CARNET BULGARE
J’écris, assise sur la balancelle, au dessus de la piscine. Il fait frais, presque froid après les trois orages d’hier, le ciel est sans nuages et quand la zone ensoleillée m’aura atteinte, le soleil sera brûlant comme toujours.
L’ours de pierre regarde vers moi et pisse un haut jet glacé d’eau de montagne dans la piscine. Depuis le premier soir, à Sofia à la Villa Boyana, nous avons appris à nous endormir dans le murmure des fontaines. Le patron de l’hôtel me l’avait montrée fièrement à minuit et nous avions été surprises de découvrir tous ces gens qui remplissent bouteilles et bombonnes.
A Kovatchevitsa, la fontaine du village était sous notre balcon. Si l’eau se taisait, c’était parce que quelqu’un remplissait une bouteille, présence humaine silencieuse, en creux.
Que dire de la fontaine octogonale au chapeau vert de gris du monastère de Sokolovo ? Ses multiples bouches auraient pu désaltérer de nombreux pèlerins. Elle a aussi bercé notre sommeil. Sans parler de la rivière de Devin, gonflée par les orages.
Par politesse, à la taverne, je commandais de l’eau minérale facturée bien cher, elle arrivait souvent tiède avec le goût banalisé par l’emballage plastique. Depuis quelques temps j’ai mis un terme à cette commande inutile. La serveuse se tient bien droite, interrogatrice « Et pour boire ? » – « Rien du tout avec la soupe ! » est une réponse facile au dîner. Nous avons découvert au Complexe Rojena la fonaine à l’entrée, délicieuse, glacée et gratuite .
Ces fontaines bulgares nous ravissent. Partout dans la montagne, sur le bord des routes, on a construit de belles fontaines de pierre (ou des moches en ciment). Les automobilistes s’y arrêtent pour se désaltérer. Parfois, il y a un gobelet métallique attaché par une chaîne, même dans un monastère, en forme de louche. Des voitures s’arrêtent, quelques fois remplissent 30L. j’ai demandé pourquoi les gns nenaient de chez eux pour faire leurs provision. N’ont-ils pas l’eau courante ? A Koprivtshitsa l’attaché culturel avait dit « en Bulgarie, nous n’avons pas de problèmes d’eau, seulement de canalisations ». A Bojentsi, la jeune guide eut une autre explication « cette eau est gratuite, il fait chaud, il faut arroser els jardins ».
C’est une bénédiction que cette eau de montagne glacée alors que si peu d’hôtels mettent à notre disposition des réfrigérateurs qui fonctionnent. En voiture, à chaque fontaine, nous renouvelons nos bouteilles d’au fraîche. Dans les Rhodopes, certaines sources étaient taries. A Geravna, la courte averse avait réjoui les gens . ici, près de Melnik et Sandinsky, les villes les plus chaudes de Bulgarie noyers, cerisier et pruniers sont verts. Les hauteurs du Pirin semblent condenser les orages.
Je viens de terminer le livre de Paolo Rumiz « Aux frontières de l’Europe » qui convient à mes humeurs voyageuses. Il conviendrait de le ranger de retour entre les Patrick Leigh Fermor et Primo Levi. Il me vient l’idée d’une bibliothèque idéale où les livres ne seraient pas classés par ordre alphabétique mais par affinités.
8h30, nous sommes prêtes pour le départ. Prêtes, mais…enfermées. Un cadenas ferme le portail du complexe Rojena.