19. avions inter-îles :de Fogo à Mindelo

CAP VERT 2002

la baie de Mindelo, au fond :Santo antao
la baie de Mindelo, au fond :Santo antao

On a failli acheter un awalé
Dernière promenade au marché pour éviter la persécution du vendeur de souvenirs sénégalais qui est venu nous chercher jusqu’à dans la salle à manger pour nous vendre un awalé – bien cher –, puis qui s’est installé devant notre fenêtre. Il nous a même laissé le jeu emballé sur le rebord de la fenêtre. Cette insistance nous a indisposées, -2500$-, c’est beaucoup trop cher !

On a aussi failli rater le taxi et l’avion !

Lou est d’une humeur massacrante. L’avion est avancé d’une heure. Si nous ne sommes pas prêtes dans 10 minutes, il faudra prendre un taxi. Heureusement que les bagages étaient bouclés !
Dans le pick up nous retrouvons Régine, André et leur fils. Notre «ami» le sénégalais laisse le jeu pour 2000$ à André. Après palabres, nous l’aurions bien acheté à ce prix !
Il ne reste plus  que deux places dans l’avion de Praia. André et Régine nous laissent leur tour. Ils prendront le prochain avion. Lou, pas étonnée, n’est guère causante… Elle me déçoit d’autant plus qu’elle nous a réclamé le prix des transferts au dernier moment. Ce n’était pas très délicat… Elle attend nos remplaçants sans plus se soucier de  nous.
André et son fils passent le temps en jouant à l’awélé. Si nous avions acheté un jeu, on aurait pu en faire autant.

Retour à l’aéroport de Praia

Le vol jusqu’à Praia dure 20 minutes. C’est devenu de la routine. Dommage que nous soyons assises du mauvais côté, nous aurions pu revoir le volcan.
A l’aéroport de Praia, encore trois heures d’attente! Nous pique-niquons sous « notre » acacia puis passons le temps en regardant la télévision. La télévision  m’agace, avec ses séries où tous les héros sont blancs et riches…
Vol Praia/ Sao Vicente : 50 minutes au dessus des nuages, rien à voir.
Chaque fois qu’on découvre une nouvelle île, le climat change. Nous arrivons  sous la chaleur. Un taxi nous emmène en ville sur une route asphaltée. Sao Vicente est désertique comme Sal, mais montagneuse. Décor de western ! A l’entrée de la ville : une petite zone industrielle. Nouveauté, nous sommes dans une grande ville moderne et plus ordonnée que Praia.

Mindelo : une grande ville

Mindelo est une véritable ville
Mindelo est une véritable ville

L’hôtel Che Guevara est complet. On nous place dans une petite chambre aveugle, fenêtre minuscule, cube complètement occupé par les deux lits. Heureusement, une très belle salle de bain.C’est provisoire, demain nous aurons une chambre avec vue.

Visite aux supermarchés qui contrastent avec les petites lojas de Sao Felipe. Retour au monde moderne.

Un marché au poisson carrelé et décoré d’azulejos
La ville est vivante et animée. Il y a foule dans les rues dans les magasins et les banques. La  ville est un peu désuète et décrépite,  plus urbaine que Praia :  belles maisons coloniales du siècle dernier, à balcons en fer forgé, marché couvert comme à Funchal avec trois niveaux et des petites boutiques, marché au poisson décoré d’azulejos modernes aux couleurs vives. Ici, il y a aussi un marché africain pour les habits, des petites boutiques  alignées dans des guérites couvertes, très propres, avec des décorations d’azulejos bleus portugais.

le port de Mindelo
le port de Mindelo

Retour par le front de mer. Dans l’ancien port, les pontons de ciment tombent en ruine, les ferrailles rouillées, épaves, remplaçent les anciens cargos du temps où Mindélo était un port charbonnier où les transatlantiques en route vers le Brésil faisaient escale pour se ravitailler. Les vestiges se désintègrent. Autres monuments bizarres : une sculpture représente un aigle sur un tas de fausses pierres, sur une digue mal entretenue et la réplique de la Tour de Belem cachée par des échafaudages. Quelques catamarans et voiliers de croisière mouillent, regroupés au milieu de la baie.
Promesse de coucher de soleil,  englouti par un banc de nuages comme à Tarrafal, le gros ballon jaune disparaît avant de rougir.

La lumière est très belle. Je tente des photos. C’est à ce moment que je me rends compte de la beauté du site. Baie fermée de toutes parts (où est l’océan ?) par des monts mauves à l’heure du couchant, avec des formes étranges. La ville s’étage sur des collines, cubes colorés aux teintes vives. On n’a pas hésité à utiliser des oranges vifs et du turquoise soutenu ou du violet.
Le  « ferry »de Santo Antao le 21 a mauvaise réputation. Patrick nous a raconté en plaisantant que les Capverdiens sont malades avant même de monter sur le bateau. Dominique est hantée par cette traversée et cherche à y échapper. Peut-être existe-t-il un avion ?  Pas si idiots que cela, les Capverdiens ! Le rafiot à quai, par une mer d’huile, tangue abominablement. Il faudra prendre du  Mercalm.
Nous dépassons d’énormes silos pour découvrir la plage de sable blanc. A cette heure-ci, comme à Tarrafal, elle est remplie de sportifs qui font des exercices divers, jogging, pompes, assouplissements, jeux de balle… les Capverdiens entretiennent leur corps.
Le residencial Che Guevara est tout proche de la plage. Nous rentrons à la tombée de la nuit, commandons du thon grillé et du riz pour moi, un yaourt pour Dominique. Je mange donc seule le thon grillé délicieux assaisonné d’huile avec de l’oignon et de la coriandre hachée devant les informations à la télé capverdienne.

