Bons baisers de Tanger – Melvina Mestre

LIRE POUR LE MAROC

Après Marrakech et Casablanca, c’est Tanger des années 50 que Melvina Mestre nous fait découvrir avec une enquête rondement menée par sa détective favorite Gabrielle Kaplan et son fidèle adjoint Brahim.

Tanger est cosmopolite, espagnole, française et bien sûr marocaine. C’est aussi un nid d’espions. Services secrets français et américains qui se sont implantés depuis l’opération Torche en 1942. Grand port se  prêtant à tous les trafics où le Milieu corse et marseillais prospère. Ville très animée avec ses bars, ses boites de nuit, ses fêtes somptueuses qui mêlent la jet-set à toute une population interlope.

Kaplan enquête sur la disparition d’un assureur. Elle se déguise en épouse éplorée et nunuche qui cherche son mari. 

Ne comptez pas sur moi pour vous raconter l’intrigue. Lisez-la!

Vous allez voyager.

 

J’emporterai le feu – Leila Slimani

LIRE POUR LE MAROC

Troisième volet de la saga familiale qui a commencé avec le Pays des Autres et Regardez-nous danser. Trois générations, Mathilde l’alsacienne qui a épousé Amine, le soldat marocain venu défendre la France pendant la Seconde guerre mondiale, tous deux ont cultivé la terre dans la campagne près de Meknès, la ferme a prospéré. 

J’emporterai le feu raconte l’enfance et la jeunesse des deux filles Mia et Inès. Mia est la  narratrice. Enfance choyée et privilégiée au sein de la villa familiale à Rabat. Les parents, Aïcha, gynécologue, et Mehdi, banquier, bourgeois cultivés très occidentalisés.   Mia et Inès, brillantes et originales, étudient au Lycée français . 

« Aïcha mettait ses filles en garde contre les dangers du monde. Les chutes, les étouffements, les jeux de mains, jeux de vilains, les noyades, les égarements dans des lieux bondés où un prédateur viendrait les enlever. Elle leur inocula la frousse comme on injecte un vaccin. À chaque âge de la vie survenaient de nouvelles inquiétudes : les hommes, les grossesses, les accidents de voiture. Elle leur apprit à parler bas, à ne jamais donner leur avis, à haïr toute forme d’imprudence, à se méfier de tous et de chacun car des indics de la police se cachaient partout et l’on pouvait disparaître, en un claquement de doigts, au fond d’une geôle où personne ne vous retrouverait. Aïcha espérait que ça leur entrerait dans la tête, qu’elles développeraient une aversion du risque. Elle voulait des enfants lâches à qui ne viendrait pas l’idée de s’indigner, de se révolter, de parler trop haut. Des enfants dociles avec les puissants, de petites Shéhérazade qui sauraient charmer les tyrans et sauver leur peau. »

Au contraire Mehdi offre à Mia des livres qui lui ouvrent l’esprit, et la fait réfléchir alors que ses camarades de classe sont beaucoup plus frivoles.

Mia ne se coule pas dans le moule offert aux jeunes filles, elle tombe amoureuse d’une fille doit subir le rejet des autres. Elle ira chercher la liberté en poursuivant ses études à Paris. Encouragée par son père :

Mais n’y crois pas. Mets-toi de la cire dans les oreilles, accroche-toi au mât, souviens-toi de ce que je t’ai
dit. Ne reviens pas. Ces histoires de racines, ce n’est rien d’autre qu’une manière de te clouer au sol, alors
peu importent le passé, la maison, les objets, les souvenirs. Allume un grand incendie et emporte le feu.
Je ne te dis pas au revoir, ma chérie, je te dis adieu. Je te pousse de la falaise, je lâche la corde et je te
regarde nager. Mon amour, ne transige pas avec la liberté, méfie-toi de la chaleur de ta propre maison. »
Et là, il lui tendrait le livre. Elle poserait le paquet sur ses genoux. « Merci papa. » Lentement, elle
déchirerait le papier : La vie est ailleurs. « Tu aimeras Kundera, j’en suis sûr. »

 Inès rejoindra sa sœur. 

