir marre des touristes ;

Nous dînons à l’hôtel. On a dressé une table carrée dans le patio. Salade plutôt sucrée de cubes de betterave, pommes de terre et carottes, l’autre salade est épicée avec des aubergines, courgettes et piment. J’ai commandé du plov, moins gras qu’à Tachkent ressemblant plutôt à notre riz vapeur avec des morceaux de carottes et mouton. En dessert des « baklavas » différentes de celles que je connais, point de miel, de la pâte feuilletée avec de la crème et des amandes.

Ourguentch et forteresses de Khorezm

CARNET OUZBEK

vu d'avion l'Amou Daria
vu d’avion l’Amou Daria

Vue du ciel, Tashkent est une ville très aérée, nous reconnaissons le Stade et l’Hôtel, les coupoles du Marché. Survol d’une campagne cultivée puis de bizarres étendues vertes à la surface comme ridée, des ravines formant une arborescence et des méandres. Puis la steppe sans maisons ni culture. L’avion survole le Syr Daria, on voit des champs rectangulaires, les traces des méandres abandonnés par le fleuve. La zone cultivée se limite au lit du fleuve.  Au-delà le désert est crevé de bizarres structures comme des cratères, (d’anciennes dunes ?). Parfois de bizarres taches blanches, sable ou lac salé évaporé ? on survole de petits lacs. A l’approche d’Ourguentch  on voit d’autres petits lacs bordés de blanc (sel ?), puis des champs des maisons aux toits de tôle dans des jardins. A nouveau un fleuve l’Amou-Daria, ses multiples bras, îles et méandres. L’eau est marron, boueuse.

L’aéroport d’Ourguentch est petit, tout neuf, blanc et bleu. Il s’ouvre directement sur la route ; pas de contrôle de sécurité. Les valises arrivent vite sur l’unique tapis roulant. A Tashkent on m’avait rappelée pour ouvrir moi-même la valise. Le sac contenant les fils des chargeurs électriques leur avait paru suspect.

Nassim, notre guide-chauffeur est accompagné d’un jeune homme très mince en costume gris brillant qui empoigne la valise. C’est le propriétaire de l’hôtel de Khiva qui est un bon copain de Nassim et qui nous accompagne en excursion, l’hôtel étant vide.

Forteresses Toprakala et Ayaskala

Nassim a modifié le programme de visite pour éviter la foule des touristes ouzbeks le dimanche à Khiva. Il nous montre la file de cars. Demain, la ville sera tranquille et nous gagnons 80km.

Nous sommes ravies de cette excursion dans la campagne après les visites des mosquées et madrasas de Tachkent. A la sortie d’Ourguentch, la route est bordée de murier têtards formant une haie. Dans les vergers les pommiers sont en fleurs. De maisons en maisons court le mince tuyau jaune du gaz (on a déjà vu le même dans les pays baltes, en Roumanie et en Bulgarie). Les gros tuyaux bleus, pour l’eau, sont enterrés pour le gel en hiver. La route traverse des villages tranquilles, chaque famille cuit son pain dans la cour dans un four rond en argile. Des hommes rentrent els vaches. Des femmes binent les jardins.

Un très long pont enjambe l’Amou Daria , gardé à chaque extrémité par de policiers. Pour l’occasion on boucle les ceintures dans la voiture. Le long du fleuve les vaches sont nombreuses. La route est très mauvaise. On cahote dans les nids de poules. Aucun panneau indicateur ne guide le chauffeur qui dit connaître la route par cœur. (Au retour son acolyte transformera son Smartphone en GPS).Les  portails des maisons  sont décorés, encadrés parfois de colonnettes peintes en blanc ou de briques décoratives, les portes peuvent être ajourées. Certaines sont précédées d’un auvent sous lequel de larges banquettes servent de lits de repos, parfois une voiture y est garée. Des poteaux penchés guident une tonnelle de vigne. De petites carrioles tirées par des ânes viennent à notre rencontre. Le le blé est déjà haut, vert foncé. Dans de petits carrés inondables entourés par des levées de terre on cultive du riz. Le Khorezm, bien pourvu en eau,  est une région rizicole. Les riz est la base du plov. Le coton « or blanc » est semé en mai récolté en septembre. Nous ne le verrons pas : 3 millions de tonnes font de l’ Ouzbékistan le 3ème pays producteur. Il faudra que je relise le Voyage au Pays du Coton d’Orsenna qui m’avait captivée. Nous traversons aussi une zone désertique où de petits lacs salés montrent que la nappe phréatique affleure.

Plaisanterie de Nassim au sujet du nom de Boston de la bourgade que nous traversons. Il nous montre des lotissements d’habitations neuves au crépi jaune clair et aux toits rouges, alignées, toutes identiques qui se vendent avec un crédit de 15ans. Pourvues de tout le confort moderne, elles sont destinées à compléter une urbanisation soviétique lacunaire qui n’avait pas permis d’installer eau courante et électricité aux hameaux isolés. En 1991, kolkhozes et sovkhozes ont  été démantelés. L’exploitation individuelle a remplacé l’agriculture collective. Toutefois, la terre n’est pas à vendre ; l’Etat-propriétaire loue aux fermiers désireux de l’exploiter.

