Ravenne: eglises et mausolée de Dante

 

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Saint Jean l’Evangéliste

 

En quête de St Apollinaire la Neuve, nous arrivons presque à la gare. Un haut campanile nous attire. Cette église est précédée d’un beau porche blanc gothique aux colonnes torsadées avec une rangée de petits personnages qui font penser à des moines superposés. Le jarrdin est fleuri. L’église sonorisée. L’église est vaste mais point de mosaïque dorée, rien que des panneaux avec des fragments hétéroclites montrant des soldats et des bateaux. Nous nous sommes trompées d’église et ne nous attardons pas.

Saint Apollinaire la Neuve

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Retournant sur nos pas, rue Roma, nous trouvons l’église que nous cherchions avec son campanile rond aéré d’ouvertures de plus en plus grandes comme le signale le G du Routard. A Ravenne presque toutes les tours sont rondes alors que celles de Bologne étaient carrées.

L’église immense est meublée uniquement de deux rangées de colonnes rondes avec de beaux chapiteaux soutenant des arches arrondies.

Trois registres de mosaïques sont historiés.

Le registre le plus bas est le plus impressionnant. D’un  côté le cortège des saintes et des vierges de l’autre symétriquement la procession des martyrs. Les femmes partent du port de Classe où se trouvent trois galères. Les martyrs d’un palais face au port.

Le registre du milieu est entrecoupé de larges fenêtres laissant entrer largement la lumière. Entre chaque fenêtre des prophètes et des saints que nous n’avons pas cherché à identifier.

Le registre supérieur raconte des petites scènes que j’examine à la jumelle. Noces de Cana : bizarrement un homme traine un  panier, sur la vignette suivante Jésus tient dans une main le pain, dans l’autre un poisson, sur la 3èmer image deux pêcheurs tirent un filet plein. Lazare est tout entouré de bandelette comme une momie. En face est représentée la Passion. La Cène est un  peu ratée, le format carré ne convient pas. En revanche très belle prière dans le jardin plus loin Pilate se lave bien les mains…

Ici aussi les groupes scolaires sévissent. En fin de journée leurs enseignants ont bien du mal à les faire écouter. Les jeunes préfèrent se photographier les uns les autres. Sans doute, ils ont, comme nous vu des mosaïques toute la journée et sont saturés.

Dante et S Francesco

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La rue Negri, perpendiculaire à la via Roma en face de St Apollinaire la Neuve conduit au Musée et à la Tombe de Dante. Ses ossements reposent sous un tumulus couvert de lierre. Le mausolée en pierre claire est à côté. Nous faisons la queue, bien disciplinées, derrière les scolaires. Chacun se fait prendre en photo devant la stèle où Dante est de profil face à un lutrin. Les adolescents ont sûrement étudié Dante, pas moi ! Dans la cohue, nous n’ avons pas vu la flamme alimentée par l’huile qu’offre encore la Ville de Florence

Dans l’église S Francesco, nouvelle queue cette fois-ci derrière des enfants d’âge primaire. L’instit compte 1, 2, 3, 3 seconde pour photographier la crypte envahie d’eau claire où nagent des poissons rouges.

Ravenne : Baptistères arien et néonien

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Baptistère des Ariens

Le baptistère des Ariens est un petit bâtiment octogonal construit par Théodoric, roi des Ostrogoths arrivé à Ravenne en 493. La coupole est décorée par deux cercles de mosaïques entourant le médaillon représentant le Baptême dans le Eaux du Jourdain. Le Christ est déshabillé (et pour une fois sexué) à travers les filets bleus figurantt les flots.  Saint Jean Baptiste est perché sur un rocher tandis qu’un vieillard figure le fleuve Jourdain est assis portant ses attributs : un roseau vert et deux pinces d’écrevisses surmontant  la tête si bien qu’on le confondrait avec un diable. Tout autour faisant la ronde : les douze aprôtres séparés chacun par un palmier, habillés en toge et toujours sur de l’herbe vert vif. Pour moi, Ravenne restera associé à la couleur verte ! Le reste du bâtiment est en brique crue.

Baptistère Néonien et Cathédrale

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Trop tard pour le Musée épiscopal, nous jetons un œil dans la cathédrale, immense, baroque avec dorures et angelots.

