Lire pour l’Afrique : Amadou Hampâté BÂ : Amkoullel, l’Enfant Peul – Oui mon commandant.

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C’est un vrai grand livre qui m’a emportée pendant des jours et qui me hante encore.

Les mémoires d’enfance  de l’écrivain remontent au début du 20ème siècle, à la colonisation française. La vie dans une ville du Mali est décrite dans les moindres détails.

Nous avons vu un campement Peul en sortant de la Réserve de la Pendjari, au Bénin. Huttes démontables de paille. Les commentaires de  notre chauffeur, Duran, nous laissaient penser que les nomades peuls « qui n’aiment pas se mêler aux autres », « qui ne s’intéressent qu’à leurs bœufs », étaient des sortes de gitans, nomades pauvres et déshérités. Rien ne laissait soupçonner la noblesse et la fierté des peuls.

Richesse de cette culture orale, influencée par l’Islam mais aussi par l’animisme !

L’enfant Peul apprend à lire dans le Coran, mais il apprend à vivre dans les contes des griots à la veillée. Le maître de l’école coranique trace des  lettres sur la planchette de bois puis la rince et fait boire à l’enfant l’encre qui a servi à écrire le texte sacré. Tout un symbole. Tandis que la circoncision est racontée comme une initiation de passage d’âge et non pas comme un cérémonie musulmane.

C’est aussi le récit d’une dynastie de princes et de rois de grande noblesse que je ne soupçonnais pas. Récit d’initiation dans des sociétés enfantines qui découvrent le monde des blancs.Cocasses questions d’enfants: concernant les cacas des blancs! L’enfant grandit alors que la colonisation s’installe.

Rencontre des cultures, rencontre aussi des traditions orales des conteurs et de la langue française qu’Hampâté Bâ maitrise admirablement.

Amadou Hampâté Bâ : Oui mon  Commandant

C’est la suite de l’enfant Peul.

 A. Hampâté Bâ a terminé ses études. Il commence sa carrière de fonctionnaire de la colonisation française en Haute Volta à Ouagadougou en bas de l’échelle. Le livre commence donc par son voyage à travers le Mali jusqu’au Burkina. Voyage surveillé par un garde, il est presque prisonnier, voyage à pied, en pirogue, à cheval à travers l’Afrique Occidentale française.

L’auteur raconte ses débuts comme commis. Il se fait apprécier par son travail sa probité et sa personnalité. Il n’est pas le fils d’un roi pour rien. Dans la ville où son père a régné, il détient même pendant un certain temps l’autorité que seul un blanc peut exercer.

Il raconte avec fidélité les déboires d’un africain employé par la colonisation, administrateurs médiocres parfois corrompus, parfois militaires incompétents, parfois d’ancienne noblesse derniers aventuriers de la 3ème République,…parfois ridicules, toujours profondément humains. Bâ se « convertit » à l’Islam, à un Islam exigeant, empreint de spiritualité soufie. Jamais, il n’est intolérant si borné.

 

Lire pour l’Afrique : Orsenna : Madame Bâ, Fatou Diomé: le Ventre de l’Atlantique

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Je ne me suis jamais tellement intéressée au football. Tout le  battage médiatique autour de ce sport m’ennuie. Mais c’est au cours de mon premier voyage « africain » au Cap Vert que j’ai mesuré la joie que le foot donnait au gens. Nous étions arrivées à Sal un jour de Finale gagnée par le Brésil et c’était la fête!j’ai donc reconsidéré mon dédain….

Erik ORSENNA : Madame Bâ

Madame Bâ est une forte personnalité. Elle envoie au Président de la République française une requête pour un visa refusé. Elle veut aller en France pour retrouver son petit fils enlevé par des entraîneurs de foot peu scrupuleux venus en Afrique dénicher les talents prometteurs. Le livre est astucieusement construit selon les items du formulaire de demande de visa, Etat civil, profession, enfants… tout la vie de madame Bây passe :  fille de forgerons Soninké, instruite, institutrice,mariée à un  trop beau Peul, nomade–cheminot …. Orsenna est toujours très sympathique, il dénonce, il raconte… les meilleurs sentiments ne font pas forcément les meilleurs livres. C’est un livre très agréable à lire, bien documenté qui  manque peut être de souffle. D’autant plus que je venais de lire le livre du  Amadou Hampâté Bâ , la comparaison nuit à Orsenna.