Toprak Kala

Toprak Kala
Toprak Kala

La forteresse de Toprak Kala domine la plaine de l’Amou Daria perchée sur sa colline. A l’époque l’Amou Daria  avait son lit proche de la colline, mais le fleuve, l’Oxus, d’Alexandre le Grand, surnommé fleuve fou ou fleuve enragé, changeait souvent de lit.

Toprak Kala fut la capitale du Khorezm du 1er au 4ème siècle. Au 8ème siècle les Arabes ont commis des destructions parce qu’il y avait des temples zoroastriens. Gengis Khan, en 1220, l’a rasée. Tamerlan a mené cinq expéditions contre le royaume de Khorezm avant d’en venir à bout. En 1860, arrivée des Russes qui ont commencé par détruire ce qui en

déesse de la victoire trouvée à toprak kala
déesse de la victoire trouvée à toprak kala

restait.  Puis les archéologues russes, ont mené des fouilles jusqu’en 1970 sur le site et aux environs où ils ont trouvé 50 forteresses  ce qui a donné le nom d’EliKala à la province. Ces forteresses étaient bâties en pisé, on voit encore les briques crues.

A Toprak Kala, le site était de 500mx350m, comprenant trois tours de guet et un palais au milieu. Les habitants logeaient en contrebas mais, des habitations, il ne reste rien. Dans le palais Serguei Tolstov a trouvé des fresques et différents objets mais tout est parti à Saint Petersbourg.

Quelques  murs en pisé ont été remontés  puis le projet de restauration s’est arrêté.

Tête rouge (musée de l'ermitage)
Tête rouge (musée de l’ermitage)

De Toprak Kala on aperçoit d’autres citadelles : Ayaskala et Kizil Kala éloignée de 40 km ; des montagnes barrent l’horizon.

Nous achetons une bouteille d’eau au camp de yourtes pour touristes, traversons un village paisible où les villageois s’activent dans les jardins, passons un canal d’irrigation et arrivons au pied d’Ayaskala.

Ayas kala
Ayas kala

Ayaskala – citadelle garnison – signifie forteresse du froid ou forteresse du vent . Nassim raconte une légende à propos de ce toponyme.

Au 2ème siècle avant JC , le Khorezm, attaqué par des nomades,  décida d’élire « démocratiquement «  un chef. Réuni en assemblée, on décida de libérer l’aigle de sa cage. Ce dernier se posa une première fois sur l’épaule d’un berger, Ayaz, une seconde puis une troisième fois. En gardant ses troupeaux, le berger avait parcouru la région qu’il connaissait mieux que quiconque .Ayas décida de construire une forteresse garnie de meurtrières pour surveiller et défendre la place. Un souterrain et une tour complétait le dispositif. Cette intervention de l’aigle me ravit.

Nous reprenons le même itinéraire pour aller à Khiva.

caanl d'irrigation près d'Ayaskala
caanl d’irrigation près d’Ayaskala

En route, je remarque sur certains véhicules l’autocollant triangulaire qui signifie partout Attention ! GAZ ! . Ces voitures roulent au gaz, trois fois moins cher que l’essence et moins polluant. Il y a des stations-service PROPAN et METAN. L’Ouzbékistan, riche en gaz le vend à Gazprom.

Ourguentch

C’est l’heure du déjeuner quand nous traversons Ourguentch par  des quartiers neufs : belles maisons belles boutiques dans le style contemporain qui semble à peine terminées. Les artères sont très larges 2×3 voies. La place principale a des dimensions comparables à ce que nous avons vu à Tachkent. Il y a aussi une promenade plantée sur les bords de l’eau. Ourguentch est la capitale du Khorezm avec des administrations et des usines de coton et de textiles.

Le restaurant Uzbegim Art Restaurant (références introuvables sur Internet) a une terrasse avec des tables de bois brut carrées sous des parasols de bois. Nous aurions pu choisir de manger dans la salle : sorte de cave d’Ali Baba qui fait penser à une boîte de nuit avec des petites lumières rouges qui se promènent, des tables installées dans des alcôves portes en ferronnerie. Le soleil est radieux, la température agréable, nous préférons manger dehors.

La carte est illustrée (mais uniquement en ouzbek), le choix est varié. J’hésite entre divers kebabs et choisis les brochettes au foie, Dominique, la soupe aux raviolis. Il n’y a pas de brochettes. Je commande le plat du jour comme Nassim et son compère.

