J’emporterai le feu – Leila Slimani

LIRE POUR LE MAROC

Troisième volet de la saga familiale qui a commencé avec le Pays des Autres et Regardez-nous danser. Trois générations, Mathilde l’alsacienne qui a épousé Amine, le soldat marocain venu défendre la France pendant la Seconde guerre mondiale, tous deux ont cultivé la terre dans la campagne près de Meknès, la ferme a prospéré. 

J’emporterai le feu raconte l’enfance et la jeunesse des deux filles Mia et Inès. Mia est la  narratrice. Enfance choyée et privilégiée au sein de la villa familiale à Rabat. Les parents, Aïcha, gynécologue, et Mehdi, banquier, bourgeois cultivés très occidentalisés.   Mia et Inès, brillantes et originales, étudient au Lycée français . 

« Aïcha mettait ses filles en garde contre les dangers du monde. Les chutes, les étouffements, les jeux de mains, jeux de vilains, les noyades, les égarements dans des lieux bondés où un prédateur viendrait les enlever. Elle leur inocula la frousse comme on injecte un vaccin. À chaque âge de la vie survenaient de nouvelles inquiétudes : les hommes, les grossesses, les accidents de voiture. Elle leur apprit à parler bas, à ne jamais donner leur avis, à haïr toute forme d’imprudence, à se méfier de tous et de chacun car des indics de la police se cachaient partout et l’on pouvait disparaître, en un claquement de doigts, au fond d’une geôle où personne ne vous retrouverait. Aïcha espérait que ça leur entrerait dans la tête, qu’elles développeraient une aversion du risque. Elle voulait des enfants lâches à qui ne viendrait pas l’idée de s’indigner, de se révolter, de parler trop haut. Des enfants dociles avec les puissants, de petites Shéhérazade qui sauraient charmer les tyrans et sauver leur peau. »

Au contraire Mehdi offre à Mia des livres qui lui ouvrent l’esprit, et la fait réfléchir alors que ses camarades de classe sont beaucoup plus frivoles.

Mia ne se coule pas dans le moule offert aux jeunes filles, elle tombe amoureuse d’une fille doit subir le rejet des autres. Elle ira chercher la liberté en poursuivant ses études à Paris. Encouragée par son père :

Mais n’y crois pas. Mets-toi de la cire dans les oreilles, accroche-toi au mât, souviens-toi de ce que je t’ai
dit. Ne reviens pas. Ces histoires de racines, ce n’est rien d’autre qu’une manière de te clouer au sol, alors
peu importent le passé, la maison, les objets, les souvenirs. Allume un grand incendie et emporte le feu.
Je ne te dis pas au revoir, ma chérie, je te dis adieu. Je te pousse de la falaise, je lâche la corde et je te
regarde nager. Mon amour, ne transige pas avec la liberté, méfie-toi de la chaleur de ta propre maison. »
Et là, il lui tendrait le livre. Elle poserait le paquet sur ses genoux. « Merci papa. » Lentement, elle
déchirerait le papier : La vie est ailleurs. « Tu aimeras Kundera, j’en suis sûr. »

 Inès rejoindra sa sœur. 

Tandis que les filles s’émancipent, une chape de plomb tombe sur le père. Quelle faute a-t-il commise? Il perd la confiance du pouvoir. Sa charge à la banque, puis sa liberté. C’est pour son père qui lui a dit d’emporter le feu que l’écrivaine a écrit ce livre. 

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

4 réflexions sur « J’emporterai le feu – Leila Slimani »

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