 

18. Fogo – Salinas, dernier jour sur Fogo

CARNET DU CAP VERT 2002 

Salinas au bout de la route
Salinas au bout de la route

On essaie de louer une jeep

Bettinho avait loué une  Jeep à André. J’avais fixé un rendez-vous après le petit déjeuner, à la Pousada. Comme il tarde, je pars au bureau d’ Ecotour. Sur ces entrefaites, Bettinho, arrive à ma rencontre . nous nous retrouvons enfin à 9h15. Ce n’est pas un loueur officiel, il nous fait toutes sortes de recommandations. D pense qu’il ne nous fait pas confiance parce que nous sommes des femmes.

9h30, nous sommes encore devant la Pousada, sans véhicule. Un vendeur sénégalais essaie de nous aider à trouver une autre voiture. Nous le suivons à grandes enjambées dans toute la ville. Sans succès, on nous renvoie à Bettinho  qui loue ses voitures sur le marché mais dont nous ne voulons pas entendre parler.

Il faut se contenter de l’aluguer

Aluguer pour Salinas

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au marché de Sao Felipe

Enfin 10h15, l’aluguer pour Salinas n’a pas encore fait le plein de passagers. Il passe au marché, charge plusieurs femmes, dont une entre deux âges avec ses paquets qui descend au marché aux vêtements (sucupira). Le taxi erre dans les quartiers hauts de Sao Felipe pour de ramasser d’autres voyageurs, revient à sucupira, reprend la dame, qui redescend à nouveau au marché aux légumes pour chercher un balai. Après une heure de va et vient, l’aluguer prend la route de Salinas, traverse des villages où alternent des maisons misérables de parpaing et les magnifiques villas flambant neuves des émigrants américains, ainsi que d’autres en construction…

Les acacias du reboisement sont plus beaux que ceux de Santiago. Autour des villages, les papayers sont spectaculaires, énormes chandeliers à multiples branches. Dans les petits champs protégés par des murets des animaux, les hommes binent et font des monticules. Les sisals vert vif sont de plus en plus nombreux. Ils sont taillés à la base, certains ont même des troncs comme des palmiers. Des cabanes pour les animaux domestiques sont entièrement construites en feuilles de sisal tressées.

Salinas, plage perdue

Salinas, plage perdue
Salinas, plage perdue

Le HIACE stoppe dans un endroit désert. Le chauffeur nous indique une route qui descend vers l’océan. En bas c’est Salinas. Environ un kilomètre de descente dans une ribeira. Au bout de la route, un petit cimetière marin domine une anse fermée par des rochers noirs qui font une arche naturelle. Les vagues battent les rochers. La «piscine naturelle» est bien agitée ? Il nous semble que nous sommes au bout du monde. Enfin pas tout à fait, des barques reposent sur la grève, et dans ces barques des pêcheurs. Des enfants se baignent. Comment vit-on au bout du monde ? Comment ? A qui vendent-ils leurs poissons ?

L’aluguer doit repasser sur la route à midi et quart. Nous n’avons pas le temps de nous baigner si nous voulons être à l’heure là-haut. Cet aluguer me paraît être la seule chance de retourner à la civilisation. Nous remontons dare dare. A mi pente, un klaxon, le chauffeur est descendu à notre recherche. A 13h nous sommes de retour à Bela Vista.

Baignade près du port

Après la sieste, un aluguer bâché nous emmène à la plage près du port pour «100$ par personnage».
Au port de commerce deux gros bateaux sont à quai. Plus loin, une rangée de barques et derrière les barques, une plage très tranquille. Pas une vague malgré le vent, du sable noir et de l’eau limpide. Plus loin, les falaises imposantes et Sao Felipe. Les vagues se brisent sur la falaise et je me baigne comme dans une piscine. Des familles avec des enfants barbotent. Pour rentrer, un père de famille qui avait emmené ses enfants et son petit chien à la plage nous remonte en stop dans son pick- up. Pour le remercier on distribue des chewing- gum aux enfants. Finalement nous n’avons pas si mal organisé cette journée si mal commencée avec la défection de la voiture.

17 – Fogo – De Cha da caldeira retour à Sao Felipe

CARNET DU CAP VERT 2002

 

La coulée de 1995
La coulée de 1995

Fête au village à Cha da Caldeira

 

Toute la nuit, le village a dansé. A 4h10, on, j’entendais encore la musique des bals populaires.
Nous rentrons à bord du pick-up de Patrick, retraversons la caldeira.
Je comprends mieux l’ordre des coulées, la plus récente de 1995, très épaisse, ressemble à un champ labouré par une gigantesque charrue où les mottes auraient plusieurs mètres de haut. Elle se superpose à des coulées plus anciennes recouvertes d’une pellicule de cendres ou de scories plus fines.

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Aluguers, pick up et camions bondés viennent à notre rencontre pour déposer les villageois venus pour la fête. Un camion surpeuplé ne peut pas croiser le pick up sur la piste étroite. Patrick se gare sur le bas côté ensablé par les scories fines. Je me demande si nous n’allons pas rester coincés, enlisés. Les passagers du camion, debout, entassés, sont hilares et me font signe de les prendre en photo. Tôle contre tôle, ça finit par se décoincer. Nous croiserons encore voitures, minibus et camion : il semble que toute l’île converge vers Cha da Caldeira. Le village va être bondé. Nous avons loupé quelque chose.!
Patrick conduit vite en descente, – cela secoue -, et je me suspends à deux mains aux ferrailles sur lesquelles on pourrait accrocher une bâche. Les villages sont désertés, il n’y a plus personne aux fontaines si animées vendredi. Tout le monde est dans la caldeira !

Sisal et mer de nuages
Sisal et mer de nuages

A la descente, une épaisse couche de nuages cache le sommet. Un pick- up stoppe à notre hauteur, le conducteur annonce à Patrick qu’il pleut dans le nord de l’île. Cela paraît étrange. Il faisait un temps magnifique là haut.

