« Écoutez, c’est moi, le port de Marseille, qui vous parle. Je suis le plus merveilleux kaléidoscope des côtes. Voici les coupées de mes bateaux. Gravissez-les. Je vous ferai voir toutes les couleurs de la lumière ; comment le soleil se lève et comment il se couche en des endroits lointains. Vous contemplerez de nouveaux signes dans le ciel et de nouveaux fruits sur la terre. Montez ! Montez ! Je vous emmènerai de race en race. Vous verrez tous les Orients—le proche, le grand, l’extrême.[…] Je vous ferai voir des oiseaux qui plongent et des poissons qui volent.
Embarque-toi ! Embarque-toi ! »
Albert Londres est le père du journalisme d’investigation. Grand voyageur, il s’est embarqué de Marseille pour ses voyages lointains en Asie, Inde, Chine et Japon… Eté 1926, aprèsl’Exposition Coloniale de 1922 Albert Londres écrit une série de reportages réunis dans ce livre qu’il dédie au Gardien du phare du Planier.
« En résumé, une porte monumentale, où passeraient, flux et reflux, les cent visages du vaste monde. Passer ! Le mot convient à la ville. On va à Lyon, à Nice. On « passe » à Marseille.
Il y a les sédentaires de Marseille et puis le flot des nomades qui va de la gare au port ou du port à la gare. Si vous ne faites partie ni des sédentaires ni du flot vous n’êtes plus rien. Vous êtes le badaud. Vous gênez la circulation. »
Pour Albert Londres,Marseille est avant tout un port où entrent et sortent personnes et marchandises et ceci depuis 2500 ans avec l’arrivée des Phocéens. Entrée des marchandises coloniales, sortie des colons qui partent peupler l’Algérie ou l’Indochine. Et inversement arrivée des marins en transit vers les ports du monde entier et qui se rencontrent autour d’un verre avant de repartir. Arrivée aussi des émigrants s’installent . En 1926 Marseille est italienne, grecque et arménienne…
« Marseille était bien dans un département qui s’appelait les Bouches-du-Rhône. J’ai fermé la géographie. Le lendemain, je l’ouvris de nouveau. Marseille était dans les Bouches-du-Rhône, cependant les Bouches-du-Rhône devaient être en Italie. Eh bien ! Non, ce département était en France. Je repris courage et, comme nous étions au matin de cette journée d’expérience, je sonnai la femme de chambre. Elle arriva. C’était une Italienne. « Alors,
lui dis-je envoyez-moi le valet. » C’était un Italien. « Faites monter le sommelier ! » Il était italien ! J’empoignai mon chapeau, ma canne, mon pardessus. Je sortis de ma chambre. J’appelai l’ascenseur. Le garçon de l’ascenseur lisait Il secolo ! Je brûlai le hall jusqu’à la porte. Là, je m’adressai au portier et j’eus comme un espoir : le portier était anglais… »
Même si le propos est connu, le livre est original par le ton amusant. Lecture jubilatoire.
J’aurais pu choisir pour illustrer ce billet des conversations de bistro, rencontres de commerçants qui se donnent rendez-vous après avoir fait le tour de la planète. Chaque chapitre, chaque annecdote
Ce volume termine le cycle des Rougon-Macquart à Plassans là il avait commencé 25 ans plus tôt.
Pascal, le troisième fils de Félicité,le seul qui ne soit pas monté à Paris faire fortune comme Eugène, le ministre de Napoléon III ou Aristide – Saccard, l’homme d’affaires. Médecin des pauvres mais dans le livre, il a presque cessé d’exercer et se consacre à la recherche médicale. Il cherche à fabriquer avec des cervelles de mouton, une sorte de panacée qu’il injecte à ses patients pour leur donner des forces. Son remède est-il au point? La visite du médecin et ses injections semble avoir des effets miraculeux. Effet placebo? Il s’avère qu’il injecte de l’eau pure.