Le serveur est très jeune, emprunté et maladroit mais la cuisine est excellente. Sur une planche de bois ronde, il pose un plat de fer contenant des lamelles d’oignon, d’aneth et de coriandre tandis que Nessim  a une sorte de fondue : sur un très joli chauffe-plat de ferronnerie ouvragé un plat creux contient du bouillon et des morceaux de bœuf bouilli, fondant, excellent. Les raviolis sont sans surprise mais le bouillon très gras. Les hommes terminent par une glace au chocolat (glace italienne). Il nous en coûtera 30 000 soum, somme qui paraît énorme mais traduit en € : 5€ chacune. Ces zéros, cette liasse épaisse, nous affolent. Nassim nous promet des coupures de 5000soums plus pratiques la prochaine fois.

A l’entrée de Khiva : un lac bleu opalin.

Tachkent : Bazar et vastes esplanades

CARNET OUZBEK

grenades
grenades

Le Bazar,  coiffé d’une coupole bleue, se voit de loin. On y accède par une allée où les « changeurs » murmurent « dollar » à notre passage. Plus loin, de magnifiques pèsent-personnes électroniques en verre sont proposés aux passants, les « peseurs » attendent le client assis sur des chaises. Je traverse d’abord le marché aux vêtements : foulards, soutiens-gorges, T-shirts…avant de parvenir au marché aux légumes sous la coupole. Peu de variétés de fruits (ce n’est pas la saison) pommes, les mêmes variétés que chez nous, couleur locale : les pyramides de grenades, seules les fraises sont de saison. Pour les légumes, surtout des choux, carottes, choux-fleurs, pommes de terre, des tomates et poivrons de serre (chers). Touche folklorique : les dames débitent de petits bâtonnets de carottes jaunes au hachoir sur une planche de bois.

Sucre candi
Sucre candi

Plus loin, les sucreries : spectaculaires sucres candis, boites géantes de nougats pour les mariages avec des cœurs et des alliances en sucre filé.

Une allée couverte est occupée par les vendeurs de pains « nan » très joli, rond en galette aux bords épais et au centre fin décoré de motifs pointillés ou de grains de pavot. La croûte est brillante, dorée, la pâte ressemble un peu à la brioche. Les boulangers qui cuisent le pain à l’arrière de l’allée sont très accueillants.

pain nan
pain nan

Sous une autre coupole les bouchers présentent le « gras » de mouton sur les comptoirs alors que de beaux morceaux bien rouges sont aussi en vente (le Petit Futé nous a fait très peur avec ce gras). Dans les boucheries chevalines il y a de grosses saucisses rouges. Les poulets sont moins appétissants, plumés, emballés dans du plastique transparent informes, ils semblent décongelés et ressemblent plus à du caoutchouc qu’à de la volaille.

La guide convertit les prix en €. Je suis surprise. Ils sont comparables aux prix français, 1€ pour de petites pommes ridées, 6€les poivrons.

Moustaqilik Maidani

La Mère endeuillée commémoration de la 2ème guerre mondiale
La Mère endeuillée commémoration de la 2ème guerre mondiale

L’ancienne Place Rouge soviétique a été aménagée en parc verdoyant. Le Monument au Soldat Inconnu de la 2de Guerre Mondiale est maintenant le Monument à la Mère endeuillée : des parterres fleuris de tulipes bordent deux pavillons longs à colonnade de bois abritant des livres aux pages de cuivre où sont gravés les noms des soldats morts ou disparus (700 000 pour une population de 30 millions). Le jour de la Victoire, le 9 mai, est devenu le Jour de la Mémoire. Le monument en granite rouge porte une grande statue. Un photographe professionnel attend les touristes locaux : les selfies sur les téléphones ne les ont pas encore envoyés au chômage.

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cigognes symboles de paix

 

Plus loin, sur l’immense esplanade, un globe monumental lisse où un seul pays est en relief : l’Ouzbékistan, remplace le plus grand Lénine de l’Union soviétique. Au pied du globe, la Mère Heureuse berce son enfant, c’est la Patrie, son enfant symbolise l’Avenir. A l’arrière : les armoiries de l’Ouzbékistan : à l’avant d’un soleil radieux le Simurgh est entouré d’une branche de coton et d’épis de blé.

Tout atour de la place les bâtiments officiels semblent récents pour la plupart : e Sénat n marbre blanc, le Cabinet des ministres en verre doré, et plus loin des ministères.

Un portique (arc de triomphe ?) porte des cigognes. Trois cigognes sur un globe me paraissent d’un style très asiatique, chinois, bien que la guide ne partage pas du tout cette opinion. Les cigognes sont un symbole de paix.

