TOURISTE DANS MA BANLIEUE

J’ai eu le plaisir de suivre la balade organisée par Le Voyage Métropolitain
« Le Voyage métropolitain questionne, explore et révèle les territoires de la métropole. Des marches exploratoires et collectives, une attention à ce qui nous entoure, mais aussi le partage d’impressions et de connaissances…. »

Nous sommes sortis du RER A au Mont d’Est à Noisy -le -Grand par un très beau jour de Novembre sous un soleil éclatant. Nous nous promenons d’abord sur la dalle jusqu’à un étonnant carrefour des miroirs, descendons une rampe en colimaçon, aux bizarres vertèbres de reptile géant, descendant aux parkings du centre commercial des Arcades. Ce centre commercial, sous la dalle est discret, rien ne permet de le soupçonner au premier abord.

Important le soleil pour découvrir le Palais d’Abraxas de Ricardo Bofill!
Palais, Théâtre, Arc.
18 étages, 600 logements concentrés dans un ensemble impressionnant. Un palais rose, aux fenêtres toutes pareilles. Une dame noire opulente dans sa robe rouge est accoudée, dès qu’elle perçoit notre présence, elle rentre. Dommage, j’aurais aimé une figure humaine pour la photo. Parce qu’il semble que l’architecte ait oublié les humains! Qui peut vivre dans ce monument? La réponse s’impose : des pauvres gens! Cela se voit aux rideaux, si on peut appeler rideaux, ces chiffons, ces pagnes, et même le papier journal collé sur les carreaux. Trois petites filles blackettes aux cheveux tressés jouent en bas, dans le théâtre. J’ai aimé découvrir cette réalisation architecturale, la photographier sous le soleil. Mais je suis saisie à l’idée que des gens puissent habiter, ainsi. Pas un balcon, des vis à vis gênants (d’où les rideaux). Et encore! il fait beau. On peut imaginer sous la pluie, comment le Palais a gagné le surnom d’Alcatraz. Je ne peux nier l’intention esthétique de l’architecte. Intention généreuse de ne pas construire des tours et des barres comme dans les années 60 ou 70. Offrir aux banlieusards un palais….qui maintenant se délabre. On a même envisagé en 2006 de le détruire. Dans un article du Monde daté 8.2.2014, une interview de Bofill: d’après lui, l’expérience est en partie réussie, en partie ratée.

Réussie, techniquement : les espaces d’Abraxas inaugurent un nouveau système de fabrication : le préfabriqué.
Ratée socialement « ratée car quand on est jeune et très utopique, on pense qu’on va changer la ville et finalement rien ne s’est passé[…]dans ces quartier, les gens brûlent leurs logements. Ils les haïssent »
La condition de la réussite était de mêler les catégories sociales et de ne pas dépasser les 20% d’immigrés. Les populations ne se sont pas mélangées.
Les Camemberts ou les Arènes de Picasso

Ils se remarquent de loin. Le soir, de mon balcon de Créteil, ils brillent en reflétant le soleil couchant. Deux disques encadrent une place octogonale, la place Pablo Picasso comprenant 540 logements mais aussi une crèche, un groupe scolaire, et des boutiques. Ils sont l’oeuvre de Manuel Nunez Yanowsky, natif de Samarcande(1942), mais arrivé en Espagne en 1957, il est diplômé de Barcelone et fait partie du « Taller de Arquitectura » avec Bofill.

A l’intérieur d’un groupe de statues féminines étranges, naïades aux chairs généreuses et à la longue chevelure qui leur sert de support, on a gravé le portrait de Picasso. Je ne m’expliquerai cette bizarrerie qu’en apprenant de retour à la maison quel’ensemble s’appelle les Arènes de Picasso.

Noisy le Grand est diverse, et variée. Non loin des expériences architecturales, on traverse un quartier de pavillons. Retour de la voiture, grosse cylindrée familiale garée devant le pavillon. Puis on atteint la médiathèque avec façade de verre en avant du corps de bâtiment, très actuelle (je commence à me lasser de ces façades de verre devant les gares, les médiathèques….) la rue principale du village ancien est bouchée par la mairie de briques et pignons, irruption d’un siècle précédent. Sur cette rue, une brocante et un rassemblement de voitures anciennes. Enfin, une foule sympathique venue flâner devant les étals, faire des selfies devant les belles voitures rutilantes.