A Sao Felipe tout est fermé

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Pour déjeuner, difficile de trouver une loja ouverte. On achète des yaourts aux fraises. au supermarché de la station service près de la poste. La supérette moderne vend des pizzas, des gâteaux et des croquettes.

Après la sieste nous parcourons Sao Felipe en suivant le plan à la recherche des sobredos, maisons à étage avec balcons datant de l’époque de l’esclavage. Les maisons sont souvent rénovées et repeintes. Une rue en pente avec des façades de guingois attire mon regard. 14J’ai envie de la peindre. Mais je m’y prends mal, tout est coincé en bas de la feuille. A la Pousada Bela Vista, je recommence en agrandissant. C’est la première fois que je refais une peinture à la maison.
Pour dîner, nous retournons au Bistro.

16 . Fogo – l’ascension du Pico Fogo

CARNET DU CAP VERT 2002

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Pico Fogo 2900m

Le Pico Fogo, 2900m est impressionnant, c’est haut!Je suis un peu inquiète : 1200m de dénivelé dans les scories, cela doit être quelque chose ! Je ne suis pas sûre de chargés de mystère.  A ma collection, le Puy de Dôme, le Vésuve, l’Etna, l’Erceyes en Cappadoce. Serais-je capable de terminer la randonnée ?

Départ à 6h30

cultures dans la caldeira : pommes et vignes
cultures dans la caldeira : pommes et vignes

José, très jeune, ne fait pas ses 20 ans, plutôt timide, – petit pour un Capverdien- chemise à manches longues, pieds nus dans ses baskets et les mains vides. Il parle un peu français. Je profite de l’occasion pour prendre une leçon de Portugais. Il s’y prête avec beaucoup de bonne volonté pendant la marche d’approche, dans les vignes sur des petits lapilli noirs très brillants, presque du sable. Dès que nous entamons la montée, je garde mon souffle. Très rapidement, le sentier grimpe tout droit selon la plus grande pente. Je ralentis l’allure et raccourcis mon pas. Mais déjà nos pieds s’enfoncent comme dans une dune. Je m’essouffle sur ce substrat qui ne donne aucun appui.

José, très patient, propose «une petite pause». Le soleil vient de se lever, la mer de nuages cache l’océan et le rivage. A 8h00 l’ascension est à peine entamée.

Nous sommes censés gravir une arête rocheuse. Les rochers ne sont pas stables, j’essaie de m’aider des mains, mon sac me déséquilibre. Heureusement, Olivier porte un énorme sac à dos vide et propose de me débarrasser. Sans le sac, je suis plus légère et je peux monter à quatre pattes «style macaque» On n’avance pas, José multiplie les pauses pour souffler. La cime au dessus de nous est énorme. La progression très lente. A nouveau, on s’enfonce dans le sable noir. J’ai l’impression qu’on ne parviendra jamais. En haut pourtant, à la dernière pause, nous sommes à 50 m du sommet. Encore à quatre pattes, j’y arrive.

Sur la crête, nous découvrons le cratère : quelle surprise ! Le vent souffle, on a presque froid. Les nuages se sont dispersés, l ‘île de Santiago sort des nuages. Dans le cratère profond, très noir, des traînées jaunes de soufre. Des fumerolles se dégagent avec leur odeur infecte. Nous sommes bien sur un volcan actif !

Au creux du cratère, un groupe de touristes ramasse des pierres pour écrire leurs prénoms, – c’est la tradition-. Nous y renonçons,  à l’idée de descendre pour avoir encore à remonter ! C’est tellement plus beau vu d’en haut ! J’ai oublié la monté pénible  Nous sommes récompensés. Des petites plantes sont en fleurs des langues de lézards. J’ai réussi ! Je suis fière de moi mais je me garde bien de parader. Il est onze heures. Nous avons mis quatre heures et demie au lieu des trois heures prévues.
A la pause, le pique-nique manque, seulement un bonbon pour reprendre des forces.

Godille dans les cendres

La descente est un plaisir. Nous contournons le cratère sur une arête vertigineuse. Je regrette d’avoir des tennis lisses peu sécurisantes. Puis un peu d’escalade sur des rochers bruns et enfin la récompense : la descente dans le sable noir… On se dirait sur une immense piste de ski. On plante les talons, écarte les bras et on se laisse porter par une coulée de gravillons qui dévale sous nos pas. Le piège, ce sont les grosses pierres cachées sous les cendres. Tout le monde ramasse des gadins, les uns après les autres, puis la pente devient très lisse. On se laisse entraîner en courant, les gravillons arrivent nettement au dessus des chevilles, mais c’est très doux. José se déchausse et fera les trois quarts de la descente pieds nus, chaussures à la main. Nous arrivons directement sur le petit cratère de 1995 «le petit pic» qui est un enchantement pour les yeux, avec toutes ses couleurs, nuances de rouge orangé, noir, traînées de soufre jaune, dépôts blanchâtres…

les vignes de Fogo
Enfin, nous nous retrouvons dans les vignes. José cueille une grappe pour chacun. Le raisin noir à petits grains est très sucré, quelques grains desséchés ont le goût de raisins de corinthe. C’est délicieux et réconfortant.

Chez Patrick

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Pour déjeuner, je me contente de trois bananes. Après-midi, tout le monde dort ou se traîne, crevé par l’ascension.