Place Amir Temur

Amer Timur dit Tamerlan
Amir Temur dit Tamerlan

Le chauffeur se gare devant le Grand Hôtel Ouzbékistan, nous gagnons à pied l’immense place dominée par la statue équestre de Tamerlan érigée en 1993 pour remplacer Karl Marx qui avait remplacé Lénine, Staline, et avant la Révolution le Général Kaufmann. Malgré son infirmité Tamerlan lève son bras droit pour montrer la détermination. Le cheval a le pied levé. Occasion de nous rappeler la symbolique des statues équestres : un pied levé signifie « mort au combat » 2 pattes levées « assassiné » , 4 sabots au sol : « mort de mort naturelle ». Tamerlan est mort en partant en expédition en Chine, mais de maladie. Sur la stèle une inscription est gravée en quatre langues (ouzbek, Russe, anglais, arabe ou persan) « LA FORCE EST A LA JUSTICE ». Selon la guide, les Russes interprétant mal l’arabe qui se lit de droite à gauche prétendaient que la devise était le Droit est à la Force. L’Ouzbekistan, choisissant Tamerlan comme héros national préfère voir le triomphe du Droit sur la Force !

Face à Temur, les bâtiments russes du 19ème siècle lycée de filles et lycée des garçons du temps des Tsars – maintenant faculté de Droit . Un pavillon contient le Musée Temur et des Timourides, deux tours d’horloge ont été longtemps les plus hauts bâtiments de Tashkent. IL y a aussi une banque chinoise du 19ème siècle.

La visite guidée est terminée.

métro tachkent paxtakor

Nous continuons la visite par nous même en Métro. La station Pakhtakor est proche de l’hôtel. Nous traversons un parc planté d’abricotiers et cognassiers en fleurs et de grands arbres ( ?) défeuillés. Le métro est surveillé (photos interdites) . A la vue de nos passeports français, le policier le plus vieux s’exclame « Zidane ! » Zizou reste dans les mémoires et éclipse Sarkozy et Hollande. Pas question de resquiller ni de photographier. A la caisse « kassa »  on achète un jeton en plastique bleu qu’on jette dans une fente. Un escalator super-rapide nous conduit sur le quai. La station Pakhtakor qui signifie « champ de coton » est décoré de céramiques géantes de fleurs de coton.

métro de tachkent La station suivante Moustaqilik maidoni a son plafond décoré de stalactites de stuc blanc et des lustres imitant le cristal donnant une ambiance de luxe. Amir Temur est revêtue d’albâtre, Pouchkine à nouveau des lustres….Comme le quai est unique il suffit de descendre pour changer de sens. Les ouzbeks sont très fiers de leur métro. Si les stations sont décorées, les rames sont vétustes. Nous n’avons pas besoin de chercher un siège, les Ouzbeks se lève à notre venue et offrent le leur spontanément.

A Moustqilik maidoni, nous cherchons le Musée Historique qui est installé dans un  pavillon de style soviétique construit à la louange de Lénine. La propagande communiste a été déménagée mais les fresques la remplaçant lui ressemblent drôlement. La dame dans sa caisse de bois vitré me réclame 10 000 soums. Je n’ai aucune idée du change, c’est tout juste 3€, cela me paraît énorme. Je ressors, peu motivée, trainer dans les jardins me conviendrait mieux qu’une nouvelle visite. La fatigue de la nuit blanche se fait sentir. Nous passons devant le pittoresque manoir à tourelles, décoré de chiens et de cerfs, d’un prince russe avant de reprendre le métro.

tchaikanna
tchaikanna

19h, Mouhieddine, le jeune chauffeur nous conduit au restaurant. Il traverse toute la ville pour trouver une tchaikhanna qui sert du plov à l‘extérieur sur de longues tables recouvertes de toile cirée avec des bancs de bois. Il y a également une salle à l’intérieur aux allures de cantine. Le plov est servi dans de grandes assiettes bleues et blanches. Au riz, sont ajoutés des grains de raisin sec, des pois chiches (XL) et des carottes  jaunes en bûchettes. On apporte deux coupelles salade de tomates et concombres coupés grossièrement et kefir avec de l’aneth. Mouhieddine et moi piochons sans manière dans les coupelles avec un morceau de pain nan ou notre cuiller. Thé vert à volonté servi dans des théières bleues. Le samovar chauffe dans la cour. Il ressemble à une lessiveuse. Une boîte de conserve fume sur le couvercle. Comme je l’interroge devant une telle bouilloire géante, Mouhieddine, le gentil chauffeur, pianote sur son smartphone  et me montre l’image d’un samovar en argent sans doute en usage à la cour des Tsars (rien à voir avec la lessiveuse).

Premier plov
Premier plov

Retour à l’hôtel à 20h30. Je règle le réveil à 4h50. Encore une fois, la nuit sera courte.

Tachkent : 1ères visites les monuments du vieux Tachkent

CARNET OUZBEK

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Petit déjeuner –

Au buffet : yaourt liquide, à côté du samovar,  sachets de thé et paillettes de café instantané, concombres tomates fromage en tranche, salami et mortadelle. Dans des plats chauffants, du porridge, des pommes de terre et divine surprise : des crêpes roulées à la crème épaisse un peu aigre, un délice, j’en mange 5 avec deux verres de jus de cerise.