« Ce qui avait amené le docteur Pascal à s’occuper spécialement des lois de l’hérédité, c’était, au début, des travaux sur la gestation. […]mettant surtout en observation sa propre famille, qui était devenue son principal champ d’expérience, »
« Il avait, pour sa famille, d’abord dressé un arbre logiquement déduit, où les parts d’influence, de génération en génération, se distribuaient moitié par moitié, la part du père et la part de la mère. »
Son second axe de recherche s’oriente sur l’hérédité et comme Zola il dresse un arbre généalogique de la famille élargie des Rougon-Macquart assorti de fiches décrivant les caractères de chacun et la transmission possible des tares de la famille : alcoolisme, folie, ou débilité. Les Rougon-Macquart semblent assez nombreux pour fournir un bon échantillonnage.
Le docteur Pascal a recueilli Clotilde , sa nièce, la fille d’Aristide Saccardqui l’appelle « Maître » et qui l’adore. Evidemment, ils vont tomber amoureux. Mais comme cette liaison presque incestueuse pourrait choquer, Pascal attendra que Clotilde ait 25 ans. Il est rempli de scrupules et renoncera à elle quand il sera ruiné pour qu’elle mène une vie plus confortable auprès de son frère Maxime dont on a fait connaissance dans La Curée. Les histoires d’amour chastes et pures ne sont pas ce que j’ai préféré dans la Série des Rougon-Macquart. Il me semble que Zola excelle dans la méchanceté et le vice et qu’il s’affadit dans la vertu.
Nous retrouvons de nombreux protagonistes de la saga : l’ancêtre, Adelaïde, centenaire vit toujours dans l’asile des Tulettes. Mutique et desséchée, la folie l’a quittée. Antoine, l’alcoolique s’est aussi assagi, il a sa ferme des Tulettes et coule une vieillesse sereine. Félicité, toujours aussi manipulatrice, détient le pouvoir sur la famille. Elle craint que les recherches généalogiques de Pascal ne s’ébruitent et qu’elles ne jettent l’opprobre sur la famille. Pascal, le scientifique libre-penseur est en contradiction avec les convictions catholiques qu’elle professe.
« Veux-tu que je te dise mon Credo, à moi, puisque tu m’accuses de ne pas vouloir du tien… Je crois que l’avenir de l’humanité est dans le progrès de la raison par la science. Je crois que la poursuite de la vérité par la science est l’idéal divin que l’homme doit se proposer. Je crois que tout est illusion et vanité, en dehors du trésor des vérités lentement acquises et qui ne se perdront jamais plus. Je crois que la somme de ces vérités, augmentées toujours, finira par donner à l’homme un pouvoir incalculable, et la sérénité, sinon le bonheur… Oui, je crois au triomphe final de la vie. »
Cependant le personnage de savant positiviste, libre-penseur, apparait un peu faible. Dans Germinal, La Terre, la Bête Humaine, L’Argent, et d’autres… Zola livre une analyse fouillée du milieu dans lequel évoluent les personnages, tandis que Pascal dans son laboratoire est plutôt désincarné. Zola avait il eu connaissances des recherches de Mendel à Brno? Des recherches de Pasteur? La première vaccination contre la rage a eu lieu en 1885, le Docteur Pascal a été publié en 1893
D’autres personnages sont évoqués comme l’abbé Mouret et leParadou. Maxime avec sa jeunesse dissolue est presque un vieillard alors qu’il n’a pas la quarantaine. Son fils illégitime, Charles beau comme un ange, est complètement dégénéré. On le confie à la garde d’Antoine et même d’Adelaïde….
Quatre générations de Rougon-Macquart peuplent ce dernier livre, consignés dans l‘arbre généalogique qui est la pièce-maîtresse de l’intrigue. Si l’analyse politique et sociale du Second Empire s’achève avec la Débâcle qui aurait pu être la conclusion de l’histoire. Ledocteur Pascalen est plutôt un épilogue ou un post-scriptum.
