Sur le Ierapetra nous retrouvons les mêmes marins. Nous mettons les valises à la même place . Nous avons nos habitudes ! La traversée n’est pas longue : 3h.
La première heure se passe à regarder s’éloigner Samos. Le bateau passe entre des îles que je ne sais nommer qui se profilent, mauves sur la mer bleu foncé. Sur tribord, une côte basse et aride, des éoliennes, des villages tirés au cordeau. Est-ce Chios ? Bien plat bien désert. Nous fonçons droit sur une ville au pied de montagnes bien découpées. La Turquie ? Nous avons tout faux : les villages modernes formant des quadrilatères sont turcs. La haute montagne est à Chios.
Thimiana, Fannyrooms
La maison est magnifique, en belle pierre de taille un peu bosselée de grès rose de plusieurs tons. La cour est pavée, rose et rouge, en harmonie avec le grès. Des arbres variés : albizzia rose en fleur, un cyprès, un haut peuplier, des massifs d’hibiscus. De nombreuses plantes en pot, des géraniums…
Les abords sont très sympathiques mais la chambre est exiguë. Fraîche, mais exiguë.
Pas de cuisine non plus. Il y a bien une cuisine extérieure sous l’escalier, mais interdit de cuisiner.
Contre mauvaise fortune, bon cœur !
L’intelligence étant la capacité de s’adapter à un nouvel environnement, on va s’adapter, je range, je finis bien par trouver une place pour chaque objet indispensable, y compris en rangeant les couverts et le sucre dans le frigo. La seule épicerie ouverte lee dimanche à Thimiana nous fournira l’eau en bouteille : l’eau est saumâtre à Chios, des yaourts du petit déjeuner, les croissants mais pas les oranges.
Au restaurant, pour 15€, j’achète des souvlakis de porc et de la seiche dans une sauce délicieuse servie avec du riz dans un paquet. A retenir « paqueto » !
Nous terminons la soirée autour de la table dans le jardin. Il fait un temps délicieux, vent frais et douceur d’été.
Journée d’adaptation : nous allons à Chios à l’Office de tourisme et sur le port acheter notre billet de ferry pour Lesvos. Ensuite nous visiterons la ville.
La route de Thimiana à Chios passe entre les grands murs de grès du Kampos enfermant les belles propriétés et les vergers.
Chios.
D’abord se garer. Il y a une circulation infernale : un gros paquebot de croisière à quai. Les policiers municipaux détournent tout le trafic pour permettre aux passagers de descendre directement dans la file de taxis de luxe qui les attend. Nous trouvons une place de parking le long du jardin public. Nouvelle ville, nouveaux usages. Il faut acheter une carte de parking au kiosque périptère. On coche ensuite au stylo bille le mois, le quantième, le jour de la semaine et l’heure d’arrivée. C’est désuet et charmant.
L’employée de l’Office de Tourisme parle français. Elle nous donne des prospectus en anglais et en allemand (on renonce à ceux en turc) mais ne nous aide guère. Seul renseignement : il y aura vendredi soir une fête dans un village. Pour acheter les billet sur le Samothraki qui part dimanche à 13h, il faut aller à l’Agence Kanaris (si on avait voulu reprendre le Ierapetra on serait arrivées à 22h à Mytilène, cela aurait été dans une autre agence).
Mastic
L’agence Kanaris se trouve à côté de la boutique de Mastic. Le mastic est la spécialité de Chios. Je connais depuis longtemps le lentisque (Elat mastic) comme arbuste de la garrigue méditerranéenne. J’ignorais les propriétés de sa résine.
Bizarrement, cette résine ne cristallise naturellement qu’à Chios et nulle part ailleurs. Cette ressource originale est utilisée pour différents usages : pour le raki, la confiserie, la parfumerie. Du temps des Ottoman elle a conféré à l’île de Chios des privilèges. Actuellement les produits dérivés sont nombreux, entre autres une boisson gazeuse, toutes sortes de produits de beauté. Nous achetons du dentifrice au mastic qui a très bon goût (les romaines utilisaient des bâtonnets dentaires au mastic) (6€) et du lait hydratant au mastic – pépins de raisin- huile d’olive et thé vert (17,30€) Ce n’est pas un caprice. Sur le bateau, nous avons constaté que bras et jambes se desquament et que nous avons des écailles comme un vieux lézard en train de muer.
