Albert Londres – vie et mort d’un grand reporter 1884-1932 – Pierre Assouline – Gallimard

« Son nom recouvre un mythe, celui du journalisme au long cours »

Albert Londres (1884-1932)

La biographie du Grand Reporter, très complète, très détaillée (632 pages)  qui se lit comme un roman d’aventure, de voyages ou comme un livre historique. Une compilation, une synthèse de ses articles souvent regroupés édités en livres. Une contextualisation dans le milieu journalistique et politique de l’époque. Passionnant!

La vie personnelle d’Albert Londres se confond avec son métier de journaliste.  Il devient journaliste, quand il publie l’incendie de la Cathédrale de Reims en septembre 1914. Reporter de guerre il visite le front dévasté en Flandres et ailleurs multiplie les rencontres, les points de vue pour obtenir des articles variés. En 1915, il devine que quelque chose d’important se joue en Orient et couvre l’expédition des Dardanelles. J’ai lu cette « épopée » comme un roman d’aventures en passant par Athènes, Chios, Gallipoli, Salonique mais aussi à travers la Serbie, l’Albanie ou la Macédoine

« mars 1916. Allons voir à Corfou si la Serbie n’y est pas »

Entre Venizelos et le Roi Constantin, Albert Londres a ses préférences, il sort même de son rôle de journaliste pour comploter et ourdir l’assassinat d’un général britannique.

Toutes ces aventures balkaniques m’amusent beaucoup. Le point de vue décalé est intéressant.

Anasthasie, la censure rend ses articles méconnaissables. Après le règne des fausses nouvelles au début de la guerre vient l’absence de mauvaises nouvelles :

« il est formellement interdit de porter préjudice aux intérêts de l’Armée »

Le grand reportage à Moscou l’obsède. Pour parvenir en Russie, il est prêt à tous les subterfuges, y compris l’espionnage. Il finira par entrer dans le Pays des Soviets mais ce fut un voyage éprouvant…

1920, il ne se passe rien dans la vieille Europe, mais cela bouge dans les Balkans…En passant par l’Italie, il fait la connaissance de Gabriele d’Annunzio.

Dépaysement total au Japon, et en Chine où la situation est encore plus complexe « la Chine en folie » est le titre du chapitre . Difficile de se retrouver dans ce chaos. De Chine, il passe en Indochine où il découvre la vie aux colonies. Il y est déçu, pas d’aventure. Même la chasse au tigre l’ennuie !

En 1922, en Inde, Trois hommes incarnent l’Inde à venir : Nehru, Gandhi et Tagore. Leçon d’histoire du XXème siècle!

Après 1923, « le flâneur salarié devient redresseur de torts ». 

Après des reportages dictés par les points chauds de la politique internationale, des reportages en Allemagne sur le thème des réparations,  Albert Londres se penche sur des sujets moins compromettants politiquement.

Il part enquêter au Bagne , à Cayenne, dans les îles du Salut. Ce qu’il découvre est effroyable. Il met en scène des personnages, s’attache au « traître », Benjamin Ullmo qui a su se repentir et s’amender et surtout à l’anarchiste Eugène Dieudonné, ouvrier ébéniste qui l’a touché au cœur et qu’il suivra le reste de sa vie. Pire que le bagne de Cayenne, Biribi, les bagnes militaires. L’enquête n’y sera pas facile! 

Plus léger :  Le Tour de France et les forçats de la route. la joyeuse caravane qui suit le Tour, Londres la tient pour un convoi de pompes funèbres. Il célèbres trois champions, trois frères, les Pélissier qui sans prévenir disparaissent du peloton et qu’il retrouve au bistro!

Pour faire son reportage Chez les fous, Londres rencontrera presque autant de blocages que pour visiter le Pays des Soviets. Ni le Préfet de la Seine, ni les médecins aliénistes ne sont prêts à subir ses critiques. Il va devoir contourner les obstacles, feindre la folie, se lier avec des familles. Et il découvrira, et fera découvrir des horreurs. 

Au Djebel Druze, avec les Comitadjis macédoniens en Bulgarie le  reportage est  plus classique. 

Il poursuit l’étude des sujets de société avec La traite des Blanches qui le conduit en Argentine.  La Traite des Noirs qui aurait dû être son pendant symétrique, rend compte de la colonisation et du « chemin de fer qui tue » . sans manifester une opposition politique à la colonisation il dénonce ses manifestations les plus abominables : le drame du Congo-Océan, chemin de fer libérateur?

Ce chantier avait une particularité : le nègre y remplaçait tout à l’exception des explosifs. On lui demandait de tout faire avec ses mainq: la grue, le camion…Bilan6 à 8000 morts selon l’administration 17000 selon Albert Londres

Le Juif errant est arrivé le mène de Londres à Varsovie, de Roumanie en Palestine. Il aimerait découvrir le monde musulman et les lieux saints de la Mecque. Impossible, il va remplacer le voyage en Arabie par une enquête sur les Pêcheurs de Perle à Bahreïn et dans le Golfe Persique….

La mort d’Albert Londres est romanesque, dans un incendie sur le bateau qui le ramenait de Chine avec un reportage « explosif ».

Les 620 pages se sont tournées avec frénésie. Une belle leçon d’histoire. Une personnalité hors du commun.

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

15 réflexions sur « Albert Londres – vie et mort d’un grand reporter 1884-1932 – Pierre Assouline – Gallimard »

  1. Très bel hommage rendu à l’immanentisme Albert Londres ! L’article de Miriam Panijel m’a vraiment décidé à lire le bouquin de Pierre Assouline. Juste un copier/coller et je l’ai commandé sur Amazon. Je vais me régaler !

    Merci pour votre super-blog !

    Bien Cordialement

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  2. Je ne me suis jamais vraiment penchée sur la vie d’Albert Londres, même si son nom fait toujours référence. Ce serait une bonne occasion.

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  3. Je ne me suis jamais vraiment penchée sur la vie d’Albert Londres, même si son nom fait toujours référence. Ce serait une bonne occasion.

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    1. @keisha : la biographie de Londres par Assouline est une magistrale leçon d’histoire de 1914 à 1934. mais cela ne remplace pas la plume d’Albert Londres qui mérite d’être lu même avec un siècle d’écart

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  4. Un beau pavé de lecture estivale, même si ce n’est pas un « épais de l’été » (il s’en faut d’une vingtaine de pages…).
    Mort dans des circonstances confuses… Il aurait travaillé ponctuellement pour les services secrets français?
    (s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola

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      1. J’aimerais m’abonner à votre blog mais je ne sais pas comment Merci de m’aider 

        Yahoo Mail : Recherchez, organisez, maîtrisez

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      2. @luocine : sin vous avez un blog WordPress ou accès au Lecteur WordPress, c’est prévu. Sinon copiez/collez l’adresse pour me mettre dans votre blogroll. Si je trouve un autre moyen je vous le fais savoir.

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