Notre guide, Sayyora, est une jeune femme mince, brune aux traits un peu asiatiques. Le chauffeur est très jeune, avenant, anglophone ; sa voiture est une Chevrolet blanche. Toutes les voitures neuves sont des Chevrolet. Elles sont montées en Ouzbékistan. Les vieilles sont des Lada. Pas vu les voyants 4×4 noirs des Russes rencontrés dans les Pays Baltes ou en Arménie. Pas vu de Russes frimeurs nouveaux riches dans l’avion non plus. Plutôt des gens simples mal fagotés transportant toutes sortes de marchandises. La voiture circule dans de très larges artères vides (c’est samedi matin). En face de l’hôtel, un cylindre cannelé en béton, c’est un cinéma, plus loin le long d’une avenue de très élégants immeubles bas crèmes dans un style à la fois russe et oriental.

Tachkent est une citée ravagée en 1966 par un séisme de magnitude 8. Elle a été reconstruite grâce aux dons de toute l’Union soviétique. Contrairement à Gümryi en Arménie qui reste blessée 25 ans plus tard (séisme de 1988) et qui a subi les conséquences de l’Indépendance et de la guerre, Tachkent semble avoir bénéficié de cette reconstruction. Avec ses 3 millions d’habitants, Tachkent est la 4ème plus grande ville de l’ancienne Union soviétique après Moscou, Saint Petersbourg et Kiev. Saint Petersbourg ne s’appelle plus Leningrad, Kiev est ukrainienne mais le souvenir de l’ancienne union est encore présent.

Pratiquement partout je déchiffre sans comprendre l’ouzbek qui s’écrit en lettres latines comme le Turc. Partout j’entends du Russe et il y a encore beaucoup de cyrillique. La voiture passe devant le Théâtre, la bibliothèque toute neuve, des centres commerciaux flambant neufs, nous n‘arrivons pas à différencier les bâtiments officiels des habitations. Les HLM soviétiques sont au goût orientalisant, les façades sont agrémentées d’arches et d’arabesques cassant la désespérante monotonie des constructions de la Hongrie à la Mer de Chine.

Place Khast Imam

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La visite touristique commence sur la grande esplanade au bord du Vieux Tachkent et ses maisons basses aux toits de tôle et canaux que je me faisais une joie de visiter mais qu’on ne verra que de loin.

Le Mausolée de Kaffal Chachi

(Kafal = serrurier Chachi = nom ancien de Tachkent)

(904-949) période de l’Islamisation. Ce saint docteur de l’Islam alla en pèlerinage à la Mecque et fut tellement respecté que les fidèles souhaitaient se faire inhumer près de lui pour jouir de sa protection dans l’autre monde. Les environs du mausolée fut entouré de tombe si bine que la place était un vaste cimetière. A l’Indépendance de l’Ouzbékistan on transporta les tombes ailleurs pour faire de l’espace dégagé un endroit récréatif et touristique.

La guide nous fait remarquer autour du mausolée les tombes de briques, hémicylindriques et surélevées attestant d’une survivance des coutumes zoroastriennes. Les adeptes de Zoroastre vénéraient les 4 éléments et considéraient la Terre comme sacrée. On ne devait pas la profaner en y enterrant des morts. Les défunts étaient exposés aux oiseaux charognards dans des tours de silence. Les os étaient conservés dans des ossuaires< ; les tombes musulmanes très anciennes avaient conservé l’usage d’être surélevées.

Autour du tombeau du saint à l’intérieur du mausolée ont été inhumés les professeurs de la Medersa de Boukhara, la seule ouverte pendant la période soviétique. Les autres medersas d’Asie Centrales avaient été fermées.

Le mausolée est construit de briques beiges, décoré de majoliques aux motifs végétaux, d’inscriptions coraniques bleues et de coupole turquoise. Les coins sont soulignés de motifs géométriques blancs-bleu foncé-turquoise. De très belles colonnes de bois de noyer finement ciselées soutiennent de beaux plafonds de bois à l’intérieur.

La Medersa Barak Khan  (16ème)

Selon la guide les medersas d’Asie Centrales servirent de modèle aux medersas des autres pays musulmans et auraient été inspirées par le plan architectural des monastères bouddhiques : une grande façade décorée, deux coupoles vernissées, une cour entourée de cellules. On n’y enseignait pas exclusivement la religion mais également es mathématiques et l’astronomie. Les études duraient 15 ans, l’étudiant entrait à 15 ans et de ressortait qu’à 30. Les portes des cellules étaient trop basses pour forcer l’étudiant à courber la tête et s’incliner devant le Coran. Depuis l’Indépendance de l’Ouzbékistan les médersas ont été ré-ouvertes, dix fonctionnent actuellement.

Les étudiants ont maintenant cédé la place aux marchants de souvenirs dans cette médersa historique.