Le jardin enclos par les arcades ombragées est un lieu clos pour établir des liens avec les autres visiteurs. Nous sommes montées avec un couple de médecins très classe, un peu méprisants, qui nous avait paru antipathiques à l’aéroport qu’on avait classés dans la catégorie des culottés et des profiteurs. Ils avaient également emprunté la Jeep d’André et Régine avec le même naturel. «Fastoche !» était leur expression favorite. Ne pas se fier aux apparences, ils sont charmants. Elle, Ullriikke (finnoise), médecin, fait un stage à l’hôpital de Dakar. Lui est orthopédiste. Ullriikke donne une consultation  😀 n’a pas  l’appendicite, heureusement. En revanche, elle n’est pas en faveur de l’Immodium et lui donne un autre médicament.
Je dîne avec les deux allemands avec qui je m’exerce à parler allemand. Cela commence à revenir. Ils me félicitent pour mon accent, même si le vocabulaire est enfoui loin dans ma mémoire.
Tout le monde a appris à jouer à l’awalé.

Au dîner Patrick raconte Fogo

Le dîner est fameux : magnifique plat de poisson, daurade coryphèle (cela ne ressemble en rien à la daurade) sur un lit de bâtonnets de carottes avec quatre flans de courgettes et quatre beignets de purée. C’est très joliment présenté. La sauce à la crème et au vin blanc est délicieuse.

Patrick, pour terminer la soirée, nous raconte Fogo, l’immigration vers l’Amérique avec les allers et retours des immigrants qui irriguent l’économie de l’île en dollars. Aussi le trafic des «bidons» dans lesquels ils envoient hors taxe des vêtements de marques qu’ils revendent pour trois fois rien sur l’île. Ensuite les bidons servent à tout, à aller chercher de l’eau, à faire des échafaudages, construire des tables ou des armoires : «civilisation du bidon»
C’est la fête au village. Nous entendons de la musique partout. J’irais à la fête bien en compagnie des allemands ou des médecins, mais Patrick nous encourage très mollement. Seuls les hommes y assisteront, cela serait peut-être gênant pour les filles.

15 -Fogo – Cha da Caldeira – l’auberge de Patrick

CARNET DU CAP VERT 2002 

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Chez Patrick, les chambres et la salle à manger sont installées sous des arcades en pierre de lave rouge soulignée par un parement clair. un peu comme un cloître roman avec un jardin fleuri d’hibiscus de laurier rose, ricin et d’autres arbustes.

le patio de l'auberge de Patrick
le patio de l’auberge de Patrick

Nous commandons des sandwiches pour aller pique-niquer dans la forêt.

Le village de Cha da Caldeira, 500 habitants, est bâti de maisons basses de lave noire, parfois de parpaing, parallélépipède d’un seul étage.

Devant les maisons, je remarque un cadre avec un fin grillage. J’avais pensé à une moustiquaire, c’est un tamis pour les cendres volcaniques… Quand nous arrivons, un groupe d’hommes coule la dalle en béton du toit. Un drapeau américain flotte. Les maisons sont dispersées dans la caldeira, il y a de la place !

Campagne

les vergers de Cha da Caldeira : coings
les vergers de Cha da Caldeira : coings

Nous passons devant leurs petits champs : dans les lapilli, ils creusent des trous et installent des pommiers minuscules qui portent de petites pommes – combien émouvantes – et partout, des buissons de haricots- congos. Au sol, des haricots ressemblant aux nôtres rampants, sont en fleur en ce moment. Dispersée sur les petits cratères, la vigne s’étale en pieds également rampants portant du raisin noir. C’est la saison de la vendange. Le raisin est ramassé dans des paniers ronds d’une quarantaine de centimètres de diamètre. Un peu plus loin, la coopérative vinicole est en pleine activité. Des enfants blonds aux yeux bleus mais à la peau foncée réclament des stylos ou de l’argent. Comme on ne leur donne rien, le plus petit nous balance une pierre. Patrick en a été très surpris.

Les enfants blonds de Fogo, les descendants d'Armand de Montrond
Les enfants blonds de Fogo, les descendants d’Armand de Montrond

Nous nous installons sur une banquette pour déjeuner. A l’ombre. Des arbres à très fines feuilles très découpées portant de curieuses fleurs jaunes en brosse horizontale. De l’autre côté de la piste, la coulée s’est arrêtée net en formes déchiquetées et tourmentées. Je cherche quelques surfaces cordées pour la photo.
Nous sortons de la caldeira vers le nord, au dessus de Mosteiros.

La forêt luxuriante

Eucalyptus
Eucalyptus

C’est là que commence la forêt luxuriante et combien surprenante, qui pousse au flanc du volcan. Le gardien qui devrait percevoir le péage nous demande une cigarette et nous laisse entrer. De toute façon, nous n’irons pas loin. La forêt est plantée sur une pente très raide. Les arbres sont magnifiques. Les eucalyptus ont un fût épais; des cyprès sont très fournis (on n’en avait pas encore rencontrés au Cap Vert). Les sisals bornent la route, leurs flèches piquantes sont vertes très vif et bien fournies.

Petit âne et fourrage
Petit âne et fourrage

Le retour est agréable. Le soleil est passé de l’autre côté de la muraille qui borde le cratère. Je marche à l’ombre. . En chemin, j’achète du raisin à une petite fille qui m’offre une jolie grenade de belle taille.

Soirée agréable

Cha da Caldeira coopérative vinicole

Un couple d’allemands lit un guide en anglais que j’emprunte. Ils sont vraiment charmants avec la politesse germanique un peu formelle dont ils sourient eux-même. Nous dînons ensemble et partageons une bouteille de vin blanc de Fogo que D compare à du Gewürztraminer…
Patrick termine la soirée avec nous. Il raconte la vie facile au Cap Vert sans tension ni sociale ni raciale. D’après lui, le Cap Vert est plutôt bien parti pour sortir du sous développement. Extinction des feux à dix heures, le groupe électrogène est stoppé.

14. Fogo – Montée au volcan en minibus

CARNET DU CAP VERT

Le volcan Fogo
Le volcan Fogo

En minibus, nous montons au volcan

Albino, le chauffeur du minibus d’Ecotour, est polyglotte : anglais parfait, accent américain, il se débrouille également en français et en espagnol. A bord, le jeune couple qui a fait le voyage en avion en même temps que nous et deux garçons espagnols. Les français rencontrés au Bistro nous suivent dans une Jeep de location.

