Les Cent Frères de Manol – Anton Dontchev

LIRE POUR LA BULGARIE

Merci à Claudialucia ICI pour ce challenge qui m’a donné l’occasion de retourner en Bulgarie .

J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce gros livre (471p.), roman historique retraçant l’islamisation forcée de la  vallée d’Elindenya  dans le Rhodope en 1668, alors que se déroulait le siège  de Candie (Héraklion, Crète).

Deux témoins racontent les faits : le pope Aligorko et un noble français. Ce dernier, capturé pendant le siège de Candie, est devenu l’esclave de Karaïbrahim, envoyé par le sultan Mehmet IV  convertir les Bulgares de la vallée, appelé « Le Vénitien » ou Abdullah, il a été aussi converti à l’Islam. Leurs deux récits alternent et se fondent si bien qu’au début le lecteur doit fournir un certain effort pour attribuer les paroles à l’un ou l’autre des narrateurs.

Cette vallée enclavée vit surtout de l’élevage, les hommes sont bergers . L’aga Süleyman de son konak règne sur le village avec une justice sévère, il possède un cheptel important et il est respecté des bergers. La vallée a  été islamisée précédemment, mais il reste une église et des villageois orthodoxes, Istanbul est loin, l’autorité du sultan ne pèse pas trop. En revanche, les enlèvements d’enfants, pour faire des janissaires se sont répétés si bien que les villageois redoutent de voir leurs enfants, frères dans les troupes du sultan. 

Manol fut un enfant trouvé, allaité par cent mères. Les Cent Frères sont les bergers. Frères de lait peut-être, mais surtout solidaires,  ces rudes montagnards  respectent son autorité naturelle. Quand Karaïbrahim vient dévaster la vallée, Manol a un fils adulte Momtchil et un autre plus jeune Mirtcho.

La montagne, le Rhodope avec ses forêts protectrices, ses gouffres, ses grottes est le sujet central de l’ouvrage. Je me souviens des descriptions de Kapka Kassabova dans Lisière et Elixir . J’ai été fascinée par la succession des saisons, les incendies, l’arrivée de l’automne et c’est sûrement l’aspect qui m’a le plus plu dans le livre. Et en filigrane, le mythe d’Orphée. 

Récit terrible des souffrances infligées et des tortures sophistiquées. Sans la présence des éléments naturels j’aurais peut-être calé à la lecture de tous ces supplices. Après une résistance héroïque, de nombreux  villageois se soumettent et abjurent, à leur tête, le pope préfère la vie et ne voit qu’un seul Dieu, qu’on le nomme Jésus ou Allah.

J’ai aimé ces personnages nombreux, ces contes, ces mythes, tragédie  sans  cesse recommencée. J’ai aimé ce récit complexe loin du manichéisme où même le pire tortionnaire révèle son humanité et les héros, leurs faiblesses.

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

6 réflexions sur « Les Cent Frères de Manol – Anton Dontchev »

  1. Comme toi j’ai beaucoup aimé ce roman mais c’est vrai qu’il est extrêmement violent et que les supplices infligés par les turcs aux villageois sont terribles. J’ai beaucoup aimé la présence de la nature, des couleurs, des odeurs , de la montagne, les Rhodopes sont envoûtantes, et aussi le caractère fier du peuple Bulgare. Les bergers paraissent aussi grands que les rois !

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