Tandis que les filles s’émancipent, une chape de plomb tombe sur le père. Quelle faute a-t-il commise? Il perd la confiance du pouvoir. Sa charge à la banque, puis sa liberté. C’est pour son père qui lui a dit d’emporter le feu que l’écrivaine a écrit ce livre. 

le Rucher d’Inzerki

8 JOURS AU SOLEIL DU SUD MAROCAIN

le Rucher d’Inzerki vu de la route sur le versant d’en face

Le roman de Zineb Mekouar « Souviens-toi des abeilles » fut un coup de cœur. J’ignorais que le Rucher du Saint existait réellement.

Il est certes, éloigné d’une bonne centaine de kilomètres de Taroudant. C’est une visite qui se mérite. Notre première tentative lundi, s’est soldée par une crevaison tout près de notre maison d’hôtes, les 3 paons. Nous décidons d’ignorer les injonctions de Madame GPS qui trouve des raccourcis non carrossables et de rester sur le goudron. A peine avons-nous quitté Taroudant que les gendarmes nous arrêtent, 75 km/h au lieu de 60 , nous croyions bien avoir quitté la ville et roulé dans la campagne ! 150 Dirhams et surtout une belle perte de temps, le gendarme recopie très lentement les passeports et documents de la voiture. La route P1708 traverse de nombreux villages et petites villes, les enfants à vélo, 3 de front, les camions des serres, les habitants qui traversent ne facilitent pas la conduite.

haut Atlas et sommes enneigés

Je décide que nous prendrons l’autoroute A3 Agadir/Marrakech. L’autoroute est très belle, le paysage fantastique, le péage minime. Elle s’élève progressivement à travers la montagne rouge aux sommets découpés. Certains au lointains sont même saupoudrés de neige, ils culminent au-dessus de 3500 m dominant les lignes de crêtes pourpres, violacées et bleues qui se superposent. La montée est interminable entre Amskroud et Argana. La Route Nationale suit exactement le même tracé, passant parfois en dessous de l’autoroute. Elle est vide et ne traverse aucune agglomération. Nous aurions mieux fait de choisir la nationale 11 d’autant plus que la gare de péage à Argana est 17 km plus au nord et que nous avons ajouté 34 km au voyage déjà bien long.

la piste d’Inzerki

Le GPS nous fait descendre trop au sud à Bigoudine et nous envoie sur une mauvaise route. Nous n’arriverons donc jamais ? Je téléphone à Brahim qui nous dit de cliquer sur le lien qu’il a envoyé. nouveau direction nord vers le nord pour trouver une piste de terre que nous avions négligée. Il y avait pourtant un écriteau « Rucher d’Inzerki » mais le chemin ne m’avait pas paru carrossable. 13 km d’une piste poussiéreuse à parcourir encore ! Finalement la piste est assez confortable, sableuse, poussiéreuse avec très peu de cailloux et pas d’ornières. Elle change de couleur sur le parcours, ocre, rouge et même verte à la fin. Elle dessert deux villages ; Très étroite quand même. Nous n’avions pas imaginé trouver un véhicule à notre rencontre. Dominique se concentre pour bien rester dans les traces. Aucune difficulté jusqu’au village. A la sortie, elle devient très sinueuse et même penche en dévers en longeant un ravin profond. La conductrice doit s’accrocher pour deviner ce qui nous attend à la sortie de chaque virage. Il y a tout juste la place pour passer. Sur le versant d’en face, la roche est verte mais la piste plus horizontale. Nous découvrons le rucher visible de la route juste avant le deuxième village.

Le rucher et ses casiers

Le parking est large et dallé. Brahim nous y attendait malgré le retard de près de 2 heures. Nous descendons un bel escalier de pierre pour accéder au rocher adossé à la pente. On découvre d’abord la maison de l’ancien gardien décédé il y a 16 ans, à l’âge de 90 ans.  C’est un rucher collectif où les villageois installaient leurs ruches à la belle saison. Il domine la vallée. Dans le creux, une forêt d’essences différentes où les butineuses trouveront nectar et pollen toute la belle saison. En janvier, il n’y a pas de fleurs et il fait froid. Les habitants gardent leurs ruches chez eux. Brahim a installé les siennes un peu à l’écart. Les ruches se rempliront à la saison des essaims. Les premiers arbres à fleurir sont les caroubiers, puis les arganiers…La récolte de miel s’effectue au printemps. On laisse la moitié du miel pour l’été. Contrairement à l’Europe, l’été est une saison difficile pour les abeilles du sud marocain : la végétation est desséchée.

