BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

7 heures. Quand j’ai pris congé, Étienne m’a demandé un service :
–« Pouvez vous emmener avec vous un de mes hommes, malade ?
– Bien sûr ! ».
Notre passager est déjà installé sur le porte-bagages, faisant office de vigie. A 1km de l’hôtel, il signale dans la plaine herbeuse deux lions qui se déplacent lentement dans les herbes. A gauche, il y en a un troisième. Je monte sur le toit. Le lion est tout près. La présence du lion déclenche une excitation très spéciale, mélange de conscience du danger d’un animal si puissant et sentiment que nous bénéficions d’une chance spéciale : « Lion, est rare, il y a de la chance ! ». Le félin s’éloigne nonchalamment en feulant. Ce n’est pas un rugissement brutal, un cri très grave qui résonne. Inattendu, plus proche du braiment de l’âne en beaucoup plus grave, plus sourd.
Enfin les éléphants !

A la Mare Sacrée, passons sous les Rôniers de la Pendjari et reconnaissons la piste de la veille. Sous les arbres deux éléphants s’affrontent en une joute amicale, leurs trompes levées. Ils écartent les oreilles puis s’éloignent. Enfin ! Les éléphants !
Un autre camion nous le confirme, il y a plein d’éléphants « en avant » sur la piste. Nous allons enfin voir un troupeau ! Les pachydermes sont six, sous les arbres très occupés à manger le feuillage. Soudain, le plus gros nous repère, il nous fait face et amorce la charge. J’avais oublié le passager sur le toit qui se glisse à l’intérieur par la fenêtre arrière. Duran l’exhorte « il ne faut pas avoir peur ! ». Nous l’invitons à s’installer sur la banquette arrière. Nous pouvons retourner plus près du troupeau. Mais ils ont reculé dans les arbres et s’éloignent.
11 Heures à la Mare Bali

Sur la route de la Mare Bali nous voyons surtout des oiseaux, encore deux calaos, des martins pêcheurs,, un gros oiseau marcheur aux plumes toutes gonflées. De temps en temps, une antilope, un vervet…Je commence à mieux identifier les différents paysages : la savane arborée avec ses baobabs et d’immenses arbres verts, c’est là qu’on a vu les éléphants et les phacochères, la savane arbustive complètement sèche en ce moment, les brûlis, les zones complètement plates couvertes d’herbes hautes, celles qui seront inondées à la saison pluvieuse…
Tous les animaux viennent boire à la Mare Bali aux berges plates où quelques grands arbres fournissent une ombre bien fraîche aux colonies de babouins assis, les mains pendantes. Sous un arbre, un troupeau d’hippotragues, très paisibles, est couché. Les oiseaux pataugent. Les crocodiles sont à l’eau, on les devine de temps à autres. Une famille de phacochère fouille la vase. Dans un nuage de poussière, les buffles arrivent, ils entrent dans la mare avec de l’eau jusqu’aux genoux et boivent longuement. Les oiseaux les accompagnent. Il y a peut être quelque parasite à croquer ? Tout ce monde divers coexiste en paix. On oublierait que le crocodile peut croquer le petit ibis qui arpente la rive. Les babouins sont les seuls à troubler cette harmonie par les cris perçants.
Je sors mon carnet à dessin. Je renonce rapidement à construire tout un paysage avec cette scène qui change trop vite : le bel hippotrague qui buvait au milieu de la mare se retire pendant que j’essayais de le croquer. La petite antilope agenouillée pour boire se relève en plein dessin. J’opte pour une solution « à la chinoise » : me faire des modèles d’animaux que je replacerai dans une mare imaginaire de retour à la maison. 4 photos font un panoramique de droite à gauche : antilopes et oiseaux, sous l’arbre quinze hippotragues et les grues couronnées puis le guib qui boit enfin à gauche les buffles).
