Corfou – ville : Esplanade et ville ancienne

Au pied de la forteresse se trouve l’Esplanade, Spianada, ancien champ de manœuvre maintenant occupé par un parc, (et le parking) et même un terrain de cricket.

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De l’autre côté de l’Esplanade se trouvent les arcades du Liston et en face des terrasses luxueuses de cafés chics. Ce Liston rappelle la période française de l’Île. Les troupes révolutionnaires de Bonaparte en 1797 bien accueillies et les corfiotes brûlèrent le Libro d’Oro, sur lequel les Vénitiens avaient consigné  la liste  des familles nobles de l’île, et planté des arbres de la Liberté. C’est ce qui a donné le nom de Liston aux Arcades dessinée par F ; de Lesseps sur le modèle de la rue de Rivoli lors de la deuxième occupation français en 1807.

A l’extrémité de l’Esplanade un  magnifique Palais Saint Michel et Saint Georges a été construit par les Britanniques en 1819. Construit pour servir de résidence au Gouverneur Britannique pendant le Protectorat, il est devenu Palais Royal Grec,le Sénat des Iles Ioniennes et il est maintenant occupé par le Musée d’Art Asiatique.

Autre souvenir des anglais : le terrain de cricket qui est encore un sport pratiqué à Corfou.

Nous suivons une promenade du guide « Voir » partant de l’Esplanade,  dans la Vieille Ville. Dans les petites rues, nous perdons rapidement l’itinéraire. Sur le Liston, les immeubles au dessus des arcades sont en belle pierre blanche et ont des balcons et de larges baies. Dans les petites rues on se croirait en Italie, maisons hautes, jaune pâle, volets verts, linge qui sèche à travers les ruelles étroites.

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Nous cherchons l’église Antivouniotissa transformée en Musée Byzantin.  Nous ne la trouvons pas. Nousen voyons d’autres, passons par des placettes où l’on a disposé des plants dans des pots ou des bidons,  sous une arcade, découvrons une collection de culottes blanches en train de sécher sur un fil, des paréos éclipsant un clocher…D’autres ruelles sont occupées par des boutiques de souvenirs pour touristes, torchons, éponges, bois d’olivier. Les touristes s’y pressent. On se sauve. L’église Saint Spiridon est la plus renommée de la ville. Saint Spiridon, originaire de Chypre est le patron de la ville de Corfou. Le plafond est remarquable presque digne ces plafonds des églises vénitiennes. Mais nous sommes dans une église orthodoxe avec une iconostase de pierre. Des touristes font la queue, cierge à la main, je me sauve.

Nous revoilà sur le Liston, toujours pas d’Antivouniotissa. Un monsieur nous explique : il faut aller à la mer et monter un escalier. La façade de l’église est discrète et passe inaperçue. Sa particularité architecturale est une galerie couverte qui fait le tour de la nef. C’est là que sont exposées les icones provenant de diverses églises de Corfou, assez récentes – 16ème – 17ème et sont de l’école Crétoise ; c’est assez étonnant parce que nous nous trouvons en pleine domination vénitienne. Ces icones n’ont pas la fixité des peintures byzantines anciennes. On peut imaginer que les peintres connaissaient la peinture italienne. Comment ces icones crétoises sont-elles parvenues à Corfou?

Plages au nord-est de Corfou

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La petite route débouche vers Acharavi.  Le sable de la plage d’Almiros est tantôt fin, tantôt grossier sur des kilomètres. Quelques maisons basses sont posées ça et là. Impression de calme. Première baignade : sur cette plage ouverte sur la mer, une vague roule son écume blanche. Je reviens chausser mes sandalettes : une dalle de grès par endroits fissurée borde la plage. . Je suis un peu méfiante: le sable en suspension cache le fond,et ne m’aventure pas loin. La longue plage invite à un autre plaisir : la marche là où se brise la vague. Je pourrais marcher des kilomètres.

