Promenades dans Pont Aven

CAP SIZUN ET CORNOUAILLE

Chaos sur l’Aven

Pont Aven est une ravissante petite cité. que j’avais négligée  après la visite du Musée.  J’étais si impatiente d’aller à la mer! Nous sommes donc revenue sous un beau soleil. Le village est si encaissé qu’à 9h30 il était complètement dans l’ombre.

Trois promenades : Le port, la promenade Xavier Grall qui remonte l’Aven, le circuit du Bois d’Amour encore plus vers l’amont du ruisseau. Et bien sûr les rues du village avec toutes les galeries de peinture.

Moulins sur l’Aven

La rue des Meunières conduit au Port. Selon Gauguin, « Pont Aven, 15 maisons, 14 moulins ».  L’activité meunière est à l’origine des fameuses Galettes de Pont Aven étaient confectionnées avec le grain moulu sur place. 

Le cours de la rivière s’élargit au Port. De nombreux bateaux de plaisance sont à quai dont la Belle Angèle . La Belle Angèle est le portrait d’une des hôtelières de Pont Aven, peinte par Gauguin actuellement exposée au Musée d’Orsay. C’est aussi un bateau qui emmène les touristes dans l’estuaire de l’Aven et du Belon (Belon comme les huitres!). Beaux hôtels et restaurants chics pour un tourisme friqué.

Le Port de Pont Aven

Plus haut, dans le centre du village après le pont, la rivière ressemble plutôt à un torrent de montagne au vif courant et à l’eau claire bondissant sur les rochers arrondis d’un chaos granitique. La Promenade Xavier Grall remonte l’Aven ; elle se déroule sur du sable fin entre des massifs fleuris. Des passerelles conduisent aux terrasses des restaurants.

Xavier Grall (1930 -1981)est présenté comme un poète et journaliste libertaire et breton. Selon Wikipédia, élève des établissements catholiques traditionnaliste il a conçu une aversion pour ces curés noirs autoritaires sans renier pour autant sa foi. Son passage en Algérie, tortures et tabassages, l’a marqué. Il quitte Paris pour la Bretagne.

Promenade au Bois d’Amour

la promenade du Bois d’Amour continue à remonter le cours de la rivière, assagie maintenant, son lit élargi s’écoulant sous de très grands arbres. C’est dans le Bois D’Amour que Gauguin délivra sa leçon de peinture qui guida Sérusier pour peindre le Talisman. 

Arrivée à Audierne, notre gîte à Esquibien

CAP SIZUN ET CORNOUAILLE

Pique-nique à ‘entrée de la presqu’ile de Quiberon à marée basse. Deux heures de route sur la 4 voies bretonne gratuite qui contourne Lorient. Nous arrivons sous le soleil à Audierne. Après avoir longé les quais nous posons la voiture sur un grand parking à l’entrée du port? Promenade sur une longue digue empierrée jusqu’à un petit phare blanc et rouge : la Jetée de Raoulic. La marée monte; Des surfeurs s’élancent sur la vague qui déferle sur le port longuement comme un mascaret.

Le port d’Audierne

Des panneaux émaillés racontent l’histoire d’Audierne. 

Port marchand dès le XVème siècle exportant au loin sel et marchandises. Puis vint le temps de la pêche. Du XVIIIème au début du XXème siècle, la sardine fit la richesse dAudierne. Dès le début du XXème siècle les bancs de sardines se sont raréfiés. Les pêcheurs ont alors pêché la langouste dont les effectifs ont aussi décliné, remplacés par le thon. Ces reconversions m’ont rappelé les analyses d’Anita Conti sur la prédation de la ressource.

Plus loin j’ai découvert la ville, ses commerces, la Mairie et les halles.

