PALESTINE

Nathan Thrall journaliste américain – récompensé par le Prix Pulitzer 2024 enquête sur un fait divers : l’accident et l’incendie d’un bus scolaire le 16 février 2012 qui a conduit au décès de 7 personnes dont six enfants d’une école maternelle en sortie. Abed Salama est le père d’un petit garçon de 5 ans.
Cet essai de 400 pages( dont une quarantaine en annexe) et références très détaillées, sources officielles israéliennes, palestiniennes, des Nations Unies, journalistiques, entretiens…un travail approfondi et sérieux.
Ce n’est pas du tout un texte aride ou ennuyeux. Des chapitres présentent les personnages et leur histoire personnelle. il raconte une histoire qui commence avec la Nakba (1948) et l’histoire de la Palestine, Première Intifada(1987), Accords d’Oslo (1993), Seconde Intifada(2000-2002), avec. les violences et les incarcérations . Personnages palestiniens et israéliens, tous nommés, caractérisés avec leurs interactions. Un chapitre est consacré à la conception de la barrière de séparation, son inventeur, les arguments des différentes parties concernées.
Surtout, ce sont des personnages qui ont des vies diverses, des histoires d’amour, des mariages plus ou moins heureux, des carrières professionnelles ou politiques. Les chapitres s’entrelacent. Vie quotidienne compliquée par les checkpoints, où la couleur de la carte d’identité permettra ou interdira le passage. L’apartheid est régulé par la couleur de la carte. Heureux possesseurs d’une carte de couleur bleue qui permet l’accès à Jérusalem !
Ces 350 pages se lisent comme un roman. Au début, je n’avais pas compris qu’il s’agissait de véritables personnes et de leur vraie vie. C’est à la lecture des annexes que j’ai vu l’ampleur de la documentation du journaliste.
La tragédie a bien fait l’objet d’une enquête, de la recherche des responsabilités dans l’accident : négligences des chauffeurs du camion ou du car, indemnités. Le drame aurait-il pu être évité? Le tribunal a jugé.
Si des coupables furent désignés, personne — ni les enquêteurs, ni les avocats, ni les
magistrats — ne pointa les causes véritables de la tragédie. Personne n’évoqua le manque chronique de
classes à Jérusalem-Est, qui avait conduit de nombreux parents à envoyer leur progéniture dans des
écoles de Cisjordanie très médiocrement encadrées. Personne ne pointa non plus du doigt le mur de
séparation et le système d’autorisations qui avaient contraint.Personne ne fit remarquer qu’une seule et unique route par ailleurs très mal entretenue ne pouvait
suffire au trafic routier palestinien nord-sud de la zone Grand Jérusalem-Ramallah. Et personne ne
rappela non plus que les checkpoints étaient utilisés pour endiguer la circulation palestinienne et
faciliter celle des colons aux heures de pointe. Personne ne releva que l’absence de services de secours d’
un côté du mur de séparation ne pouvait que conduire à une tragédie. Personne ne déclara que les
Palestiniens qui vivaient dans la région de Jérusalem étaient négligés parce que l’État juif cherchait
activement à réduire leur présence là où l’expansion d’Israël était la priorité des priorités. Et personne ne
fut tenu de rendre des comptes pour tout cela












