CARNET VIETNAMIEN

Route Mandarine
La Route Mandarine(RN1)l ’artère principale du Vietnam est une route à péage pour les voitures. Les motos ne paient rien.
Urbanisation galopante de Saïgon – 8 millions d’après le dernier recensement – sûrement beaucoup plus. Pour loger tous les gens affluant de tout le pays, il faut construire des immeubles. On draine les marécages, on aplanit, on dame le terrain. Des immeubles monstrueux sortent de terre comme des champignons. Constructions d’Etat – de mauvaise qualité selon notre guide – et construction privée. Dans la même logique, sur les bords de la route, slogans révolutionnaires et publicités géantes.
Arrêt pour les lotus en fleurs. Un petit garçon se précipite nous offre un bouquet. Je le photographie et nous lui donnons 5000dongs.
temple cadaoïste

Le temple Cadoaïste, sur le bord de la route, n’est ni très grand ni très beau. Occasion de rencontrer un culte qui rassemble deux millions de fidèles dans le sud du Vietnam. Religion pour les uns, secte pour les français, secte militariste pour les communistes. L’extérieur est très coloré. Dans le vestibule, sur une affiche étrange Victor Hugo est en compagnie de sages orientaux. Le cadoaïsme est un curieux syncrétisme. Au fond du temple, dans un fronton, l’un au dessous de l’autre figurent Bouddha, Mahomet, Jésus Christ et Lao Tseu encadrés par deux Génies taoïstes, un mandarin chinois et Bodhisattva en jaune. Au dessus de l’autel, dans un triangle : l’œil, le gauche, celui qui connaît le cœur et le cerveau et celui qui ne doit pas mentir. Devant l’autel deux grues (le bonheur) perchées sur des tortues (longévité). Les prêtres assistent à quatre offices par jour, les fidèles à deux seulement. Hommes et femmes prient dans des travées séparées, les prêtres sont au milieu de la nef. Les Cadoaïstes ont levé une armée contre le communisme. Ils furent donc réprimés pendant la Réunification, les pagodes transformées en bibliothèques. Après la politique d’Ouverture, pour donner des gages de liberté de culte vis-à-vis des Américains, on a ré-ouvert les temples.

Rizières
Nous avions imaginé une promenade dans une campagne vert fluo à damier de rizières, peuplée de paysannes sous leur chapeau conique, et, si possible, quelques buffles. Les rizières sont bien vertes. Des tombes badigeonnées de blanc se trouvent au beau milieu des rizières.
Malheureusement, le plus souvent, la route Mandarine est bordée de villages, d’échoppes, de restaurants pour routiers. Certains sont équipés de hamacs suspendus pour le repos des chauffeurs. Des entrepôts, nombreux masquent la campagne. Une séparation en ciment au milieu de la chaussée a pour but d’éviter les accidents de la route, très nombreux. 35 millions de motos circulent au Vietnam (80 millions d’habitants), presque une moto pour deux. Comme on peut s’asseoir à deux, voire à trois, ou même à quatre, sur une selle on peut imaginer que tout le Vietnam est motorisé. Aujourd’hui, dimanche, nombreux sont ceux qui sont rentrés dans leur famille dans le Delta et qui rentreront ce soir à Saïgon. Nous verrons deux accidents.
A 60 km de Saïgon : Mitho