 

Le baptistère néonien tire ce nom étrange de l’évêque Neon qui commanda les mosaïques au 5ème siècle. Bâtiment octogonal (selon le plan consacré à ce genre d’édifice) , en brique rouge il est dans un juste à l’aplomb, la coupole est décorée d’une représentation du Baptême du Christ dans le Jourdain. Ici, le vieillard représentant le Jourdain est dans l’eau, il ne ressort que son torse et sa tête il apporte une serviette à Jésus, plus décent que dans le Baptistère Ariani. Autour du médaillon, les apôtres semblent danser sous une guirlande. Ils sont séparés par des plantes exubérantes. Leurs visages sont très expressifs. Le dernier cercle représente des palais et des jardins avec des barrières ajourées. Nous sommes fatiguées saturées de visites  et ne jetons qu’un œil distrait aux merveilleux décors  de marbre aux feuilles d’acanthe. Nous aurions dû visiter le baptistère Ariani  lundi après midi. Deux baptistères dans l’après midi c’est un peu trop !

Ravenne : Saint Apollinaire in Classe

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L’autobus 44 pour Classe passe à la gare. Il traverse des quartiers modernes, petits immeubles, pavillons et grandes surfaces sans  intérêt.

La basilique se trouve dans une pinède. Les grands pins l’accompagnent merveilleusement Le campanile est très haut et rond, les ouvertures, soulignées de pierre blanche. L’église, elle-même en briques longues et fines est contemporaine de San Vitale.La statue Octavius Auguste nous accueille : fondateur du port militaire de Classis.  La mer était autrefois toute proche. Le port s’en ensablé.

Apollinarius est le premier évêque de Classe.

Le narthex est occupé par les groupes de scolaires. L’église est très vaste et claire plus grand que son homonyme, la Neuve. Les colonnes de marbre veiné de gris, portent des chapiteaux très curieux : les feuilles d’acanthe sont « gonflées par le vent » et percées de trous au lieu d’être découpées . On ne peut qu’imaginer la splendeur de l’ensemble quand les murs étaient revêtus de marbres précieux.

Le chœur (ici on dit le Presbytère) orné de mosaïques va mobiliser toute notre attention. Comme partout à Ravenne le vert domine. Verts pâturage où paissent des moutons. Un arc de triomphe encadre l’abside dont les piliers verticaux portent chacun un palmier-dattier. Au dessus deux registres horizontaux : sur celui du bas 12 moutons, 6 de chaque côté, sortent d’une cabane et figurent les douze apôtres, au dessus un ciel bleu parcouru de jolis nuages, le Christ dans un  médaillon et les 4 évangélistes.

La coupole est partagée en deux parties,  dans celle du haut, la Transfiguration, un globe bleu sur un fond étoilé porte une croix ornée de joyaux, à chaque bout des branches horizobtales de la croix, écrit en Grec, alpha et oméga ,  au bout de la branche verticale, Ichtyos.

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Apollinarius debout en toge blanche et manteau marron constellé d’abeilles est le berger de 12 moutons alignés en bas symbolisant les fidèles. La campagne est toute verte et riante, entre chaque mouton fleurit un lys blanc, entre leurs pattes des fleurettes rouges et jaunes. A l’arrière plan, de petits rochers sont soulignés de blanc et des pins stylisés, ce sont ceux qui sont encore là 1600 ans plus tard. Un mouton isolé représente Pierre de l’autre côté deux autres, Jean et Jacques.

Ravenne : Exposition l’Italia s’e desta, peinture 1945 – 1953

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Via Manzoni 

Musée d’Arte della Cita

Le Musée d’Arte se trouve dans la Logetta Lombardesca

Délaissant les collections permanentes nous préférons nous consacrer à l’exposition temporaire

 

l’Italia s’e desta

1945 -1953 de Chirico à Guttoso

de Fontana à Burri

Prémisses : une grande reproduction murale de Guernica : dans l’immédiat après-guerre, l’œuvre immense de Picasso se retrouve dans les tableaux très sombres de 1945. Mario Sironi a peint 2 hommes et un cheval, les hommes casqués comme à la guerre, cavalcada est encore dans cette obscurité, noir et blanc.