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La route pavée fait le tour de l’île (ou presque). Nous traversons des villages. La route est animée par le va-et-vient des ânes qui portent de grosses chambres à air de camion remplies d’eau. Les villageois n’ont pas l’eau courante et l’achètent à la fontaine publique. Une maison gigantesque avec une énorme niche est entourée par un grillage. La bannière étoilée flotte fièrement. Elle appartient au propriétaire de l’hôtel Las Vegas.
Le minibus s’engage sur une chaussée très escarpée qui grimpe tout droit vers le sommet du volcan. Il peine à la montée et personne n’ose demander d’arrêt photo.

Coulée de lave

La coulée de 1995, très fine langue noire, marque le paysage. Cette coulée de lave visqueuse était assez lente pour ne faire que des dégâts matériels. Albino nous montre aussi la coulée de 1951.

Coulée de 1951 et re-forestation
Coulée de 1951 et re-forestation

Un village est construit sur une coulée plus ancienne, les maisons sont perchées sur la surface irrégulière. Des petits cratères anciens boursouflent le flanc de la montagne. Près des villages, les cultures sont irriguées, les papayers magnifiques, du maïs, de beaux bananiers et des légumes, choux et épinards.Au flanc du volcan, les acacias de belle taille sont dispersés. Si on regarde plus attentivement, on distingue les lignes parallèles des terrasses de la reforestation. Ici les plantes ne s’installent pas par hasard. La main de l’homme est nécessaire, travail titanesque que ce terrassement, pour planter des acacias qui ne produisent rien d’économiquement vendable, ni même rien de mangeable, en dehors du bois de chauffage. La reforestation a pour principale vocation de lutter contre l’érosion. D’après Patrick, notre hôtelier, ces grands travaux date de l’époque marxiste

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Bergerie

Au-dessus de 1300 m, la vue est dégagée on voit tout un alignement de petits cratères, la mer et une grosse coulée. Au premier plan, un petit enclos pour les chèvres, protégé par un toit de paille. C’est émouvant : on dirait la crèche de Noël.

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haricots-congo arbustifs

Dans ce que nous aurions pu prendre pour un désert, Albino désigne des plantations d’arbustes : les haricots-congos, véritables haricots aux fleurs jaune-oranger avec les gousses. Des ricins ont également été plantés. Ce sont des plantes toxiques mais certaines feuilles peuvent servir de fourrage aux chèvres. Les petits maniocs sont minuscules, faute d’eau. Des arbres ont aussi été plantés là, une variété d’eucalyptus à grosses feuilles larges ressemblant à des oreilles, orelhadas, des arbres à curieuses fleurs jaunes en plumet et du sisal (sorte d’agave). Si Albino ne nous avait pas expliqué tout cela, je n’aurais vu que de la broussaille sèche inutile.

Ricin
Ricin

Après une montée pénible pour le moteur, nous parvenons sur le rebord de la caldeira.

La caldeira

la caldeira
la caldeira

Cette caldeira est vraiment impressionnante : fer à cheval bordé de murailles verticales parcourues par de fines failles verticales sur plusieurs centaines de mètres. L’intérieur est tapissé par des coulées noires à la surface irrégulière et tourmentée. La route pavée fait comme une digue surélevée au dessus des coulées de 1951 (la plus grande éruption). Celle de 1995 a coupé la route , mais il n’y paraît plus. Près du rebord de la caldeira, c’est tout vert. Cette végétation est tout à fait insolite.

13 – Fogo, l’île-volcan, sa capitale Sao Felipe

CARNET DU CAP VERT 2002

Sao Felipe
Sao Felipe

A l’aéroport, Lou,une très jolie métisse, habillée avec recherche nous accueille et  nous montre dans Sao Felipe, la poste, la banque, les restaurants, avant de nous déposer devant une belle bâtisse à étage peinte en beige orangé, portes et volets marrons avec un balcon et une terrasse à fins balustres blancs :
la Pousada Bela Vista

La Pousada Boa vista
La Pousada Boa vista

 

La Pousada Bela Vista a vraiment fière allure. Notre chambre est  magnifique,vaste, haute de plafond. L’ameublement est classique, raffiné, les meubles en bois foncé portugais. Sur les tables de nuit, des petits bouquets de roses artificielles. Ce qui donne le charme particulier à la pièce, ce sont les rideaux blancs éblouissants masquant la fenêtre et l’entrée de la grande salle de bain. Avant de déballer les valise, photo.
Vers six heures nous sommes prêtes, douchées, pour l’exploration de Sao Félipe.

Sao Felipe : Une jolie ville coloniale

C’est (en dehors de Praia, la capitale) la première fois que nous sommes dans une ville et non un village. Les rues sont toutes pavées avec soin de motifs en mosaïque comme au Portugal. Balayées, bordées de trottoirs plantés de petits arbres, et de flamboyants qui donnent de l’ombre. Plusieurs places sont fleuries de massifs avec même du gazon. On y a disposé des bancs, luxe, il y a des fontaines!
Les maisons sont sagement alignées. La plupart sont peintes de couleurs pastel, beige, rose, vert amande, jaune, mais aussi certaines tranchent avec des teintes vives bleu et vert. De nombreuses maisons ont un étage avec un balcon. Ce sont les sobredos, les maisons coloniales. Parfois la peinture écaillée part en grandes plaques. Certains balcons tombent de guingois. La richesse de Sao Felipe appartient à un passé bien révolu. L’argent des émigrés américains a permis de repeindre les façades.