Partons pour Bombay,Agra ou Udaipurpour quelques heures très colorées et festives après une semaine maussade. Le voyage au Quai Branly est un dépaysement assuré. Attention Exposition très copieuse! Prévoir de rester un bon moment si vous voulez visionner les nombreuses séquences proposées. Et regarder les films dans une exposition pour le cinéma est un minimum!
Le cinéma est arrivé à la veille du XXème siècle en Inde, en 1898, création de la première société cinématographique indienne et en 1907 s’ouvre à Calcutta la première salle Chaplin Cinéma. Si certains films occidentaux s’adressaient à une élite britannique les images animées vont servir aussi à l’émancipation nationale en exploitant la mythologie traditionnelle, « faisant sortir les dieux des temples ».
Peinture pour conteurs
Les images animées n’arrivent pas en terrain vierge : Les poètes-chanteurs et les conteurs utilisent de grandes peintures qui se déroulent pour raconter les légendes. Ces panneaux racontent parfois des évènements très récents comme le Tsunami de 2006, ou une histoire située dans le métro.
Fresque dans un temple représentant des divinités
Avant le cinéma circulaient aussi des lanternes magiques: l’exposition présente de très jolies aquarelles destinées à y être visionnées. Le Théâtre d’ombre utilisait des figures géantes. Un Bioscope figure aussi dans l’exposition. Le cinéma du début utilise des constructions identiques . La Naissance de Krishna (1919) montre Krishna enfant facétieux avec le serpent Kaliya.
« l’amour est le roi des sentiments » proclame-t-on en s’inspirant des légendes de Krishna, le séducteur, et de son amante Radha. les fantastiques épopées du Mahabharata et du Ramayana sont mises en scène.
Un film en Noir et blanc montre les comment étaient projetés les films dans le cinéma itinérant sous des tentes dans des fêtes foraines ou à la campagne.
Portrait d’un maharadjah
De la miniature à la photographie : toute une iconographie montre les Moghols, le Taj Mahal et les merveilleux palais de Jaipur ou d’Udaipur donnent un cadre magnifique pour une exploitation cinématographique.
L’âge d’or du cinéma hindi (1940-1960) exploite cette veine avec des comédies dansantes et chantantes, des costumes somptueux de Devdas ou Jodhaa Akbar qui utilisent aussi bien les danses traditionnelles codifiées depuis le Vème siècle que les mises en scène de comédies musicales. l’exposition montre des séquences éblouissantes, l’une d’elle montre une danse en kaléidoscope.
Certains films ressemblent aux films de genre occidentaux, l’un d’eux Cholay utilise tous les codes du western, avec chevaux, flingues et harmonicas.
Bollywood Superstar érige aux acteurs-stars un véritable piédestal de demi-dieux.
Il ne faut pas négliger non plus le cinéma de Satyajit Ray que j’admire infiniment. j’ai eu grand plaisir à retrouver quelques scènes du Salon de Musique
Je suis sortie un peu abrutie de bruits et de couleurs, mais parfaitement dépaysée!
Le dit de Genji est unpoème écrit au 11ème siècle par la poétesse Murasaki Shikiburoman se déployant en 54 livres racontant les intrigues amoureuses du prince Genji et de son fils illégitime. Plusieurs centaines de personnages interviennent dans le poème. Chacun des livres a un titre très poétique évoquant souvent une plante: Clos de Pawlonias, Belle-du-Soir, L’Œillet, le Prunierou un épisode Le Banquet sous les fleurs, la Barrière,Feu de brasier...La mue de la Cigale, Les Papillons, Les Lucioles…
paravent
Ce poème a été l’inspiration de toute une iconographie, illustrations du texte, estampes, motifs décorant des objets précieux comme ces boites à secrets
Boite à secrets laquée
écritoires, même palanquins …
L’exposition présente des rouleaux calligraphiés du poèmes avec les illustrations à différentes époques
Illustration du manuscrit à la feuille d’or
D’autres illustrations plus tardives sont des gravures d’une finesse incroyable.
