CARNET SICILIEN 1998

L’orage nous a réveillées vers 6h30.
Petit-déjeuner-buffet en compagnie d’un troupeau arrivé en car, Suisses et Allemands, en survêtements hideux, vert et violets. Je renvoie le café américain.
– « Nous sommes en Italie!« , j’explique au garçon, « il n’est pas question de boire cette lavasse! »
Ce dernier m’apporte un espresso en souriant.
Catacombes

La route panoramique longe la zone archéologique sous la pluie battante. Nous avons bon espoir que le temps va s’arranger et préférons nous abriter aux catacombes de San Giovanni.
La guide est munie d’un parapluie et d’une grosse torche. La visite est en Italien que je suis ravie de comprendre.
Ces catacombes occupent l’ancien réseau d’adduction d’eau construit par les Grecs: des citernes creusées dans la pierre. Les couloirs correspondent aux canaux souterrains.
Ce sont les cimetières des premiers chrétiens. Les tombes sont réparties dans des sortes de caves au plafond voûté en arc de cercle. Au sol, jusqu’à vingt tombes sont creusées dans la roche côte à côte, le père et la mère occupant les premières places, ensuite on inhumé les enfants. En plus des grandes tombes dans la paroi, de petites niches rectangulaires étaient destinées aux enfants ou aux ossements. Bien sûr, actuellement, c’est vide. Il faut donc imaginer les dalles de marbre pour les gens riches, de terre cuite pour les plus modestes. Du marbre, il ne reste plus rien. Quelques traces de fresques et quelques gravures subsistent. Notre guide évoque par leur nom les défunts qu’on a identifiés : beaucoup de femmes. Une certaine Adelpha dont le mari, connu, avait fait confectionner un sarcophage orné de nombreuses sculptures. Une autre jeune femme morte à 27 ans s’était convertie au christianisme à 13. Dans une chapelle, le tombeau monumental d’un pape. Des paons, symboles d’immortalité, des croix grecques, une barque gravée figurait le christianisme luttant sur la mer, le poisson, signe de Jésus, au dessus une bulle : l’eucharistie.

Notre guide raconte la vie des premiers chrétiens avec force détails. Quand elle a l’impression que je comprends mal, elle recommence.
San Giovanni

L’Eglise San Giovanni était, à l’origine, une basilique byzantine : plan initial avec la croix grecque. Les Normands l’ont agrandie ensuite, laissant les arcs gothiques. Les tremblements de terre successifs ont détruit l’église normande. A l’extérieur, le portique est catalan. Des restaurations plus récentes ont encore modifié l’ensemble. La crypte byzantine est la plus ancienne église de l’Occident. La guide nous montre les fresques puis l’emplacement de Saint Marziano envoyé à Syracuse par saint Pierre.
Toutes ces histoires des anciens chrétiens paraissent terriblement vivantes. Elles ne sont pas empoussiérées par de la bigoterie et sortent, toutes fraîches de l’Antiquité.
Latomies

Le temps ne s’est pas amélioré. Il pleut toujours autant quand nous visitons donc la zone archéologique, suivant les troupeaux de français, belges… jusqu’aux latomies, les carrières de pierres antiques, souterraines mais pas mal effondrées. Elles sont envahies par une végétation luxuriante, citronniers, magnolias, glycines…

Une des attractions de la visite est l’Oreille de Denys, une fente dans la falaise qui donne une acoustique extraordinaire à la salle. A notre arrivée un Italien chante à voix basse, on l’entend de très loin. Malheureusement un groupe de français entonne « Les Montagnards sont là !». Nous fuyons ces hordes hurlantes.
Le théâtre grec est creusé dans la roche. Au dessus, une grotte avec une petite cascade. Sous la pluie, c’est beaucoup moins charmant.
Musée archéologique
Le Musée Archéologique est très bien conçu. Une surprise : la faune naine des îles de Méditerranée. L’éléphant nain de Malte et de Sicile ainsi que des hippopotames nains et des cerfs.
Les vitrines de la Préhistoire et de l’âge de Bronze sont un peu répétitives. Les objets grecs sont très nombreux. Les vases, un peu ennuyeux. J’ai préféré les figurines en terre cuite représentant des déesses et des animaux.
Après un pique-nique dans la voiture nous faisons route vers Acireale, toujours sous la pluie passant devant des raffineries et des complexes chimique puis traversant des vallées arides.