L’Affaire de la rue Transnonain – Jérôme Chantreau

On ne tue pas le peuple dans son lit

« 4 au 14 avril 1834, des émeutes ont ensanglanté le pays. Le premier foyer s’est allumé chez les ouvriers
lyonnais. C’est la deuxième fois en trois ans que les canuts se révoltent, »

Le règne de Louis Philippe ne s’est pas déroulé tranquillement. J’avais retenu les Jours de Juillet 1830, qui avait mis fin au règne de Charles X, et plus tard à la Révolution de 1848. L’Affaire de la Rue Transnonain met en lumière des évènements moins bien connus. 

Depuis quarante huit heures de l’Hôtel de Ville jusqu’au Temple, les insurgés ont érigé plus de six mille barricades […]Mais au moment où l’on pense que la paix est revenue, un coup de feu est tiré, un simple coup de feu. Et les hommes du 35e de ligne pénètrent au numéro 12 de la rue Transnonain.

La Rue Transnonain n’existe plus actuellement, confondue avec la Rue Beaubourg élargie au cours des modernisations de Paris. Une seule plaque  rappelle son existence

numéro 62 de la rue Beaubourg, un immeuble cossu a remplacé le numéro 12 de la rue Transnonain. 

Joseph Lutz, policier de la brigade des Mœurs, ancien « chien de Vidocq« est chargé de l’enquête de l’Affaire de la rue Transnonain. Ainsi, commence le roman que je croyais roman policier. Le 14 avril, quand les policiers et le médecin légiste viennent constater le massacre. 

Il s’attendait à examiner les dépouilles d’insurgés, décidés à vivre libres ou à mourir. Pas une maisonnée de commerçants.

Douze victimes massacrés sauvagement, des bons bourgeois, des artisans, une femme,  un enfant, le fils de la concierge, un jeune homme dans son lit….Pourquoi les militaires se sont-ils acharnés sur les habitants de cet immeuble? Officiellement, un coup de feu a été tiré et un officier est décédé, la troupe se serait précipitée pour lui rendre justice.

Une enquête est ouverte, des témoins entendus, des militaires principalement, des voisins qui répètent tous la même histoire. Officiellement on tient le nom du tireur qui a tué le capitaine. Fin de l’histoire, en attendant un procès.

Tout serait rentré dans l’ordre si Ledru-Rollin, n’avait pas publié un mémoire affirmant que Transnonain est un crime d’Etat et que Daumier n’avait pas réalisé une lithographie représentant une famille entière gisante dans son sang. La Presse s’est emparée de l’Affaire qu’il s’agit maintenant de classer. 

Joseph Lutz n’est pas convaincu des résultats d’une enquête bâclée. La balistique contredit les hypothèses. Il est impossible que Louis Breffort, exécuté au 5ème étage, soit l’auteur du tir mortel. Les voisins n’ont pas été interrogés…un témoin-clé, Annette Vacher, la compagne de Louis a disparu…Le policier, malgré les consignes de sa hiérarchie, va mener ses investigations et chercher la jeune femme aux cheveux rouges dans les maisons closes. 

 je chercherais d’abord l’identité de celui qui a tiré le coup de feu. Il faut un certain cran, ou une bonne dose
de folie, pour ouvrir une fenêtre et tirer sur un officier, au milieu d’une émeute. — Nous ne vous
demandons pas de trouver les responsables, interrompt Gisquet. Nous les connaissons. Nous traînons
cette affaire depuis quatre mois, et le ministre de l’Intérieur veut une résolution rapide. Vous savez l’
essentiel. Une agression des insurgés,

Sur une intrigue assez mince, le romancier va construire un roman historique très documenté. Il va aussi évoquer de manière très fouillée des personnages  de fiction : Joseph Lutz et sa famille et Annette Vacher. Nous allons suivre ces héros pendant presque tout le siècle, des guerres napoléoniennes où Joseph a été blessé, à la Commune et même après. De Bayonne à Paris, pour Annette. Bien sûr, des figures historiques vont intervenir : Adolphe Thiers, ministre et le Général Bugeaud qui a déjà réprimé dans le sang la Révolte des Canuts. 

L’enquête conduit Joseph dans le Paris encore médiéval du Marais, mais aussi dans les carrières de Gypse de Montmartre, dans la zone, aux portes de Paris où arrivent les immigrants, auvergnats ou bretons….Estaminets et bordels, imprimeries et autres artisanats. la reconstitution est très vivante et pittoresque. Argot des bouchers…

Sans oublier les Saint- Simoniens et le procès qu’on intenta à Enfantin eainsi que les premières feuilles féministes œuvres de Saint Simoniennes

Une bibliographie en fin de volume peut être consultée.

Je m’attendais à un roman policier, je me suis laissée embarquée dans un roman historique puissant et très documenté.

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

11 réflexions sur « L’Affaire de la rue Transnonain – Jérôme Chantreau »

  1. J’ai aimé ce roman la partie historique est vraiment très bien . Mais en revanche, j’ai trouvé, l’histoire amoureuse est vraiment très faible.

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  2. Je pense que c’est l’époque où je connais le moins bien l’histoire de France ; elle m’a toujours paru un peu confuse et terne. Ce roman a tout pour me plaire (et m’instruire).

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  3. C’est un de mes coups de coeur de l’année. Une enquête historique romancée mais tellement bien documentée. L’auteur restitue bien l’ambiance du temps et ses personnages sont bien campés. J’ai aimé son approche particulière. Et en plus, l’objet livre lui-même est de belle qualité (le grammage des pages, la police d’écriture, le format pratique, etc).

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