Citadelle
La citadelle est toute proche. On entre dans les murailles épaisses par une arche – presque un tunnel – qui nous conduit à l’ancien donjon signalé par une plaque qui raconte qu’en 1822, 74 citoyens grecs y furent emprisonnés et exécutés.
A côté, le Palaki – palais Giustiani- la famille génoise qui a gouverné l’île pendant des générations. Le « Petit Palais » se visite, c’est un musée byzantin, fermé le lundi.
Nous suivons le guide vert. Nous passons devant une petite galerie d’Antiquité qui vend des icônes (pas terribles), des vieux pistolets et des armures miniatures. Sur la petite place se trouve un minuscule cimetière turc. Les pierres tombales sont verticales, plantées dru les unes à côté des autres. Au fond le sarcophage du chef de guerre turc tué par l’amiral Kanaris.
Les ruelles de la citadelle sont étroites et tortueuses. Les maisons à encorbellement, un peu comme les maisons ottomanes de Rosette, ont des avancées en bois (mais pas de moucharabieh) ici : des volets. Après les massacres de 1922, seuls les turcs et les juifs avaient le droit d’habiter dans la place forte. Maintenant, la ville close a u n charmant aspect d’abandon avec beaucoup de jardins et surtout des plantes en pot. Bien qu’on soit en pleine ville dans un endroit où la construction est dense, il y a des fleurs partout : géraniums, citronniers et tant d’autres. Certaines maisons tombent en ruine, d’autres sont en restauration. Les artisans travaillent en pleine rue, les menuisiers ont tiré le bois de charpente, une grande boulangerie embaume. Nous trouvons par hasard, au fond d’une cour pavée une église et son campanile. Eglise catholique, puis mosquée – il reste une belle plaque de marbre avec des caractères arabes, maintenant attenante à une église orthodoxe plus grande. Un platane très vieux a une branche horizontale si lourde qu’on dû
l’étayer. Elle abrite un bac qui ressemble à un sarcophage et qui était la fontaine aux ablutions de la mosquée.
Nous suivons la rue Giogiou Fouriou jusqu’aux murailles. Les bains turcs sont en restaurations. Il y a quatre coupoles, une grande fermée et trois autres plus petites percées. Nous passons devant une tour ronde inaccessible. Plus loin, du côté du port, sur le bord de la mer, en traversant la terrasse fleurie d’une maison basse et en passant avec précaution sur le rebord en ciment, j’accède au chemin de ronde en haut de la muraille. La vue est saisissante : sur le port et ses grands navires, sur les moulins de la jetée du vieux port de marchandises. Et au loin sur les côtes turques. Je découvre les coupoles du hammam sans les échafaudages.
Au nord de la ville, se trouve le port de commerce. La mer est bordée d’anciens entrepôts. Les moulins à vent apportaient autrefois l’énergie destinée à cette zone industrielle.
Les moulins portent toujours les grandes perches et les gréements même si on ne les voile plus. La maçonnerie et les fenêtres sont en très bon état. Ils ont belle allure!
Un café a installé ses tables bleues juste en face. Nous commandons café et ouzo habituels et je dessine les moulins à mon aise.
Le retour est un peu plus difficile. Dans un quartier piétonnier, les rues commerçantes font penser à un bazar turc. Un policier municipal délivre la voiture en enlevant une barrière très aimablement.
Déjeuner de midi dans le jardin à l’ombre : salade grecque de ma façon et les souvlakis d’hier, froids. Sieste de 15 à 16 heures dans la pénombre de notre chambre bien fraîche.
La plage
Le propriétaire nous a recommandé la plage de Megas Limionas distante de 2km. Elle n’est pas facile à trouver. La campagne est divisée par de longs murs. Aucune route n’est droite. On aboutit à des culs de sac ou à la cour d’une maison. Première plage au bout du chemin : galets et un arbre. Devant une maison, on a pratiqué un petit port rectangulaire ou une piscine en enlevant les cailloux et en cassant les gros rochers. Ailleurs l’eau attend à peine les genoux même en s’éloignant. Il faut tenir en équilibre précaire sur les rochers glissant ou essayer de nager avec précaution pour ne pas se racler les cuisses sur les oursins. Le snorkelling est joli : poissons et coraux, rares coquillages. Je me lasse assez vite de peur de me blesser.
