la route d’Essaouira à Mirleft

PLAGES DE L’ATLANTIQUE – ANTIATLAS

Cad Rhir Euphorbes

8h40, le soleil est dans l’axe de la route, plein sud, éblouissant. C’est un véritable crève-cœur que de traverser les vergers d’arganiers grisâtres desséchés. Les arganiers sont le trésor de la région. Ils font vivre des milliers de femmes dans les coopératives paysannes. Leur silhouette en parasol donne de l’ombre en temps de canicule. Fourrage pour les chèvres. Ils sont un élément essentiel de lutte contre la désertification et la conservation des sols. Le Maroc a fourni des efforts pour la préservation des arganiers en distribuant des fours solaires pour éviter qu’on ne les coupe pour le bois de cuisson. Les arbres sont en stress hydrique avec cette sècheresse qui dure des années déjà.

Le relief s’accentue. La route s’élève. En altitude il y a un peu plus d’humidité. Des champs labourés, semés sont verts. Il y a même des mauvaises herbes sur le bord de la route (crucifères jaunes). Des oliviers coexistent avec les arganiers. Smimou s’éveille à peine à 9h30, écoliers et collégiens sont sur le chemin de l’école. On grimpe une interminable montée. Les crêtes sont bleues, violettes dans la brume. Descente sur Tamri où l’étroite vallée est occupée par des bananeraies, des cultures maraîchères et quelques serres.

Avant le cap Rirh

La route surplombe l’océan. Une très belle plage attire de nombreux surfeurs qui font de la gymnastique avant de rejoindre les vagues. Un vendeur propose des barquettes de framboises pour 20 dh , parfumées, elles viennent d’être cueillies. De Tamri à Agadir nous suivons le littoral, tantôt en corniche sur une côte rocheuse où les rares arbres ont des formes torturées, courbés par le vent d’ouest. Le sol est hérissé de plantes grasses, cactus ressemblant à de gros cierges buissonnants (Euphorbia handiensis). Des arbustes malingres fleurissent malgré la sècheresse (Nicotiana glauca). Aux environs du Cap Rhir une laie suivie de jolis marcassins traverse la route. On passe au-dessus de belles plages frangées de vagues.

La N1 aborde Agadir par son port. Au large, de très gros bateaux (pétroliers ou méthaniers) attendent. Les grosses sphères métalliques, les citernes, les installations portuaires sont importantes mais je suis encore plus impressionnée par le fourmillement sur les quai du port de pêche ( 462 navires et 1319 barques y sont répertoriées selon Darrayat.) si nombreux que le port de pêche est encombré ; La route entre dans la ville par une artère droite avec une voie en site propre pour les transports en commun. Elle passe entre des immeubles modernes chics. Pour sortir, je règle le GPS ave Massa pour but. Il nous entraîne dans la ville voisine d’Inezgane commerçante, embouteillée, mais tellement plus vivante que les façades contemporaines aseptisées que nous avons vues défiler à Agadir. Malgré les indications du GPS, on se perd dans les petites artères, coincées derrière le camion-poubelle et autres auto-écoles. Le pont est bloqué par une voiture en panne. Il y a de l’eau dans l’oued Souss mais on n’a même pas l’idée de le regarder. Nous rejoignons enfin une sorte de périphérique et la N1.  C’est le règne de la logistique et des gros camions frigorifiques qui emportent les fruits et les légumes en Europe. Domaine des serres opaques aux toits plats s’étendant sur de grandes surfaces. De grands murs enclosent les domaines agricoles. Difficile de deviner ce qui pousse en dessous. Les champs de plein air sont aussi entourés de bâches vertes et de murs. Que cultive-t-on ? Cette région agricole contraste avec les collines pierreuses que nous venons de traverser ce matin. Des publicités géantes vantes des fongicides. Agriculture conventionnelle !