Notre gîte est à Esquibien, sur la route de la Pointe du Raz. En 1960 j’avais fait un camp de Petites ailes dans l’école d’Esquibien qui avait laissé le souvenir d’un petit village. Avec Leclerc, Biocoop et Liddl , je découvre plutôt une banlieue d’Audierne. Nous logeons dans une maison moderne dans un lotissement, le Cabestan, allée Surcouf. maison modeste, moderne mais bien typique crépie de blanc avec des volets bleus. A l’intérieur, pas de chichis, c’est clair, fonctionnel. A l’arrière un carré de jardin, tables et des fauteuils en plastique et de très confortables chaises longues. C’est parfait.

Tour de Guernesey -Côte ouest plus sableuse

 

GUERNESEY

La Plage de Pembroke et les tours Martello au dessus de l’Ancresse

Il fait un temps merveilleux, l’eau est presque tiède (la Manche, pas la Méditerranée. J’en profite pour une belle matinée plage sur la Plage de Pembroke. Plage de sable fin très doux pour marcher. A marée haute les bancs rocheux disparaissent. Je parcours pieds nus cette belle anse. 

Je combine 3 promenades du Perry’s Coastal Walks pour retrouver Dominique plus au sud vers Port Soif

promenade 14 – de l’Ancresse à Chouet (3 km ) facile

Le sentier fait le tour d’un petit cap où se trouve le Fort Pembroke(1778 -1811) cachant la toute petite Baie de la Jablonneuse. De l’autre côté, un golf, environnement vert et tranquille. Au lieu-dit Crève-Coeur, c’est une réserve naturelle. Cela se gâte ensuite. Le Mont Cuet et le cap Chouet sont enfermés derrière de hauts grillages . Les carrières ont creusé de grands trous. Un ouvrier en salopette orange interdit le passage. Avec un couple de retraités, je  suis consignée sur un banc face à la mer. Une sirène va retentir, puis un Boum! (tir de mine) et enfin une sirène nous signalera que les tirs sont terminés et que nous pouvons reprendre la promenade. 

Vazon à marée basse

promenade 13 – Grand Havre Bay : de Chouet à Rousse Tower 5.5 km  facile

On longe encore le Golf, environnement agréable quoique non dénué de danger : un écriteau prévient qu’il faut prendre garde aux tirs de golf! (après les tirs de mine….). Le Grand Havre est une vaste baie avec nombreux bateaux. Le sentier est proche de la route et des constructions, ce n’est pas très agréable de marcher près de la circulation. Je passe devant l’église Vale Church. J’ai raté le site néolithique signalé sur le petit livre les Fouaillages. 

la fin du parcours se fait en bord de route, bien fréquentée à cette heure-ci. La tour de La Rousse fait encore partie du système de défense des 15 tours martello mais elle a été rénovée et a fière allure. Toujours une tour ronde de deux étages inspirée des tours génoises corses mais au centre de fortifications en étoile avec des canons encore en place. 

Guernesey ail et ciel bleu

Promenade 12 – De la Tour de la Rousse au tir au pigeon Les Pecqueries (2.5 km) Facile mais en bord de route. la côte est sableuse. Le sentier court dans des dunes bien plates. 

Nous avions prévu de piqueniquer aux Grandes Rocques mais un mur d’escalade a été installé pour des scolaires et le parking est occupé. Nous terminerons notre journée balnéaire à la plage de Vazon. Malheureusement à marée basse la baignade n’est pas possible. La mer s’est retirée vraiment loin. 

Voyage extraordinaire au Crotoy – Tristan Robert

MASSE CRITIQUE JEUNESSE DE BABELIO

Le résumé précisait que cette BD racontait comment Jules Verne avait conçu ses 20 000 Lieux sous les mers au Crotoy après que George Sand lui ait suggéré un roman en plongée sous-marine. 

L’auteur et le sujet m’intéressent, j’ai coché avec enthousiasme la case. 

Il a une très jolie couverture rappelant les livres originaux.