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Mosquée Tellia Cheikh et la petite médersa Muyie Mubarak (autrement dit du cheveu saint)  la légende veut qu’un cheveu du Prophète ait été disposé entre les briques. Le Coran d’Osman, le plus vieux du monde, très vénéré, y serait exposé. Il aurait été écrit par Osman 14 ans après la mort de Mahomet de 644 à646. Le Prophète étant illettré, ce fut Osman qui inscrivit la parole sacrée sur 5 exemplaires du Coran, calligraphié en coufique sur la peau de gazelle : 330 pages de (63cmx50cm), pesant 25kg. Des 5 exemplaires, un seul a subsisté. On raconte aussi qu’Osman aurait été décapité pendant la lecture du Coran et que les gouttes de sang auraient taché le manuscrit. A l’origine ce Coran était en Irak. Tamerlan le rapporta pour l’exposer à Samarcande où il demeura jusqu’au 19ème siècle. Le Général Kaufmann l’emmena à saint Petersbourg pour l’offrir au Tsar. En 1924, Lénine le rendit aux Ouzbeks. Depuis il est à Tashkent.

La vaste place est barrée par l’imposante mosquée Hazrati Jomi Masjidi, la plus vaste d’Ouzbekistan, construite en 2008 quand Tachkent fut « capitale de l’Islam ». Avec ses deux minarets hauts de 68m, ses colonnes en bois de santal indien, elle est très imposante. Le Président Karimov en aurait dessiné le plan. Elle n’est pas ouverte à la visite touristique, nous nous contentons de regarder la vaste salle de prière moquettée par les baies vitrées.

 

Trois dames en grandes robes et foulards chamarrés s’approchent. Elles sont ravies de poser pour la photo. Elles viennent de Fergana, nous y invitent. Leurs incisives en or brillent quand elles sourient. Je regrette de ne pas avoir osé photographier la gamine sur un tricycle chinois à parasol rose poussée par sa maman en longue robe de velours. Trois enfants jouent au cerf volant en papier aluminium. Le petit porte un calot traditionnel sur la tête. les enfants ont l’air très choyés. Selon la guide la natalité serait entre 2 et 3 cette année.

Roissy CdG/ Tachkent

CARNET OUZBEK

descente sur Moscou
descente sur Moscou

Trois heures de décalage horaire suffisent pour nous désorienter complètement.

Le vol s’est remarquablement passé :  luxe d’ Air France (A320) et 3h30 Moscou- Tachkent dans un énorme A330, la passerelle haute de près de deux étages sous un tunnel plastique arrondi à bord de l’avion géant. Nos places F et H sont près du hublot. Larges sièges, j’ai mis mon masque, oreiller-tour de cou, bouchons d’oreilles et j’ai bien dormi jusqu’à 2h45 (11h45 heure de Paris) . J’aurais dû être en forme mais j’ai l’impression d’une nuit blanche.

Cohue au contrôle des passeports. On râle. Un monsieur parlant français s’adresse à nous. A la vue de la carte « handicapé », on nous invite à doubler la file avec une grande gentillesse. Personne ne proteste, tout le monde nous encourage.

Le tapis roulant des bagages est débordé. Pauvres valises rafistolées au scotch, sacs plastique emballés dans du plastique transparent, les mêmes sacs écossais en fibre plastique que nous avons connu en Afrique. Les bagagistes enlèvent les valises et les paquets et les entassent. Il faut encore passer la douane, remplir un formulaire à conserver jusqu’au retour.

C e n’est qu’à 4h que nous rencontrons Tolkin qui nous donne le téléphone portable à carte SIM ouzbèke et deux épaisses liasses de billets correspondant chacune à 50€. Billets de 1000soums = 0.33 €.

tachkent hotelL’Hôtel Shodlik Palace est un grand établissement, grand immeuble plat, 107 chambres avec balcons. Mobilier élégant en fausse loupe d’érable. Couettes agréables, moquette épaisse. Mais aucune âme.

Des monts célestes aux sables rouges (2) Vagabonde au Turkestan- Ella Maillart

LA ROUTE DE LA SOIE

Ella maillartAvant de m’envoler pour Tachkent j’ai volontairement refermé Des monts célestes aux sables rouges  avant la deuxième partie Vagabonde au Turkestan, désireuse de découvrir Tachkent, Samarcande Boukhara et Khiva avec des yeux neufs!

Déjà, dans l’avion du retour, j’étais impatiente de continuer le récit d‘Ella Maillart. Quelle expérience ! En 1932, à bord du train de marchandises, sur un rafiot descendant l’Amou Daria, vole dans un petit Junker,  à dos de chameau, dans un pays où les transports sont réservés aux privilégiés du régime, où le pain manque, où tout déplacement est réglementé….

Malgré les difficultés, journaliste plutôt que sportive (dans la première partie De Moscou à Alma-Ata, c’était plutôt la sportive qui s’exprimait.