Genji illustration : gravures
Des estampes plus colorées sont, pour le néophyte, incompréhensibles parce que le titre du tableau correspond au titre du poème, parfois un clin d’oeil, un détail
Le spécialiste verrait les techniques évoluer, pourrait analyser les différentes scènes de cour. Je me suis contentée d’être émerveillée par la finesse du tracé, la variété des thèmes, les nuances de couleurs, le raffinement.
On entre dans un manga, les vignettes sont peintes sur le sol et les murs, un dessin animé raconte un épisode du Dit du Genji version-manga.
Rouleau tissé par Itaro Yamagushi épisode de la barrière
Puis, brusquement nous changeons d’univers, entrons dans les filatures de soie sans transition. Un film présente le Maître Tisseur Itaro Yamagushi (1901-2007) qui a consacré 25 ans de sa vie à tisser 4 rouleaux de soie sur plus de 30 m de long illustrant le Dit de Genji d’après des rouleaux peints de l’époque de Heian époque où a été écrit le poème par des moyens modernes (machine Jacquard, analyse numérique) . Ces rouleaux ont été offerts au Musée Guimet et présentés dans la suite de l’exposition.
Rouleau tissé par Itaro yamagushi
la fin de l’exposition est étonnante, on initie le visiteur à une visite olfactive : des perles de parfums sous une cloche distillent les senteurs des différentes saisons.
Arrivé à Paris en 1906, Amedeo Modigliani rencontre Paul Guillaumeen 1914 par l’intermédiaire de Max Jacob. la première salle est consacrée au marchand avec Trois grands portraits de Paul Guillaume ornent els cimaises. Il faut dire que Paul Guillaume est chez lui à l’Orangerie. Sa collection est voisine des salles d’expositions temporaires.
Tête en marbre de Carrare
Modigliani peintre renommé était aussi sculpteur.(1911 à 1913) Comme Picasso, Apollinaire Picasso…, la découverte de la sculpture africaine et des masques exerce une fascination sur les plasticiens. La stylisation des visages rappelle les masques . Face aux têtes sculptées et aux masques africains on a accroché une série de portraits peints en 1915 : l’Enfant Gras, Lela de Valence (presque cubique) La Femme au ruban de velours
la Femme au ruban de velours
La troisième salle : Milieu Parisien et affinités artistiques et littéraires
la Belle irlandaise
on trouve les portraits de Max Jacob, de Kisling, des portraits de femmes comme la Belle irlandaise mais aussi ceux d’inconnus plus modestes comme l’épicière, le jeune apprenti, une petite fille.
le jeune apprenti
Sur les murs de la dernière salle, on projette le décor des appartements de Paul Guillaume.
Le parcours se termine ainsi, un peu en queue de poisson. J’en aimerais encore! C’est facile parce que la Collection Paul Guillaumeest à l’Orangerie. Je peux donc contempler les Derain, Douanier Rousseau, Picasso,Utrillo…. qui comblent mon envie de peinture.
Traversée du Cotentin, du Sud-Ouest au Nord-Est par Coutances et Valognes (environ 110 km aller)
Jusqu’à Coutances, la route est une 2×2 voies très roulante dans une campagne boisée très verte. Les villages aux sévères maisons de pierre présente un homogénéité architecturale étonnante. Peu de constructions contemporaines défigurent l’ensemble. Seule concession au XXIème siècle : les ronds-points.
Cathédrale de Coutances : transept
La Cathédrale de Coutances se voit de loin, perchée sur sa colline. Y accéder en voiture est un peu compliqué. Il faut tourner autour de la vieille ville avant d’arriver sur la grande place située entre la Mairie et le parvis de la Cathédrale qui est aussi la Place du Marché. La Cathédrale est impressionnante. Elle peut se visiter guidée ou individuellement avec un audioguide (après 10h du matin). Je me contente d’une courte visite dans la haute nef très lumineuse, prodige du gothique en Normandie. Après avoir admiré piliers et arcades d’une hauteur vertigineuse et d’une grande finesse, je découvre les vitraux anciens très colorés.