L’étape suivante est prévue à Agios Spiridonias. On s’égare. La circulation sur la route côtière est très dense. Motos, quads, 4×4 et même autobus bouchonnent dans les villages.

Nous avions rêvé, comme à Ithaque d’une taverne de plage où nous aurions dégusté gyros, calamars ou souvlakis entre deux baignades. Soit els criques sont profondes, petites et sauvages soit les beaux restaurants à chichis colonisent les quais des marinas. La foule nous agace. Les pétarades des motos et des bateaux nous fatiguent. Il faut se battre pour passer, reculer, ma œuvrer et les places de parkings sont rares. Si on voit une boulangerie qui vend des feuilletés, c’est impossible de s’arrêter. Et on finit par se retrouver coincées dans un embouteillage.

Impression qu’on s’est trompées de vacances, qu’on a choisi la mauvaise destination. Corfou a atteint un point de saturation insupportable ; Les petites criques sont inabordables faute de parking. Nous déjeunons debout sur un coin de plage sous l’œil soupçonneux de la dame plagiste qui espérait qu’on louerait des lits. Les bateaux à moteur rendent dangereuse la baignade. J’ai acheté des chaussons aux épinards. Nous aurions peut être trouvé des calamars à emporter dans la taverne voisine. Le pique-nique est raté.

Je me suis découragée trop vite. Cinq minutes plus tard nous découvrons la petite plage de Houhoulo à l’ombre de deux eucalyptus géants bordée de beaux rochers blancs en bancs minces feuilletés. Pas d’installations. Une famille est à l’eau avec masques et tubas, un monsieur d’un certain âge est assis sur le bord de l’eau. C’est bien calme. L’eau est limpide. Les fonds rocheux sont intéressants. Je traverse la baie et longe les rochers. Cette jolie baignade fera oublier la déception du pique-nique.

Non loin de là, la plage de Gialiskari est bien cachée. Il faut laisser la voiture en haut dans les oliviers  Seul bémol, les bateaux à moteur à louer qu’il faut surveiller.

Il est déjà 16 heures. Nous avons envie de rentrer, de retrouver le calme de la terrasse, le paysage paisible des deux villages perchés, les éclats de voix de nos voisines qui grondent une petite fille Marié.

J’ai commandé pastizada sans savoir ce que c’était exactement : je reviens avec des parts gigantesques de spaghettis au ragout. Sous la tonnelle le jasmin embaume. La fraîcheur tombe avec le soir. La musique grecque s’égrène tranquillement.

Corfou : Musée Archéologique


 

 

Des idoles cycladiques nous accueillent à l’entrée. La première salle contient des statuettes de bronze d’une quarantaine de cm de la période hellénistique ou romaine. Mon préféré est un berger trouvé à Almiros Perathias (nous sommes passées à proximité hier). Il porte un bonnet phrygien et à la main, un fouet.

La plupart des objets proviennent de l’ancienne  Corcyre au sud de la ville actuelle de Garitsa à la péninsule de Kanoni.

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Le peuplement de Corfou est très ancien : les silex préhistoriques datés 40.000 à 9.000avJC sont relayés par les céramiques archaïques très simples. Les vases décorés correspondant à l’installation des Corinthiens vers 700-600 av JC. On voit aussi de belles statues de marbres de toutes es périodes d’archaïques à romaines. Certaines sont des copies de Praxitèle.

Dans la 2de salle 10 statuettes en terre cuite représentant Artémis ont été retrouvée dans un temple à Kanoni. La déesse d’une quarantaine de cm de haut porte toujours la même coiffure sévère, elle tient dans sa main gauche un arc et dans l’autre main un animal, caille, biche ou lion. Parfois la biche est couchée à ses pieds ou se dresse contre elle.