La Crussifissione (1949) de Testori est peinte de couleurs violentes, le sang de l’agneau sacrifié s’écoule ans un calice. Les allusions à Picasso sont encore évidentes : le  taureau, la bête qui tient le calice.

Deuxième salle très différente, apaisée, au titre : « culte de la Beauté ». je reconnais les natures mortes de Morandi. Les paysages de Carà sont plaisants. Curieusement on leur a adjoint Ettore et Andromaque de Chirico et deux pastels très doux de Campigli Deux Attrice et Baigneuse.

Salle 3 au titre de « Il Fronte nuovo delle Arte » : A nouveau des toiles cubistes d’inspiration avec des réminiscences de Picasso et surtout de Braque. Un tableau me plait beaucoup « La Grand Aratrice » : charrue à disques labourant le tableau brun. Les disques brillent d’éclats blancs et bleus. Une étoile rouge est perchée en haut , étoile soviétique ?

Une nature morte de Guttoso semble d’inspiration de Braque avec le clavier dans un angle.

« Tra maestri e idoli polemici » 1947, plus hétéroclite. Une belle chimère sépia de Corrado semble sérigraphiée et ressemble à une photo floue.

A l’étage l’exposition continue. Dans la salle du fond tout le mur est occupé par une peinture guerrière de Guttoso, une bataille de Garibaldi en Sicile, qui ressemble à une gravure d’époque. A côté, aussi Guttoso, des femmes d’ouvriers des mines de soufre, crient leur fureur.

Ces tableaux trouvent leur écho dans la dernière salle avec La Zolfara (1953), un tableau magnifique de très grand format toujours de Guttoso. Dans cette œuvre figurative spectaculaire des hommes nus travaillent de parr et d’autre d’une colée de soufre qui traverse l’espace en diagonale ; le relief est marqué par des lignes noires, ou plutôt des segments nets qui courent et découpent des facette dans le soufre, soulignent les muscles saillants des ouvriers en plein effort. Des surface des bleues s’opposent au jaune. Deux taches rouges attirent le regard : les mouchoirs de tête noués aux quatre coins.

 

 

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 Zolfara

Entre les deux grands tableaux de Guttoso, deux salles Otto pintori  où la peinture est très politique, marquée par le communisme, deux œuvres de Turcato : Bandiere (1951) des drapeaux rouges occupent tout l’espace flottant sur un fond clair, Gli Scaricatori (1949) encore plus « soviétique », presque une affiche de propagande. Très cubiste aussi. Les muscles des dockers proéminents et exagérés au premier plan comme un manifeste, pantalons de travail bleus.

D’autres tableaux sont abstraits, encore cubistes : I lavatori del Mare, Il porto de Corpora sont moins explicites mais les titres parlent d’eux-mêmes.

Dans une salle parallèle, à l’écart, une autre ambiance : cinématographique. Des affiches de films néo-réalistes Fellini, Rossellini, de Sica et au fond u n magnifique Tableau  de Sassu Via Manzoni : des élégantes en robe à pois se promènent dans cette artère de Milan. On se croirait au cinéma

Ravenne : Casa Masoli, notre suite au palazzo

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En rentrant de l’expo, nous découvrons notre suite au premier étage.

 Une étroite entrée (ou un large couloir) peint en jaune mène à notre domaine. Des rideaux beiges se déploient devant une haute fenêtre. Sur une très belle table ancienne, une énorme lampe, un bouquet de roses blanches, et  des revues négligemment oubliées, un chapeau en opaline complète ce décor, c’est un bougeoir assez grand pour recevoir un cierge.

De chaque côté ,deux portraits au fusain d’une femme élégante aux cheveux et yeux noirs (qui pourrait bien être notre hôtesse). Le long du mur deux chaises basses rustiques et un  pupitre. En face sur une table de campagne de bois brut, presque un établi, on a posé un bouquet de camélia et diverses dinanderie : gobelets d’étain, fruits en métal terni, animaux naïfs en poterie peinte..

 On est impressionné par le volume de la chambre dont le plafond est voûté et peint à fresques, à moitié effacés une grisaille et des médaillons.  Pour agrandir encore l’immense pièce, la glace en face de la porte, porte une sorte de couronne, non pas au sommet comme on s’y attendrait mais en bas, mordant à l’intérieur .