Fatou DIOME : Le Ventre de l’Atlantique

Fatou Diomé est sénégalaise et vit en France. Le roman est il autobiographique ?

La narratrice regarde les matches de foot pour pouvoir les raconter au téléphone à son petit frère qui rêve de venir jouer en Europe. Des chapitres entiers sont donc consacrés à ce sport et ce n’est pas le plus passionnant. Dans la petite île sénégalaise, les Africains essaient de regarder le match quand la télévision marche. Tous ont un rêve : immigrer dans cette France racontée par les immigrés qui sont rentrés au pays. Et le foot leur paraît la solution rêve de s’enrichir…Orsenna a déjà traité cette thématique dans Madame Bâ.  Et, avec beaucoup plus de talent.

Un homme qui crie – film tchadien de Mahamat Saleh Haroun

Un film tchadien sélectionné à Cannes, c’est un évènement à ne pas rater!

Adam, ex-champion de natation exerce la fonction de maître nageur dans un hôtel de NDjamena, la piscine, c’est sa fierté, sa vie, dit-il.

A l’occasion  du rachat de l’hôtel par des Chinois Adam doit céder sa place à son fils Abdel et se retrouve dégradé au rang de garde-barrière. il n’est pas seul, son ami cuisinier est licencié. Adam n’accepte pas ce remplacement. Le face à face père/fils est ambigu, un autre verrait peut être cette passassion de témoin comme naturelle, lui non.

L’action se déroule aussi dans un contexte de guerre qui gronde autour de la ville. Un notable du quartier suggère, ordonne peut être à Adam de donner son fils à l’effort de guerre. Rien n’est dit, mais on devine qu’Adam a cédé.

A-t-il livré ce fils devenu un rival?  A-t-il cédé à la pression? Aurait-il du intervenir quand les soldats sont venus chercher Abdel? Lacheté devant la force ou pire?

je me suis interrogée sur le sens du titre. Justement Adam aurait peut-être dû crier tant qu’il était encore temps. C’est la critique du Monde qui m’a révélé  l’allusion à Aimé Césaire « Un homme qui crie n’est pas un ours qui danse »

J’avais aimé Daratt, saison sèche du même réalisateur (2006), la vengeance du fils  avait une dimension de tragédie antique que n’atteint peut être pas Un homme qui crie. J’aurais souhaité louer le chef d’oeuvre comme Daratt, j’ai trouvé des longueurs, peut être pas assez de rythme dans le montage. Certaines scènes sont mangifiques : la fin poignante après l’errance de la mto et du side-car

Lire pour l’Afrique – Ahmadou KOUROUMA : les Soleils des Indépendances

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Pourquoi ce titre : Les soleils? les jours, peut être… le soleil radieux des espoirs?

« les Indépendances » et non pas l’Indépendance au singulier, l’expression s’est répandue si bien qu’on fête cette année le cinquantenaire de ces Indépendances

Critique acerbe des années du parti unique. L’Indépendance n’est pas glorieuse. Si la Décolonisation est une évidence, l’Indépendance n’apporte pas  au peuple tout ce qu’il aurait pu souhaité. Nostalgie plutôt, d’un monde ancien, d’avant la colonisation. D’un monde naïf, intègre…

Ce roman retrace l’histoire de Fama, le dernier descendant des Doumbouya, chefs traditionnels, mais déchu. Fama vit dans la capitale de la Côte d’Ebènes, avec Salimata sa femme. L’ouvrage commence avec des funérailles où Fama est contesté.

C’est aussi l’histoire de Salimata, excisée, violée, mariée de force, femme stérile.

Fama retourne dans son village à l’occasion des funérailles de son cousin le dernier chef Doumbouya, il épouse Mariam. A son retour, la vie devient impossible entre les deux épouses. Fama fuit la maison et se mêle de politique. Il aboutit en prison.

C’est un beau livre. Kourouma véritable écrivain et  conteur,  joue avec la langue française. Ce récit est plus dépouillé que l’ouvrage précédent que j’avais découvert « En attendant le vote des Bêtes sauvages ».