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La salle du fond reconstitue au autre sanctuaire d’Artémis, archaïque (580-550avJC). Sur le mur du fond, un fronton triangulaire figure la gorgone Méduse – celle dont Persée a copé la tête – qui a donné naissance à Pégase, le cheval ailé, et à Chryséor. La Gorgone figure vivante avec ses enfants, une ceinture de serpents à sa taille. De Pégase, il ne reste que le bas, en revanche les deux lions-panthères sont très bien conservés. Tout autour de la salle sont disposés les éléments de décoration du temple : métopes et triglyphes ou bordures en terre cuite. Il reste même les couleurs  sur certains fragments.

Les autres salles rassemblent des éléments plus disparates : un joli lion retrouvé près de la tombe de  Ménécrate,  monument cylindrique proche du musée.

Corfou : l’ancienne Corcyre et Mon Repos

On longe la mer de Garitsar à Anemomylos. Pas de moulin mais des cafés.

Mon Repos n’est pas loin mais où ?

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Nous trouvons d’abord la petite basilique byzantine Saint Jason – saint Sossipatre dont nous avons vu la photo à l’exposition byzantine du Vieux Fort. Cette église est l’un des rares édifices byzantins subsistant sur l’île. C’est une charmante basilique grecque comme celles que nous avons vues sur le continent ou dans des îles de la Mer Egée. Décor extérieur avec des briques disposées en bandes.A  l’intérieur, les fresques ont été martelées et sont en mauvais état ; L’iconostase  du 17ème -18ème siècle est baroque. Le clocher vénitien, ajouté vers 1500, est  sur le même modèle que tous les clochers de la ville.

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L’ancienne ville de Corcyre, Palaiopolis, se trouve dans  la presqu’île de Kanoni. Les thermes romains conservent encore une belle mosaïque. En face, la Basilique Paléochrétienne du 5ème siècle se trouve à l’emplacement de l’agora non loin de l’ancien port d’Alkinoos. Les lignes du rivage ont changé depuis l’Antiquité. L’autre port de Corcyre se trouve sous les pistes de l’aéroport quand on a comblé la lagune.

De l’autre côté des thermes, le parc de Mon Repos. L’entrée est libre ; Nous ne rencontrons pas de touristes mais des Corfiotes qui font leur jogging, des gamins sur des vélos ; des dames qui promènent des poussettes. Une allée goudronnée conduit à l’ancienne Résidence sous des arbres gigantesques, oliviers aux troncs noueux, comme tressés, eucalyptus odorants, chênes centenaires et yuccas touffus. Des massifs d’agapanthes bordent la route. Je subtilise quelques feuilles de lauriers pour cuire le poisson.

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Comme le Palais Saint Michel et Saint George, Mon Repos est une construction classique, anglaise avec des colonnes autour d’une rotonde  .Sir Fréderic Adam, le Haut Commissaire le fit construire et il passa entre les mains de la famille royale grecque. C’est ici que naquit en 1921 le duc d’Edimbourg. On visite les salons en acajou Regency. Des salles d’exposition variées montrent la flore (belles aquarelles), racontent les voyages d’Ulysse et présentent les découvertes archéologiques de Palaiopolis, des stèles funéraires des divers cultes célébrés à Corcyre : Artémis, bien sûr, mais aussi Héra – un petit Héraion est visible dans le parc, Poséidon, les Nymphes…Nous terminons la matinée par une promenade dans le parc à la recherche de ruines antiques, je trouve un petit temple dorique dans la verdure.

Corfou : Chemin de Lakones à Paleokastritsa

Paleokastritsa

Nous avions mal jugé Paléokastritsa, traversée le premier jour, à l’heure de midi. Connaissant mieux Corfou maintenant,  c’est une des stations balnéaires les plus réussies.