Brahim nous montre une ruche traditionnelle dans un casier

Les ruches traditionnelles sont cylindriques en roseau tressé. Le couvercle est un cercle de bois de palmier. Chaque famille dispose de plusieurs casiers. Une seule ruche est déposée dans un casier. Quand elle est pleine de miel, il y a de la place pour la réserve à côté. Ces ruches sont moins productives que les ruches modernes avec des cadres pour les rayons amovibles. Les ruches modernes concurrencent les traditionnelles.

L’exode rural est la plus grande cause du déclin de l’apiculture. La plus grande catastrophe est la sécheresse qui sévit depuis des années avec le changement climatique. Cette année, il a plu une fois en octobre et rien depuis. L’an passé, une fois aussi. En 2022 oualou.

Ce rucher collectif date de 1520 ; C’est le plus grand et le plus ancien du Maroc. Comme les agadirs, les greniers collectifs et coffres-forts, il témoigne de la force des solidarités villageoises. Chaque village s’organise pour préserver ses richesses collectivement.

Bien sûr, j’interroge Brahim au sujet du livre de Zineb Mekouar. L’histoire est une fiction. Il n’a pas entendu les légendes autour des vols de miel et de la malédiction qui y est attachée. En revanche, il trouve qu’elle a bien raconté la sécheresse. Le rejet de la femme étrangère montre les limites des solidarités. Ce livre est riche en thématiques : la transmission entre le Grand-Père et le petit garçon Anir qui a donné le titre au livre, le rapport très fort entre Anir et sa mère. La difficile adaptation à la ville du père berbérophone qui parle à peine l’arabe et qui se fait exploiter.

Tandis que Brahim sort une riche vide, me fait sentir la cire et les alvéoles je pense à Anir, le petit garçon de l’histoire, à sa reine des abeilles …

Le retour est beaucoup plus facile. Même si on frôle le précipice on sait qu’on est passées déjà sans encombre, donc c’est beaucoup moins effrayant.  On croise même deux voitures. La première dans le villages avec ses tournants, conduite par deux jeunes filles intrépides qui n’hésitent pas à faire une marche arrière pour nous laisser passer, la deuxième, plus grosse nous contraint à reculer mais nous étions déjà dans la vallée.

Route de Mirleft à Taroudant

8 JOURS AU SOLEIL DU SUD MAROCAIN

les murailles de Taroudant

Aglou, Avant de quitter la côte, dernière balade pieds nus sur le sable mouillé sur la plage immense, déserte. On ne devine pas les extrémités dans la brume et les embruns. La station balnéaire est très moche. Les bâtiments, grosses villas de ciment pas terminées, alignées, tassées les unes près des autres. Pas de crépi. Pas un jardin. Vue sur la rangée suivante.

La grande route, Nationale1 évite Tiznit. Je serais bien retournée au souk des bijoutiers. J’ai préféré la plage. Nous roulons très bien jusqu’à Massa. Nous traversons ensuite des agglomérations. Il faut être attentives aux limites de vitesse. A l’entrée de chaque village, au barrage des gendarmes, au moins une voiture est arrêtée. Hangars à camions, serres poussiéreuses, villes champignons le long de la route. Les étages supérieurs des maisons sont presque toujours vides, souvent inachevés.

La route de Taroudant est celle de l’aéroport d’Agadir entre serres et vergers, agrumes et oliviers. La plaine du Souss est irriguée. Tout pousse.

Arrivée à Taroudant vers 15 heures.

Petit tour des remparts . L’office de tourisme est ouvert. J’y achète une belle plaquette qui propose des excursions dans la région. Celle au Rucher d’Inzerki m’excite beaucoup. C’est là que se déroule l’histoire de Souviens-toi des abeilles de Zineb Mekouar. Brahim, le responsable, joint par téléphone m’envoie un lien sur Googlemaps. 1h50 par l’autoroute Agadir/Marrakech, 102 km. Nous demandons à Abdou d’avancer l’heure du petit déjeuner. Je retrouve le roman dans ma liseuse. Demain j’imaginerai Anir, son Grand-père, sa mère …Sauf qu’en janvier les abeilles seront peut-être endormies ! Inch Allah, je m’endors en lisant le livre.