Mais une fois ouvert le livre : déception. L’histoire est simplette, peu de recherche (aucune dans les décors) le graphisme est moche. Et pourtant, il y avait tant à faire ne serait-ce qu’avec les maquettes (j’en ai vues de passionnantes à Cabourg à la Maison du Temps Retrouvé où il y a une exposition Jules Verne). 

Une déception, ce n’est pas grave. la prochaine Masse Critique me livrera peut-être une pépite

Dives, ville de Guillaume le Conquérant et de l’usine électrométallurgie

NORMANDIE IMPRESSIONNISTE 2024 

le marché installé dans les halles médiévales

Samedi est jour de marché à Dives, excellente occasion pour découvrir cette petite ville animée. L’un des joyaux est la Halle médiévale à la belle charpente de bois reposant sur 60 piliers. Charcutiers, bouchers, fromagers et primeurs sont installés sous cette belle toiture pentue. Les autres commerçants ont investi toutes les rues adjacentes étroites.

la Lieutenance

Les maraichers et vendeurs de fruits et légumes aux étals colorés sont sur la place devant la Lieutenance, (1695) belle maison en pierre de Caen appelé aussi Manoir de Bois Hibou. Les poissonniers sont installés dans une halle de bois,  ouverte,  installée sur une estrade. Plus lion, des vêtements bradés. C’est le dernier marché de l’été ; dit une marchande qui propose des bracelets en acier à 10 €. Toujours pour 10€ j’achète un Laguiole(peut être pas tout à fait authentique) mais j’i une fâcheuse tendance à égarer mes canifs.

l’église ND de Dives

Je parviens enfin à a belle église blanche, Notre Dame, fondée au XI ème siècle. La façade a un fronton pointu accompagné de deux clochers aux ouvertures gothiques. A l’intérieur, de beaux vitraux colorés et les ex-voto des marins. Il y a même une barque de pêcheur toute entière. Au-dessus du porche, un historien, Arcisse de Caumont(1801-1873) a fait graver le nom des 475 compagnons de Guillaume le Conquérant.

Village Guillaume le conquérant : relais de Poste

Guillaume le Conquérant est la grande figure historique de Dives. C’ est dans l’estuaire de la Dives qu’il a rassemblé mille bateaux en 1066 pour partir conquérir l’Angleterre. Avant de traverser la Manche, il fera une escale dans la Baie de Somme. Toute la ville célèbre Guillaume. Les piliers des Halles portent les blasons de ses barons. Le village touristique de Guillaume et bien sûr Port Guillaume.

Village Guillaume le Conquérant . Louis XIV

Le Village de Guillaume le Conquérant se compose de plusieurs cours entourées de maisons à colombages. C’est un ancien Relais de Poste sur la route de Caen à Rouen, transformé en hostellerie. Henri IV, Marie de Médicis, Louis XIV , Madame de Sévigné, y sont passés. A la fin du XIX ème siècle, le propriétaire de l’auberge, collectionneur d’antiquités fit orner la cour de nombreuses statues et d’éléments de décoration. Ce « village » est tout à fait charmant et pittoresque. C’est aussi le siège de l’Office de Tourisme. A propos de l’auberge Guillaume le Conquérant voici ce que je viens de trouver dans La Recherche du Temps perdu La Prisonnière

« C’est de la même façon que tout le monde a connu à Dives un restaurateur normand, propriétaire de «Guillaume le Conquérant», qui s’était bien gardé — chose très rare — de donner à son hôtellerie le luxe moderne d’un hôtel et qui, lui-même millionnaire, gardait le parler, la blouse d’un paysan normand et vous laissait venir le voir faire lui-même, dans la cuisine, comme à la campagne, un dîner qui n’en était pas moins infiniment meilleur et encore plus cher que dans les plus grands palaces. »

En passant par l’avenue Secretan et le boulevard Maurice Thorez, nous retrouvons la toponymie communiste (il y a aussi une rue Aragon, un collège Paul Eluard, une rue Benoit Frachon). Nous retrouvons la mémoire ouvrière d’une ville industrielle.

