Gertrude Bell – The Desert and the Sown

VOYAGE EN ORIENT

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Quel plaisir de voyager dans les contrées dont la télévision ne nous  montre aujourd’hui que ruines et destructions….

Le Voyage en Orient est mon sujet de  lecture de prédilection, et encore plus quand  une exploratrice raconte  ses aventures. The Desert and the Sown(1907) non traduit en français est le récit d’un voyage en Palestine, Liban et Syrie en 1905.

Gertrude Bell est partie de Jérusalem en Février 1905 et son périple s’est terminé à Antioche en avril (elle a rejoint Konya mais ce n’est pas raconté dans le livre). Elle se déplace à cheval dans une véritable caravane avec guide, cuisinier, muletiers sans compter les escortes que lui accordent les dignitaires ou les zaptiehs (gendarmes ottomans) qu’elle doit éventuellement rémunérer. Elle transporte des tentes et tout le matériel de camping mais profite aussi de l’hospitalité qu’on lui offre généreusement surtout quand il pleut. Car il pleut beaucoup en hiver et au printemps et qu’il fait bien froid dans la montagne libanaise et druze. C’est amusant de la voir pester contre la boue, les marais et la pluie en pays méditerranéen qu’on imagine plutôt desséché.

Pendant les premiers chapitres, je n’ai pas saisi d’emblée le but de son expédition : tourisme ou archéologie? Gertrud Bell est parfaitement arabophone, elle est capable de saisir les variantes des parlers des bédouins ou des seigneurs de la montagne. Elle n’est pas une voyageuse naïve, elle est tout à fait au courant des moeurs des différentes populations. Comme pour Ella Maillart ou Alexandra David-Neel, être une femme ne semble pas lui avoir fermé de portes. Sa personnalité, son aisance et sa nationalité britannique inspirent le respect des hommes qui l’invitent dans les salons où seuls les hommes se réunissent. Le fait d’être une femme lui permet de fréquenter les femmes qui recherchent sa compagnie.

Dans le début du voyage, elle rencontre surtout les tribus du désert, rendant compte de leurs habitude, de leur merveilleuse hospitalité, leur accueil sans condition, même sans question, le café sous la tente mais aussi les razzias, les vendettas. »les Arabes n’ont pas de nom pour le désert comme nous. Pourquoi en auraient-ils? Pour eux, ce n’est ni un désert ni un endroit sauvage, c’est la terre dont ils connaissent tous les détails, une mère-patrie dont le moindre produit a un usage suffisant à leurs besoins »

Les Druzes sont plus mystérieux, leur religion cachée, seuls les initiés y ont accès. Comment Gertrude Bell reconnaît-elle un initié? Il ne fume pas. Elle tient en grande estime les Druzes dont elle connait les dignitaires.

Ce livre n’est pas un catalogue des coutumes et des traditions des différentes population. Le cuisinier la chapitre:

« Quand vous écrirez un livre, ne dites pas « ici il y a un  grand château ou une belle église » les nobles le voient par eux-mêmes. Dites dans ce village, il n’y a pas de poules, comme cela ils verront quelle sorte de pays c ‘est »

Gertrude Bell est attentive aux équilibres politiques, elle souligne l’absence de sentiment national au sein des populations de l’empire ottoman en 1905.

« ...dans un pays habité par des Turcs, il n’y a pas de pays Turquie….les parties où les turcs sont en majorité sont peu nombreux ; généralement un gouvernement étranger gouverne à l’eaide de soldats étrangers, une collection de populations hostiles au pouvoir et hostiles entre eux … »

Le voyage  se déroule pendant le conflit Russo-Japonais. Ses hôtes sont friands de discussions autour de cette guerre. A l’exception des Chrétiens orthodoxes qui soutiennent la Russie, les autres sont ravis de voir une Puissance occidentale mise en échec par des Orientaux.

Entre les longues cavalcades dans les montagnes et les déserts, Gertrude Bell visite les grandes villes syriennes, Damas, Hama, Homs, Alep et Antioche. Je me suis laissée emporter dans ses promenades dans ces villes anciennes (maintenant ravagées par la guerre actuelle).

Gertrud Bell n’est pas uniquement une aventurière ou une exploratrice. C’est aussi une archéologue qui décrit avec précision les temples antiques de Baalbek, les ruines Séleucides ou romaines ainsi que les villages chrétiens byzantins, les églises primitives du 6ème siècle. Elle a le privilège de loger dans le Krak des Chevaliers, forteresse des Croisés, des Hospitaliers.

Attentive à l’équilibre des différentes populations qui forment une mosaïque, elle se trouve aussi à l’aise avec les Kurdes, se renseigne sur la religion Yezidi ou celle des sectes Ismaéliennes ou des Bahai. Elle conseille à tous les voyageurs de se tenir « éloigné des mèches du filet de la Question Arménienne » comprenant comme elle est délicate à cette époque. C’est d’ailleurs ) cette seule occasion, qu’on lui a réclamé son passeport – qu’elle avait perdu. Monde bien étrange pour nous où l’on pouvait voyager sans passeport dans tout le Moyen Orient, alors empire turc.

Une personnalité fascinante, surtout quand on sait qu’elle fut également  archéologue, alpiniste, suffragette, espionne et qu’elle négocia à l’égale de Lawrence d’Arabie le partage de l’Empire Ottoman après la Première Guerre mondiale. Comme écrivaine, toutefois, je préfère Ella Maillart.

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

6 réflexions sur « Gertrude Bell – The Desert and the Sown »

      1. Je me suis pris d’ une véritable passion littéraire et historique pour Gertrude Bell ! J’ ai énormément aimé The Désert and the Sown et lis actuellement  » Amurath to Amurath ( évidement c’est aussi en anglais. Ce mélange de géopolitique d’ethnologie et est impérissable …avec un flegme victorien .Il y a un très beau site de l’ université de Newcastle qui classe ses milliers de photos prises. A découvrir ! Aussi son anthologie de lettres en sections: l’ infirmière de guerre ( 1914 )

        l » archéologue, la linguiste, la femme, la diplomate..Quelle vie fascinante!

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  1. S’il n’est pas traduit, je ne pourrai pas le lire. J’ai entendu parler d’elle, sans plus, c’est passionnant ce que tu racontes et on se frotte les yeux aujourd’hui, on a l’impression que c’est si loin cette époque …

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      1. Le traiter laisse entrevoir quelque chose d’assez previsible avec une N.Kidman pas du tout crédible : on ne perçoit pas du tout l intelectualite et la classe victorienne qu ‘ on perçoit en lisant GB. Ca paraît tiré vers le film d aventure orientalisant téléphoné avec une beauté hollywoodienne blonde et fade ^^ – Même si elle peut etre une très bonne actrice.

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