Eleftheria – Murielle Szac

LIRE POUR LA GRECE (CRETE)

les ruelles de la Chanée

Le titre seul m’aurait attirée : Eleftheria, liberté en Grec, qui résonne particulièrement en Crète quand je pense à Kazantzakis, La Liberté ou la mort.

Avec mes écouteurs dans les oreilles, en forêt, j’ai écouté Murielle Szac sur un podcast de Talmudiques dédié à Rosh Hachana. C’est par une  coutume crétoise de Roch Hachana : Tashlikh que s’ouvre le roman, avec les bougies sur de petits radeaux « Armée de lucioles surgie de la mer ». Jolie occasion pour faire la connaissance de Rebecca, de Judith Levi, du rabbin Elias et de la communauté juive de Chania vivant dans l’ancien ghetto vénitien de Evraïki.  Jeunes filles juives, et leurs camarades grecques avides de liberté qui n’acceptent pas la place qui leur est assignée :

« Comment choisir sans entrave sa vie quand tout vous désigne, vous assigne à une place ? Que peut décider de son destin une jeune Crétoise, comme elle, juive et pauvre, alors que les nuages noirs de la guerre se massent au-dessus de sa tête ? La flammèche coule soudain. Rien, pourtant, ne semble troubler la joie, les rires…« 

Le roman débute en  octobre 1940, à la veille du Ochi, le Non opposé à Mussolini par Metaxas qui et aussi le début de l’intervention nazie en Crète et qui se terminera en Mai 1944 par l’anéantissement de la communauté juive crétoise. 

Roman choral rassemble de nombreux personnages, le plus souvent très jeunes : jeunes filles juives, ou pas. Jeunes grecs, marins ou villageois attirés par les filles, certains s’engagent dans la résistance et prennent le maquis, d’autres pas collaborent avec l’occupant nazis. Histoire aussi de Petros, le photographe qui documente les massacres, fait des portraits, le témoin. Luigi, italien, des troupes d’occupation qui ne se soumettent pas aux Allemands éprouve plus de sympathie pour les Crétois. On croise même Patrick Leigh Fermor dans son rôle d’espion britannique (je connaissais ce rôle de mon écrivain-voyageur préféré). 

Et la Liberté? Elefthéria. Bien sûr dans la Résistance contre l’occupant, mais aussi la liberté d’aimer en dehors de sa communauté. La liberté de faire de la musique. De très belles évocations d’un Premier Mai fêté malgré l’occupant nazi dans un village rappelant le poème de Yannis Ritsos.

« Yannis Ritsos. L’enseignant traduisait en italien les poèmes qu’il trouvait et les faisait apprendre par cœur à ses élèves. Un jour de mai tu m’as abandonné… Ce cri de la mère d’un jeune ouvrier tué par la police au cours
d’une manifestation du 1er mai à Thessalonique, ce cri déchirant devenu un poème encore plus déchirant… Un
jour de mai je t’ai perdu… Ce texte, Epitaphios, avait bouleversé le jeune étudiant. Sans toi j’ai perdu le feu et la lumière, j’ai tout perdu… Luigi, est-ce donc si loin de toi ? »

Les histoires s’entremêlent. Grecs et juives vont s’aimer, se séduire, se marier ou se quitter et se retrouver  sur le Tanaïs pour la tragédie finale.

mon Dieu, je vous en conjure, changez les cieux Et alignez toutes les étoiles pour dessiner la forme de la Crète.Aussitôt un autre poursuit : Un printemps sans mois de mai j’aurais pu l’imaginer Mais jamais, au grand jamais,que mes amis trahiraient. Un troisième enchaîne : Il y en a qui sont pris de vertige en haut de la falaise Etd’autres qui, au bord du vide, dansent le pentozali.

Un véritable coup de cœur pour ce roman!

Et encore une fois merci à Claudialucia de m’avoir fait connaître ce livre!

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

3 réflexions sur « Eleftheria – Murielle Szac »

  1. Je n’ai pas lu beaucoup de romans grecs sur cette période tragique. Ma bibliothèque a plusieurs textes de Murielle Szac mais pas celui-ci. Dommage.

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