Un peu plus loin, la plage officielle de Megas Limionas : sable et eau plus profonde. C’est moins dangereux mais moins amusant. S’il y a du monde sur le sable sec, dans l’eau je suis seule.
Le Kampos est une des régions les plus intéressantes de l’île. Composée de grandes propriétés, selon le guide Michelin, de belles maisons « génoises » où les riches familles de Chios aiment à résider.
Dès notre arrivée, nous avions remarqué les grands murs de grès rose, les portails monumentaux et les villas carrées. C’est dans l’une d’elles que nous logeons. Notre chambre est au rez de chaussée, non pas au premier étage, étage noble. Dans notre petite pièce le plafond est en arête peut être était-ce une cave fraîche ?. Si notre logement est minuscule, la cour est très agréable, agrémentée d’un bassin – vide – dommage pour le décor, mais c’est peut être mieux pour les moustiques. Des escaliers de marbre avec des ferronneries conduisent à l’étage autour de la maison, des jardins, des orangers, un gros figuier, oliviers, amandiers, de la vigne. Maintenant que nous sommes installées, nous apprécions l’environnement paisible. Il faut vivre dehors. Les arbres et un énorme parasol donnent de l’ombre à toute heure.
Nous nous proposions justement d’explorer à pied le Kampos ce soir en regardant par les grilles et au dessus des murs. Justement, aujourd’hui lundi, une visite gratuite offerte par le Tourisme de Chios se déroule au Kampos. Inutile de s’inscrire : le rendez vous est au pont de Kabalas, sur la route principale. Endroit facile à trouver avec un parking. La promenade a lieu à la fraîche de 19 à 20H30/ Une bonne douzaine de voitures sont arrêtées là.
Essentiellement des Grecs, un couple de Français et un Jeune canadien anglophone. Le groupe suit le guide sur une chaussée dallée le long d’un cours d’eau à sec. Il n’existe pas de rivière permanente sur Chios. Ce ruisseau ne coule qu’à la saison des pluies. A la manière des oueds du déserts, ses crues sont redoutables : on a construit un deuxième trottoir en hauteur et on a érigé un mur devant la grille de la propriété pour la protéger de l’inondation. Notre guide connaît les propriétaires d’une belle villa. Il ouvre donc la grille et nous pénétrons dans un parc boisé de palmiers, de grands arbres feuillus et de massifs de fleurs. Une imposante roue à eau puisait dans la nappe phréatique et permettait autrefois d’irriguer le domaine (maintenant ce sont des pompes électriques). L’eau est stockée dan un bassin rectangulaire aux murs de pierre et aux fontaines de marbre sculpté. De la gargouille, l’eau se déverse dans une sorte d’évier en pierre pour se distribuer ensuite dans les canaux de l‘orangeraie. Le guide envoie les « non hellénophones » se promener dans les jardins. Sur la terrasse les propriétaires reçoivent des amis. C’est un peu gênant d’y porter un regard trop insistant.
Le guide explique les cultures du Kampos.
C’est la seule région irriguée de l’île où, dès le Moyen Age on pratiqua une agriculture destinée à l’exportation : le ver à soie avec la culture des mûriers, tout d’abord jusqu’au 17ème siècle, puis les agrumes introduits par les Génois : orangers puis citronniers (curieux que ce soit un apport italien puisque ce sont les Arabes qui apportèrent les agrumes en Italie et en Sicile). Les Français importèrent les mandarines de Chine (mandarine tire son nom de mandarin) au Maroc et, de là au 19ème siècle les mandarines arrivèrent à Chios. L’exportation des agrumes se faisait à l’Est jusqu’en Russie et vers l’Occident par le port de Marseille. Des liens étroits existaient entre Chios et Marseille. Est-ce pour faire plaisir aux trois français de son audience ? le guide prétend que les belles maisons sont l’imitation des maisons provençales. Nous avions plutôt reconnu le style des villas italiennes.
