Sur la carte routière Paléokastritsa nous emble une grosse station balnéaire. Nous pensons y trouver un supermarché et un Office de Tourisme. Erreur ! Il n’y a rien en dehors des hôtels, du grand parking et des échoppes de souvenirs vendant serviettes de plage et autres babioles. Les plages sont belles, très belles même, mais entourées de swimming-pool-bars et de restaurants avec des embouteillages plus ou moins régulés par des feux de circulation.

Plus loin, le château d’Angelokastro coiffe un éperon rocheux.
Un panneau résume l’histoire du château : les premiers chrétiens, les empereurs byzantins pour qui Angelokastro était la limite occidentale de Byzance, les convoitises des Normands – à l’époque régnant sur la Sicile -puis des Angevins enfin des Croisés. La domination Vénitienne ne date que de 1386 et dura jusqu’à ce que Napoléon ne pénètre en Vénétie en 1797. La forteresse eut pour rôle de contenir les envahisseurs venant de l’Ouest dans les premiers temps puis les Turcs venant d’Orient. Verrou de l’Adriatique sud, c’était une place stratégique de première importance.

Au-delà de la station balnéaire de Paléokastritza on peut aussi visiter le Monastère de la Panaghia perché. De nombreux cars déversent leur cargaison de touristes, e majorité des russes mais aussi des Français. Deux jeunes Corfiotes en jupe rouge et corsage blanc arborant une très belle coiffe carrée de voile blanc empesé, se tiennent de chaque côté du porche. Cette mise en scène est destinée aux photo-souvenirs. Chaque touriste est photographié et trouvera son portrait en compagnie des jeunes filles costumées à la fin de la visite. Flairant quelque arnaque payante, je me garde bien de les photographier. Des tissus sont à la disposition des visiteurs peu vêtus. En short et le dos nu je prends un linge.
– « You are OK ! » on m’intime l’ordre de reposer le chiffon.
Interloquée, je sors mon foulard turc pour m’en couvrir les épaules. A qui sont destinés ces tissus ? A celles qui pensent visiter un monastère en bikini ?
Dans une pièce sombre on peut voir un pressoir à huile qu’on vend à un prix raisonnable avec des sachets d’aromates. Qui vit ici ? Des moines ou des nonnes ? Je ne croise aucun religieux. Un passage voûté est décoré de potées de bégonias et de fougères et basilic, pavé de galets le chemin conduit au petit musée recelant des icones fort belles. J’aurais aimé prendre mon temps pour les contempler si deux groupes russes ne remplissaient pas toute la pièce déjà fort encombrée par une vitrine contenant des ossements de baleine.
A l’église c’est carrément la queue, Russes et roumains viennent en touristes mais aussi en pèlerins et font maints signes de croix. Je jette un coup d’œil furtif à la très belle iconostase. Ce monastère mériterait une autre visite plus tôt dans la matinée.
Nous rentrons à Liapades avec des sentiments mitigés. Que sommes nous venues faire à Corfou dans cette cohue ? Les plages vues de la montagne sont merveilleuses : petites criques à l’eau turquoise mais vues de près elles sont bondées. Les voitures klaxonnent.les motos pétaradent. Visiter un monastère devrait être un moment de sérénité et de recueillement, c’est course et dispute pour une place de parking.
Dans notre maison rouge nous passons l’après midi sur la terrasse abritée du soleil par des cannisses sur un confortable canapé à regarder la vue intéressante sur le village de Liapades, ses toits de tuile. Des arbres fruitiers : agrumes, néfliers, abricotiers et amandiers sont à portée de main. Au nord, une crête montagneuse barre l’horizon, sur l’épaulement d’une colline plantée d’oliviers touffus d’où émergent quelques cyprès. Sur la terrasse de la maison voisine on a entreposé des oignons dorés.
Vers 18heures je descends à la plage à pied. J’en ai fait un principe pour 1km on ne prend pas la voiture. En remontant je m’arrête à la taverne Aspros où on m’offre un caf é (j’ai décliné l’offre de whisky ou d’une vodka). On goûte la douceur du soir qui tombe, pas une voiture ne passe, pas une moto ?
– « vous avez fini de travailler ? » me demande Yannis
– « pourquoi, j’ai l’air d’être si vieille ! », je réagis, piquée.
Occasion de râler à propos des réformes des régimes de retraite aussi bien en Grèce qu’en France. Je raconte le plan français de ne remplacer qu’un fonctionnaire sur deux qui partent à la retraite
– « l’un ira à la retraite, l’autre dans la tombe. » dit Giorgos « on ne devrait pas faire travailler les gens après 60 ans ! »
A 21heures, je rapporte de la taverne dans mon « pakete » de la moussaka délicieuse, épaisse couche d’aubergines, béchamel au fromage et sauce à la viande bien assaisonnée. Demain on essaiera pastitsio. La cuisine de la taverne est excellente.