Coutances vitrail
Selon le Guide Vert, Geoffroy de Montbray acheva la nef en 1056 grâce à la générosité des fils de Tancrède de Hauteville, les conquérants de la Sicile et des Pouilles. Non loin d’ici : le Château de Hauteville-la Guichard loge le musée Tancrède. Ce nom de La Guichard me rappelle le petit port grec de Fiscardo à Céphalonie qui doit son nom justement à un des fils de Tancrède né à La Guichard.
Le ciel est barré de gris puis la route de Valognes entre en plein brouillard. Le Château de Gratot n’est pas loin mais invisible de la route. L’Abbaye de Lessay, en bordure de route, mérite la visite mais nous n’avons pas le temps. Nous traversons Valognes : l’hôpital occupe un véritable château. Les hôtels qui bordent la rue principale sont construits avec un soin particulier et de belles pierres de taille claires qui contrastent avec le style des maisons de la Manche que nous avons vu, petits moellons de schiste gris rosé. La ville est très fleurie, les rondpoints débordent de dahlias, géraniums et œillets d’Inde.
Saint Vaast-la-Hougue
port de Saint Vaast et île TAtihou
A la sortie de Valognes, il reste encore 7 km pour arriver à la côte à Quettehou qui touche Saint Vaast-la-Hougue que nous découvrons sous un ciel gris et bas qui nous étonne en ce mois d’Août de canicule sur le reste de la France. Le guide Vert conseille d’abord la visite du port. Déception, la plaisance a chassé les bateaux de pêche : une forêt de mâts qui se balancent. Nous continuons la route et arrivons à l’abri de remblais herbus bien verts, protection contre les vagues submersives, mais pas de vue ! Demi-tour. A l’autre extrémité du port, derrière un petit chantier naval où sont réparés de beaux bateaux de bois. Derrière, la Chapelle des Marins, vestige de l’église du Xième siècle : portail roman et des modillons sous la corniche. A l’intérieur les murs sont couverts de plaques gravées aux noms des marins morts en mer. A côté une plateforme surélevée permet de découvrir la jetée conduisant au phare à l’entrée du port et plus loin l’Île Tatihou qu’on pourrait rejoindre à pied à marée basse. Comme la mer est haute, une curieuse embarcation amphibie, bateau à roue, bleue et blanche fait la navette pour emporter les touristes.
Symétrique au fort de l’Île Tatihou, le fort de la Hougue est construit par Vauban sur la presqu’île de la Hougue au bout de la Grande Plage. Construites après la bataille de la Hougue (1692 défaite de Tourville.) en 1695.
Saint Vaast la Hougue
Nous assistons à un curieux ballet à la sortie du port, course entre les gros bateaux de pêche lourds et colorés et une flottille de petits bateaux blancs à moteur qui suivent les grands puis les dépassent. Les petits partent-ils à la pêche ou sont-ils des plaisanciers suiveurs ? Ces embarcations ont attendu la marée et sortent tous en même temps. Le long de la jetée un gros bateau a le pont couvert de caisse plastiques contenant des bulots. Je surprends une conversation ; le bulot n’aime pas l’eau chaude, le réchauffement de l’océan leur sera-t-il fatal ? Chez les poissonniers les prix des mollusques ont grimpé en flèche, maintenant le bulot est devenu un produit de luxe.