A l’ occasion de la visite de la belle pagode, notre guide nous instruit dans la connaissance du Bouddhisme. Au Vietnam, une pagode est consacrée uniquement à Bouddha, les temples abritent d’autres divinités ou des Génies. Le Vietnam sous la double influence de la Chine et de l’Inde, Indochine, est le seul pays de la région où sont présentes les deux versions du Bouddhisme : le Bouddhisme de grand véhicule venant de Chine majoritaire et le Bouddhisme de Petit Véhicule, plutôt indien, répandu chez les Khmers et en Thaïlande. C’est ce qui explique que nous n’ayons rien reconnu dans les temples et pagodes de Cholon. Dans le Grand Véhicule, Bouddha est vénéré et représenté sous trois formes : le Bouddha d’hier, jeune, celui d’aujourd’hui et celui de demain, bedonnant et souriant. Dans les pagodes du Grand Véhicule, on voit la représentation de l’Arbre de Bouddha avec ses sept étages de bras représentant les 7 avatars ou 7 réincarnations. Dans le Petit Véhicule il n’existe qu’une seule représentation de Bouddha. La vie des moines, selon les deux interprétations est très différente : les moines du Grand Véhicule portent trois costumes différents, jaune pour la prière marron pour sortir et un dernier gris. Leurs épaules sont couvertes. Dans le Petit Véhicule, la robe safran laisse une épaule découverte. Les bonzes du petit Véhicule mendient chaque jour leur nourriture en portant leur bol. Ils mangent ce que les fidèles leur ont offert. Ceux du grand Véhicule cuisinent pour la communauté et sont strictement végétariens. Dans les pagodes du Grand Véhicule, les troncs sont bien en évidence, dans le Petit Véhicule où les bonzes vivent d’aumônes on ne doit pas voir le tronc. Dans le Grand Véhicule on peut rencontrer ensemble Bonzes et bonzesses pas dans le Petit. Enfin da&ns le GV les bonzes consacrent leur vie à l’état monastique. Les Khmers et les Thaïs envoient leurs enfants pour une période de trois ans et l’état de bonze est temporaire.
Un gong appelle les bonzes à l’office. Ils ont revêtu leur tenue jaune et se réunissent autour de tables dressées comme pour leur repas dans la partie « enfer » de leur temple. Plus loin, là où se trouvent les statues vénérables est la partie « paradis ». Il nous faudra encore maintes visites guidées avant que nous nous y retrouvions dans un lieu de culte oriental. Au moins nous avons compris certaines différences entre le bouddhisme vietnamien et celui de la Thaïlande. En dehors des considérations théologiques, la pagode de Mitho est très décorée dans les teintes beiges avec des mosaïques pastel.
Lorsque nous retrouvons la voiture, les enfants nous attendent. Imprudemment, je leur avais lancé « later » pour me débarrasser de la vendeuse de chapeaux et de la petite fille aux cartes postales. Elles me rappellent « later », je dois tenir parole. Le chapeau me con vient tout à fait : beige, aéré, un peu cloche, tricoté, pas trop grand pour un prix minime (3$=45 000VND) c’est une aubaine. Pour 1$ j’achète également 10 cartes postales que la petite fille recompte en français.
L’Ile de la Tortue

Nous laissons la voiture sur le bord du Mékong pour emprunter un bateau à fond plat. A bord, le capitaine, sa femme, leur fils, et un petit chien. Avec notre guide, cela fait beaucoup de monde pour deux passagères seulement. Selon le guide, c’est un bateau de l’Etat. Sans nous, le marin serait au chômage. La traversée du Mékong, ou plutôt d’un de ses bras, dure un bon quart d’heure. On m’offre une noix de coco que je siffle avec plaisir. Dominique fait cadeau d’un mini accordéon au petit garçon.
Sur l’île de la Tortue, un chemin dallé nous mène entre vergers et étals de souvenirs puis aux tables aménagées pour la dégustation des fruits. L’endroit est aimablement décoré de fruits. J’observe le jacquier qui porte ses gros fruits attachés au tronc. Nous avons vu de belles portes en jacquier, j’avais imaginé un très gros arbre. Dans des palanches, des ananas, je me fais tirer le portrait portant la palanche. On nous apporte tout un assortiment de fruits tropicaux : papaye épluchée, ananas découpé avec des festons, longanes, litchis, ramboutans, petites bananes, et fruits du dragon en quartier. Je suis surtout curieuse de goûter ce dernier. Il est aussi joli à l’extérieur avec sa pulpe blanche et ses pépins noirs dans l’écorce rose fuchsia. Dans une petite coupelle : du sel rougi par du piment, on trempe une rondelle d’ananas. Le sel fait ressortir le goût, c’est délicieux !
Un petit orchestre et des jeunes filles en ao dai blanc nous font entendre des chansons du Delta. Nous traversons les vergers de longaniers. Nouvelle dégustation : du miel qu’on sert avec du thé dans de tout petits verres. De minuscules kumquats sont pressés pour aromatiser le thé. Une jeune fille ouvre la ruche et me propose de sortir le python de sa cage pour me le mettre au cou. Je refuse, j’ai déjà sacrifié à cette expérience. Dans une assiette des amuse-gueules : graines de lotus et gingembre confits, chips de bananes, nougat à l’arachide. On se laisse tenter par les graines de lotus et par le gingembre.
Le retour à l’embarcadère se fait dans de petites barques menées par des paysannes dans de petits canaux tortueux serpentant entre les palmiers d’eau.
Sadec, la ville de Marguerite Duras

Nous quittons la route Mandarine, toujours aussi fréquentée et construite sur ses bords pour Sadec, la ville de Marguerite Duras. Dès que nous sortons de la route principale, la circulation se complique. La route est en chantier, pleine de nids de poules. Nous traversons de nombreux cours d’eau : canaux et arroyos. « Le canal est droit, l’arroyo sinueux » explique le guide. Le long du canal, de curieux dômes rouge : les fours des briqueteries. Dans cette cuvette du Mékong, l’argile abonde. On utilise l’écorce de riz comme combustible abondant et bon marché qui arrive par bateau directement de l’usine où le riz est décortiqué.