Un sentier relie Lakones, village perché  à Paléokastritsa. Il commence par des marches de pierre qui conduisent à l’église entourée d’un jardin. Un ruban de ciment descend à l’oliveraie puis s’arrête net ; la route n’est pas loin. Je coupe par une terrasse et marche deux ou trois épingles à chevaux sur le goudron. Au pied d’un mur, je retrouve un sentier muletier et quelques balises rouges. Cette marche est très agréable. Mais arrivée sur une petite route devant une villa, je perds le balisage ? Dans une cour, un homme m’indique le chemin. Il descend raide vers les premières maisons de Paléokastritsa.

A cette heure matinale, emprunter la route n’est pas si désagréable : je découvre les escaliers qui permettent de descendre dans les criques. Pas de plage mais un accès facile. Il n’est donc pas indispensable de s’entasser sur la plage organisée. Je retrouve D au port Alipa, marina remplie de petits voiliers – les yachts sont à Corfou – et départ des bateaux-taxis et des bateaux d’excursion. Un « petit sous-marin jaune » à fond de verre emmène les touristes à Paradise  Beach, 25€, BBQ compris.

Paléokastritsa, sur le plan ressemble à un trèfle évidé.  Chaque feuille étant une crique : au Centre « Main Beach » de chaque côté la plage d’Ambelaki et de l’autre Alipa. La Plage principale s’étale dans une baie parfaitement ronde avec une étroite ouverture sur la mer qui fait face au sable blanc. Des parois rocheuses verticales enserrent l’anse. L’eau est cristalline et glaciale. Les rochers, les massifs de Posidonies font des taches coloriées dans l’eau turquoise.  Cette plage a gagné le Pavillon Bleu, elle est bien équipée : cabines de déshabillage, cheminement sur des planches, douches…

Après une hésitation, surprise par le froid, je me plonge et traverse la baie ronde pour voir ce qu’il y a derrière les rochers. Une grotte profonde entaille la paroi. Elle est monopolisée par les bateaux de promenade qui font la queue pour la visiter ; Je me contente de regarder de loin.

Vers 11 heures les touristes arrivent en masse. On dirait que la cloche de la récré a sonné. Rapidement les lits se peuplent, les nageurs sont plus nombreux. Les pédalos et les kayaks sont envahissants. C’est l’heure du café frappé ! je retraverse la baie équipée de mon masque. Mais, nageant une brasse discrète, la tête dans l’eau, je ne suis pas repérable pour les diverses embarcations. Cette constatation met fin à mes observations sous-marines.

A midi, la plage est remplie, les pédalos sillonnent la crique ; Ce n’est plus un plaisir. Nous fuyons la foule vers 12h30 et rentrons au calme au village

Corfou : Achilleon, palais de Sissi

Achilleon

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L’Achilleon est le Palais construit par Sissi et occupé plus tard par Guillaume II. Situé à Gastouri à une dizaine de km de Corfou, il domine la mer du haut d’une colline boisée.

Je n’aime la crème Chantilly ni en pâtisserie ni en architecture. Je trouve les constructions viennoises du 19ème siècle,  pompeuses et ennuyeuses. J’ai vu les films Sissi étant gamine et n’en ai gardé aucun souvenir spécial. Rien ne m’attirait particulièrement à l’Achilleon. L’afflux de cars de touristes (beaucoup de Tchèques, Russes et autres slaves) n’a rien  pour nous plaire.

Nous avons pris l’audio-guide et nous avons bien fait !