Les trois paons qui ont donné leur nom au Ryad viennent nous voir sur la terrasse

 

 

 

Crépuscule à Casablanca – une enquête de Gabrielle Kaplan – Melvina Mestre

LIRE POUR LE MAROC

Enchantée par Sang d’encre à Marrakech, j’ai enchaîné avec Crépuscule à Casablanca qui est le premier opus de la série. A paraître Bons baisers de Tanger ( Avril 2025).

J’ai vraiment aimé Gabrielle Kaplan, détective privée, qui se livre davantage dans ce roman. A vrai dire, elle se présente. Juive de Salonique, elle est arrivée en 1941, échappant au destin des juifs de Salonique, déportés presque tous. Francophone, fille d’une parfumeuse, on comprend mieux ses allusions aux parfums qui m’avaient étonnée dans le premier livre. 

Bizarre polar, où l’enquêtrice ne cherche pas à dénouer une énigme mais plutôt à fuit ses persécuteurs. Je n’en dirai pas plus….

Casablanca 1951 est parcourue par de troubles courants, des rivalités, des luttes d’influence. La Résidence avec le général Juin, le sinistre Boniface qui règne sur des policiers corrompus, leitmotiv : pas de vagues. Les Américains arrivés en 1942 avec l’opération Torch en 1942, tête de pont du débarquement et de la reconquête du sud de l’Europe, ils souhaitent étendre leur influence chasser les français quitte à s’allier avec le Sultan et l’es indépendantistes. Les ultras, des colons ne font aucune concession .  Sinistres personnages et mercenaires. Cagoulards, malfrat corses ou marseillais, agents du SDECE ou de la CIA. L’Istiqlal et le sultan luttent pour l’Indépendance du Maroc.

Et puis le reste de la population défini selon une hiérarchie précise:

Delmas faisait donc partie des grands propriétaires terriens et des industriels, ceux qui se situaient au sommet de la pyramide de la société coloniale, la « crème de la crème ». Venaient ensuite les ingénieurs et les cadres de l’administration, puis les « petits Français », fonctionnaires ou militaires. Les juifs, les Espagnols et les Italiens, artisans ou commerçants, complétaient l’édifice. À la base se trouvaient les Marocains, les plus nombreux et généralement les plus précaires, que l’on nommait « les indigènes ».

Les souvenirs de la guerre sont encore très prégnants. On se souvient, ou pas de ceux qui furent vichyistes, qui se sont compromis avec les Allemands. On se souvient aussi de l’héroïsme de la campagne d’Italie.

Gabrielle Kaplan et son lieutenant Brahim se trouvent pris dans ces rivalités. Roman d’action et d’aventure, leçon d’histoire aussi. 

Lu en à peine une journée, un polar très réussi!

Sang d’encre à Marrakech – Melvina Mestre – Points

LIRE POUR LE MAROC (POLAR)

Gabrielle Kaplan, native de Salonique, exerce son métier de détective privé à Casablanca. L’enquête se déroule en 1952 dans le Maroc sous Protectorat.

promenade architecturale :

Casablanca est une ville dynamique, européenne. L’autrice Melvina Mestre a grandi à Casablanca : elle connaît bien la ville qu’elle nous fait visiter telle qu’elle était alors, avec les noms des rues et places du Protectorat. Elle décrit avec soin les bâtiments, s’intéresse à l’architecture pour mon plus grand plaisir. 

Marrakech est encore un gros bourg tranquille, mais promis au développement touristique avec la construction du quartier de l’Hivernage, d’un casino. La Mamounia est déjà un hôtel luxueux et on assiste à une soirée organisée par le Glaoui.

L’autrice resitue l’intrigue dans le contexte historique et politique :

Je veille à ce que mes romans d’atmosphère s’inspirent de la grande Histoire, et qu’en me lisant mes lecteurs soient immergés dans le contexte historique, urbanistique et socio-culturel des années 1950.

En 1952, le souvenir de la guerre est encore très vif. Casablanca était un centre très important qui a vu le Général de Gaulle et les Forces Françaises libres, les Américains. On se souvient encore très bien de Joséphine Baker, de Saint-Exupéry. Les Marocains ont pris part à la Libération, lutté en Italie etc. La présence de nombreux militaires a pour conséquence le développement de la prostitution : à Casablanca se trouve le plus grand Quartier Réservé : le Bousbir.