Un lit royal drapé  à baldaquin  est couvert d’une courtepointe rouge. Un drapé vert à motifs  floraux  s’enroule bizarement sur une ferronnerie verte.  Une  banquette recouverte de la draperie verte peut servir de lit d’appoint. Un canapé rose recouvert de cachemire est installé sous le tableau d’une femme dénudée en bas et en jarretière donne un effet légèrement équivoque.

 Sur le tapis ancien à bouquet de pivoine, une table moderne au plateau de verre posé sur un chapiteau antique, porte un bouquet fourni de dahlias rose violet dans un pot de fleur de velours vert et une rose de cire de 40cm de diamètre.

Entre les deux hautes fenêtres, des draperies décoratives tiennent lieu de double-rideaux. Une bibliothèque a été encastrée entre deux piliers dorés portant chacun deux angelots.

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La salle de bain est toute miroirs et bois précieux. Le plafond en voûte compliquée, avec le jeu des glaces se reflète et les arcades sont démultipliées. La baignoire semble être un sarcophage de marbre. J’ai dû vérifier qu’elle était bien équipée d’une bonde ? On  imaginerait des esclaves remplissant et vidant cette baignoire (on a vu cela à Cuba). Deux lavabos sont encastrés dans de l’acajou. Parquet en palissandre. .

Ravenne : Domus dei Tappeti di pietra

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Près de la rue Cavour, via Barbiani, en creusant un parking souterrain, on découvrit un palais byzantin, lui-même construit sur une villa romaine et sur une rue romaine pavée d’énormes dallées arrondies. On entre par l’église Sa Eufemia , toute petite et on découvre le musée souterrain. Des parcours surélevés sur des cheminements métalliques permettent d’admirer les mosaïques. Deux d’entre elles sont figuratives. Le Bon Berger entre deux arbres où sont perchés des oiseaux colorés se tient appuyé sur sa houlette entre deux moutons. Tout à fait dansants, le Génies qui représentent les saisons. L’hiver, habillé d’un manteau sombre avec un étrange capuchon ressemblant à un bonnet de fou, le printemps en tunique rose couronné de roses, l’automne ressemble à un Arcimboldo tandis qu’un musicien souffle dans un syrinx de roseau doré. Les Génies se tiennent pas la main et leur pas de danse est bien marqué ; les pièces du palais sont décorées de motifs géométriques très variés. Nous avons déjà vu de beaucoup plus belles mosaïques romaines. L’originalité déside dans la découverte  d’un palais byzantin du 5ème siècle presque entier.

Après cette visite, nous retournons chez notre glacier de la rue Cavour. Amusant de prendre des habitudes en trois jours !

Ravenne : La Passion selon Saint Jean sous le regard de Théodora à saint Vitale

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Au deuxième rang, derrière les officiels, curés en civil noir et deux moines en aube blanche. Le spectacle est dans la coupole. Si les curés me cachent les musiciens j’aurais toujours les mosaïques à regarder !

En attendant que les musiciens ne prennent place, je détaille à la jumelle les paons et les colombes, les cailles et les hérons qui se promènent dans la verdure.

Je suis impressionnée d’écouter cette Passion sous les yeux grand ouverts de Théodora. Anachronisme ? Pas vraiment. Jérusalem estdessinée ici avec ses hautes murailles et ses tours ornées de pierres précieuses. Je  ne trouve rien qui raconte la Passion dans cette église étrangement agreste, paradisiaque avec son Mont Sinaï verdoyant, Bethlehem et Jérusalem resplendissantes. Même le sacrifice d’Isaac est paisible.

Orchestre baroque avec instruments anciens : un petit orgue haut d’1.20m montre ses petits tuyaux. Serais-je capable de distinguer viole, des violons et viole de gambe, des violoncelles ?

Entre un  homme serré dans un manteau de laine noire, enveloppé dans une écharpe. Applaudi. Le chef ? Comment va-t-il diriger en manteau ? Il s’assied sagement devant les violons.