L’évocation d’Elisabeth qu’on n’a plus envie d’appeler Sissi est passionnante. Sans ces commentaires, nous aurions sans doute été indifférentes à ces objets personnels dans les vitrines et aux nombreuses statues, copies d’antiques.
L’entrée est solennelle : une statue de marbre de l’Impératrice,  placée par Guillaume II, accueille le visiteur. Les portes sont ornées de bas-reliefs de bronze aux motifs antiques . L’entrée est occupée par un escalier spectaculaire. Les fresques murales ressemblant aux grotesques florentins recouvrant entièrement les murs et plafonds, se reflètent dans un miroir. L’Impératrice a dessiné elle-même les ferronneries sophistiquées de l’escalier.
Nous pénétrons dans l’intimité de Sissi : les nombreux miroirs sont l’occasion d’évoquer la santé d’Elisabeth, le soin qu’elle portait à son apparence, sa taille fine, le brossage de ses cheveux. C’est la Sissi que nous connaissons, celle qu’on présente à Schönbrunn en montrant sa salle de bain. A Corfou, elle est libérée de l’étiquette viennoise, elle reprend des forces et dévoile des aspects moins connus de sa personnalité : la grande voyageuse curieuse de tout, la passionnée d’Antiquité, et surtout du monde d’Homère. Elle a débarqué incognito à Troie  visiter les fouilles de Schliemann alors que François Joseph lui avait demandé d’éviter le territoire ottoman. Enfin, férue de poésie, écrivant des vers. Etonnante impératrice autrichienne qui a construit un monument à colonnes en l’honneur de Heine qu’elle admirait et qui était à la place d’honneur à l’Achilleon.la statue n’y resta pas longtemps quand Guillaume  emménagea. Ce n’est qu’en 1956 que la statue du poète juif trouva enfin sa place…à Toulon.
Dans le parc se trouve également une statue de Byron, tout à fait à sa place !
De l’autre côté des appartements privés on voit la chapelle Stella Maris, la Vierge émergeant d’une tempête, parfait chromo (l’Impératrice était une navigatrice intrépide). En revanche deux Della Robia sont les seuls objets de valeur.
L’autre occupant célèbre, Guillaume II, a laissé quelques souvenirs, des tableaux de marine, un cendrier de mauvais goût, une curieuse chaise tournante avec une selle de vélo.
Tous ces objets n’ont rien d’extraordinaire en soi, c’est l’audio-guide qui les fait vivre.
La visite du parc est très agréable, nous gagnons une terrasse ronde, balcon sur la mer, puis une autre terrasse avec un  olivier, un banc de pierre tout autour du tronc. C’est un endroit charmant où Elisabeth venait méditer. Delà on arrive sur une terrasse où deux galeries couvertes aux colonnes ioniques peines de couleurs vives. L’afflux des visiteurs ne gène même pas la photo : on imagine les grecs de l’Antiquité  discourant sous les stoas. Une collection de statues de marbre orne la colonnade les muses et les Grâces ainsi qu’une rangée de têtes d’hommes illustres, commençant avec Homère mais aussi Shakespeare inattendu. La pièce de bravoure est l’énorme tableau du Triomphe d’Achille tirant la dépouille d’Hector attachée à un char et suivi par les Myrmidons sous les yeux des troyens. Pompeux, grandiloquent, antipathique avec même une croix gammée (antique et non nazie mais quand même !)
Deux athlètes de bronze se tiennent à l’entrée des jardins. Achille mourant est une belle statue tandis qu’Achille triomphant commandé par Guillaume occupe la place d’honneur. Cette grande statue était revêtue de pointes d’or sur le casque et le bouclier de manière à être vue par les marins. Mauvais goût de ce nationalisme allemand. Statue de propagande !
En sortant nous prêtons une attention nouvelle à la mignonne statue de l’enfant marin étudiant les cartes, figurant peut être la navigatrice.
J’ai envie de voir Gastouri, lieu du roman de Dessaix que j’ai lu avant le départ, je ne reconnais pas la maison.

Corfou :la maison rouge de marie claire à Liapadès

notre maison rouge

Chiens et coqs se sont surpassés à l’aube.

Je profite donc de ces heures fraîches précédant le lever du soleil pour écrire sur la terrasse. Il sortira à 7h15 derrière la cheminée de la grosse maison que nous nommons entre nous « le HLM ».

