Solibo le Magnifique – Patrick Chamoiseau

LECTURES CARAÏBES – MARTINIQUE

Solibo le Magnifique commence comme un roman policier, par le procès verbal rédigé par Evariste Pilon, officier de police. Au pied du tamarinier, au cours d’une soirée de Carnaval, est retrouvé un cadavre

«  le conteur Solibo le Magnifique mourut d’une égorgette de parole en s’écriant Patat’sa »

Sucette, le tambouié, Alcide Victor, commerçant, le surnommé Bête-Longue se disant marin-pêcheur, Doudou-Menar, vendeuse de fruits confits, Patrick Chamoiseau,  Bateau Français surnommé Congo ainsi qu’une demi-douzaine d’autres sont embarqués comme témoins de ce qui paraît aux policiers, un assassinat.

« Le mot assassiné nous précipita dans les sept espèces de la désolation : la tremblade, les genoux en faiblesse, le cœur à contretemps, les yeux en roulades, l’eau glacée qui moelle l’os vertébral, les boutons rouges sans
grattelles, les boutons blancs avec grattelles. Nous nous enfuîmes par en haut, sur les côtés et par en bas. »

Rapidement, la scène dégénère, l’action des forces de l’ordre tourne au pugilat grotesque. L’intervention des pompiers venus enlever le corps complique encore la bataille. Ce n’est plus une scène de polar mais Guignol.  La vendeuse du marché estnla plus enragée Un coup de matraque l’enverra aux urgences de l’hôpital.

« Ô amis, qui est à l’aise par-ici quand la police est là ? Qui avale son rhum sans étranglade et sans frissons ? Avec elle, arrivent aussi les chasseurs des bois d’aux jours de l’esclavage, les chiens à marronnage, la milice des alentours d’habitation, les commandeurs des champs, les gendarmes à cheval, les marins de Vichy du temps de l’Amiral, toute une Force qui inscrit dans la mémoire collective l’unique attestation de notre histoire : Po la poliiice ! »

L’interrogation des témoins est musclée. Les représentants de la loi et de l’ordre mènent l’enquête :

« Afin de coincer ce vieux nègre vicieux, il fallait le traquer au français. Le français engourdit leur tête, grippe leur vicerie, et ils dérapent comme des rhumiers sur les dalles du pavé. En seize ans de carrière, le brigadier-chef avait largement éprouvé cette technique aussi efficace que les coups de dictionnaire sur le crâne, les graines purgées entre deux chaises et les méchancetés électriques qu’aucun médecin (assermenté) ne décèle. – Bien. Maintenant, Papa, tu vas parler en français pour moi. Je dois marquer ce que tu vas me dire, nous sommes entrés dans une enquête criminelle, donc pas de charabia »

Enquête à charge. Jamais le brigadier n’imagine autre chose qu’un assassinat. Il est persuadé que la victime a été empoisonnée. Il va recourir aux pires sévices pour obtenir des aveux…Cette histoire serait tragique sans le génie comique de Chamoiseau (qui se met lui-même en scène) . Le lecteur s’amuse énormément des jeux de mots entre le créole et le français

La question n’est pas là, coupe Évariste Pilon. Il faudra faire rechercher l’état civil de cet homme. Monsieur Bête-Longue, quels sont vos âge, profession et domicile ? – Hein ? – L’inspesteur te demande depuis quel cyclone tu es né, qu’est-ce que tu fais pour le béké, et dans quel côté tu dors la nuit ? précise Bouaffesse.

 

 

Trop occupés à obtenir des aveux, les enquêteurs ne s’intéressent guère à la victime. Qui était Solibo? De quoi est-il vraiment mort?

Qu’est-ce qu’une »égorgette de paroles« ?

Saveur de la langue , entre oralité du conteur et écrit. J’ai pensé au dernier livre que je viens de terminer : Le Conteur la nuit et le panier Chamoiseau se réfère à Solibo. J’ai pensé aussi à la Traversée de la Mangrove de Maryse Condé qui est également une veillée mortuaire. 