Oued Massa

Nous quittons enfin la route principale pour atteindre Massa et le Parc Naturel du Souss-Massa. Dans le fleuve Massa l’eau verte coule entre des champs de luzerne vert fluo. La luzerne est destinée aux animaux ; c’est aussi un engrais vert. On cultive aussi en ce moment des navets. A cause de la Réserve Ornithologique le bio est obligatoire. « Il faut préserver la biodiversité et les insectes pour les oiseaux » affirme le guide qui m’accompagnera pour une courte promenade (45 minutes/100 dh) . le musée est fermé. Sur le parking, nous sommes les seules visiteuses. Pique-nique rapide mini bruschetta et framboises.

J’ai de la chance, Lahcen, avec ses grosses jumelles repère un vol d’ibis chauves, et un balbuzard (aigle pêcheur) . Debout dans l’eau, des flamands roses et des spatules, et plus loin, les canards barbotent canards souchets(tête verte bec filtreur) tadornes caserca (tête blanche et corps roux). Les ibis chauves  passent et repassent « ils embêtent l’aigle » qui va pêcher ailleurs. J’ai déjà vu des choucas chasser ainsi un aigle à SuperDevoluy au Col du Rabou. Finalement, un hélicoptère survient, effrayant ibis, spatules et flamands qui décampent.

Lahcen nous indique une petite route tranquille dans la campagne jusqu’à Mirleft pour éviter la Nationale 1 et ses camions. C’est la route d’Aglou qui part de Massa et traverse la petite ville de 18.000 habitants dans toute sa longueur. A la sortie de Massa, la campagne devient désertique avec des buissons épineux. Du sable blanc s’accumule sur les côtés de la route.

Aglou est une station balnéaire plutôt en expansion avec des chantiers presque partout. La route longe le littoral : des falaises rouges bordent l’Atlantique écumant.

Aftas trip la piscine et notre studio

C’est sur cette belle corniche que nous trouvons Aftas Trip, une résidence de vacances construite à flanc de colline entourée de verdure ce qui tranche avec l’environnement. Plusieurs barres de trois ou quatre studios précédés de belles terrasses, une piscine bleue.  Les allées gravillonnées sont bordées de murets ou de haies taillées au carré comme chez nous les buis ou les ifs, mais ce sont des éléanus aux clochettes odorantes, des hibiscus (sans fleurs) et d’autres végétaux difficiles à identifier à cause de la taille drastique. Les terrasses de chaque studio sont à l’ombre d’une pergola couverte de canisses. Du lierre exubérant grimpe sur le mur qui sépare des voisins. Un canapé, deux tabourets, une table basse meublent notre terrasse. Le studio est égayé de tadelakt jaune pâle. Une très jolie table est incrustée d’argent ciselé et d’os (ivoire ?) et de marqueterie, le tout protégé par une vitre. Il y a aussi une jolie commode en bois peint bleu foncé. Sinon les rangements sont des casiers muraux enduits de tadelakt.

Nous profitons du soir qui tombe. Entre les deux appels du muezzin, on entend les enfants lire en chœur le Coran ; Nous avions pris cette lecture comme la répétition d’une chorale pour une fête.

On dîne sous une grande tente caïdale de toile blanche ornée de motifs et doublée de tissus colorés. Nous sommes les seules clientes. On nous accueille très bien. Il n’y a qu’une seule marche. Seule la télévision nous donne du fil à retordre. Il y a au moins 30 chaînes arabophones, d’Irak au Soudan, 2 chaines palestiniennes, d’innombrables égyptiennes. France 24 parle arabe, je trouve enfin la BBC.

La « friture » que Dominique a commandée est servie sur une grande assiette avec un filet de merlan, une sole et des anneaux de calamar, des légumes bouillis et une mayonnaise à l’ail comme dans l’aïoli d’hier. La salade marocaine est une salade tomate, oignons, aromatisée de persil, coriandre, menthe roquette. Elle est présentée comprimée dans un emporte-pièce.  Mon tagine poulet olives et citron est un peu décevant. Il faut me résigner aucun tagine ne soutiendra la  comparaison avec celui de Rachida .

 

 

 

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

4 réflexions sur « la route d’Essaouira à Mirleft »

    1. @claudialucia : et on va encore transiger avec les mesures de transition écologique, reculer sur les carburants, annuler des écotaxes ! Quand je pense aux « écoterroristes » qu’on n’hésite pas à canarder et aux concessions qui vont être faites….

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