A la suite de la lecture de Demon Copperhead, Je lis je blogue m’a signalé que le Masque et la Plume l’avait cité à propos de James de Everett. CLIC
Comme la lecture en miroir de David Copperfield/Demon Copperhead m’a intéressée, j’ai conçu le projet de renouveler l’expérience avec Huckleberry Finn/James. Avant de me lancer dans l’aventure, j’ai fait le détour par l’essai Toutes les époques sont dégueulasses de Laure Murat dont le thème est justement la récriture/réécriture dans le cadre de la Cancel Culture.
Laure Murat, s’est intéressée à James Bond, Miss Marple, Tintin, ainsi qu’aux ouvrages de Road Dahl(que je ne connais pas).Ces œuvres posent de graves problèmes de racisme, sexisme et colonialisme et ont fait l’objet de récriture. Elle a également cité Ourika (1823) de Claire de Duras. Huckleburry Finn et James sont plutôt un cas de récriture. Enfin, elle évoque l’appel fait aux sensitive writers par certains écrivains pour une écriture politiquement correcte.
En préambule intéressons nous à ces deux concepts : réécriture et récriture
le verbe réécrire (ou le substantif réécriture) pour désigner l’action qui consiste à réinventer, à partir d’un
texte existant, une forme et une vision nouvelles – comme l’a fait, par exemple, Racine en écrivant La
Thébaïde, Iphigénie, Andromaque ou Phèdre à partir d’Euripide.récrire (ou le substantif récriture) pour désigner tout ce qui a trait au remaniement d’un texte à une fin
de mise aux normes (typographiques, morales, etc.) sans intention esthétique.
Réécrire ou Récrire procèdent de deux démarches très différentes.
réécriture relève de l’art et de l’acte créateur, la récriture de la correction et de l’altération.
La Réécriture est acte de création, on s’inspire d’une œuvre connue du public pour en écrire une nouvelle, originale. Le plus souvent, l’auteur situe l’action dans une autre époque, un autre contexte politique. Le lecteur qui a déjà des références culturelles appréciera, ou non. Personne n’ira reprocher à Joyce d’avoir utilisé Ulysse.
La Récriture, en revanche, est la correction de l’œuvre originale sans forcément l’assentiment de l’auteur. On débarrasse le texte des mots choquants principalement les n-words ou les remarques racistes, antisémites, grossophobes et autres. Ces corrections sont aléatoires et très approximatives. Pourquoi ne pas blesser les Noirs et blesser les Coréens? Remplacer un patronyme juif par un autre (qui se trouve juif aussi) dans Tintin. La correction sera toujours imparfaite à moins de vider le texte de toute saveur et de tout sens. Laure Murat démontre que le but de la récriture est commercial :
C’est exclusivement pour conserver leur valeur lucrative que les éditeurs ont procédé à ces nettoyages
approximatifs, avant que les héros canoniques comme Miss Marple ou James Bond, notoirement racistes
et sexistes, ne deviennent complètement ringards.
L’effacement du texte original est aussi dangereux.
Car éliminer ce qui gêne aujourd’hui au motif que cela nous offense, c’est priver les opprimés de l’
histoire de leur oppression. Faites de James Bond un féministe ou seulement un homme respectueux
des femmes, et dans cinquante ans, on ne comprendra plus rien à l’histoire de la misogynie ordinaire
dans les années cinquante.
Refus de l’appropriation culturelle et relecture par les sensitive writers, censure de la cancel culture ne sont qu’un volet de la censure qui règne aux Etats Unis d’aujourd’hui. La Censure officielle qui enlève des bibliothèques scolaires des milliers d’ouvrages. Celle qui supprime les travaux comme els études de Genre ou de Diversité est beaucoup plus perverse.
Je ne vais pas copier/coller le texte de Laure Murat plus longtemps.
Lisez-le! Il est court et percutant. Et si le titre vous choque c’est à Artaud qu’elle le doit.
Roald Dahl est une mine (aussi bien pour les adultes que pour les enfants).
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Je suis en pleine lecture. On ne peut qu’inciter tout le monde à le lire.
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Intéressant, merci!
Cette notion de « récriture » a effectivement plutôt tendance à m’agacer, surtout pour son aspect « commercial » bien mis en évidence.
Jadis, je pense que les « adaptations » étaient plus honnêtes: quand on transcrivait un texte « ad usum delphinum » (pour les chastes yeux des jeunes lecteurs, par exemple), il était clairement mentionné était « adapté »… (et non « récrit » comme ayant vocation à devenir un nouveau canon!). Dégueulasse, surtout et essentiellement aujourd’hui, oui…
Je tâcherai de mettre la main sur un exemplaire du livre de Laure Murat.
(s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola
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Court et percutant , je suis tout à fait d’accord ! 😉
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de quoi questionner!
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Je l’ai lu il y a quelques semaines (pas de billet) et prêté à une bibliothécaire. C’est dire si je le recommande!
Sinon, je compte lire James et ai emprunté le bouquin de Twain que je n’ai jamais lu…
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@keisha : j’ai dépassé la moitié de Huckleberry Finn !
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Il faut que je lise ce livre ! La politique de la cancel culture est très inquiétante.
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@Claudialucia : bonne rentrée dans la blogosphère après les vacances!
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