Le chef c’est Elena Sartori, mince nerveuse, moulée dans un fourreau blanc à manches longues en tissu précieux brodé, qui serre la main aux premiers violons. Le concert peut commencer. L’homme en noir est rejoint par un autre, en costume, cravate rouge, écharpe rouge : l’Evangéliste, le ténor Stefan Zelek. Plus tard arrivera un  troisième homme (toujours écharpe), Pilate. Au premier rang juste devant moi, deux garons blonds joufflus, coiffés en pétard, boivent du Schweppes. La grincheuse en moi tique. La grincheuse a bien tort. Les jeunes garçons se retrouvent habillés en col marin debout derrière une colonne. Ce sont de jeunes solistes (14 et 16 ans) Alois Mulhbacher (soprano) et Fabian Killinger (contralto). L’homme en noir c’est Jésus, Andrea Mastroni. Il n’a pas le physique de l’emploi sa barbiche et ses sourcils effilés lui donnent une physionomie diabolique. Selon le programme, il a chanté Sarastro. Sa voix est magnifique. Peut être suis-je placée trop près ? Ce genre de réflexions est idiot !

Adolescente, je faisais hurler Bach sur le phono quand mes parents étaient en voyage. Je préparais d’énormes salades de poulet-crudité qui duraient toute la semaine, fumais des Peter Stuyvesant ou des Kool à la menthe, et écoutais en boucle la Passion selon saint Mathieu. Mais je n’avais jamais assisté à une Passion en concert.

C’est donc une expérience neuve que de suivre mot à mot le spectacle (sous les yeux de Théodora). Je n’avais jamais pensé à une telle théâtralité dans l’intervention des solistes et des chœurs. Non pas une musique d’ensemble, mais chaque protagoniste joue un véritable rôle . Le programme qui comporte le texte intégral m’a été d’une grande aide. Je ne comprends pas l’Allemand chanté mais je le lis. J’oublie que je suis au concert. On me raconte une histoire. Certes, elle n’est pas neuve et j’en connais le dénouement. Je la découvre comme une première fois.

La chef d’orchestre danse presque en dirigeant. Elle sourit aux jeunes garçons et les encourage de la voix. Elle découpe l’œuvre en scènes, ménage des silences, disparaît dans le déambulatoire, impose la voix des bois cachés derrière les violons. Le procès de Jésus occupe la majeure partie de cette Passion. Pilate (Carlo Borrarelli) est parfait. Modeste, il quittera le devant de la scène pour se joindre aux chœurs.

Les enfants viendront clore le récit « Tot ! Denn Jesu est tot… » Tandis que le chœur apaise « Ruht wohl. »

J’avais bu un cappuccino pour ne pas m’endormir, il aura été bien inutile !

Quand je rentre, notre palais est illuminé. Du lit je reconstitue les motifs de la fresque à moitié effacée au plafond, je découvre que les candélabres sont en feuillage portant de minuscules fleurettes. J’ai envie de prolonger encore cette soirée.

De Ravenne vers le Delta

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L’option de rendre la ville piétonnière a été poussée à bout. Les voitures sont des intruses même là où elles peuvent rouler. La signalisation n’est pas pour elles. Cyclistes et piétons revendiquent la préséance et ne se laissent pas doubler.

La Romea, route Ravenne-Venise est infestée de camions.

Première tentative de la quitter pour rejoindre la mer. Une bande de forêt classée Natura 2000 borde la route et la plage mitée par les lidi à urbanisme approximatif. On se trompe et se retrouve à la limite de Ravenne non loin de l’embarquement des ferries pour la Croatie.

Deuxième essai un peu plus loin au nord. Les accès à la plage ont été goudronnés, chacun mène à un restaurant qui gère le parking et les installations de plage. Heureusement le 14 avril,  la plage est encore sauvage. Coquillages, bois flottés, algues et laissées de l’hiver n’ont pas encore été balayés. Mais cela commence ! Des africains avec des brouettes emportent les laissées indésirables. Pour Pâques, s’il fait encore beau, les lidi s’animeront et la plage deviendra détestable ! En attendant, je me livre à ma marche pieds nus à la lisère de la vague. L’eau est fraîche et les coquillages coupants. Je ne reste pas longtemps pieds nus dans l’eau.

