Cagnac-les-Mines et le Chemin des mineurs

CARNET OCCITAN

Cagnac-les Mines est situé à 6 km au-dessus de Lescure d’Albigeois en direction de Carmaux.

Depuis le Moyen Âge le charbon est exploité où il affleurait alors. Une famille noble locale de Solages obtint en 1724 le privilège d’exploiter les mines et resta aux commandes jusqu’à leur nationalisation. Déjà en 1806, 18 mineurs travaillaient à Carmaux, 1000 en 1860. La production atteint ses records en 1918. En 1985, l’Etat lança un grand projet d’extraction à ciel ouvert sur 600 ha. Fin de l’exploitation minière en 1997.

Six mineurs à la retraite ne se résignèrent pas à la disparition des traces du passé minier du bassin de Cagnac-Carmaux. Il se mobilisèrent pour arrêter les démolitions et reconstituèrent dans une galerie de 350 m les différents aspects de l’exploitation minière. En 2007 le département du Tarn prit le relai pour en faire un musée départemental. Des travaux de rénovation ont été entrepris récemment le le musée a réouvert ses portes à l’été 2023 avec des expositions temporaires.

La visite sous terre est accompagnée. J’ai visité les expositions temporaires en attendant les autres visiteurs :

BLEUE  de Cathy Conan : « de l’intime individuel à la richesse du collectif »

Bleu comme la toile des bleus de travail. « Entre les fils apparaissent les déchirures et les usures soutenues par l’inlassable rapiéçage, reprisage, ravaudage des femmes »

Des broderies au fil rouge décorent les bleus transformés en vêtements de fête, en robe de mariée…Le fil rouge relie les broderies aux portraits des femmes au travail sur une photographie ancienne. Fil rouge de la solidarité comme le clament les bleus suspendus ensembles.

C’EST AVEC EUX QUE J’AI COMPRIS de Erik Sather Jorgensen et Clara Mouillesseaux

CLIC

Est une exposition de portraits de mineurs, en très grand format accompagnés des témoignages. Une pleine page raconte le parcours professionnel des dernièrs mineurs. Pas ceux de Zola mais ceux qui ont travaillé à la fin du XXème siècle, embauchés en 1955, 1975…Attachement aux valeurs de solidarité.

MINE DE RIEN du Collectif EPONYME

Expose en plein air une série de photographie couleur, parfois très loufoques prises dans le site abandonné de la laverie de Blaye-les-Mines CLIC. On y effectuait les opérations de triage, lavage et criblage du charbon. Friche industrielle abandonnée, bâtiments rouillés, taggés où des silhouettes étranges prennent la pose. Mes recherches sur Internet m’ont appris qu’il existe aussi un film « Mine de Rien » de Mathias Mlekus (2020) tourné dans une mine abandonnée. A voir….

Des Expositions permanentes pédagogiques traitent de divers sujets :

Très belles coupes géologiques du bassin d’Albi-Cagnac-Carmaux, origine du charbon et fossiles, frise des temps géologiques, échantillon de houille et charbons….

La Grève de Carmaux de 1893 est illustrée de photographies d’époque. JB Calvignac, ouvrier mineur,, fut élu Maire de Carmaux. Le directeur des mines, le Marquis de Solages, également député du Tarn, voyait d’un très mauvais œil le développement des idées socialistes. Prétextant des absences au travail et l’incompatibilité de la fonction de maire avec le travail à la mine, Calvignac fut licencié. Les ouvriers se mirent en grève (1892 – 1895) La grève de Carmaux fut un des épisodes fondateurs de la prise de conscience de la force collective de la classe ouvrière. C’est aussi l’émergence de la carrière politique de Jean Jaurès CLIC. A l’époque, le charbon était la seule énergie utilisée dans les transports et l’industrie ; un arrêt de la distribution de charbon provoquait l’arrêt de l’économie, production et transports.

La Visite de la Mine

La visite de la mine débute sous le chevalement du puits n°2 où l’on voit la cage « de jour », la cage « du fond » étant 230 m au fond. On se familiarise avec cette opposition entre « le fond » et « le jour ». Dans la Salle des Machines, le Machineur était aux commandes de la « cage » (l’ascenseur). On peut voir le siège du machineur, les manettes de contrôle, les tableaux indiquant l’emplacement de la cage de jour et de la cage de fond, la guide explique les codes employés pour le transport des hommes, des cadres, des wagonnets, et même des chevaux.