Saint Vaast la Hougue : fort de la Hougue
Parcourant la digue au-dessus de la Grande Plage qu’on ne voit pas à marée haute j’arrive à la Hougue (1.5 km) . De l’autre côté de la digue, il y a de l’eau calme comme celle d’un lac et plein d’oiseaux. La visite du Fort de la Hougue est fléchée. Fermée le matin, visite possible l’après-midi. Je me contente de faire le tour des remparts sur un bon chemin à l’abri d’épineux, ronces et prunelliers qui forment un tunnel. Ce sentier est d’abord très confortable et je ne comprends pas les avertissements l’interdisant aux poussettes. Je le comprendrai quand le cheminement sera au sommet d’une muraille large de 50 cm sans aucun garde-fou se prolonge au-dessus de l’eau ; la dame devant moi est bloquée et a le vertige. La balade sur l’eau est facile mais impressionnante. Heureusement tout le monde le suit tranquillement amis que se passerait-il si un touriste indiscipliné arrivait à notre rencontre : un peu étroit pour se croiser.
Etroit passage entre deux eaux
Pour le pique-nique nous trouvons un emplacement « avec vue » après Réville sur la route de Barfleur en suivant la côte au-dessus de la petite anse de Landemer. Les maisons de pierre sont fleuries et pittoresques. Des marches descendent à l’anse. Quelques algues brunes n’empêchent pas un homme de nager. Après la salade de pommes-de-terre/anchois, j’hésite à me baigner. Le ciel s’est dégagé, je me laisse tenter et suis bien récompensée. Dans la crique, l’eau est lisse, même pas une ride. Un peu fraîche, mais nager réchauffe. Un vrai bonheur.
Barfleur
Barfleur église saint Nicolas
Barfleur est un tout petit port de pêche et pratiquement pas de plaisanciers. Curieuse, je regarde sur les ponts les chargements de bateaux : l’un d’eux croule sous les caisses d’araignées ; certaines sont énormes.
L’église Saint Nicolas (17ème siècle) semble fortifiée avec sa tour carrée trapue ; pas vraiment un clocher. Si on en fait le tour on découvre la mer. La rue principale est bordée de maisons de pierre, fleuries décorées par un céramiste qui a émaillé les plaques des rues et les numéros des maisons, fabriqué d’amusants oiseaux vernissés posés sur les toits. La promenade devient un jeu à la recherche de ces éléments du décor. Heureusement les boutiques de souvenirs ont oublié de s’installer et le village reste authentique.
A l’horizon on devine le très mince et très haut phare de Gatteville : 12 étages, 365 marches, un défi pour les touristes. Il marque la Pointe de Barfleur. Nous voici arrivées à la Pointe Nord du Cotentin.
La côte Nord du Val de Saire qui arrive à Cherbourg est recommandée par le Guide Vert. L’heure tourne et il nous faut penser au retour. Je sélectionne le minuscule Port Pignot et le Cap Levi et son phare qui ne sont distants que de 25 minutes à pied sur le sentier côtier (très fréquenté).
« Ce n’est pas un affrontement entre flics et grévistes qui dégénère, c’est quelque chose qui remonte des tréfonds de notre histoire. Les gens sur la place de la Victoire ont complètement oublié les demandes d’augmentation. Ils se battent maintenant contre l’injustice, contre ce qu’ont subi leurs parents, leurs grands-parents et toutes les générations avant. Les policiers en face, eux, tout ce qu’ils voient, ce sont des Noirs qu’il faut remettre à leur
place ! »
[…]
Le 27 mai, c’est la date anniversaire de l’abolition de l’esclavage en 1848,
Qui connaît le massacre du 26 au 28 mai 1967 sur la Place de la Victoire à Pointe-à-Pitre?
Au cours de notre visite en touktouk de Pointe-à-Pitre, Baptiste, notre guide a immobilisé le touktouk pour nous montrer la fresque et nous conter cet épisode tragique de l’histoire de la Guadeloupe.