Notre nouveau gite, Prato&Pozzo,  est bien différent du palais de Ravenne. C’est un bungalow dans un centre hippique qui est aussi un Centre d’observation des Oiseaux. Nous sommes en pleine Réserve Naturelle. Il suffit de marcher 100m et nous entrons dans le premier affût le long d’un bassin. Les limicoles sont nombreux. Un grand héron blanc arpente les bords d’une pièce d’eau. Le bassin suivant est rempli de plantes aquatiques ; l’eau est si immobile que la surface est un miroir. Les hirondelles qui volent bas s’y reflètent. Avant d’arriver, nous avons vu des flamands roses (pas très roses), trois spatules, des aigrettes ainsi que des canards variés, colverts et tadornes. Les tamaris en, fleurs font des haies roses très légères.

Comacchio

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La route de Comacchio longe une grande étendue d’eau tranquille comme un lac. Une lagune ? Saumâtre ou eau douce ? On le saura demain !

Comacchio a un air de Venise avec ses ponts aux arches bombées. Venise bien simplette, des barques de pêcheurs en guise de gondole. Des maisons d’un étage aux façades jaune vif, jaune pâle, vert amande. Sur les bords des canaux des restaurants proposent la spécialité du pays : l’anguille. Les monuments de brique paraissent disproportionnés, l’église est immense et son campanile très haut. La tour de l’Horloge est imposante. A Bologne, les tours étaient carrées, à Ravenne, rondes ici elles ne sont ni carrées ni rondes un peu des deux octogonales à la base.

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Je visite un musée consacrée aux bateaux romains, en vitesse, il est déjà tard.

Delta du Pô : Abbaye de Pomposa

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Sur la Romea, on  dépasse Comacchio et ses lidi quelques km plus loin le haut campanile de l’abbaye de Pomposa se voit de la route. L’église fut d’abord construite en 751 jusqu’en 874, et agrandie au 11ème siècle. Le campanile date de 1063. Comme à Ravenne,  les ouvertures sont de plus en plus grandes vers le haut. Il ne s’agit pas d’esthétique mais d’alléger la construction. Le terrain du delta est peu stable, les tours moyenâgeuses ont une fâcheuse tendance à pencher.

L’intérieur est couvert de fresques de Vitale da Bologna sur trois registres : en haut l’Ancien Testament, au milieu la Vie du Christ en bas autour des arches : l’Apocalypse, le plus original avec ses monstres à plusieurs têtes. Les groupes de scolaires se succèdent.

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jugement dernier, l’Enfer

 A la tête de l’un d’entre eux, un conférencier pédant donne un cours d’astronomie médiévale. Les enfants sont sages, je ne sais si cela les intéresse, moi oui. Il rappelle que les églises ne sont pas orientées au hasard, mais selon les points cardinaux. De la fenêtre au dessus de l’autel, au soleil levant, le 21 mars, le rayon doit toucher le Christ du Jugement dernier au dessus du portail. Ce n’est pas évident d’atteindre une telle précision compte tenu que les fresques ont été peintes cinq siècle après la première construction de l’église, et de la précession de l’équinoxe. Les scolaires ont-ils entendu parler de la précession de l’équinoxe ? Ce monsieur est également intéressé par les matériaux constituant les colonnes.  Il montre aux enfants la pierre de Vérone rose, le marbre grec blanc, le granite. L’église est une véritable collection de colonnes romaines, corinthiennes, byzantines ou médiévales. L’utilisation de la feuille d’acanthe témoigne de ces différences

Dans une chapelle, des documents tentent de prouver que l’inventeur de la gamme, Guido Monaco, n’était pas d’Arezzo comme je le croyais mais de Pomposa.

Dans la salle capitulaire  il reste une fresque du style de Giotto. Des panneaux racontent le déclin du monastère : en 1152 le Pô sortit de son lit inondant les terres. Ce changement géographique fut fatal au monastère. Au 11ème siècle il y avait là 100 moines, il n’en restera plus que 10 en 1306. Il fut complètement fermé en 1663. A l’abandon, il devint même un hangar pour le matériel agricole.

Des jardiniers  plantent des bordures originales  qui sentent très bon, mélangeant thym et impatiens, 8 plants de thym et 12 fleurs.