La terrasse carrelée de notre maison rouge est notre endroit préféré. Le soir, nous regardons les étoiles à travers les cannisses. Le jour,  nous jouissons d’une vue splendide : à gauche, une haute crête rocheuse qui barre l’horizon au nord, précédée par une colline boisée surmontée du village perché de Gardelades. Sur le balcon de maison voisine, dans  un aimable bric à brac , oignons répandus et en bouquet sur la rambarde, plantes en pot, et chaises pliantes, hier soir, le Monsieur regardait la télévision muette assis, dehors face à sa fenêtre en croquant force pépites.
A droite, les maisons de Liapades s’entassent, adossées la colline, enchevêtrement de toits bruns, oranges ou de tuiles mécaniques rouges, ou grises de lichens, les murs en camaïeu passant du jaune pâle au rouge sang en passant par l’ocre, l’orange ou le rose.
Plus près de nous, des arbres fruitiers très variés : néfliers aux grandes feuilles lancéolées épaisses groupées en bouquet, agrumes au feuillage vernissé vert très foncé, les oranges sont déjà formées, billes vertes, un prunier au léger feuillage clairsemé porte des  prunes violettes qui tombent dans la rue et que je n’ose pas ramasser. En face, deux abricotiers ont des extrémités rosissantes. Un figuier et un magnifique noyer et des amandiers se détachent.
Je suis heureuse d’occuper une maison de village et non pas une de ces grosses villas pour touristes aux studios impersonnels agrémentés d’une piscine. Les Grecs, nos voisins, vivent dehors sur les terrasses et les balcons. On se salue joyeusement à toute heure « kalimera ! «  ou » kalispera », « yassas ! » « yassou ! ». Les grands-mères appellent les enfants. Nico bricole les scooters garés le long de notre mur. C’est bruyant et cela pue mais cela l’amuse bien.
Quand le soleil sera brûlant, je descendrai l’escalier blanc, pour m’assoir près du jasmin qui embaume. Je l’arrose et j’imagine qu’il me remercie en fleurissant à nouveau.  Je relis Mangeclous d’Albert Cohen, natif de Corfou qui situe l’histoire à Céphalonie. Le séisme de  1953 (et sans doute la 2de guerre mondiale) ont anéanti le ghetto. Le récit est savoureux, je ris à haute voix  secouée de spasmes.
Nous déjeunons sous la tonnelle où pendent des grappes de raisin blanc d’une taille spectaculaire. Les grains gonfleront encore et attireront les guêpes. Celles qui rôdent sont plus intéressées par le miel de mon yaourt que par les grains durs et verts. Quelques sarments dépassent, les feuilles font des ombres intéressantes sur le mur rouge sombre. Les tours des fenêtres blancs laqués font un ensemble joyeux. Un jeune citronnier pousse dans la cour et un olivier dans un gros bidon fera peut être un bonsaï. D’une poterie s’échappe une liane qui monte rejoindre la vigne. Le mur mitoyen est bordé d’une jardinière en ciment où le cep de vigne et une menthe anémique poussent. Il y a aussi un buisson envahissant qui mériterait d’être taillé.

Corfou – Paleokastritsa : promenade, grottes marines et baignades

Nous avions prévu de louer un pédalo pour approcher de la grotte de Paléokastritsa. C’est trop tôt ! En revanche on peut faire un tour en mer dans une barque pour 10€ : visite de trois grottes et une demi-heure en mer.
J’embarque avec des Espagnols. Le spectacle des grottes est tellement magique qu’ils sont restés muets, ce qui est plutôt exceptionnel pour des Espagnols. Dans les grottes l’eau limpide prend des teintes turquoise lumineux, des éponges roses tapissent les rochers, dans une autre « Blue Eye » les poissons sont au rendez vous.
La plage Ampelaki, derrière le grand parking est plus sauvage que la plage principale. Les fonds sont aussi plus jolis à observer (c’est là qu’est installée l’école de plongée). Mon masque est resté dans la voiture, je nage avec circonspection pour ne pas rider la surface de l’eau et surveiller les oursins et les rochers tranchants. Dernière baignade à la Main Beach. Je regarde avec amusement l’embouteillage des pédalos à l’entrée de la grotte.