Le livre de Cantaloube tente de nous éclairer sur cet épisode oublié de l’histoire récente. Oublié ou occulté? Le décompte des victimes n’a même pas été établi, 8 morts, officiellement, une centaine, avance ChristianeTaubira, peut-être davantage. Sans compter les arrestations, et l’emprisonnement en Métropole de syndicalistes et militants et même de personnes n’ayant pas pris part aux manifestations.
Ce n’est pas un livre d’histoire, mais une fiction. l’auteur est toutefois très bien documenté et livre ses sources.
Trois personnages principaux interviennent : un journaliste ancien flic, un barbouze émargeant aussi bien à la CIA que dans les officines parisiennes d’ultra droite, un ancien truand corse, marseillais, spécialiste des convois de drogue, reconverti skipper transatlantique pour les yachts de luxe. Tous trois connaissent les coups tordus, le maniement des armes, savent donner des coups (et les encaisser). Nous allons suivre les aventures de ces tristes sires en Guadeloupe d’abord, puis à Paris avec combats de rue et barricades de Mai 68. Une France qui s’ennuie comme on l’a dit à la télé? Peut être que la Guadeloupe n’est pas tout à fait la France? En tout cas l’Etat de Droit n’y règne pas vraiment.
Loi du genre, le roman sera bien arrosé de rhum et d’hémoglobine. Ce n’est pas vraiment ma tasse de thé. Je me serais passée des vengeances personnelles. Mais l’aspect trouble de cette période, les personnages comme Foccart, les dessous pas très propres de la France sous De Gaulle sont très bien évoqués.
120 pages, une aimable promenade à travers les livres et les films de Duras sur les trace de la très élégante dame en fourreau noir ou en robe rouge qui a pour moi le visage de Delphine Seyrig…De Calcutta à Lahore, de Savannakhet à Venise, bicyclette appuyée au grillage du tennis vide, salons brillants avec la musique de Carlos d’Alessio. Je suis toujours hantée par les films vus et revus, India Song,Son nom de Venise dans Calcutta déserte…
Il vaut mieux bien connaître l’œuvre de Duras pour ne pas s’ennuyer dans toutes les répétitions et les nuances. Heureusement l’enquête est bien menée et le livre est court. En tout cas, il m’a donné envie de revenir à l’original.
La première partie, les pas d‘Anne-Marie Stretteret Ses Visages m’ont enchantée. La seconde Eurydice : Aimer après Auschwitz,est moins légère. Lourde de significations, les sens cachés m’avaient complètement échappé quand j’ai découvert autrefois les textes. Les associations « lèpre-Juifs » m’ont mise mal à l’aise. Les allusions à la colonisation, surtout dans le Barrage contre le Pacifique m’avaient paru évidentes. Encore une fois la lecture de l’essai de Sylvie Thorel éveille une nouvelle curiosité et un besoin de retour au texte.
Si vous n’avez jamais lu Duras, ce livre n’est pas pour vous, mais si vous êtes fan, c’est une belle occasion d’approfondir et une lecture intéressante.
Le kimono est un des symboles de la culture japonaise.
Pendant l’ère Edo (1603-1868) , le kimono est associé au « monde flottant » avec divertissement et érotisme ; le kimono est un moyen d’afficher son statut social.
« monde flottant » divertissement sur l’eau
Les kimonos atteignent un tel degré de sophistication que des des lois somptuaires ont été édictées pour freiner les surenchères. Broderies, fils d’or, paysages illustrant des poèmes connus comme le « Temple d’Ishiyima »
Au temple d’Ishiyama La lune éclairant Le petit lac de Grèbe est aussi merveilleuse Qu’aux baies de Suma et Akashi
Les broderies ou les teintures sont variées. il existe des kimonos masculins et féminins, des kimonos d’été légers et des sur-kimonos.