Les porches monumentaux ont suivi diverses influences : ottomanes, italiennes, et même Napoléon III avec des grilles en fer forgé. Pendant les explications les cloches sonnent avec insistance pour l’office en l’honneur de Santa Markiella, la Sainte patronne de l’île, dans une petite église toute proche. Actuellement et depuis le 18ème siècle on y célèbre exclusivement le culte orthodoxe. Au 116ème c’était une chapelle mixte. On y disait aussi la messe latine. Les familles génoises étaient mélangées. Pendant que nous rejoignons l’église toute la campagne profite de la messe diffusée par haut-parleur. « Kyrie Eleison » répète le chantre. Le décor dde l’église est baroque : peinture crème, dorures et stucs. L’iconostase aussi. Le chantre est debout derrière le lutrin, un bedeau promène un cierge sur un chandelier d’argent. Le pope, en chasuble blanche et or tourne autour d’un plateau sur lequel on a placé 5 pains. Il tourne et bénit le pain, le bénit et l’encense. Le bedeau tourne aussi. L’assistance n’est composée que de 5 personnes. Quand l’office est terminé une dame sort avec une corbeille et offre à tous les touristes une belle part de ce pain dense et épais qui ressemble à du gâteau. Il est légèrement parfumé à l’anis. Nous remercions pour ce cadeau inattendu et le dévorons avec appétit ; il est 8 heures, l’heure du dîner !
Chios Kampos mp8
Sur le chemin du retour nous marchons sur des branches de laurier. Toute la route menant à l’église est jonchée de rameaux. Le guide nous explique que les lauriers expliquent aux habitants qu’une célébration aura lieu dans cette église (les églises sont si nombreuses en Grèce !).
Il nous montre de grosses agrafes en fer rouillé qui retiennent les pierres ensemble. E la suite du séisme de 1881 de nombreuses maisons ont été détruites (5000 morts à Chios). Une belle maison présente des influences ottomanes : les gracieuses arcades orientales surmontées d’un premier étage moderne (reconstruit après le séisme).
Cette promenade a été très agréable. Seules nous n’aurions pu qu’imaginer ce que cachent les hauts murs et n’aurions pas pu comprendre l’agriculture du Kampos. Maintenant, je devine l’usage du beau bassin carré au gîte que j’avais pris pour une piscine sur Internet.
Après dîner, il fait une température délicieuse dans le jardin. Le patron nous rejoint et nous parle de Santa Markiella.
Une belle route traverse les collines où poussent oliviers et buissons de mastic. Notre hôte nous a expliqué qu’on blanchissait le sol sous les arbres à mastic pour que la résine ne se salisse pas au contact de la terre. Une garrigue assez diffuse s’étend sur les pentes où on voit des terrasses abandonnées.
Il faut laisser la voiture à l’entrée de Pirgi.
Les façades sont toutes décorées par une technique originale « xista » : on enduit de blanc la façade, on trace les figures que l’on souhaite voir apparaître et on gratte avec une fourchette l’enduit blanc. Les figures sortent en gris ou bleu. Les façades sont entièrement couvertes et pas seulement la façade, tous les endroits disponibles y compris dessous les balcons. Les motifs sont variés : figures géométriques, frises losanges triangles et rosaces mais aussi de gracieux bouquets de fleurs, des feuilles d’acanthe et des animaux.
Au petit matin, seules des dames en noir sont sorties. Curieuses, elles nous interrogent :
-« d’où venez vous ? »
– « Où allez vous ? »
Comme elles ne parlent que le Grec, les échanges sont limités mais toujours chaleureux.
A la fin de la messe, des gobelets remplis de fruits secs, amandes pois chiches et raisins secs avec un loukoum emballé. Comme nous passons on nous en offre un chacune comme hier avec le pain. Tout le monde nous souhaite une bonne fête pour la Sainte Markiella.
La vieille église des apôtres (1200) est malheureusement fermée. Nous nous contentons d’en faire le tour. Les coupoles de brique s’empilent et feront de belles photos. La décoration est toute simple mais originale : on a encastré dans le mur des assiettes vernissées vertes ainsi que des petites formes comme des croix ou des fleurs vernissées qui soulignent les arches et les arrondis.
La place du village est pleine de tables et de chaises. A 9h du matin je m’amuse à compter : une seule femme pour 22 hommes au café. L’un des kafénéion est décoré sur deux niveaux. Des tables sont installées dans la galerie.
Dessiner au café est un grand plaisir. D’abord, je suis bien installée et c’est bien plus facile. Ensuite, le café est vivant. J’écoute distraitement les conversations. Enfin, j’aime le café des cafés. Comme il fait encore frais, je commande un café turc. A notre dernier passage on parlait de café byzantin. Cette expression pédante est passée de mode on est revenu au « café grec ». Le « café byzantin » avait bien fait rire Nabil, notre chauffeur copte.