L’usine électrométallurgique

le beffroi de l’usine garde l’entrée du quartier résidentiel de Port guillaume

En 1891 Pierre-Eugène Secretan fonda une usine métallurgique par le procédé Elmore-Secretan (élaboration de tubes de cuivre par électrolyse sans soudure. Il y a eu jusqu’à 144 cuves à électrolyse et le diamètre des tubes allait jusqu’à 600 mm. Le métal était acheminé du havre par  cabotage.

En 1897, création d’une fonderie et d »’ateliers de laminage

1910 création d’une douillerie.

En 1929, la société métallurgique de Dives devient Compagnie Générale d’électro-métallurgie.

En 1945, reconstruction des bâtiments endommagés par les combats de 1944

1956 adjonction d’un département plastique

1967 fusion Cegedur et Trefimétaux. L’usine de Dives est la plus importante usine français de métallurgie , 1100 personnes y sont employées.

1988 cessation d’activité. L’usine est rasée, ne subsiste que le beffroi et les bâtiments des bureaux.

Autour de l’usine des cités furent construites pour accueillir les travailleurs français, marocains, bretons, polonais, russes et italiens.

Quand nous revenons du Centre-ville à Port Guillaume, nous traversons ces quartiers ouvriers.

1991 Inauguration de Port Guillaume

Port Guillaume le soir

La marina et les immeubles touristiques sont construits dans le périmètre de l’usine rasée. On entre dans le quartier en passant entre le beffroi et les immeubles de bureaux contenant maintenant la médiathèque de Dives et un musée de marionnettes. Le buste de Secretan a été déboulonné par les ouvriers grévistes dans les années 80. On l’a remplacé aujourd’hui par une cuve de fonderie.

 

 

Le Côté de Guermantes (3ème partie) – un dîner chez la Duchesse de Guermantes

LECTURE COMMUNE AVEC CLAUDIALUCIA, AIFELLE, KEISHA, FANJA, SANDRINE,  DOMINIQUE et d’autres…..

logo de la lecture commune

La troisième partie du livre se déroule presque entièrement au cours d’un dîner chez la Duchesse de Guermantes.

Quelques échappées : Albertine fait un retour inopiné justement quand Marcel manigance un dîner galant avec Madame de Stermaria recommandée par Saint-Loup. Ce dernier arrive du Maroc où son régiment est cantonné. Ils dînent ensemble, comme autrefois à Doncières, mais dans un café bizarrement fréquenté par les dreyfusards et les jeunes nobles, antidreyfusards, comme il se doit, dans deux salles séparées. 

« la petite coterie qui se retrouvait pour tâcher de perpétuer, d’approfondir, les émotions fugitives du  procès Zola attachait une grande importance à ce café. mais elle était mal vue des jeunes nobles qui formaient l’autre partie de la clientèle et avait adopté une seconde salle du café »

Le narrateur n’éprouve plus de sentiment amoureux pour la Duchesse de Guermantes qui, justement, elle l’invite à l’un de ses dîners. Au début du livre, Marcel aurait fait n’importe quelle bassesse pour une telle invitation. Il avait réclamé avec insistance que son ami Saint-Loup le  présente à sa tante. Il avait aussi prétexté un intérêt pour les tableaux d’Elstir que possède la Duchesse. Ce dîner inespéré arrive trop tard!

Au cours de la soirée, des digressions se feront, suivant les divers convives dans leurs relations familiales ou mondaines. Avec un luxe de détails, l’auteur analyse les relations entre les différentes coteries, les relations de hiérarchie. La Duchesse de Guermantes, l’hôtesse, est l’arbitre du bon goût, de l’élégance et l’ordonnatrice des invitations, tandis que La princesse de Parme, Mme d’Arpajon, et d’autres devront se soumettre à cette domination.