Ahmadou KOUROUMA : les Soleils des Indépendances  – POINTS 196p

Lire pour l’Afrique- Dominique SEWANE: Le souffle du Mort – les Batammariba (Togo, Bénin)

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J’ai trouvé ce gros livre (850p) au Musée du Quai Branly, à la sortie de l’exposition Bénin. Si j’avais lu le titre je ne l’aurais peut être pas acheté, le Souffle du Mort m’aurait peut être rebutée. Mais j’ai seulement lu le mot « Batammariba », vu les silhouettes au sommet de la Tata….Le livre n’est pas resté longtemps en attente sur ma table de nuit. Il m’a accompagnée pendant plusieurs semaines.Je me suis trouvée fascinée. Il a hanté mes pensées.

La première fois que j‘ai entendu parlé de Bétammaribé, c’était à la sortie du parc de la Pendjari. Etienne, le gérant de l’auberge m’avait demandé comme un service de descendre un  de ses hommes malade. Nous avions trouvé Félix, notre passager, installé sur le toit de la 4X4. Il avait repéré pour nous les lions à proximité de l’hôtel. En revanche, la rencontre avec un gros éléphant menaçant l’avait effrayé, il s’était glissé dans l’habitacle par la fenêtre arrière quand l’éléphant avait secoué ses oreilles. Je lui avais fait cadeau du lait en poudre que nous transportions avec nous depuis Cotonou pour sa petite sœur et il  nous avait quittés à la Cascade de Tanougou. C’est lui qui  nous avait montré les campements démontables des Peuls et leurs troupeaux. J’avais senti une nuance de mépris de ce sédentaire pour les nomades. « Je suis Bétammaribé » avait il affirmé.  C’est ensuite, en lisant Hampâté Bâ que j’avais découvert l’immense fierté et la noblesse des Peuls. 

Quelques jours plus tard, dans la 4X4 de Duran, nous avions visité le pays Somba de Natitingou à Boukoumbé. Curieuse expérience que cette expédition à la recherche des Tatas Sombas, ces magnifiques forteresses de terre dans l’Atakora. La beauté de l’architecture nous incitait à prendre photo sur photo malgré l’opposition des habitants. Une femme s’était précipitée sur la 4×4 et j’avais cru qu’elle allait gifler Dominique ou lui arracher l’appareil photo. Pourquoi étions nous si mal perçues ? C’est seulement après l’intercession de Maurice que nous avions été invitées dans une tata et chaleureusement accueillies. L’ »auberge » de Maurice nous avait aussi beaucoup plu. Quand nous somme revenues l’année suivante, notre seule exigence dans l’élaboration du circuit était de  dormir une nuit dans la tata en ciment de Maurice. Malheureusement Maurice n’avait pas fait le nécessaire et nous l’avons trouvé complètement saoul à une cérémonie dont nous n’avions pas élucidé le sens et nous sommes redescendus dormir à Natitingou. Sentiment d’inachevé de cette visite. Comprendre ce qui s’était passé ce soir là… comprendre pourquoi nous étions si étrangères…

Ce livre devait donner l’explication.

Dès l’introduction, j’ai été attirée on seulement par le sujet mais aussi par l’auteur. Dominique étant un prénom mixte, je n’avais pas pensé que l’anthropologue serait une femme. Et une femme dont je me sens très proche par la génération post soixant-huitarde et les racines. J’ai beaucoup aimé la façon dont elle se met en scène dans son étude. L’observateur n’est jamais neutre dans une telle enquête. Cela m’a plu que ce soit le regard d’une femme. J’ai aussi apprécié son ambition de faire paraître ses travaux dans cette Collection Terre Humaine en compagnie en Jacques Lacarrière dont l’Eté Grec m’a servi de guide en Grèce ou de Dominique Fernandez, et de Mahmout Makal. Ambition d’être un écrivain avant tout plutôt qu’une universitaire publiant sa thèse. Et de ce fait, la lecture est très agréable.

Je n’imaginais pas la complexité de la religion animiste des Batammariba. Chez ces hommes restés longtemps nus et considérés comme « primitifs » le respect du savoir non écrit des Anciens est fondamental. Importance du nom, nom prononcé ou interdit, complexité des généalogies et des réincarnations. Extrême sophistication des cérémonies et en même temps tolérance inimaginable. Poésie. Alors que toute mystique me rebute habituellement j’ai lu jusqu’au bout cette analyse très fine de leur religion.