Céphalonie, Ithaque : Lire Homère sous un olivier

Voyager pour Lire/Lire pour Voyager

quel livre emporter dans les Iles ioniennes?

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Quand je (re-)lis l’Odyssée, je retrouve l’âme de l’enfant qui redemande la même histoire le soir avant de se coucher, qui la connaît mais ne s’en lasse pas, qui attend son épisode favori, qui découvre un détail passé inaperçu, qui se réjouit d’une expression favorite comme « les mots ailés« …

Je suis  au bord de la magnifique plage de Filiatro, à Ithaque, j’ai nagé dans l’eau claire et paisible du petit fjord, nous avons déjeuné de souvlakis, je sirote mon café frappé sous un olivier. Je sors l’Odyssée et j’oublie la sonorisation de la taverne. je suis Ulysse aux Enfers…

Je lève les yeux et imagine les personnages se mouvoir dans ce décor précis.

Chant XI : Ulysse aux enfers rencontre les héros de la guerre de Troie Agamemnon raconte le meurtre de Clytemnestre, Achille s’enquiert de son fils Néoptolème, Ajax , toujours jaloux à cause des armes d’Achille, fait la gueule …passent en revue Tyrin Antiope, Alcmène, Epicaste, Chloris que je ne connais pas. Découverte de toute une mythologie beaucoup plus riche que je ne le soupçonnais.

Le chant XII raconte les épisodes plus connus des Sirènes, de Charybde et Sylla, des troupeaux du soleil. Ces aventures se déroulent sur l’autre rive du côté de l’actuelle Italie et de la Sicile. Le monde grec était alors plus étendu qu’aujourd’hui mais toujours avec le décor des oliviers de la rocaille…

C’est au chant XIII que les Phéaciens transportent Ulysse endormi au port de Phorkys, la plage Dexia, et les chants suivants nous serviront de guide dans notre visite d’Ithaque

Céphalonie : Mangeclous d’Albert Cohen

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Quel livre emporter dans les îles ioniennes?

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Albert Cohen est né à Corfou.

Ses Valeureux, Mangeclous, Saltiel, Salomon, Michaël et Mattathias sont céphaloniens.

Séisme ou Shoah? Il ne reste plus rien du ghetto de Céphalonie où évoluaient les Valeureux. D’ailleurs dans quelle localité se trouvaient-ils? A Argostoli ou à Lixouri? Jamais Cohen ne le précise.

C’est un plaisir de relire les aventures des Valeureux dans leur décor. Nostalgie d’un monde disparu, d’une innocence dont la roublardise n’est pas antinomique. Truculence des caractères, pittoresque et de leur langage. La farce est énorme et je ne peux me reternir de rire à haute voix. J’ai adoré l’évasion de la petite lionne et les transports des  Juifs en cage que Mangeclous a inventé. les menus aussi, pantagrueliques et orientaux.

Scipion le Marseillais m’a moins accrochée, personnage un peu convenu, peut être.

quand les Valeureux arrivent à Genève à la SDN, la farce prend un tour plus tourmenté. On sent la menace qui pèse sur les Juifs personnifiée par Jérémie, le juif polonais réfugié(le livre a été publié en 1938). Mais aussi  l’attitude ambiguë de Solal tiraillée entre sa fonction diplomatique et  son attachement aux Valeureux.

que vient faire cette histoire de fonctionnaire belge  à l’esprit étriqué , à la SDN? Est-ce le  contrepoint à la rudesse mais à la chaleur des Céphaloniens?

J’avais déjà lu Mangeclous autrefois, mais j’avais confondu Céphalonie et Salonique. Je n’avais pas relevé les allégences à l’empire Britannique, ni comment ces juifs étaient français. Après avoir lu l’histoire des îles ioniennes, françaises quelques années au début du 19ème siècle puis sous Protectorat britannique cinquante ans, je comprends mieux les allusions.