C’est d’ailleurs ainsi que commence l’intrigue policière : une prostituée est retrouvée assassinée, dénudée et tatouée, puis une seconde….(mais je n’en dévoilerai pas plus). Les autorités locales ne veulent pas ébruiter la macabre découverte qui risque d’être exploitée politiquement. Le commissaire préfère faire appel à la détective privée, pour sa discrétion et parce qu’une femme pourra peut-être glaner des informations auprès des prostituées.

L’intrigue semble partir en tout sens, rebondissements, puis tout s’éclaire. Encore une fois, je ne spoile pas! J’ai été happée et je n’ai pas lâché cette lecture.

Un autre aspect intéressant est l’émergence des mouvements indépendantistes. La décolonisation s’amorce malgré l’aveuglement des autorités qui préfèrent diviser pour régner et s’appuyer sur le Glaoui de Marrakech. J’ai visité le palais du Pacha, et sa kasbah mais sans vraiment comprendre qui était ce personnage. Le roman répare cette lacune. 

Et comme j’en redemande, j’ai déjà commencé une nouvelle enquête de Gabrielle Kaplan : Crépuscule à Casablanca

Le jardin des pleurs – Mohamed Nedali

LIRE POUR LE MAROC (MARRAKECH)

De cet auteur, Mohamed Nedalij’ai également lu  le Poète de Safi qui m’a laissé un agréable souvenir de lecture. 

Le jardin des pleurs se déroule à Marrakech. Le narrateur, Driss, est un jeune assez ordinaire. Après des études médiocres, un bac mention passable, il aspire à une situation tranquille de fonctionnaire et choisit l’école d’Infirmiers. Pour réussir le concours, il va dénicher un piston : une bouteille de pastis à son oncle, un chevreau offert à une personnalité influente, et le tour est joué. Pour une affectation à Marrakech même tarif. C’est bien sûr de la corruption. Mais cela ne va pas chercher loin, et tout le monde achète ces passe-droits. 

En revanche, lorsque sa femme Souad est agressée par un commissaire de police, Driss découvre l’autre versant de la corruption. Certains personnages sont intouchables, d’autres sont vénaux. Pour le citoyen ordinaire l’Etat de Droit ne fonctionne pas. Acculé à des procès sans fin, Driss en arrive à « écrire au Roi » et même « écrire à Dieu » . Il en vient à débloquer.

Ce roman commence d’un ton léger, ironique, d’une comédie pour se transformer en tragédie dans la deuxième partie. Les anecdotes sont amusantes, le style enlevé, la lecture agréable. La dénonciation de la corruption  est graduelle, du cadeau d’une bouteille, à la ruine en fin de roman. L’auteur dénonce le système policier, judiciaire mais aussi l’incurie du système de santé qui ne cherche pas à guérir les pauvres patients mais plutôt à s’enrichir à leurs dépens. 

Bilan lectures 2024 – Statistiques – Et si on pensait à la parité ?

Avec l’aide de Babélio, mes statistiques sont vite faites : 

102 livres au 21/12, j’ai dépassé de 2 le défi de 100 fixé pour l’année.

43 livres écrits par des écrivaines / 102 livres.  (et encore j’ai compté comme livre écrit par une femme les BD de Catel&Boquet) très limite…..

Certains livres entrent dans plusieurs catégories. J’ai adopté un code couleur. Est-ce vraiment pertinent?

A PROPOS D’UN VOYAGE AU MAROC :

5 écrits par des écrivaines, 5 par des hommes

Leila Slimani : Regardez-nous danser (t2)

Meryem Alaoui : La vérité sort de la bouche du cheval

Zineb Mekouar : La Poule et son cumin, souviens-toi des abeilles

Samira El Ayachi : : Le ventre des hommes 

 

Fouad Laraoui :  Les tribulations du dernier Sijilmassi

Mohamed Nedali : Le Poète de Safi

Edmond Amran El Maleh :Parcours immobile

Soufiane Khaloua : La Vallée de Lazhars

Ruben Barrouk : Tout le bruit du Guéliz

A PROPOS D’UN VOYAGE A MARSEILLE

Pour la parité, peut nettement mieux faire!