Impossible de quitter ce livre pourtant si gros. Je l’ai lu avec attention jusqu’au bout. Il n’a pas répondu aux questions que je me posais sur nos aventures béninoises.  Pourquoi tous ces villageois étaient-ils si alcoolisés ? Etait-ce la condition pour entrer en transe ? Ou était- ce une corruption moderne de leurs traditions, l’alcool comme compagnon de l’irruption des fripes, des mobylettes et de la modernité. Dominique Sewane fait peu allusion à cette imprégnation lors des cérémonies auxquelles elle a assisté.

Dominique SEWANE : Le souffle du Mort – les  Batammariba (Togo, Bénin) Terre humaine Poche

Lire pour l’Afrique – Ousmane SEMBENE: Les Petits bouts de Bois de Dieu

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Avant les Indépendances, c’est le récit d’une grève des cheminots  sur la ligne de chemin de fer Dakar –Niger en 1947

3 Dépôts : Dakar, Thiès, Bamako.

4 mois de grève très dure.

On pense à Zola.

Toute la population est impliquée. Si le début de la grève est une affaire d’hommes et les revendications syndicales, celles d’une égalité de traitement entre les cheminots noirs et les européens, mêmes pauses, droit à la retraite, aux allocations familiales, salaires… très rapidement femmes et enfants se trouvent au centre de la lutte. C’est la force de ce livre que de montrer la mutation  et la prise de conscience de l’ensemble d’une population illettrée, profondément religieuse et soumise à l’autorité coloniale. Au départ de la grève,  la seule qualification politique des militants est de savoir lire et écrire. Bakayoro, le meneur,  a lui seul, une vision vraiment politique. Les autres apprendront sur le tas.  La réaction des colons  radicalisera l’ensemble de la population. Non contents de les affamer, la grève très longue a épuisé les réserves, (l’aide de la CGT de France et la solidarité de cheminots n’a apporté que quelque répit). On a coupé l’eau des bornes fontaines. Les femmes se trouvent à court d’eau. Ce sont elles qui auront les premières réactions violentes  et qui trouveront aussi les moyens de lutte les plus originaux :  la marche de Thies à Dakar qui marquera les foules. Les enfants marcheront aussi en première ligne et seront  les victimes du contremaître blanc exaspéré. C’est le sacrifice de ces enfants et la marche des femmes qui permettra les négociations que la direction refusait aux syndicalistes

Les Petits bouts de bois de Dieu, c’est une expression imagée qui désigne les cheminots. On mesure au cours du roman la conquête de la dignité de ces hommes et de ses femmes qui n’imaginaient pas la force de leur résistance et de leur grève.

Livre militant ? Pas seulement ! C’est un formidable roman qui raconte très bien une histoire, qui fait vivre des personnages, évoque une époque, une ambiance.

Lire pour l’Afrique – Ahmadou KOUROUMA : En Attendant le vote des bêtes sauvages

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En cette période de célébration des Indépendances, c’est une bonne occasion de redécouvrir  ce roman.

Si Hampâté Ba a décrit la période de la colonisation, Kourouma raconte celle qui suit la décolonisation. On retrouve des allusions à toues les dictateurs du continent africain.

La construction de l’ouvrage est tout à fait originale : au cours de 6 veillées, des conteurs – griots ? – racontent et chantent les louanges de Koyaga le grand chef, le grand soldat, le dictateur. Ces veillées sont rythmées de proverbes, de danses.

La première veillée est celle des origines, de la colonisation, de l’embrigadement des hommes nus – les paléos – qui habitent des fortins ressemblant aux tatas sombas – dans les régiments de tirailleurs sénégalais, dans la grande Guerre, puis dans la seconde guerre mondiale, l’Indochine, l’Algérie. Généalogie. Le père guerrier, lutteur. La mère, sorcière. Le marabout, Bokano, le protecteur.

La seconde veillée, c’est la prise de pouvoir, le coup d’état militaire, sur fond de guerre froide, les complices.

La troisième conte l’histoire du journaliste Maclédio dans diverses contrées,  de traditions variées, des fétiches, des esclaves dans le Sahel, l’apprentissage à Paris.