Sao Felipe
Sao Felipe

A six heures, Sao Felipe est une belle endormie. Nous sommes seules dans les rues et croisons au hasard deux couples de touristes. Comment allons-nous dîner ? Pas de terrasse de restaurant sur le front de mer (ou plutôt si, une ruine). Les mercerias vendent les conserves habituelles. Le pain est introuvable.
Le soleil va se coucher près de l’île de Brava dans les brumes, la lumière est très douce.

le Bistro
le Bistro

Au Bistro, tenu par une Hollandaise, nous dînons de sandwichs au poisson froid et aux oignons, faisons connaissance avec une famille française (Roots aussi) et échangeons nos impressions. Ils ont été ravis de la Pensao Alternativa à Sal où nous passerons la dernière nuit du séjour.

A la  nuit, nous rentrons à la Pousada.

C’est à cette heure-ci que la ville s’éveille. De la musique sort de toutes les fenêtres ouvertes, une circulation d’enfer s’est emparée des rues. Des 4×4 étincelants vrombissent, appuis-tête aux couleurs américaines, stéréo à plein volume. Nous ressortons faire un tour, mais il faut se garer des voitures!

le lendemain matin

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Sao Felipe, la belle endormie, s’est éveillée tôt. Dès 6h, sur la terrasse, je  profite du spectacle de notre petite placette triangulaire très animée où s’arrêtent taxis et aluguers venant de la campagne.
Tout le monde est beaucoup plus soigné qu’à Santiago. Quatre femmes en  noir vont avec leurs sac la main (à la messe ?). Deux d’entre elles ont grande allure avec leurs longues robes noires fendues. Elles pourraient assister à un spectacle à l’opéra dans cette tenue ! Les jeans ne sont pas les contrefaçons de Sucupira. Ils arrivent de Boston. Les aluguers affichent les couleurs américaines.

le marché

Le marché dans les paniers, le raisin du volcan
Le marché dans les paniers, le raisin du volcan

Peu à peu, les rues se peuplent de marchands. Des femmes portent des bananes dans des cuvettes. Il existe deux marchés à Sao Felipe, l’un ne vend que des vêtements pour les Capverdiens, de bien meilleure qualité qu’à Sucupira à Praia, l’autre est un joli marché aux légumes. Devant ce marché, on décharge des paniers couverts de toile colorée.  Dans les panier, le raisin de Fogo.

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Le petit déjeuner est raffiné , jolie vaisselle, une belle papaye, sous une petite cloche de verre : du fromage de chèvre et de la pâte de coing.

12. Dernière matinée à Tarrafal et traversée de Santiago

CARNET DU CAP VERT 2002

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la plage  de Tarrafal : un terrain de sport? 

5h52, les passerinhas m’ont éveillée avec leurs cris affreux. De la terrasse, j’observe l’animation  sur la plage.
Sous le kiosque de pierre hexagonal couvert de palmes, un homme s’échauffe, s’étire et fait un véritable ballet (karaté ou capoeira ?). Hier, des jeunes filles dansaient.

Les barques sont poussées par une foule de pêcheurs. L’une d’elles est peinte stars and stripes.

Un couple de joggers grimpent le sentie devant le bungalow. Une femme arpente la plage en nombreux allers et retours d’une marche sportive.
Des enfants se baignent. Vers sept heures, tous ces sportifs quittent la plage. J’irais bien me tremper aussi. J’hésite, le temps est couvert et surtout, j’attends les macaques.
Les macaques ne sont pas venus nous voir, ils sont autour de la salle du petit déjeuner.
Dernière baignade.
Les petits porteurs, l’allumeur de réverbère et son frère, se chargent de nos valises. Ils les trouvent bien lourdes (18kg). Ils ont 14 et 16 ans, vont au lycée et travaillent, après les cours, à l’hôtel. Ils parlent assez bien le français appris à l’école.

Retour à Praia en minibus par la côte est

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Le minibus de l’hôtel emprunte la route de la côte est. Des rochers émergent, battus de très grosses vagues. Dans chaque faille formant un canyon, de véritables oasis prospèrent. Une éolienne monte l’eau  qui irrigue  bananeraies,  vergers d’orangers et  cocotiers.
Des femmes portent de très hautes charges de branches sèches, sorte de fourrage entassé sur les terrasses des maisons basses. Quelques fois, c’est un âne qui les transporte.

Dans les collines, des feux sont allumés au mépris de la sécheresse et du vent. De grandes colonnes de fumée s’élèvent. Prépare-t-on les champs pour la saison des pluies qui s’annonce ? A quoi servent les brûlis au pied des petits acacias de la reforestation, bien alignés mais bien desséchés ? Certains sont squelettiques, la plupart ont perdu toutes leurs feuilles. J’ai bon espoir pour eux. S’ils étaient morts, ils seraient ébranchés depuis longtemps. Nous rencontrons souvent des hommes portant des machettes ou des scies. La forme bizarre des arbres résulte de la force des vents mais aussi des élagages sauvages avec des instruments peu tranchants. Des moignons partent du tronc à hauteur d’homme.
Les villages sont misérables. Les maisons sont presque toutes en parpaing brut, très peu sont badigeonnées. Il y a affluence aux fontaines, les animaux domestiques furètent comme à Cidade Velha. Les petits cochons à fourrure épaisse, brune ou grise, sont assez malins pour traverser la route quand il le faut. Ce n’est pas le cas des poules avec leurs poussins, que le taxi évite avec des embardées.