Je me suis bien ennuyée à suivre les relations familiales des uns et des autres. Tout ce beau monde se fréquente non pas pour l’intérêt de la visite mais par habitude familiale. Si on n’estime pas beaucoup telle princesse, on lui rend visite parce que c’est une cousine…Dans l’entre-soi, on se désigne par des surnoms ou des raccourcis Palamède (le baron de Charlus) est « Mémé », » Grigri « pour Agrigente,

Vous ne connaissez pas cet excellent Gri-gri», s’écria M. de Guermantes, et il dit mon nom à M. d’Agrigente. Celui de ce dernier, si souvent cité par Françoise, m’était toujours apparu comme une transparente verrerie, sous
laquelle je voyais, frappés au bord de la mer violette par les rayons obliques d’un soleil d’or, les cubes roses d’une cité antique dont je ne doutais pas que le prince — de passage à Paris par un bref miracle — ne fût lui-
même, aussi lumineusement sicilien et glorieusement patiné, le souverain effectif. Hélas, le vulgaire hanneton auquel on me présenta, et qui pirouetta pour me dire bonjour avec une lourde désinvolture qu’il
croyait élégante, était aussi indépendant de son nom que d’une oeuvre d’art qu’il eût possédée »

Texte prémonitoire quand je pense au tableau de Nicolas de Staël peint des décennies après la parution de la Recherche.

Basin est le Duc de Guermantes (drôle de prénom), il me faut aussi retenir les prénoms des dames, Oriane, pour la duchesse, Madeleine, Mme de Villeparisis..

Pour donner du lustre à son salon, la Duchesse de Guermantes invite parfois des artistes ou des hommes de lettres, c’est à ce titre que Bloch qui a écrit des pièces de théâtre se trouve invité chez Madame de Villeparisis, Swann, autrefois fit connaître Elstir. 

La conversation ne languit pas, les bons mots circulent avec les médisances, « Taquin le Superbe », calembour d’Oriane à propos de Charlus, des critiques acerbes concernant la cousine Zenaïde, « rapiate« 

Tu mangeras de la purée de marrons, je ne te dis que ça, et il y aura sept petites bouchées à la reine. -Sept petites bouchées, s’écria Oriane. Alors c’est que nous serons au moins huit!« 

Méchancetés au sujet d’un auteur qui empesterait

« je n’ai osé respirer qu’au gruyère »

 

Et c’est long, très long, Proust ne nous épargne pas un ragot. Motivée par le défi, je continue ma lecture, en calculant le temps qui restera à lire le pensum.

Il y a aussi toute une rédaction sur l’esprit des Guermantes par comparaison avec les Courvoisier,  nobles réactionnaires  bornés. 

A ce moment entra M. de Grouchy, dont le train, à cause d’un déraillement, avait eu une panne d’une heure. Il
s’excusa comme il put. Sa femme, si elle avait été Courvoisier, fût morte de honte. Mais Mme de Grouchy
n’était pas Guermantes «pour des prunes». Comme son mari s’excusait du retard: — Je vois, dit-elle en
prenant la parole, que même pour les petites choses, être en retard c’est une tradition dans votre famille.
— Asseyez-vous, Grouchy, et ne vous laissez pas démonter, dit le duc. — Tout en marchant avec mon
temps, je suis forcée de reconnaître que la bataille de Waterloo a eu du bon puisqu’elle a permis la
restauration des Bourbons » 

Sans y prendre garde, je me prends à sourire à des trouvailles : comment ne pas serrer la main à un importun qu’on doit quand même inviter à déjeuner, déjeuner couché peut-être? Pépites littéraires quand l’une des invitées parle d’un écrivain incompréhensible :

Je finis par comprendre non seulement que le poète incapable de distinguer le beau du laid était Victor Hugo, mais encore que la poésie qui donnait autant de peine à comprendre que du russe ou du chinois était:
«Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille applaudit à grands cris», pièce de la première époque du poète
et qui est peut-être encore plus près de Mme Deshoulières que du Victor Hugo de la Légende des Siècles.
[…]

Victor Hugo n’est pas aussi réaliste que Zola, tout de même? demanda la princesse de Parme. Le nom de
Zola ne fit pas bouger un muscle dans le visage de M. de Beautreillis.