Nous traversons les villages de la Région du mastic. Olympi est un village fortifié très différent de Pirgi. Les maisons son en pierre grise, cubiques, ramassées les unes contre les autres autour du donjon, enfermées dans les murailles. Les ruelles étroites passent sous des arches. Tout était conçu pour la défense du village en cas d’attaque des pirates. Aujourd’hui c’est un village très tranquille. Une dame armée d’une tapette à mouches me conseille :
– « allez à la grotte ou à la plage. Aujourd’hui tout est fermé. C’est la fête de Sainte Markiella. Ce n’est pas un bon jour pour visiter le village. »
Seul, le restaurant installé dans le donjon, a sorti ses tables et ses chaises.
Une promenade de 2 km relie Olympi à Mesta. Il faut monter à saint Antoine en haut de la colline pour redescendre tout droit sur Mesta. La randonnée me tente beaucoup. Je me renseigne auprès des gens qui me découragent. Il est onze heures et il fait déjà très chaud. Je n’insiste pas en le regrettant. 2 km ce n’est pas le diable ! Olympi semble infesté de guêpes. Partout, on a posé des pièges rudimentaires avec des bouteilles en plastique. La chasse aux guêpes semble être l’occupation favorite des gens que nous rencontrons sur le pas de leur porte. La guêpe se dit « mamounia » ce qui nous amuse beaucoup.
Contrairement à Olimpi, il règne une agitation touristique intense. Des cars débarquent leur cargaison et les places sont chères au parking. Dès que nous entrons dans la ville nous trouvons des femmes qui vendent des tapis. La place, comme à Pirgi est encombrée de tables ; Mais c’est un café de luxe (avec les prix de luxe). Pas de vieux parlant politique en mobilisant 3 chaises en paille chacun. Ici, des fauteuils metteur en scène en toile claire. Si au moins j’avais un sujet de dessin ! Nous renonçons à l’apéro en terrasse et je vais me perdre dans les ruelles de la ville médiévale. Certaines sont si étroites que deux piétons se croisent à peine.
Mesta est très fleuri et plus pittoresque qu’Olimpi mais nous sommes redevenues des touristes anonymes, personne ne nous parle. Sauf à l’église. Une femme veut savoir d’où nous venons :
– « Gallia !»
Elle me serre dans ses bras
– « Mais les français ne parlent pas anglais ! », se plaint elle ;
– « mais si, et un peu de Grec ! » – « Brava ! », nouvelle embrassade.
l’église et Christophe Colomb
Un monsieur se charge de la visite guidée de l’église. Au début il se renseigne, histoire de savoir à quelle sorte de touriste j’appartiens.
– « Avez-vous lu l’Apocalypse de saint Jean ? » – « non ! » j’avoue timidement.
Malgré mon ignorance des textes saints, il nous fait une visite complète. Regrettant qu’on ait habillé les belles colonnes de granite d’un carton pâte verni en simili-marbre. Il nous montre l’Archange Michel qui semble regarder le spectateur dans les yeux
– « comme Mona Lisa, La Joconde » !.
Ces icônes sont revêtues de 35kg d’argent massif. Plus que les icônes, c’est Christophe Colomb qui est le dada de notre guide. Colomb qui était génois comme Chios serait venu à Chios. Je ne saisis pas bien le rapport entre Chios et la découverte de l’Amérique. Le Monsieur brandit un opuscule en Grec, on peut se procurer la traduction en anglais au village.
Après Mesta : la plage !
Mesta a un port quelques kilomètres plus loin. Port sans bateaux mais avec deux grosses grues et deux tavernes sur leurs estrades, chaises bleues tables bleues, nappes colorées. Il y a même une petite plage avec trois parasols et 6 lits ainsi que des tamaris plus efficaces que les parasols et un banc. Notre première idée est de boire un café frappé à la taverne. Pourquoi l’apéro ? Il est largement l’heure de déjeuner. Le pique-nique est prêt avec des œufs durs et du saucisson. Cela sent drôlement bon le poisson. Je commande des calmars (8,7€). Un régal ! Ce ne sont pas des rondelles. On voit la bête avec ses tentacules. Sa chair est fondante et pas caoutchouteuse.
Trois gamins et une vieille dame se baignent dans le port. L’eau est transparente et tranquille. Je traverse la petite baie avec circonspection.
