Trigrad et baignade à Devin

CARNET BULGARE

gorges de Trigrad

La sortie de Devin – toute ville d’eau qu’elle est – n’est pas très chic. Des usines abandonnées, une retenue d’eau dormante et au détour d’un groupe de maisons, un campement de gitans, carrioles, auvents de bâches plastiques, des constructions de bric et de broc adossées à des maisons. De nombreuses paraboles : nomades ou sédentaires, ils regardent la télé ! Les enfants ont de petites carrioles, des objets bricolés qui roulent.

La route vers Borino et Dospat suit la vallée de la rivière Buynoska occupée par des jardins : les haricots sont florissants, aussi hauts que des poivriers du Cambodge, fleurissant rouge. Des cucurbitacées géantes : melons ou citrouilles dégoulines des murs ou des clôtures ;

mosquée avec cheminée tourbillonnante

A Grohotno, la mosquée porte en plus de ses trois coupoles blanches éblouissantes et de son minaret pointu, un tuyau de poêle tourbillonnant. Une dame enfoulardée à la turque nous observe prendre la photo de la mosquée et nous fait un signe amical. Dans les campagnes on remarque plus les mosquées que les églises mais ce matin les cloches ont carillonné tandis que le muezzin a été discret. L’islam ne se signale pas par des signes ostentatoires, ni barbus ni voiles. Les jeunes sont têt nue. Quant aux vieilles, leur fichu est peut être un peu plus rabattu que le fichu orthodoxe mais sans plus.

A Teschel, deux panneaux marrons : l’un vers Trigrad et ses fameuses gorges, l’autre vers Yagodina et sa grotte.

cascades et frais torrent

La route de Trigrad est très étroite mais goudronnée. Elle suit le lit d’un torrent qui a creusé un canyon impressionnant. Au début, chutes de pierres et nids de poule. Ensuite on n’y fait moins attention, soucieuses de la circulation (peu de voitures mais de temps en temps un Fangio). C’est à pied qu’on jouit de l’endroit. Fraîcheur du torrent, ombre. Des énormes plantes à feuilles rondes poussent dans le lit du cours d’eau qui parfois saute les rochers en cascade. Cette promenade fraîche est certainement la plus agréable des vacances. Je remonte en voiture pour franchir un tunnel. Juste derrière se trouve le parking de la Gorge du Diable, une grotte qui serait l’entrée des Enfers, où bouillonne avec fracas une rivière souterraine. Orphée est un personnage récurrent de ce voyage. Placardé à l’entrée de la Grotte, une affiche annonce demain des Mystères Orphiques –musique et théâtre. Un cornemuseux joue : une affiche explique que la cornemuse est typique de la musique des Rhodope et qu’elle utilise le mode pentatonique – comme les Grecs de l’Antiquité ! – Peut être Orphée aurait joué ce thème. Personnellement, j’aurais préféré l’entendre à la lyre : Je ne suis pas fan de cornemuse même si la même affiche explique encore que cette dernière s’adapte à tous les genres même le jazz.

La visite de la Grotte est guidée en bulgare ; elle dure 30 minutes et part à 11h, 11h30 etc…Le guide prévient : il fait 8° , mieux vaut se couvrir. Une dame a même des gants en laine : là, c’est exagéré.

Mystères orphiques

Un tunnel bien éclairé conduit à une vaste salle. Des chauves-souris mais pas de concrétions. On passe en file devant une petite source et on laisse une obole devant une plaque gravée d’Orphée qui joue de la lyre. On se penche sur la rivière souterraine au bruit d’enfer. L’air est saturé d’humidité. Les végétaux attendent la moindre lumière pour croître : un tapis de mousse si drue, si verte qu’on la croirait fausse pousse dans le pinceau lumineux d’un spot. Avant de remonter, discours incompréhensible du guide qu’il me traduit brièvement : un rocher fait une ombre qui évoque le profil du diable, cette concrétion-là c’est Sisyphe, celle-là Orphée et sa lyre.

Il reste 300 marches bien hautes et bien boueuses pour retrouver la lumière. Pour me distraire dans la remontée, je pense à Orphée suivi d’Eurydice qui ne devait pas se retourner. En haut attendent les vendeurs de framboises, de confitures et herbes pour les tisanes.