Le Japon est fermé-théoriquement – au commerce, les échanges uniquement par l’intermédiaire des Néerlandais, pourtant certains tissus ont parcouru une longue distance de Coromandel (Indes), par la Thaïlande et même parfois d’Angleterre. Les kimonos sont présentés avec un luxe d’accessoires en laque ou écaille ou métaux travaillés : peignes, boites pour maquillage, peignes, aiguilles à chignon. Des estampes illustrent la toilette
une élégante à sa toilette
1859 : ouverture du Japon au commerce extérieur avec l’ère Meiji les hommes adoptent le costume occidental et le kimono devient un apanage des femmes gardiennes de la tradition. En même temps, le kimono devient à la mode en Europe et aux Amériques. Victoria et Albert firent l’acquisition d’un kimono en 1891, représentation de Madame Butterfly (1904) et déclinaison du kimono en toutes sortes de modèles pour l’exportation : robe de chambre pour l’Ecosse (bien chaude) robe imitant un kimono
Robe ou kimono?
Ces kimonos sont présentés avec un luxe d’explications techniques : matières, teintures, broderies (teinture à la pâte de riz, par ligature…) .
Surkimono rouge de la mariée brodé de grues
La dernière partie de l’exposition est résolument moderne. On y découvre l’usage actuel du kimono : essentiellement rituel : mariages, ou présentation d’enfants au temple shinto
kimonos d’enfant
A côté des kimonos dédiés à la tradition et aux cérémonies, toute une section de l’exposition montre l’inspiration très moderne dans le monde du spectacle et de la haute couture. Des stars comme David Bowie, Björk, Freddie Mercury ont porté des costumes de scène très japonisants. Sans parler de Starwars
le kimono au cinéma : Starwars et Kurosawa
Enfin nous assistons à un défilé Haute Couture avec Galliano (entre autres) et des créations modernisant le kimono pour en faire un article ultra-moderne comme un kimono « camouflage » ou l’obi est remplacé par une ceinture de cuir, ou une version costume et toutes sortes de variations
exposition temporaire : Musée Cernuschi jusqu’au 19 février
J’avais été éblouie par l’exposition de peinture ancienne peindre hors du Monde. L’affiche dans les couloirs du métro me faisait de l’œil.
L’exposition se déroule dans 6 salles :
Ecriture ancienne et peinture moderne au début du XXème siècle: sans surprise des calligraphies, des paysages, des motifs végétaux ou animaux
.
pêcher
moderniser la peinture entre Chine et Japon
j’ai adoré le gibbon, dommage que ma photo soit ratée!
les artistes chinois sont allés apprendre de nouvelles techniques au Japon. Ils ont aussi utilisé la photographie pour des cadrages spectaculaire comme la falaise rouge
Détail de La falaise rouge Zhang Daqian
3. Un exil intérieur : à la découverte des peuples de l’Ouest
le Japon a occupé une bonne partie de la Chine, dans les années 30-40, certains artistes se sont repliés à l’ouest. La route du thé : sur un rouleau horizontal, en plusieurs tableau montre le thé chargé à dos d’homme, puis dans des caravanes de chameaux est m’oeuvre que j’ai préférée
la route du théla route du thé
4. peindre le nu à l’encre vers un art universel
Des Chinois allèrent à Montparnasse s’initier à La Grande Chaumière à la peinture occidentale et enrichirent la peinture chinoise de la peinture du nu qui n’était pas un thème traditionnel
nu
5. peinture rouge dessins et encres révolutionnaires
Sans trop de surprise, ces œuvres s’apparentent au peintures soviétiques, ici à la gloire du Grand Timonier
Pluie de printemps
6. entre deux mondes dialogue avec l’abstraction
Zao Wou ki
On retrouve Zao Wou Kisans surprise . Je découvre un autre plasticien qu’on voit peindre un seau à la main, faisant des grandes dégoulinades, étalant l’encre à pleines mains : Walasse Ting dont j’ai retenu ce corbeau
corbeau Walasse Ting
7. Couper le fil du cerf-volant?
la dernière section pose la question de la transmission de la tradition. Les Chinois peuvent créer de la peinture résolument contemporaine ou poursuivre la tradition;