Journaliste donc, elle rencontre le président Faïsoulla Khordjaev, elle assiste à Samarcande au procès des bassmatchis, brigands ou contre-révolutionnaires, prélude des procès staliniens qui ont décimé l’intelligentsia ouzbèque (Khordjaev lui-même). Féministe attentive à la vie des femmes, femmes voilées cachées derrière le parandja, l’écran de crin noir, Maroussia la russe camionneuse, les ouvrières, juives ou arméniennes,  elle voit même le peintre Benkov peindre le tableau la Journée du 8 mars au Reghistan quand les femmes brûlent leur parandja.

A Samarcande, elle loge dans les cellules de  la Madrasa Tilla Kari, madrassa dorée.

« vivre dans la cour d’une médressé de Samarcande! Voilà…le rêve réalisé »

Conteuse merveilleuse elle évoque, Timour et Bibi Khanoum raconte l’histoire de l’architecte qui lui a volé un baiser, histoire de Nassim m’a raconté dans la cour de la Mosquée de Bibi Khanoum. Elle raconte les émirs, les esclaves du Khorezm où l’esclavage ne fut aboli qu’en 1873…

Si elle décrit les monuments de Samarcande, à « Bokhara, la déclassée« , elle consacre plus de ligne à la description des passants, en haillons ou morveux qu’à la madrasa d’Ouloug Beg. Elle n’a pas le regard touriste , happée dans le quotidien de ceux qui cherchent du pain, du riz pour le plov

je retournerai à ce livre quand viendra le temps de mettre à jour mes carnets, pour confronter mes notes au récits d’Ella Maillard (quelle prétention de ma part!) .

 

Comme j’aurais aimé rencontrer cette dame!

Tamerlan – Lucien Kehren

LA ROUTE DE LA SOIE

Teymur

Tamerlan est le personnage emblématique de Samarcande qu »il a prise pour capitale et qu’il a embelli en édifiant des monuments, mosquées mausolées et palais et en plantant ds jardins. Depuis les 15ème siècle de nombreux ont disparu mais je me fais une fête de visiter ce qui est encore visible. Protecteur des artistes et des savants, il a su sous son règne attirer les meilleurs à Samarcande. 

TamerlanCependant la biographie de Tamerlan est surtout une suite de conquêtes et de campagnes militaires.

La première conquête est celle du Kharezm (Khiva et Ourgenj) que nous visiterons au début de notre circuit. Ses premiers adversaires furent donc les nomades du Mogholistan.

Il s’attaqua ensuite à l’Iran qui était alors morcelé entre l’Iran oriental (partie de l’Afghanistan actuel , le Sistan, Khorassan et le Fars. Là, je suis perdue, je ne me retrouve pas dans la géographie du 15ème siècle. Une carte aurait été la bienvenue; malheureusement dans cette édition de poche de Payot histoire, les cartes sont rares et illisibles. L’Irak persan, l’Irak arabe, l’Azerbaïdjan, la Géorgie et l’Arménie se retrouvent regroupés ici comme possession de l’Iran occidental. Là je décroche encore. Les distances sont énormes. l’auteur écrit que 1800 km séparent Chiraz de Samarcande et qu’un courrier a mis 17 jours pour parvenir. L’historien ne fait pas dans le détail et les fioritures pittoresque mais la lectrice lambda aimerait des illustrations pratiques.

Le troisième adversaire en 1395 fut La Horde, ou plutôt les Hordes qui entraînèrent Tamerlan dans la Russie actuelle jusqu’à Astrakhan, Kazan… Là aussi, je suis perdue. Quelles sont les différences entre les nomades des Hordes et celles du Mogholistan? Turcs ou asiates? Ces khans étaient ils apparentés, alliés ou adversaires, Horde d’Or, Mouton noir. Quelles langues parlaient-ils? Lesquels étaient musulmans, lesquels avaient gardé les traditions animistes?

Plus à l’est Tamerlan entreprit la Conquête de l’Inde par la passe de Khyber et jusqu’au Cachemire.

La campagne suivante fut dirigée contre les Mamelouks maîtres du Caire mais aussi de Damas. Eux aussi turcs et musulmans. La prise de Damas est aussi l’occasion d’une rencontre fameuse avec Ibn Khaldoun. 

Enfin, il défait les Turcs de Bajazet ce qui donne un répit aux Byzantins, retardant la prise de Constantinople d’un demi-siècle.

Après des fêtes à Samarcande Tamerlan, même infirme, même vieillissant entreprend la conquête de la Chine et mourra dans les neiges des hauts contreforts de l’Asie.

tamerlan kehren

 

J’ai donc eu du mal à suivre toutes ces campagnes. Mais jamais au point d’abandonner ce héros. Aucun reproche à l’auteur, un historien sérieux (un peu austère cependant) mais plutôt à l’éditeur qui aurait dû présenter des cartes plus nombreuses et plus lisibles. A propos de lisibilité, la typographie laisse à désirer : caractères minuscules, lignes très denses. Prévoir une ampoule 100W pour et des loupes de lecture!