L’école de la mère de Marguerite Duras est toujours une école primaire. Le décor n’a pas changé. Sur la grille rouillée, un tableau noir à l’ancienne annonce quelque chose aux parents d’élèves, calligraphié à la craie blanche. Sans doute la mère de Marguerite Duras rédigeait ses annonces aux familles sur le même tableau. Malheureusement, aujourd’hui c’est dimanche et les grandes vacances ont commencé au Vietnam. Nous ne verrons donc que la cour et le bureau. Le concierge ne prendra pas l’initiative de nous ouvrir une classe. Si nous étions passées à une autre période nous aurions rencontré les enfants de la classe francophone. La mère de Marguerite Duras possédait une jolie villa un peu plus loin occupée maintenant par une section de la police économique. On ne visite pas. Le taxi ne se déroute pas. Quitte à ne voir que des extérieurs, on aurait pu faire le détour ! Nous sommes ravies de ce pèlerinage. India Song est notre « film culte » de notre jeunesse. J’ai lu avec plaisir « Barrages contre le Pacifique » juste avant notre départ. La biographie écrite par Laure Adler m’a donné envie de voir les lieux de son enfance et de relire ses œuvres.
Il fait gris et lourd. La pluie se met à tomber. Nous sommes réveillées depuis 5 heures. Il est 14H. Je lutte contre le sommeil, bercée par la voiture. Je voudrais ne rien rater de l’excursion mais cette RN1 n’a, décidément rien de passionnant !
Nous traversons le bras antérieur du Mékong sur un bac. Nous l’avons déjà franchi sur un beau pont suspendu ce matin. Je préfère le bac.
Canthô

– 16H : arrivée à Canthô (prononcer Cantheu), capitale de la province, 1 million d’habitants, en pleine expansion. D’énormes superficies ont été nivelées et tassées, des zones industrielles flambant neuves attendent d’être occupées. Le Vietnam industriel remplace les rizières déjà invisibles de la RN1. L’image romantique du petit pays rural, David contre le Goliath américain, est un peu écornée. Le « petit pays » est aussi peuplé que l’Allemagne sur un territoire équivalent à celui de l’Italie. La densité Delta est forte et la croissance industrielle est rapide.
Nous visitons une pagode Khmère, c’est un temple d’importance mineure, surtout l’occasion de voir une pagode du Petit Véhicule et de réviser les différences énoncées par le guide ce matin. Je reconnais la parenté de silhouette avec les pagodes de Thaïlande et la robe safran des bonzes.

L’ Hôtel Saigon Cantho, 3 étoiles, occupe l’angle d’une rue tranquille à deux blocs du Mékong. C’est à un hôtel pour hommes d’affaires. On nous offre le verre de bienvenue. La porte de notre chambre ouvre sur un mignon lac avec des plantes vertes, un jet d’eau, une fausse montagne avec une pagode de 7 étages en céramique et de vrais poissons, au milieu d’un patio autour duquel l’hôtel est construit. La chambre est immense, beau mobilier de bois sombre, tissu beige au motif floral sur le dessus de lit et les rideaux assortis. Des lampes de chevet montées sur un bras en laiton pliant. Dans un coin, un canapé d’angle autour d’une table carrée porte une théière et des tasses. Sans parler des jolis accessoires de toilette dans la salle de bain, du peignoir d’éponge…Il faut être aussi ploucs que nous pour se charger d’une trousse de toilette : on nous offre peignes, brosses à dents, cotons-tiges nécessaire à coudre, à reluire les chaussures. Il y a même un ticket pour un sauna gratuit (le massage payant). Bien entendu, l’hôtel est Wifi. Si jamais on a oublié son ordinateur, il y en a un à disposition dans le hall .
Promenade en cyclopousse

C’est un cyclo à moteur qui nous embarque sur les coussins de skaï, notre guide face à nous. La circulation est très fluide. Nous goûtons au calme provincial après la cohue saïgonnaise. Peu de curiosités notables à Canthô, ville moderne. Le marché couvert ressemble à celui d’HCMV, l’hôpital occupe un bâtiment colonial. Nous passons devant un supermarché, on nous montre même l’Aqualand local. Des attroupements de motos devant les centres d’examens où on passe l’examen d’entrée à l’Université (aujourd’hui dimanche !). On se laisse brouetter Le guide nous montre les cafés équipés de télévision en prévision de la finale de la coupe du Monde de foot : France/Italie que les foules vietnamiennes regarderont de 1 à 3 heures du matin.
J’essaie le sauna. Quelle idée bizarre de retourner transpirer alors qu’on a eu chaud toute la journée ! Mais je n’ai jamais été au sauna. A mon âge, cela manque à mon expérience. J’aurais dû prendre au moins de la lecture. On s’ennuie dans la petite cabine lambrissée.
On frappe à notre porte pour nous apporter une corbeille de fruits en vannerie. Un personnage de fil de fer portant le chapeau typique se tient debout sur une barque.