MASSE CRITIQUE BABELIO

Thriller politique noir? Dystopie?
Difficile de qualifier cet ouvrage : la Situation désigne une guerre civile déchirant la Région parisienne en 2030. Anticipation, emballement de la situation politique actuelle. Remake de la Commune de Paris. C’est un peu étrange de lire ce roman dans les échos des mortiers d’artifice des émeutes à la suite de la mort de Nahel.
Un président opportuniste à la tête d’un parti s’appelant Egalité, mène une politique antisociale, ultra-libérale. Fuyant la guerre civile, son gouvernement a fui Paris pour Chartre. Il est prêt à tendre la main aux Ligueurs, l’extrême droite qu’on appelle parfois les Versaillais (comme en 1871). Les Ligueurs ont mené le 6 février (référence au 6 Février 1934) l’attaque de l’Assemblée (comme celle du Capitole) qui s’est soldée par le massacre des députés noirs et arabes et même la pendaison de la Chef du Gouvernement noire. A la suite de la tentative de putsch l’extrême gauche (wokiste, islamiste, gauchiste, trotskistes…) on fait une alliance pour contrer les Ligueurs.
Le roman s’ouvre par un massacre dans un bar du XIème (rappelant les fusillades des terrasses de 2015)… Tout est outré mais rien d’invraisemblable.
Lecture haletante.
Beaucoup d’empathie pour le héros de l’histoire, un écrivain sexagénaire qui s’est terré chez lui pour éviter la violence et que le décès dans le bar de son quartier a forcé de prendre parti : il veut voir les criminels prisonniers des Ewoke ( ultra-gauche) qui ont tiré sur
Ahmed, Eminé, Sarah, Gilles, Océane, Kévin Coumba, Denise, Fatima, Mamadou, Bocar, Tijani »
L’analyse simpliste Ultragauche contre Ligueurs ne fonctionne pas. Les luttes de pouvoir compliquent tout. L’écrivain se trouve entraîné dans une véritable épopée…
Là, j’arrête, je ne veux pas spoiler!
J’ai lu ce livre avec beaucoup de plaisir, je me suis amusée à relever les clins d’oeil à l’histoire ou à la politique actuelle. Références littéraires aussi. Exotisme du mélange et métissage des cultures dans le
« polygone Belleville, Goncourt, Père-Lachaise, Parmentier »
et que dire de la dalle d’Argenteuil:
« la visite de Sarkozy est restée dans les mémoires comme le prologue des émeutes les plus violentes que la France n’ait connues depuis mai 1968(et jusqu’à ce que la Situation fasse passer ces périodes de troubles pour d’aimables plaisanteries). La dalle d’Argenteuil, depuis ce temps, c’est l’Esplanade des mosquées de Jérusalem pour un politicien israélien. Tu n’y joues gros bras que si tu penses que le moment est venu de déclencher une énième intifada. »