Praia,aéroport

Le temps, couvert ce matin, se dégage. A midi, à Praia, le ciel est bleu sans un nuage.
L’avion, programmé pour 13h45, ne partira qu’à 15h30. En attendant, nous nous distrayons au spectacle des autres passagers. Deux couples de touristes, le reste de Capverdiens, trois familles d’émigrés américains tout en GAP et en Nike neufs, très américains, avec des monceaux de bagages. Un gâteau à la crème tout enguirlandé bleu fleuri de rose est aussi du voyage. Les gens se reconnaissent, se parlent. Personne n’a l’air de se soucier des annonces qui périodiquement font état du retard de l’avion. Au Cap Vert, il ne faut pas être pressé, personne ne l’est.
Nous survolons Cidade Velha, reconnaissons les fortifications, l’église. Je cherche le flamboyant. A peine sommes-nous au dessus de l’océan, que ses dessine déjà la silhouette du volcan..

 

11. Tarrafal, une journée à la plage

CARNET DU CAP VERT

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Merceria

Le village de Tarafal

Petit tour au village de Tarrafal. Coup d’œil à l’école maternelle. Les enfants ont des petits tabliers en pied de poule vert et blanc. Ils sourient en nous voyant sans bouger de leur table.
Dans l’épicerie ancienne, les étagères en bois ciré contiennent des boites de conserves et des bouteilles. Sur le comptoir, une balance roberval. L’épicière est très contente qu’on la photographie. Elle nous montre la photo encadrée de l’ancien propriétaire. Cette épicerie a plus de cent ans explique-t elle.
A l’entrée du marché une petite échoppe vend des tissus au mètre. Je choisis un tissu africain pour faire un turban, la dame m’en coupe un mètre «e melhor !». Au marché, les vendeuses nous reconnaissent et nous proposent des citrons verts, l’une d’elle pose fièrement pour la photo derrière son étalage.

Encore une baignade somptueuse!

 

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La baignade est somptueuse, dans de l’eau lisse, très limpide. Sur un fond sableux, je découvre un poisson étonnant que je prends d’abord pour une pieuvre. Son corps n’a pas la forme fuselée des poissons. Il est massif, presque rectangulaire, décoré d’ocelles. On dirait une tête de vache ou de chèvre avec ses orbites le museau. Je suis toute émerveillée de cette découverte.
Le maniement de l’appareil-photo étanche est beaucoup plus compliqué que prévu : d’abord, ce n’est pas simple de nager avec. Sans tuba, il faut remonter respirer, retrouver le sujet, puis appuyer sur le déclencheur. Nous traversons à la nage notre petite anse pour aller vers les rochers juste là où plongent les plongeurs qui pêchent au fusil. Cette expédition a été sportive. Je dois toujours ramer à contre-courant pour faire du surplace, même si je m’accroche à un rocher.
Dominique a trouvé un pantalon en batik chez les marchands sénégalais qui la demandent qu’on leur prête un «bic»

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Pesée sur la plage : 17kg!

Nous retournons voir le retour des pêcheurs mais leurs prises sont moins spectaculaires qu’hier, sauf un thon de 17 kg pesé sous nos yeux.
Après le déjeuner nous retournons  sous le cocotier . L’hôtel Baia Verde s’est rempli hier soir et la plage aussi. J’emporte un bloc pour dessiner les frondes de palmiers et le livre sur le Cap Vert.
La baignade de l’après midi est rafraîchissante mais beaucoup moins intéressante. Le vent s’est levé, l’eau est agitée et plus trouble .
En soirée, j’essaie de peindre les barques sur le sable. Elles sont vraiment très jolies, très colorées avec un gros effort pour les motifs peints dessus. Le résultat n’est pas à la hauteur mais cela me donne l’occasion de bavarder en portugais avec les enfants qui m’entourent. Ils s’indignent parce que je ne dessine pas les moteurs et me dictent les numéros.

10. Tarrafal – Macaques – plage

CARNET DU CAP VERT 2002

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Hier soir la télé était en panne, explication de la direction : « ce sont les macaques », nous étions incrédules.

L’allumeur de réverbère nous avait prévenu de ne rien laisser traîner sur le balcon. Nous avions conclu qu’il y avait des voleurs et avions construit une théorie sur la perversion du tourisme et son influence néfaste sur les capverdiens. Nous n’avions pas pensé aux singes !

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Les cris stridents des passerinhas m’ont tirée du lit. Il fait très frais, j’enfile une  chemise à manches longues pour sortir.
Sur les câbles,  en file indienne, se balançant, avancent les macaques. L’un d’eux s’assied tranquillement au milieu du fil pour faire sa crotte. Les autres sautent sur le toit du bungalow et font un raffut d’enfer … Ce sont de très jolies petites bêtes avec un dos fauve, la face claire, de grands yeux bruns. Leur fourrure sur le dessus du crâne leur fait une sorte de casquette avec une visière. Ils sont peu farouches et cherchent même à entrer par la porte ouverte. Toute la famille campe sur la terrasse.

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Je vais chercher une banane que je partage. Je m’attendais à ce qu’ils attrapent les morceaux avec leurs dents à la manière des chiens ou des chats. Ils saisissent délicatement la banane avec leurs mains qui ressemblent aux nôtres. Je suis fascinée et ne veux pas perdre une seconde du spectacle. Après la distribution, la troupe file dans le  petit bois d’acacias. Certains reviennent quand même ramasser les pelures qu’ils avaient dédaignées. L’un d’eux joue à sauter de la rambarde, rebondit sur le mur puis saute l’allée pour s’accrocher au grillage et contourner les barbelés, qui ne les gênent nullement.
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Le petit déjeuner est servi dans une curieuse construction ronde en pierre surmontée d’une sorte de cône. L’aménagement intérieur est un peu décevant : longues table de cantine et toile cirée. Le buffet est délicieux, quartiers de papaye, jus de mangue, confitures-maison, œufs et petits pains.