Les prétentions littéraires atteignent des sommets de drôlerie qui me font oublier toutes les longueurs

« Zola un poète! — Mais oui, répondit en riant la duchesse, ravie par cet effet de suffocation. Que Votre
Altesse remarque comme il grandit tout ce qu’il touche. Vous me direz qu’il ne touche justement qu’à ce
qui… porte bonheur! Mais il en fait quelque chose d’immense; il a le fumier épique! C’est l’Homère de la
vidange! Il n’a pas assez de majuscules pour écrire le mot de Cambronne. »[…]Il l’écrit avec un grand C, s’écria Mme d’Arpajon. – Plutôt avec un grand M, je pense ma petite… »

Littérature, mais aussi peinture. Il est question de Renoir, de Manet et bien sûr d’Elstir. Mais mon billet est trop long, je vais m’arrêter là.

Agacée du fait que le narrateur soit autant « entiché de noblesse » , je pardonne toutes les longueurs, les généalogies, les règles de protocole pour les pépites amusantes qui me font bien rire. Proust auteur comique, qui me croirait?

 

Vallée de l’Abatesco

CARNET CORSE 2024

Serra di Fiumorbo

Circuit du Guide Vert p 404. 56 km à partir de Ghisonaccia

Nous court-circuitons Ghisonaccia en empruntant la petite D545 à partir de notre gîte à Travu qui passe parallèlement à la grande route T10, au pied des collines dans une campagne verdoyante de nombreux vignobles et arrivons directement à Abbazia et retrouvons le circuit sur la D145 qui passe le long du petit cours d’eau, l’Abatesco.

Serra di Fiumorbo

Passant un petit pont nous grimpons sur la très tortillante D.45 qui monte à Serra-di -Fiumorbo. Cette petite route très étroite est équipée de trois tables en granite pour les pique-niques. L’une d’elle auprès d’une fontaine. A chaque tournant on a une très belle vue sur la plaine d’Aléria, l’étang d’Urbino et le côte orientale. La route traverse une forêt de chênes liège. Certains, écorcés récemment, présentent leur tronc d’un bel orange qui noircira avec le temps. Le village est perché, très tranquille. Une maison-forte (une tour) se dresse face à la vallée. Un petit belvédère est aménagé avec des bancs. L’église (XIXème) est juchée au somment du village, elle est actuellement en travaux.

 

Retour dans la vallée de l’Abatesco.

Chêne-liège

Arrêt à la petite station thermale de Pietrapola. A notre passage en 2021, tout était fermé et nous avions attribué cela au Covid. Mais rien ne semble avoir ouvert depuis. Lorsque je descends à pied à la rivière, je découvre un chantier en cours avec une grande structure sur des piliers métalliques. Le village n’est pas abandonné pour autant. Les belles maisons de granite sont dispersées, d’autres modernes sont fleuries. Difficile d’imaginer une animation de curistes.

 

Après San Gavino di Fiumorbo nous cherchons le départ de la promenade à la Cascade de Buja que nous n’avions déjà pas trouvée la première fois.

Le circuit devient problématique. On a recouvert tous les panneaux indicateurs de peinture noire. Il faut essayer de deviner les noms des villages avec les quelques lettres qu’on peut deviner. Surtout les appellations des routes ne correspondent pas à celles de la carte. En bref, on se perd sur des routes très étroites (heureusement pas fréquentées) dans de sombres châtaigneraies. Les châtaigniers sont en fleur, certains sont magnifiques avec des troncs impressionnants, certains ont des branches desséchées.