Pendant la 4ème apparaissent les autres chefs d’Etat, dictateurs corrompus, totem caïman, totem léopard, totem hyène. On croit reconnaître Bokassa, Hassan II… peut être d’autres, personne n’est nommé. Puis vient l’apothéose, la fête des 30 ans de dictature. Ensuite le réveil. Les caisses sont vides. La guerre froide, terminée. Vient le temps du FMI, de La Baule. L’Occident n’appuie plus les dictateurs, enfin la révolte.


Lire pour l’Afrique : Christian DEDET : Au Royaume d’Abomey

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Carnets de voyage d’un écrivain qui est aussi médecin. Dedet connaît bien le Bénin.

L’auteur se trouve à Grand Popo lors de la manifestation Ouidah 92. Il raconte  les cérémonies vaudoun. J

J’ai commencé la lecture avant notre premier voyage à Cotonou. J’avais été étonnée de ce  parti pris. Je ne mesurais pas l’importance de cette  culture animiste. Les expériences de transes observées par Dedet sont bien différentes des cérémonies auxquelles nous avons assisté. Maintenant je comprends l’intérêt d’un anthropologue pour le vaudoun. Les cérémonies d’Abomey auxquelles nous avons assisté ont sûrement été des éléments majeurs du voyage.

Abomey, ses cérémonies et ses palais. Parfait livre de chevet pendant notre voyage

Lire pour l’Afrique: Mary KINGSLEY : Une Odyssée Africaine, Une exploratrice victorienne chez les mangeurs d’hommes

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Quel régal ce récit d’aventure!

Qui ne connaît Stanley, Livingstone…. ces explorateurs, hommes courageux, héros de notre enfance?

Mais il y avait aussi des exploratrices :

Mary Kingsley, Anglaise érudite, autodidacte mais fille d’un médecin explorateur, spécialisée en ichtyologie, part en Afrique de l’Ouest explorer les fleuves en pirogue, remonte des rapides, fait l’ascension du Mont Cameroun.

Roman d’aventure, description précise des coutumes (5 chapitres sont intitulés « Fétichisme ») Elle raconte aussi bien ses rencontres avec les blancs, Anglais, Français et Allemands au Cameroun que ses expéditions avec ses porteurs. Administrateurs ou missionnaires, commerçants des factoreries et des comptoirs perdus le long des fleuves, bateliers, porteurs tous sont décrits avec sympathie.

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L’humour très british avec lequel elle se dépeint dans les circonstances les plus invraisemblables et les plus cocasses, rend le récit délicieux. Jamais elle ne semble se prendre au sérieux. Très british aussi, la cérémonie du thé avant même de prendre un bain alors qu’elle doit arriver couverte de boue !

Lire pour l’Afrique – L’Aventure Ambiguë -Cheikh Hamidou Kane

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Ce récit m’a envoûtée.

Itinéraire d’un enfant Peule Samba Diallo qu’on retire à son Maître qui lui enseigne le Coran dans la douleur mais aussi dans la rigueur et l’extase mystique, pour le confier à l’école de la colonisation d’où il sortira licencié de philosophie.

Lecture mystique, d’une très grande exigence. Déchirement, crise de conscience, écrit Vincent Monteil dans sa préface.

Réflexion politique. C’est La Grande Royale qui prend la décision que personne n’ose prendre : envoyer l’enfant à l’école, lui apprendre pourquoi les Européens ont défait les princes peules avec tant de facilité. Apprendre chez eux le savoir qui donne le Pouvoir. Ni le chef, ni le Maître n’osent prendre parti. Entre le savoir que l’école dispensera et la tradition qui se perdra. Où sera la plus grande richesse, dans ce qui s’apprendra ou dans ce qui s’oubliera?

Ecriture d’une grande rigueur, d’une grande pureté. Rien d’inutile ne parasite le récit. Des caractères d’une étrange noblesse, des chevaliers, des princes, une sorte de jeu d’échec venant d’une sorte de Moyen Age. Pas de folklore, si peu de décor, quelques étoffes d’un boubou royal. Règnent la Pensée et la Parole.

L’épisode parisien est peut être moins épuré. La rencontre avec un Africain avocat installé à Paris est presque ironique. Ambiguïté du métissage?