Un mois autour de la Roumanie en Logan chez l’habitant

Le soleil a baissé et les murs font de l’ombre, je m’installe dans la rue pour dessiner la plus belle maison du quartier. Comme elle est grande je choisis d’étudier la décoration multicolore par le détail : mur jaune d’or ocré, tour des fenêtres blanc éblouissant, motifs bleu roi. Les persiennes projettent leur ombre rayée sur le mur jaune. J’observe spirales et volutes bleues.
Je viens tout juste de terminer le dessin d’une fenêtre qu’une dame sort, habillée d’une élégante robe à plumetis blanc sur noir me propose de visiter sa belle maison, et les trois chambre d’hôtes . Ils reçoivent des « invités » du monde entier, récemment, du Brésil
Raffinement des meubles peints aux motifs floraux. Vastes chambres toutes différentes, salles d’eau luxueuses. Ils ne jouent pas dans la même cour qu’Adrian et Elena. Catégorie luxe. La table aussi, est raffinée : « invités » font le déplacement de Bucarest ou de Brasov pour un bon repas.
Son mari emmène ses hôtes dans la forêt pour observer la faune sauvage : renards, chevreuils et oiseaux. Connaisseur en vins, il commande directement au producteur. Je décline l’offre d’une dégustation malgré son insistance.
Ils ont conduit eux-mêmes la restauration.
Caroline de Viscri (la fille de la dame guide) s’occupe de la fondation pour la conservation des façades qui finance les ravalements. Il faut ensuite consolider la maison, refaire les toits. Avec leur camionnette, ils ont écumé les villages pour rapporter 6000 tuiles, des fenêtres anciennes et des meubles peints pour donner à la maison son aspect traditionnel. Le plus difficile fut de convaincre les artisans d’utiliser des matériaux d’origine, de démolir le neuf, la véranda métallique, les grandes baies pour mettre à la place les cadres vermoulus des fenêtres de bois, les planchers à peine équarris, la peinture à la chaux. Je ne veux pas abuser de leur hospitalité mais ils sont si fiers de montrer le résultat.
Ils sont aussi préoccupés de l’image de la Roumanie en Europe et bien conscients de la mauvaise réputation et de la criminalité et de la mendicité des Tsiganes. Evidemment, je leur parle de Cioran, d’Ionesco et de Brancusi (notre prononciation française les amuse ils prononcent Brancouch, le i final est muet).
Au cours de la conversation, nous parlons des Tsiganes qui vivent au village.
– « Non, ils ne squattent pas. Ils payent un loyer à la Mairie. »
Propriétaires d’un gite de luxe, ils ne voient pas d’un mauvais œil ces occupants. Le fait de vivre dans une maison contribue à son entretien et l’empêche de s’écrouler. Comme Helena, ils ne les trouvent pas fiables comme employés, sans prendre cela de façon dramatique :
– « Ils viendront travailler deux jours et pas le troisième »
Nous terminons la visite au jardin. Le potager est vraiment grand et très bien entretenu : tomates, carottes, cornichons, oignons mais aussi brocolis, céleris, aneth. Les haricots prennent le maïs pour tuteur (nous avons vu cela chez les indiens du Canada, les Indiens appelaient maïs, haricots et courge les trois sœurs).
Finalement nous regardons les géraniums et les volubilis. Les volubilis ont une place spéciale : ils ont donné leur nom à la maison. Leur bleu rappelle celui des décors extérieurs et leur camionnette en est couverte !