Jean Claude Izzo : Total Khéops, Chourmo, Solea, le soleil des mourants, Les marins perdus

Albert Cohen :Ô vous frères humains

Christophe Gavat : Cap Canaille

Marcel Pagnol : Le temps des amours

Albert Londres : Marseille porte du sud

Anna Seghers : Transit

 

A PROPOS DU 7 OCTOBRE, des Juifs, Israël, 

Delphine Horvilleur : comment ça va pas? Conversations après le 7 Octobre, il n’y a pas d’Ajar

Albret Londres : Le Juif errant est arrivé

Rebecca Benhamou : L’horizon a pour elle dénoué sa ceinture

Eva Illouz : le 8 octobre : Généalogie d’une haine

Rosie Pinhas-Delpuech : Naviguer à l’oreille

Valérie Zenatti : Qui-vive

Laure Hoffmann : A l’Orient désorienté

Nathan Davidoff : Le Juif qui voulait sauver le Tsar

Edmund de Waal : Le Lièvre aux yeux d’ambre

A PROPOS D’UN VOYAGE EN CORSE

Marie Ferranti : La fuite aux Agriates, La passion de Maria Gentile

Jérôme Ferrari : Balco Atlantico, Nord-Sentinelle

jean Marc Graziani : De nos ombres

Jean-Claude Rogliano : Les mille et unes vies de Théodore, roi de Corse

WG Sebald : Campo Santo

LISONS MARYSE CONDE et littérature caraïbe

Maryse Condé :  Le Cœur à rire et à pleurer, La vie sans fard, Segou, la belle Créole, L’Evangile du Nouveau Monde

Estelle-Sarah Bulle : Basses Terres

Raphaël Confiant : L’Hôtel du bon plaisir

Alejo Carpentier : La harpe et l’ombre

LISONS KADARE : Le Général de l’Armée morte; le Dîner de trop

FEUILLES ALLEMANDES

Andréa Wulf : Les Rebelles magnifiques : les premiers romantiques et l’invention du Moi

Anna Seghers: Transit, La Septième Croix

Christa Wolf : Trame d’Enfance

Nino Haratischwilli : Le Chat, le Général et la Corneille

Joseph Roth : Job, roman d’un homme simple

Franz Werfel : une écriture bleu pâle

Catalin Dorian Florescu : L’Homme qui apporte le bonheur

LITTERATURE FRANCAISE

Hélène Gestern : 555

Leila Slimani : Le parfum des fleurs la nuit

Lola Lafon : Quand tu écouteras cette chanson, La petite communiste qui ne souriait jamais

Maylis Kerangal : Jour de Ressac

Laure Murat : Proust roman familial

Anita Conti : Racleurs d’océan

Evelyne Bloch-Dano :Madame Zola

Anne Vantal : Pondichéry ou le rivage des ombres

Olivier Guez : Mesopotamia

Gérard Lefondeur : les enquêtes d’Anatole Le Braz;

Bernard Clavel : Cargo pour l’Enfer

Simon Berger : Laisse aller ton serviteur

Jules Verne : Les forceurs de blocus

Balzac : les secrets de la princesse de Cadignan

Marcel Proust : A la Recherche du Temps perdu

Romain  Gary : Chien Blanc

Pierre Assouline : Albert Londres : vie et mort d’un grand reporter

DIVERS, dans l’ordre chronologique

David Bainbridge : Paléontologie, une histoire illustrée

Kapka Kassabova : Elixir

Robert McAlmon : Mémoires de Montparnasse des années folles, bandes de génies

Annette Wieviorka : Anatomie de l’Affiche Rouge

Gouzel Iakhina : convoi pour Samarcande

Hanna Krall ; les Fenêtres

Andreï Kourkov : journal d’une invasion

Jean Dytar : #j’accuse…!

 

Inès Daléry : Yannis Ritsos : J’écris le monde

Christy Lefteri : Le Livre du Feu

Makis Malafekas : le mur grec

Catel&Boquet : Anita Conti, Joséphine Baker

LITTERATURE ITALIENNE

Erri de Luca : Les Règles du Mikado

Viola Ardone : Le Choix

Alessandro Manzoni : Histoire de la colonne infâme

 

la liste est longue et incomplète, quelles seront les lectures pour 2025?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tout le Bruit du Guéliz – Ruben Barrouk

LIRE POUR LE MAROC/ RENTREE LITTERAIRE 2024

 

Ruben Barrouk raconte le voyage qu’il a fait avec sa mère à Marrakech en visite chez sa grand-mère Paulette qui vit seule au Guéliz. La vieille dame  s’est plaint auprès de ses enfants d’entendre un bruit qui perturbe sa vie quotidienne.  Des voisins sont-ils bruyants? Paulette souffre-t-elle d’acouphènes? Ils vont résoudre cette énigme. 

