Philip Roth est un auteur que je lis régulièrement et toujours avec un grand intérêt! A la suite de la lecture d’Indignation j’ai retrouvé J’ai épousé un communiste qui se déroule à peu près à la même époque. Et je publie ici la fiche que j’avais écrite il y a quelques temps déjà.

En ces jours d’anti-américanisme primaire déclenché par les discours sur « l’axe du Mal » de Bush ,et de menaces de guerre contre l’Irak. Quel plaisir de lire un livre américain intelligent !
Au temps du maccarthysme, la chasse aux communistes ressemblait à la bêtise actuelle . Voici une Amérique de gauche personnifiée ici par deux intellectuels, l’un professeur de lettres, Murray et par un écrivain Nathan . Où est le discours des intellectuels en ces jours -ci d’après 11 septembre ?
Le personnage principal, Ira Reingold, est un juif communiste, acteur de radio, chassé de son poste par la chasse aux sorcières entraînant dans sa chute tout son entourage, tandis que sa femme, une actrice de cinéma arriviste publie un roman à succès « j’ai épousé un communiste » pour essayer de sauver la mise, ce qui ne lui évitera pas la déchéance.
Le roman se déroule presque exclusivement dans la communauté juive, très rares sont les personnages qui ne sont pas juifs. le communiste pur et dur O’Days, le mentor d’Ira, les figurants du quartier italien de Newark, quelques ouvriers slaves des mines de zinc, et les Grant, aristocrates journalistes maccarthistes responsables de la chute .Juifs sans folklore aucun, quelques rares mots de yiddish apparaissent, trois ou quatre dans le gros pavé, une allusion à la vaisselle de Pessah, chez les parents de Nathan, qui y cache un disque de chants de l’armée rouge. Des Juifs complètement laïcisés, sans référence ethnique, et pourtant extrêmement conscients d’être juifs. Des Juifs en colère. C’est la première fois que les Juifs peuvent se permettre d’être en colère, note quelque part l’auteur. Cette colère se traduit par un engagement à gauche, anti-raciste, aussi bien contre l’antisémitisme que contre le racisme anti-noir. Je suis simplement étonnée de cette conscience très aiguë déconnectée des références obligée de la shoah et du sionisme. Jamais le sionisme n’est évoqué. Cet antisémitisme sans religion ni antisionisme extrêmement fort montre les limites d’assimilation du communautarisme américain. Autre communauté évoquée, les Italiens
Autre facette du livre : l’engagement communiste, syndical dans ces temps staliniens. La lutte des classes dans le cadre syndical étonne par sa radicalité. Je ne savais pas,en ces temps, les syndicats si politisés. Moins étonnante ,la figure raide et sans nuance du militant O’Days, présenté au début du roman comme quelqu’un de réfléchi, autodidacte exigeant sur le style et la langue anglaise qui devient un personnage sans cœur quand on fait appel à ses sentiments dans la chute d’Ira.
Ce qui fait la richesse de ce roman est que toutes sortes de lectures sont possibles : quête d’un mentor de la part d’Ira, l’orphelin qui se laisse embrigader par O’Days en cherchant u père mais qui cherche aussi un fils en Nathan. Quête aussi du mentor de Nathan qui trouve Ira s’en éloigne et tombe sous l’influence de son professeur de littérature qui rejette toute forme de littérature engagée, puis qui est fasciné par O’Days …
On peut aussi dire que ce livre est celui de la trahison, trahison de la femme d’Ira, mais aussi trahisons multiples qui jalonnent le livre, trahison d’Ira de la classe ouvrière en se mariant avec une bourgeoise.
Nous sommes bien loin de l’Axe du mal de Bush, et je me sens soulagée de l’anti-américanisme primaire. Heureusement qu’il existe des Américains qui pensent autrement qu’en binaire ou en terme religieux !
Bien envie de lire ce roman que je ne connais pas encore. Tu nous fais une récapitulation Philip Roth!
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