Vallée de l’Abatesco

CARNET CORSE 2024

Serra di Fiumorbo

Circuit du Guide Vert p 404. 56 km à partir de Ghisonaccia

Nous court-circuitons Ghisonaccia en empruntant la petite D545 à partir de notre gîte à Travu qui passe parallèlement à la grande route T10, au pied des collines dans une campagne verdoyante de nombreux vignobles et arrivons directement à Abbazia et retrouvons le circuit sur la D145 qui passe le long du petit cours d’eau, l’Abatesco.

Serra di Fiumorbo

Passant un petit pont nous grimpons sur la très tortillante D.45 qui monte à Serra-di -Fiumorbo. Cette petite route très étroite est équipée de trois tables en granite pour les pique-niques. L’une d’elle auprès d’une fontaine. A chaque tournant on a une très belle vue sur la plaine d’Aléria, l’étang d’Urbino et le côte orientale. La route traverse une forêt de chênes liège. Certains, écorcés récemment, présentent leur tronc d’un bel orange qui noircira avec le temps. Le village est perché, très tranquille. Une maison-forte (une tour) se dresse face à la vallée. Un petit belvédère est aménagé avec des bancs. L’église (XIXème) est juchée au somment du village, elle est actuellement en travaux.

 

Retour dans la vallée de l’Abatesco.

Chêne-liège

Arrêt à la petite station thermale de Pietrapola. A notre passage en 2021, tout était fermé et nous avions attribué cela au Covid. Mais rien ne semble avoir ouvert depuis. Lorsque je descends à pied à la rivière, je découvre un chantier en cours avec une grande structure sur des piliers métalliques. Le village n’est pas abandonné pour autant. Les belles maisons de granite sont dispersées, d’autres modernes sont fleuries. Difficile d’imaginer une animation de curistes.

 

Après San Gavino di Fiumorbo nous cherchons le départ de la promenade à la Cascade de Buja que nous n’avions déjà pas trouvée la première fois.

Le circuit devient problématique. On a recouvert tous les panneaux indicateurs de peinture noire. Il faut essayer de deviner les noms des villages avec les quelques lettres qu’on peut deviner. Surtout les appellations des routes ne correspondent pas à celles de la carte. En bref, on se perd sur des routes très étroites (heureusement pas fréquentées) dans de sombres châtaigneraies. Les châtaigniers sont en fleur, certains sont magnifiques avec des troncs impressionnants, certains ont des branches desséchées.

Nous traversons Acciani puis Isolaccio qui est un  gros bourg (300 habitants) avec une grande église baroque blanc crème flanquée d’un campanile de granite ; Ce village a une particularité assez funèbre : il possède en plus d’un vaste cimetière, au moins trois monuments aux morts. Le premier, sobre, sorte de pyramide tronquée se trouve sur la place principale, sa plaque est simplement gravée « à nos morts ». Près de l’église la stèle qui porte une très longue liste des noms des soldats tombés pour la France, impressionnante. Le troisième monument est face au cimetière : trois stèles de granite sont dédiées aux « déportés de 1808 ». Qui sont donc ces déportés ? j’ai d’abord pensé à une razzia barbaresque, tout un village enlevé, cela s’est vu. Mais la date ne colle pas, ni l’endroit. Isolaccio est en plaine montagne caché par les châtaigniers, quels pirates s’aventureraient si avant dans les terres. Wikipédia m’a donné la solution : les bataillons de Chasseurs corses sous l’ordre du Général Joseph Morand ont arrêté 167 hommes, 9 furent fusillés à Bastia, les autres déportés à Embrun. Cette opération eut lieu sur l’ordre de Napoléon, pour lutter contre le banditisme. Wikipédia souligne les épisodes de violence et de rébellion « le besoin viscéral d’indépendance de cette région, la plus farouche de l’île ». Cet état d’esprit explique peut-être la peinture noire sur les panneaux, destinée à égarer les touristes.

Ce goût funéraire me rappelle une lecture récente Campo Santo de W.G. Sebald que je viens de lire avant le départ pour la Corse.

Pas de commerces à Isolaccio mais le camion-épicerie ambulant stationne là.

« Avez-vous des citrons ? »

« non personne n’en achète, ils se gâtent »

L’épicier ambulant me conseille plutôt de chercher un citronnier et de tendre le bras pour me servir. C’est une rencontre amusante.

Cochons sur la route

A la sortie d’Isolaccio, encore des panneaux caviardés. L’étape suivante du circuit serait Prunelli-di-Fiumorbo. Un P est vaguement identifiable sur une flèche dont nous suivons la direction. La route est déserte, nous ne croiserons que le gros pick-up du dépanneur. Elle s’enfonce dans une dense forêt de chênes et châtaigniers, tourne et tourne tant que nous perdons le sens de l’orientation. Pas de 4G non plus pour que le GPS nous aide.  Si les humains sont absents pour nous renseigner les cochons tiennent le haut du pavés, installés au milieu de la chaussée, une laie allaite ses petits. Pas du tout prêts à nous laisser passer.

Nous trouvons enfin un endroit où garer la FIAT  pour un arrêt apéro avec des biscuits étonnants à la farine de pois cassés. A peine avons-nous ouvert le sachet que les cochons, curieux, radinent. Les biscuits aux pois sont infects. Je les lance aux cochons réputés pour manger n’importe quoi. Ils ont l’air de plaire mais sans enthousiasme.

Nous arrivons au creux d’une petite vallée dans une clairière égayée par les hautes inflorescences jaunes des Molènes.

Molène

Nous sommes complètement perdues, toujours pas d’Internet sur mon téléphone. J’essaie celui de Dominique qui capte la 5G (vive le progrès !) Je lui indique Ghisonaccia comme destination finale et il nous conduit sur la D144 en direction du nord.

Au creux d’un vallon nous croisons le GR Mare e Monti puis découvrons perché sur un épaulement,  le village de Poggio-di-Nazza : toit de tuiles rouges et campanile très haut. Cela commençait bien par un P !

Poggio-di-Nazza

Poggio-di-Nazza est si pittoresque  que je m’installe sur un des bancs du belvédère pour le dessiner.

De là, le GPS nous ramène à Ghisonaccia.

Il est trop tôt pour rentrer, j’ai envie de me baigner. Avec le vent, il vaut mieux éviter la longue  plage rectiligne qui s’étend de Ghisonaccia à Solenzara avec ses vagues et descendre au sud où il y a des petites anses abritées : Canella, Favone ou Tarco. Le parking de Canella est saturé, pour Favone, on n’arrive pas à couper la route avec la circulation intense. Je me suis donc baignée à Tarco. Baignade délicieuse. Nous décidons d’y revenir demain !

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

3 réflexions sur « Vallée de l’Abatesco »

  1. Que de beaux villages ! ça me rappelle des souvenirs de Ghisoni dans les hauteurs, le premier jour, nous allions à Ghisonaccia pour se baigner, et avions pris de sérieux coups de soleil, le supermarché pour les touristes avait sauté dans la nuit et l’eau avait été coupée dans Ghisoni ! Ah l’accueil chaleureux des corses ! inimitable ! Mais c’était il y a longtemps …

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