Nous traversons Acciani puis Isolaccio qui est un  gros bourg (300 habitants) avec une grande église baroque blanc crème flanquée d’un campanile de granite ; Ce village a une particularité assez funèbre : il possède en plus d’un vaste cimetière, au moins trois monuments aux morts. Le premier, sobre, sorte de pyramide tronquée se trouve sur la place principale, sa plaque est simplement gravée « à nos morts ». Près de l’église la stèle qui porte une très longue liste des noms des soldats tombés pour la France, impressionnante. Le troisième monument est face au cimetière : trois stèles de granite sont dédiées aux « déportés de 1808 ». Qui sont donc ces déportés ? j’ai d’abord pensé à une razzia barbaresque, tout un village enlevé, cela s’est vu. Mais la date ne colle pas, ni l’endroit. Isolaccio est en plaine montagne caché par les châtaigniers, quels pirates s’aventureraient si avant dans les terres. Wikipédia m’a donné la solution : les bataillons de Chasseurs corses sous l’ordre du Général Joseph Morand ont arrêté 167 hommes, 9 furent fusillés à Bastia, les autres déportés à Embrun. Cette opération eut lieu sur l’ordre de Napoléon, pour lutter contre le banditisme. Wikipédia souligne les épisodes de violence et de rébellion « le besoin viscéral d’indépendance de cette région, la plus farouche de l’île ». Cet état d’esprit explique peut-être la peinture noire sur les panneaux, destinée à égarer les touristes.

Ce goût funéraire me rappelle une lecture récente Campo Santo de W.G. Sebald que je viens de lire avant le départ pour la Corse.

Pas de commerces à Isolaccio mais le camion-épicerie ambulant stationne là.

« Avez-vous des citrons ? »

« non personne n’en achète, ils se gâtent »

L’épicier ambulant me conseille plutôt de chercher un citronnier et de tendre le bras pour me servir. C’est une rencontre amusante.

Cochons sur la route

A la sortie d’Isolaccio, encore des panneaux caviardés. L’étape suivante du circuit serait Prunelli-di-Fiumorbo. Un P est vaguement identifiable sur une flèche dont nous suivons la direction. La route est déserte, nous ne croiserons que le gros pick-up du dépanneur. Elle s’enfonce dans une dense forêt de chênes et châtaigniers, tourne et tourne tant que nous perdons le sens de l’orientation. Pas de 4G non plus pour que le GPS nous aide.  Si les humains sont absents pour nous renseigner les cochons tiennent le haut du pavés, installés au milieu de la chaussée, une laie allaite ses petits. Pas du tout prêts à nous laisser passer.

Nous trouvons enfin un endroit où garer la FIAT  pour un arrêt apéro avec des biscuits étonnants à la farine de pois cassés. A peine avons-nous ouvert le sachet que les cochons, curieux, radinent. Les biscuits aux pois sont infects. Je les lance aux cochons réputés pour manger n’importe quoi. Ils ont l’air de plaire mais sans enthousiasme.

Nous arrivons au creux d’une petite vallée dans une clairière égayée par les hautes inflorescences jaunes des Molènes.

Molène

Nous sommes complètement perdues, toujours pas d’Internet sur mon téléphone. J’essaie celui de Dominique qui capte la 5G (vive le progrès !) Je lui indique Ghisonaccia comme destination finale et il nous conduit sur la D144 en direction du nord.

Au creux d’un vallon nous croisons le GR Mare e Monti puis découvrons perché sur un épaulement,  le village de Poggio-di-Nazza : toit de tuiles rouges et campanile très haut. Cela commençait bien par un P !

Poggio-di-Nazza

Poggio-di-Nazza est si pittoresque  que je m’installe sur un des bancs du belvédère pour le dessiner.

De là, le GPS nous ramène à Ghisonaccia.