La route de Yagodina, dans une vallée parallèle, après une petite centrale électrique se réduit et passe dans un défilé presque aussi étroit que Trigad.  A Yagodina l’entrée de la grotte n’est pas poétique gâchée par les vendeurs de souvenirs aussi laids qu’à Nessebar un homme en treillis, mitrailleuse au poing nous propose de tirer au paint-ball. Pas de visite entre midi et 13h. On préféère rentrer et renoncer aux stalagmites et aux draperies. Orphée et Hadès m’ont déjà comblée à Trigrad !

La deuxième partie de la journée sera Thermale. Au complexe Orphéus, la piscine découverte est immense de forme arrondie autour d’une curieuse tholos, colonnade blanche soutenant un dôme arachnéen en aluminium et verre coloré, pas trop réussi. Elle sest encadrée par les énormes bâtiments de l’hôtel 5étoiles avec sa piscine couverte, ses spas thérapeutiques, ses deux restaurants. Nous choisissons le Restaurant Oriental qui a au menu des pides (pizzas turques allongées) et toutes sortes de mets turcs et arabes. Malheureusement ni köfte ni kebab à un prix raisonnable. Sur le menu, il y en a à 7 levas mais, dit la serveuse, il n’en resterait plus. L’assiette à 17 levas serait très bien. Je remarque Faitush sur la carte. J’aime beaucoup cette salade relevée aux épices et au persil avec du pain arabe émietté. La faitush qu’on apporte ici n’a ni pain, ni persil, ni épices libanaises, c’est une vulgaire salade tomate-concombre-laitue assaisonnée au citron mais sans huile. Comme viande on prend des bouchées de poulet en beignet avec du sésame (7levas) heureusement avec sésame ! Il ne faut rien attendre des restaurants d’hôtels, surtout si on ne veut pas t laisser une fortune ;

La piscine est merveilleuse et immense. Mes allers-retours sont bien plus longs que ceux de la piscine de Créteil,  35 peut être 40m ou plus. Je les aligne en comptant consciencieusement. Elle est vraiment remplie d’eau minérale, pas une goutte de chlore, elle ne pique pas les yeux, elle serait bonne à boire !

Le vent se lève, les parasols se retournent, le ciel se couvre. Et voilà l’orage, comme hier. Les clients de l’hôtel profitent encore de la piscine. Ceux qui ont payé leur entrée se dépêchent de rassembler leurs affaires. J’attends le premier coup de tonnerre sérieux pour interrompre mon rallye. Il était temps, les premières gouttes s’écrasent sur les vitres de la voiture. A peine montée dans la chambre d’hôtel c’est le déluge. La Bulgarie est verte, il n’y a pas de magie. Il pleut, même souvent!

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

5 réflexions sur « Trigrad et baignade à Devin »

  1. mes excuses pour n’avoir pas trouvé de traduction en Bulgare de Trenet :
    – « Orphée, je sais quel est ton mal.
    J’ai connu ton chagrin, je connais ton mystère.
    Orphée, le monde n’est qu’un bal
    Où ta voix désormais demeure solitaire.
    Pourtant, tu ne chant’s que l’amour,
    Un amour qui sourit et t’éclaire.
    Hélas, tes rêv’s, tes beaux discours
    Ne sont pas pour l’enfer où nous vivons nos jours.
    Orphée, je sais quel est ton mal.
    J’ai connu ton destin, tes joies et tes poèmes.
    Orphée, le monde est un rival
    Qui méprise aujourd’hui le meilleur de toi-même.
    Oublie les charmes d’autrefois… »

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  2. Moi, ce qui m’épate, c’est que tu aies vu de tes yeux la porte des Enfers! Brr!!
    C’est écrit en alphabet cyrillique, je le lis parce que j’ai appris le russe. Mais je suppose que le bulgare diffère bien du russe? Peut-être comme l’italien du français ou de l’espagnol? Non?

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    1. @claudialucia : le Russe, cela aide, mais le Bulgare est différent. En revanche beaucoup de gens se sont adressé à nous en Russe parce que c’est la lingua franca de la région et que des touristes se doivent de le parler (pas nous).

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