Salle des machines, câbles enroulés

Nous sommes donc prêts à descendre. La cage du puits n°2, petite, ne charge que 8 mineurs. Elle descendait les hommes à la vitesse de 6m/s, les wagons 12 m/s. Les chevaux étaient trop grands pour entrer dans la cage, ils descendaient suspendus, harnachés, saucissonnés. Dans Germinal, Zola donne un très beau récit de l’arrivée du Cheval.

« Cependant ; les manœuvres continuaient dans le puits, le marteau avait tapé 4 coups, on descendait le cheval et c’était toujours une émotion, car il arrivait parfois que la bête, saisie d’une telle épouvante, débarquait morte. En haut, lié dans un filet, il se débattait éperdument ; puis dès qu’il sentait le sol manquer sous lui, il restait comme pétrifié, il disparaissait sans un frémissement, l’œil agrandi et fixe. […] Bientôt Trompette fut couché sur les dalles de fonte comme une masse. Il ne bougeait toujours pas, il semblait dans le cauchemar de ce trou obscur. On commença à le délier, lorsque Bataille dételé depuis un instant, s’approcha, allongea le cou pour flairer ce compagnon, qui tombait sous terre…. »

Ces animaux restaient 12 ans sans remonter. La conférencière raconte avec beaucoup d’empathie les conditions de travail des mineurs aux différentes époques. Depuis Germinal, les techniques ont, heureusement, beaucoup évolué. Nous suivons les progrès techniques jusqu’aux machines modernes équipées de vérins hydrauliques qui attaquent la veine, soutiennent le toit et à l’arrière comblent avec des roches la galerie exploitée. Une animation nous fait imaginer le travail de cette machine et son bruit effrayant.

Excavatrice moderne

Une autre animation simule un coup de grisou et un feu de poussière qui se propage à la vitesse du son, brûlant tout sur son passage. Les reconstitutions sont très bien réalisées. On visualise les ruines une fois que le souffle de l’explosion est passé.

Certains visiteurs qui m’accompagnent ont été eux-mêmes mineurs ou proches de mineurs. La guide a échangé avec les témoins de ce passé récent. Elle sait très bien faire passer les émotions. Elle nous raconte aussi comment les derniers mineurs licenciés ont été envoyés en Inde comme instructeurs de ces machines sophistiquées.

Cette visite ressemble à celle que j’ai fait récemment en Sardaigne à Carbonia. L’avantage de la visite en Français est la richesse du vocabulaire de la mine et des mineurs. Chaque travailleur occupe un poste précis désigné par un métier précis, machineur, herscheuse, galibot, porion….Lisant Germinal en même temps, je me suis familiarisée avec ce vocabulaire.

Le Chemin des Mineurs

D’après Visorando (6.2 km, 1h30)

Après un rapide pique-nique près du Musée, je descends le chemin des mineurs qui emprunte la Voie Verte (cyclable et piétonnière) reliant Albi. Dominque m’attendra sur le Parking de la Voie Verte près de la Déchetterie de Lescure d’Albigeois.

Avantage de parcourir une voie verte : extrême simplicité, impossible de se perdre, arrivée bien matérialisée, pas de surprise.

Inconvénients : marcher sur une route dure, en plein soleil pendant la première moitié. Des petits arbustes ont bien été plantés pour faire une haie mais il faudra encore attendre plusieurs années pour qu’ils donnent de l’ombre. Autre inconvénient : les cyclistes sont rois, les piétons n’ont qu’à se garer.

Le sentier descend une pente très raide. A droite : une vaste implantation de panneaux solaires. A mi-chemin l’église Saint Delmaze est bien à l’ombre sous un bosquet d’arbres.

La fin de la randonnée est plus agréable parce qu’à l’ombre de grands arbres.

 

 

 

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

4 réflexions sur « Cagnac-les-Mines et le Chemin des mineurs »

  1. Je ne connais pas ce coin là. Je ne sais pas si je visiterais ce genre de site, j’y vois trop de souffrances, mais comme je l’entendais récemment à propos d’un documentaire (nous les ouvriers) les ouvriers étaient fiers de ce qu’ils faisaient.

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