Randonnée avec Hassan : deux greniers et des sources

PLAGES DE L’ATLANTIQUE – MONTAGNE DE L’ANTI-ATLAS

Grnier au dessus d’Amtoudi

Grenier au-dessus d’Amtoudi

Au départ, quelques appréhensions, 300 m de dénivelées sur un sentier en zigzag. Hassan est ponctuel mais il a oublié le bâton que je lui avais demandé. Dans un tas de feuilles de palmier, il trouve la tige qu’il me faut, casse la bonne longueur et frotte le bord épineux contre un rocher : la Préhistoire ! Il est parfait souple léger et résistant et va bien m’aider dans la montée.

Hassan est habillé de bleu, chèche bleu, djellaba bleue, l’uniforme des guides dans le sud marocain.

Le sentier muletier est confortable, assez large, terreux. De temps en temps Hassan fait une pause pour commenter le paysage. Dans les jardins on a semé du blé, par an trois récoltes de blé alternées avec d’autres cultures. Carottes, navets, oignons sont à l’intention des habitants d’Amtoudi qui se partagent les récoltes et font sécher les carottes et les navets sur les toits. Hassan a téléphoné au gardien du grenier qui nous attendra à l’arrivée.

41 minutes de montée, je suis dans les temps !

Sur le toit du grenier : abreuvoirs et Hassan

L’Agadir d’Amtoudi, Agadir Id Aïssa a été construit dès le XIIème siècle. C’est un grenier communautaire où les habitants mettaient à l’abri tout ce qui était précieux : leurs récoltes, l’huile, l’argan, les amandes et les ruches. A sa construction, ils habitaient des tentes et ils étaient vulnérables aux razzias des tribus qui venaient en masse et emportaient tout ce qu’ils pouvaient emporter : tentes et tapis, animaux, nourriture… Perché sur le sommet, gardé par les gardiens qui pouvaient prévoir les attaques de loin, il était inexpugnable. Chaque famille possédait une case fermée par une porte et un cadenas. Il y en avait 75 de taille variable, certains avaient même la taille d’une petite pièce, d’autres plus petites. Aérées par une ouverture, fermée par une porte de palmier. Souvent une chatière a été pratiquée pour éliminer les rongeurs. On stockait l’huile dans des jarres.

Rucher

Un petit musée réunit les objets usuels, moulin à argan ou à farine, vaisselle, plats à tagine, serrures variées : traditionnelles en bois percées de nombreux trous la clé portait le même nombre de pic et ressemblait parfois à une brosse à dents.

Petit musée : calebasses et théière

Sur une terrasse on a construit des abreuvoirs pour les ânes et mulets. On a même pensé aux oiseaux  avec cinq cupules, mini-abreuvoirs ou baignoires. Un peu plus loin, le rucher avec des cases où l’on rangeait les ruches cylindriques en fibre de palmier tressée. Le miel se récoltait par le fond, ouvert. A côté des ruches cylindriques, un petit panier de même forme était destiné à la conservation des dattes.

Le toit est enduit d’une pellicule blanche bien lisse avec des trous pour récupérer chaque goutte de pluie dans une citerne. Des gouttières verticales canalisent l’eau.

Toit du grenier et tour de guet

Les tours des gardiens, aux extrémités, sont crénelées décorées en gradin.

Les villageois ont utilisé ces greniers jusqu’aux années 60. Ils habitent des maisons en dur et les razzias ont cessé mais les habitudes de solidarités et de partage sont vivaces chez ces berbères.

La descente sur l’autre côté est plus facile que la montée au-dessus du camping. Nous arrivons à la maison de Hassan qui appelle sa fille apportant un pain rond et une boite de filets de maquereau.

La seconde promenade a pour but les sources et les piscines naturelles.

Piscine naturelle

Nous marchons dans le lit de l’oued dans un canyon très profond. Un ruban de ciment court dans l’ombre des palmiers, arganiers et caroubiers. Il y a également des figuiers qui ont très peu de feuilles et des grenadiers aux feuillage jaune. Le chemin de ciment conduit à un village Aglaoui – village sans voitures, les ânes suppléent aux vélos et mobylettes.

Après le village nous descendons dans le lit de l’oued. Le sentier se fraie un chemin dans la végétation exubérante. L’eau coule dans un canal de ciment. Nous arrivons sur une sorte de plateau d’aiguillage pour les rigoles. On bouche un canal et l’eau prend un autre chemin.

Le canyon se resserre et tourne. Dans le cirque des stalactites se déploient le long de la falaise. Le parcours devient sportif. L’eau devient de plus en plus abondante. Il faut grimper sur de gros rochers arrondis et lisses – heureusement bien secs -mon bâton m’aide bien à sauter de pierre en pierre dans les gués. Puis des marches, et à nouveau de l’escalade pour découvrir une première piscine, une cascade et une grande et belle piscine naturelle où nagent des truites. A nouveau des rochers à franchir, on marche sur une arête qui surplombe l’eau, il ne faut pas avoir le vertige. On retrouve un nouveau bassin, à la surface de l’eau des points de lumière qui dansent comme des étoiles.

On pourrait continuer encore et encore dans le canyon long de 14 km…se baigner.

Agadir Aglaoui

Agadir coiffant un piton

Comme perché sur une colonne, le deuxième agadir coiffe parfaitement le rocher. Du canyon, il parait moins haut que l’Agadir d’Amtoudi mais le sentier qui traverse un pierrier est beaucoup moins confortable. Les pierres pierre, de grosses frites, bâtonnets aplatis aux arêtes aigues, bougent sous mes pieds et je m’essouffle un peu.

Pause pique- nique l’ombre d’un petit arganier malingre. Hassan sort du sac des oranges, une tomate, un poivron et un oignon qu’il détaille finement dans une assiette. Il assaisonne avec l’huile des maquereaux. Il sort le pain d’un torchon à carreaux. Oranges et pommes pour dessert. Comme je suis assoiffée (je n’ai pas pris d’eau) je dévore les oranges.

C’est l’heure de la prière. Le chant du muezzin est réverbéré par la falaise qui l’amplifie et revient en écho. Impressionnant !

L’agadir Aglaoui est daté 1015, il a été restauré entre 2006 et 2014. Un panneau explique qu’il s’est développé en colimaçon autour du rocher. Plusieurs époques de construction se sont superposées. Chaque fois la topographie a dicté la construction qui l’épouse parfaitement. La progression dans els étages inférieurs se fait dans le noir, il faut allumer la torche du téléphone. Mes lunettes de soleil sont un véritable problème, avec, je suis dans le noir, sans je ne vois plus rien. Un couple d’Allemands a le même souci, cela nous fait bien rire. La montée d’un étage à l’autre se fait à la force des brasn je pose mon téléphone et me hisse. La descente est plus acrobatique : des « marches », lames de roche cimentées dans le mur sont bien  prévues pour les pieds mais pour des gens nettement plus grands que moi. J’aimerais bien me débrouiller seule mais je suis forcée d’accepter l’aide d’Hassan.

Le sommet, blanc et lisse comme dans le premier grenier est de toute beauté avec les courbes, reflets des courbes du canyon ; Il révèle l’harmonie de l’architecture.

Hassan propose une quatrième promenade pour voir des peintures rupestres, c’est un peu loin il faut prendre la voiture. Il est déjà tard, ce n’est pas raisonnable.

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

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