Il est trop tôt pour rentrer, j’ai envie de me baigner. Avec le vent, il vaut mieux éviter la longue  plage rectiligne qui s’étend de Ghisonaccia à Solenzara avec ses vagues et descendre au sud où il y a des petites anses abritées : Canella, Favone ou Tarco. Le parking de Canella est saturé, pour Favone, on n’arrive pas à couper la route avec la circulation intense. Je me suis donc baignée à Tarco. Baignade délicieuse. Nous décidons d’y revenir demain !

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De Serraggia à Travu

CARNET CORSE 2024

 

Nous sommes prêtes à 8h30. Le trajet n’est pas long 86 km par de bonnes routes, je pourrai choisir une belle plage pour me baigner !

Après Porto Vecchio la T10 remonte la côte orientale et longe le littoral à partir de  Fautea. Une tour génoise en restauration, entourée d’échafaudage annonce la plage dans le creux . mignonne petite anse bordée d’une haie de tamaris avec juste un restaurant. Sable fin, baie très échancrée. La surface de l’eau est lisse, tout juste ondulée quand un petit bateau s’approche. Je nage vers la pointe rocheuse puis coupe en diagonale et longe l’autre bord. Je me sens en sécurité et pourrais nager ainsi des heures sans fatigue.

Nous dépassons Solenzara pour aller déjeuner sous les eucalyptus de la plage de Calzarellu où nous avions nos habitudes quand nous logions à Casamozza il y a trois ans. L’allée bordée d’eucalyptus géants nous impressionne toujours. En revanche, le bois sur les bords du Fium’orbo est dévasté. Qu’est-il arrivé aux beaux arbres, abattus pour certains, squelettiques pour d’autres avec de grosses branches desséchées ? Nous sommes presque seules à part les voitures des baigneurs installés sur la plage. Nous avions apprécié l’animation villageoise, les pêcheurs dans le fleuve, les vieux qui jouaient aux cartes, les boulistes. Il n’y a plus personne.

 

Après le pique-nique je marche sur la plage sans fin, devine les étangs qui la bordent, la petite coupole blanche de la base aérienne de Solenzara, au loin la silhouette des Aiguilles de Bavella.

A 16 heures, le propriétaire du Gîte de Travu  vient nous chercher sur le parking du SuperU en face de la Base aérienne.

Notre nouveau gîte (affilié aux Gîtes de France) fait partie d’un ensemble de cinq maisons. Chacune a une terrasse avec une belle table à l’ombre d’un auvent et une petite piscine bleue isolée par des ganivelles avec un salon de jardin confortable : canapé et fauteuils rembourrés. Un gros buisson de bougainvillées, une suspension de surfinias assorti égaient l’ensemble. Derrière un petit muret en galets : des buissons, hortensias, géraniums. Les arbres : chênes et arbousiers ont été élagués pour dégager la piscine.

 

A l’intérieur du gîte : une belle pièce à vivre : bloc cuisine moderne, séparé du salon par un genre de bar et des sièges hauts. Télévision é grand écran plat. Wifi : le code est à scanner sur un QR code. Deux chambres, une belle salle de bain. Tout est parfait. Notre hôte nous apporte une imposante rallonge enroulée pour recharger commodément la voiture.

La surprise c’est la « piscine olympique » juste derrière le gîte coule une rivière très large dans laquelle nous serions seuls à pouvoir nous baigner. mais l’accès est un peu acrobatique une main courante permet de s’assurer.

Nous serons bien !

Sauf qu’avant de dormir je vais vérifier la recharge électrique de la FIAT. Et bien non ! Un message d’erreur s’affiche « vérifier le chargement ! ». Qu’est-ce qui bogue ? pas la prise (je teste avec le chargeur du téléphone. Peut-être la rallonge (25 m sur enrouleur) . je teste une autre prise. Coup de chance : le câble de la voiture est assez long en passant par la fenêtre. Cela charge !