Promenade sur le sentier côtier

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Suivant les conseils du Guide Olizane, nous partons à pied de l’hôtel, traversons le petit bois d’acacias bien verts, avant d’emprunter un sentier en corniche qui passe sur les roches blanches . Ce n’est pas du sable ou du grès mais une sorte de brèche argileuse intercalée entre deux coulées. Provient-elle de la décomposition du substrat volcanique ? Quelles pluies, quelle rivière explique la formation de cette brèche ? D’où vient alors le sable blanc ? L’observation rapprochée me pose plus de questions qu’elle n’y répond.
C’est une jolie promenade en balcon au dessus de l’eau transparente avec une vue très étendue sur la baie de Tarrafal, ville dominée par son éolienne et au loin par les crêtes découpées des montagnes de l’intérieur de l’île.
Le sentier conduit à une petite plage de sable noir très noir, étincelant sous le soleil. L’eau est limpide, verte, les rochers noirs, pas une ride, pas une vague ce matin. J’ai hâte de me baigner.

Baignade : la photo sous marine, c’est difficile !!

La baignade du matin dans cette eau calme est délicieuse. Je vois des poissons colorés. Le spectacle des poissons est encore plus intéressant qu’en Méditerranée mais la nage est moins tranquille : l’eau bouge plus, on n’arrive pas à faire du surplace, il faut nager tout le temps pour ne pas se laisser embarquer.
Nous faisons connaissance avec un marchand sénégalais, Oumar, qui propose de nous organiser une ballade en bateau jusqu’au phare. En zodiac, cela coûte 1000$ mais avec les «pirogues» ce sera moins cher…
Mauvais jour, au marché, il n’y a plus rien, ni brochettes ni même des bananes mûres. On se contentera des beignets au poisson (genre anchois) et des restes d’hier soir.

Retour des pêcheurs

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Vers 1 heure de l’après midi, ils remontent leurs barques sur le sable de la plage du côté du village. Un bouquet de très grands arbres abrite le marché au poisson. Un petit bâtiment peint en bleu sert de criée. Hier j’ai raté la pesée des thons par manque de rapidité.  Nous guettons l’arrivée des gros poissons et attendons qu’une femme les charge sur sa tête dans une bassine en plastique. Elles mettent trois gros poissons côte à côte, la porteuse ne peut pas soulever seule la charge et se fait donc aider pour remonter la bassine jusqu’à la hauteur de sa tête. Parfois tout s’écroule. Elles vont rincer le poisson dans la mer. Des femmes assistent au marché au poisson, les grattent, nettoient, dépècent, les vendent, les hommes aident à la pesée.

capvertsantiagotarrafal8-copie Aujourd’hui, on a pêché deux espadons avec leurs longs rostres pointus, l’un deux est déjà coupé en deux quand nous arrivons. L’autre est couché sur la plage. On étend sa nageoire dorsale pour y placer de plus petits poissons. Nous attendons avec impatience la femme qui va les transporter. L’espadon est beaucoup trop grand pour tenir dans une bassine.

capvertsantiagotarrafal7-copieDeux garçons vont le hisser sur la plage en l’attrapant par la tête. Les thons sont des poissons magnifiques, leur peau bleutée brille, vers la queue une rangée d’étranges triangles jaunes arrive jusqu’à la queue. Les petits poissons sont centralisés au fond d’une grande barque entourée de plusieurs dizaines de femmes qui discutent, crient, trient les poissons et remplissent les cuvettes multicolores. Rien ne permet de deviner comment se négocient les ventes. Parfois on voit des liasses de billets. Il faudrait comprendre le créole !

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Après midi à la plage

Beaucoup mieux que des parasols, les cocotiers donnent une très jolie ombre qui bouge quand le vent passe dans leurs palmes. On peut rester toute l’après midi à condition de se déplacer avec la course du soleil. Omar vient me tenir compagnie. Avec d’autres sénégalais, il tient un étal de souvenirs. Ils ont tendu un fil entre deux cocotiers où sont suspendus des pantalons de batiks et quelques bricoles. Les autres vendeurs jouent à l’awelé avec des touristes.

Les colporteurs sénégalais remplacent les offices de tourisme inexistants, ils connaissent tous les renseignements pratiques pour les touristes, sont parfaitement francophones, très débrouillards et aimables. Omar nous explique que nos cartes postales ne partiront pour la France que le lundi de Sal, jour du vol TACV, quel que soit le jour où on les poste. Il raconte aussi ses expériences de vendeur en Afrique et en Europe. Comme je manifeste l’envie de lire, Omar part jouer seul avec son ballon de foot.
Ce matin la plage était presque vide. Vers six heures du matin, quelques coureurs font leur jogging matinal en survêtement, des gamins jouent au foot. Pendant la journée les Capverdiens sont à l’école ou travaillent. Ce n’est que dans l’après midi que la plage se peuple. Les Européens sous les cocotiers, les capverdiens n’ont pas l’air de rechercher l’ombre. Au bord de l’eau, il ne fait pas chaud, il faut être vigilante pour ne prendre des coups de soleil.
Soirée tranquille, lessive et cartes postales.

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De notre terrasse, nous observons l’animation sur la plage.  Pendant que nous nous prélassions les Cap-Verdiens sont arrivés par vagues d’enfants et d’adolescents. Ils jouent dans l’eau et se roulent sur le sable. Vers cinq heures, la plage est pleine de monde, mais pas comme chez nous… où les gens s’installent sur des serviettes avec des parasols et des sacs de plage… les seuls accessoires sont des ballons et de rares bouées. Les groupes sont mobiles. Les jeunes se poursuivent, s’éclaboussent. Le soir, des jeux s’organisent : concours de pirouettes, de plongeons, football, évidemment. Un filet de volley est monté près des cocotiers. Des fillettes arrivent avec leur professeur pour un cours de gymnastique.

Le restaurant Baia Verde,   sert du sar pêché aujourd’hui-même avec une jardinière de légumes. C’est un poisson à chair ferme blanche découpée en fines darnes et cuisinée avec une sauce tomate. Cela ressemble un peu au congre ou à l’espadon.