Et, bien sûr, ils n’entendent rien!

Ils vont partir pour un pèlerinage sur les traces des Juifs de Marrakech, au Mellah, au cimetière, et sur les tombeaux de Saints Juifs.

Ce  récit est très simple, très beau, nostalgique et tendre. Traditions et souvenirs qui se mêlent. Les Juifs sont partis mais ils ne sont pas oubliés. La Grand-mère, la mère et l’auteur vont rencontrer des musulmans qui gardent précieusement les traces, les tombes.

Et si ce bruit était le silence assourdissant des absents ?

 

 

 

 

 

 

 

Souviens-toi des abeilles – Zineb Mekouar – Gallimard

LIRE POUR LE MAROC

Amtoudi : rucher

Un véritable coup de cœur!

Un livre qui tombe à pic, quelques mois après notre voyage dans le Sud marocain où nous avons découvert ces greniers collectifs perchés et leur ruchers.

Amtoudi grenier coiffant un piton rocheux

A l’occasion de ce voyage, j’avais découvert Zineb Mekouar avec La poule et son cumin CLIC que j’avais bien aimé.

Anir aime ces moments où le Taddart surgit devant eux, comme cela, d’un coup, pendant qu’ils sont sur le
sentier qui mène à lui. Le rucher prend forme, immense, avec ses étages et ses cases, et l’on imagine déjà
les abeilles qui se réveillent. Lorsqu’il le voit apparaître, le garçon se retourne vers sa mère, pour observer
son regard, et toujours une lumière s’y glisse, on dirait qu’elle vient de là-bas, du rucher sacré, et qu’elle
arrive jusqu’aux yeux sombres qui s’éclairent tout à coup, et une chaleur étrange enveloppe alors l’enfant,
et plus rien de grave ne peut arriver.

Inzerki, le village où se déroule l’histoire, existe. C’est là que se trouve le plus grand et le plus ancien rucher collectif au monde. 

L’histoire se déroule aujourd’hui. Le village a gardé son mode de vie traditionnel. Seuls les téléphones portables trahissent la modernité. Pas tout à fait, la terre s’assèche, il n’a pas plu dans le sud marocain depuis des années, les sources tarissent, les abeilles meurent, le village se dépeuple. Le rucher est presque à l’abandon, il reste bien peu d’apiculteurs pour prendre soin des ruches.

Jeddi, le grand-père, est l’un des derniers gardiens du rucher. Il raconte à son petit-fils Anir, 10 ans, les légendes du rucher du Saint. Il répète à l’infini les gestes de l’apiculteur et les techniques de culture des tomates pour transmettre ce savoir ancestral qui  se perd. Omar, le père, travaille à Agadir dans une superette, exode rural qui vide le Sud marocain. Aïcha, la mère, était une femme indépendante à l’écoute de la nature, des animaux et des plantes. A la suite d’un drame elle a perdu la raison et vit recluse. Les villageois qui n’avaient jamais accepté l’étrangère, ont peur de sa folie et rejettent Anir, le fils de la folle.

Omar, viens par ici !, mais l’homme n’entend rien et fonce, le visage rouge de sueur, droit sur Anir dont les
battements de cœur se retrouvent dans les oreilles ; doucement, mon cœur, doucement, tu fais trop de
bruit, mais ça cogne de plus en plus fort, et bientôt il ne peut plus rien entendre. Il ferme les yeux et autour
de lui un immense bourdonnement, géant, et ça tourne, ça tourne ; moins vite, mes jambes, et l’enfant
rouvre les yeux mais ne peut plus rien voir ; de minuscules points noirs tourbillonnent autour de lui

Au fil du récit l’autrice distille les secrets de famille qu’ignore l’enfant.

C’est un très beau récit, envoûtant comme le bourdonnement des abeilles. Une alerte aussi pour un monde qui meurt comme les colonies d’abeilles.