Des Bains-douches se font remarquer à l’angle d’une rue en pente, jolie vue sur la Marne. Nous descendons une promenade pavée avec bassins de granite et ruisselet qui s’appelle Promenade François Mitterrand (tiens! comme chez nous à Créteil). Avant d’arriver à la Marne, la marque jaune du PR nous fait faire le détour qui nous fera découvrir un petit bassin rond au dessus d’une grotte – une source peut être?- avec une arche romane à l’entrée.

La promenade longe maintenant la Marne, très belle sous les ors et les rouges de l’automne. On croise une procession silencieuse de moines bouddhistes.

Une tour sans grâce est accompagnée d’un bel arbre. Sûrement pas un chef d’oeuvre à primer, mais une belle vue sur une pelouse et la rivière. Si j’avais à choisir entre le Palais de Bofill ou cette banalité sur Marne, que choisirais-je? Il faut aussi compter avec la proximité du métro.

Champs-sur-Marne peut aussi s’enorgueillir d’immeubles originaux : les Pyramides , chaque appartement possède une terrasse-jardin. Ces Pyramides auraient pu aussi s’appeler les jardins suspendus. En revanche le Centre Commercial des Pyramides précédé d’un parking en surface fort étendu, ne brille pas par l’originalité. Et le rond point décoré de pyramides beiges, non plus.

Nous contournons par une rue provinciale et charmante le parc du château de Champs caché par un grand mur, meulière et silex. Nous pique-niquons dans le parc autour d’une statue de Diane chasseresse confortablement assis sur des marches.
Je pensais qu’on descendrait directement à la Chocolaterie Menier sur le bord de la rivière au bout du parc. J’avais oublié que des architectes ont organisé la promenade. Ils font le détour pour observer le château d’eau entouré d’un cadre de croisillons de bois formant une Tour de Babel végétalisée de 35 m de haut. La végétation est clairsemée elle ne semble pas avoir colonisé les étages supérieurs on a installé les ampoules de Noël.

Crochet pour découvrir la Cité Ouvrière Menier de Noisiel. Les patrons de la chocolaterie, paternalistes, avaient intégré tout le quotidien de leurs employés logements mitoyens avec des petits jardins pour les ouvriers, maisons plus grandes aux coins des rues pour les ingénieurs, crèche,lavoir, dispensaire. Autour de la grande place on peut encore voir le réfectoire, l’école et les cafés. La statue de Menier se trouve sur un socle où des bas reliefs montrent les installations industrielles.

La Chocolaterie est maintenant le siège des bureaux de Nestlé. Le bâtiments sont magnifiques. Nouveauté! On peut maintenant visiter la Chocolaterie en s’y prenant à l’avance et en réservant ici. Des bords de la Marne en grimpant un peu on a une belle vue.
La randonnée s’est poursuivie en bord de Marne jusqu’à Chelles par les îles encore un peu sauvages et nous avons grimpé la Montagne de Chelles jusqu’au fort.

Des balades en banlieue… Original et intéressant! (hum peut être que si on obligeait les architectes, par contrat, à résider 5 ans dans leurs immeubles?)
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@keisha : 5 ans ce n’est pas suffisant, quand tout est tout beau tout neuf, la mixité sociale est suffisante. C’est quand cela,commence à se déglinguer que les gens qui en ont les moyens déménagent et que les autres se trouvent piégés entre eux dans des environnements qui se dégradent.
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Les projets monumentaux ne donnent pas en général des lieux agréables à habiter (bonne idée Keisha !). C’est une architecture qui me laisse froide …
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@Aifelle : au contraire, j’aime bien que certains quartiers se distinguent par un « monument » chez moi à Créteil, j’aime bien quand les gens remarquent les épis de maïs ou le Palais de Justice; Les habitants en conçoivent une certaine fierté
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Un coin que je connais bien. J’ai vécu à Champs sur Marne trois ans et suivi de près la restauration de la chocolaterie par Nestlé qui en a fait son siège social. Un coin qui réserve de jolies découvertes, malgré l’aspect « banlieue »
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@Gwenaëlle : pour moi le mot « banlieue » n’a rien de négatif, c’est là où les gens vivent. Le centre ville est réservé aux administrations/commerce et aux très riches dont je ne fais pas partie
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Alors là, tu me présentes un endroit que je ne connais pas du tout et des architectures étonnantes. Je n’aimerais pas y vivre mais elles ne sont pas banales !
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