Des monts Célestes aux sables rouge (1) Ella Maillart

LA ROUTE DE LA SOIE

 

Des monts Célestes aux sables rouges – PREMIERE PARTIE – De Moscou à Alma-Ata

ella couvertureJe venais tout juste de refermer le volume de La Voie Cruelle et déjà j’étais impatiente d’ouvrir Des Monts Célestes..Cheminer avec Ella Maillart est un grand plaisir.

Des monts Célestes… raconte une expédition en 1932: Ella Maillart se joint à deux couples d’alpinistes soviétiques dans les montagnes du Tien Chan aux confins de la Chine. Ella Maillart âgée d’une trentaine d’années est une sportive confirmée, marin, skieuse de compétition, hockeyeuse, et , Suissesse, aguerrie à la montagne. Elle bluffe pourtant quand on lui demande si elle est une bonne cavalière (et s’en tirera avec tous les honneurs). C’est aussi un écrivain reconnu.Elle part avec un Leica et son livre qui lui sert de lettres d’introduction

Pourtant la bureaucratie soviétique lui laisse peu d’espoir pour ce voyage, les deux premiers chapitres relatent toutes ses démarches auprès de la Société du tourisme prolétarien. On suit ensuite le trajet en train – 4000 km et cinq fois 24h.

« Il faut tout réapprendre afin de pouvoir apprécier. C’est la notion que nous avons plus ou moins perdue.: le prix de la vie. Près des peuples simples, montagnards, marins ou nomades, les lois élémentaires s’imposent à nouveau. la vie retrouve son équilibre. je vais vers ces contrées désolées, sans arbres ni maisons. Après des mois passés dans une solitude millénaire, je pourrai juger ce que vaut la multitude. » 

C’est à Bichkek, capitale du Kirghizistan , appelée dans les années 30 Frounzé, que commence la véritable équipée. En camion tout d’abord, il leur faudra acheter les chevaux. Paradoxe, c’est la Route du Fer qu’Ella suit :

« Lorsque, en 1375, Tamerlan passait ici à la tête de toute sa sauvagerie, l’Issk portait le nom mongol de Temourtou nor, Lacde Fer. Tandis qu’autour de moi les sommets jouent à la balle avec un orage aux nuages gris fer percés d’éclairs, une pensée chemine en moi comme un taraud d’acier. Tamerlan, c’était Timour, le fer, Attila, en hongrois Aitzel, signifie forgeron. Et à Moscou, aujourd’hui , Joseph Dougatchvili, s’appelle Staline, l’acier[…]Les anciens Turcs adoraient le feu et le fer…On peut dire que Staline n’a rien à voir, il est Géorgien : il succède cependant à une imposante lignée de chefs…. »

 Après Karakol et son lac, ils trouvent enfin les chevaux qui vont les conduire jusqu’aux yourtes kirghizes et aux plus hauts sommets. 

ella chevaux

Quel plaisir de vivre les aventures des cinq alpinistes et de leurs guides! les nuits sous la yourtes, les repas partagés avec le gibier que chassent les guides,le Koumois, lait fermenté de jument, les costumes pittoresques! Ella Maillard décrit avec précision le montage d’une yourte, la traite d’une jument, le bol qui passe de convives en convive, nettoyé avec l’index.

Merveilleuses descriptions de la montagne, de la lumière qui change, de la neige, d’un lac à la couleur étrange.

Aventures sportives que cette randonnée solitaire à ski, cette escalade qui la mène sur une vire glissante comme du marbre gelé, ces cavalcades où les chevaux sautent de rochers en rochers, parfois se blessent….Cols à plus de 4000 m sommets à près de 7000!

Ella Maillart est aussi attentive à l’histoire : celle du soulèvement nationsl

Kirghizes, aux transformations soviétiques, et à la collectivisation des troupeaux, mal vécue par les nomades. Très attentive aussi à la condition féminine : elle constate avec un certain regret la sédentarisation des nomades mais salue l’émancipation par l’éducation de certaines femmes: présentant Soultann

« Tu pensais: « que comprendra-t-elle de notre vie, celles-ci qui dit venir de si loin, d’une ville où il y a des millions d’habitants?Que sait-elle de la vie dont je viens[….]Alors qu’il y a trois ans tu entendis parler d’écolesouvertes à tous, tu as quitté la Syrte pour venirà Karakol.

Depuis, tu as pris conscience du monde, tu sais lire, écrire, tu arrives même à t’exprimer en articles péniblement écrits[….]tu n’as plus le ciel sur ta tête mais ta paie est un beau signe d’affranchissement: et aussi ta blouse kaki sur ta très courte jupe noire qui laisse voir tes jambes courbes. Tu es allée chez les tiens -avec ton enthousiasme de néophyte, ton prestige a grandi…. » 

Il me reste à lire la deuxième partie : .Vagabonde au Turkestan, mais ce sera de retour de Samarcande et Tachkent que je préfère découvrir avec des yeux neufs!