Chios plage de Didyma
plage de didyma et les tours génoises
Nous cherchons un endroit plus sauvage. De la route on découvre la toute petite plage de Didyma. La piste est facile après tout ce qu’on a enduré à Samos. Elle est déjà occupée : deux voiture et une tente. Des gens font griller des poissons sur un feu. Pas la foule ! Pas de parasol ni de lits mai 4 bancs de pierre à l’ombre des arbres. Sous l’eau, des posidonies, un relief varié quelques poissons. De quoi m’amuser avec mon masque !
Nea Moni est inscrit à l’inventaire de l’UNESCO. La très vieille église sert de modèle pour les églises byzantines de l’île. Son sol est dallé de marbres précieux, son dôme couvert de mosaïques dorées, et le narthex de fresques anciennes.
Niché au centre de gravité de l’île, dans un vallon vert, entre deux hauts massifs montagneux. Souligné par des cyprès alignés, le monastère est situé dans un site enchanteur.
Malheureusement, nous découvrons des échafaudages et de grands panneaux de toile interdisant l’entrée de l’église : fermé pour restauration ! Nous savions que le katolikon avait beaucoup souffert en 1822 de destruction par les Turcs, puis d’un incendie. En 1882, le séisme avait mis à bas la coupole.Mais il avait été relevé…
Les restaurateurs ont fait des petits tas des pièces d’un puzzle permettant de retrouver les fresques et les mosaïques. Pour l’instant c’est vraiment le chantier !
Je furette dans le monastère. Une voix chantonne ou psalmodie. Je me retourne. La plus vieille, la plus ratatinée des nonnes, vient à ma rencontre et me prend le bras. Elle me conduit à une feuille dactylographiée et m’intime l’ordre de la lire. C’est en Grec. Je n’y comprends rien. De l’autre côté de la porte, le texte en anglais a été punaisé. Je proteste que je préfère l’autre texte. Elle marmonne quelque chose sur les étrangers et retourne à ses prières.
La porte de l’église est ouverte par derrière. Je rentre et découvre les fresques du narthex, les mosaïques. Le chantier est trop neuf. J’ai encore à l’esprit les mosaïques de Dafni et celles de Hosios Loukas. Ce que je vois ici me déçoit un peu. En insistant un peu, on m’ouvre le musée (2€) .De belles icônes sont conservées ainsi que des chasubles et un très beau rideau de soie aux motifs orientaux. A Pateres
Un sentier pédestre conduit de Néa Moni à Agh. Pateres;le monastère d’hommes en haut de la montagne. 1km mais 40 minutes de montée. Aujourd’hui encore, je cale. Il est trop tard et le sentier est très escarpé. Il faut vraiment partir très tôt pour randonner l’été en Grèce.
Le monastère A. Pateres est très bien situé. La vue est éblouissante. C’est le cas de le dire, la mer est un lac de métal en fusion. Les côtes turques, pourtant si proches, ont disparu dans la brume de chaleur. Le monastère, en ciment blanc n’offre aucun charme. On est en train de doubler l’édifice par une construction neuve inintéressante. Sous le porche d’entrée un vieux moine aux cheveux hirsutes nous prête des « vêtements décents ». J’ai pourtant bras et jambes couverts. Il me faut m’habiller en fille « fusta » insiste-t il !
L’église est dans une grotte. C’est la troisième église de caverne que nous visitons. Nous sommes blasées. Nous nous esquivons avant la traditionnelle pause dans le parloir où sont prêts loukoums, bonbons et eau fraîche. Nous n’avons pas envie de perdre du temps en compagnie des autres visiteurs, deux popes venus avec femmes et enfants en BMW noire, très désagréables.
Anavatos est un village fortifié juché sur une colline comme Olimpi, Pirgi ou Mesta que nous avons visités hier.
Le site d’Anavatos est impressionnant ; Le village fait vraiment corps avec le roc vraiment abrupt. Abandonné depuis plus d’un siècle, il n’a subi aucun des artefacts du 20ème siècle, ni pylônes, ni crépi, ni parking ou rajouts disgracieux.
Une équipe d’architectes, de techniciens, de maçons, électriciens, cantonniers sont au chevet du village fantôme pour lui redonner vie. Déjà, des habitants sont installés dans les maisons du bas. Un vieux monsieur vend de l’origan. Sur des tréteaux des olives, des confitures et des conserves sont proposés aux visiteurs pour des prix exorbitants. A quoi ? A qui ? sont destinées ces restaurations ?