Comment écrire la parole de Solibo ? En relisant mes premières notes du temps où je le suivais au marché, je
compris qu’écrire l’oral n’était qu’une trahison, on y perdait les intonations, les mimiques, la gestuelle du conteur,

Là où les chiens aboient par la queue – Estelle-Sarah Bulle

GUADELOUPE

Pour prolonger notre voyage en Guadeloupe, à la suite de lectures de Maryse Condé et de Simone Schwarz-Bart, écrivaines reconnues, classiques, j’ai cherché un roman plus récent. Un peu désarçonnée par le titre j’ai voulu tenter l’aventure. 

« Morne Galant somnolait, ramassé sur lui-même. Encore aujourd’hui, les Guadeloupéens disent de Morne-Galant : « Cé la chyen ka japé pa ké. » Je te le traduis puisque ton père ne t’a jamais parlé créole : « C’est là où les chiens aboient par la queue. »

Dans ce roman choral, alternent les récits de la narratrice (l’auteure?), de ses tantes Antoine et Lucinde, de son père Petit-Frère. La saga familiale commence à Morne Galant, village perdu dans la Grande-Terre, chez des planteurs de canne : Hilaire, l’ancêtre qui vivra centenaire, est une personnalité respectée dans le village il règne sur les Ezechiel, cousins proches ou éloignés. Hilaire a épousée une Blanc-Matignon, Eulalie dont la famille n’acceptera pas cette mésalliance. Leurs trois enfants, Antoine, Lucinde et Petit-Frère quitteront à l’adolescence le village pour tenter leur chance à Pointe-à-Pitre, puis dans les années 1960 partiront pour la région parisienne. Quatre personnages, trois lieux, un demi-siècle. 

« Hilaire représentait une Guadeloupe rurale frappée de disparition. Aucun de ses enfants n’appartenait au
même monde que lui. Ils étaient de l’âge de la modernité, éloignés de la canne, plongés dans l’en-ville. »

Je ne suis pas entrée tout de suite dans l’histoire qui se présente un peu comme un puzzle. Histoire et géographie se mélangent au gré des confidence des personnages. Mélange, métissage des origines.

« Je me considérais comme une femme, ça oui, et comme une Guadeloupéenne, c’est-à-dire une sang-mélangé, comme eux tous, debout sur un confetti où tout le monde venait d’ailleurs et n’avait gardé qu’un peu de sang des Caraïbes, les tout premiers habitants. Ça m’éloignait définitivement de toute idée de grandeur et de pureté. Ma fierté, c’était le chemin que je menais dans la vie et que je ne devais qu’à moi-même. L’homme m’a empoignée par le cou, alors je lui ai craché en créole : « Tu sais pas regarder, ou quoi ? »

L’auteure est née à Créteil, me voici perplexe : j’ai choisi une lecture exotique et me voilà revenue chez moi, pas très dépaysée! Les allers et retours en Guadeloupe vont satisfaire mes envies d’évasion!

Un demi-siècle en Guadeloupe et quelques décennies en Métropole. Le roman raconte avec beaucoup de vivacité l’arrivée d’une certaine modernité à Pointe-à-Pitre, l’évolution du commerce, des relations sociales, la construction d’une ville de béton, l’émergence des luttes anticoloniales et indépendantistes – les journées de mai 1967 que j’ai découvertes à Pointe-à Pitre.

les CRS tirent sur les manifestants mai 1967

L’intégration des trois Guadeloupéens en région parisienne est une facette intéressante du roman. Déception et déclassement pour les deux soeurs qui avaient acquis une certaine notoriété, une place dans la société pour la couturière qui faisait les robes des notables blanches, une boutique prospère pour Antoine, ouverture pour le frère qui découvre une vie intellectuelle parmi les étudiants. Dans les années 60 le racisme existait, certes mais c’est seulement avec la montée du chômage qu’ils l’ont ressenti.

« En métropole, nous sommes devenus noirs vers 1980, à partir du moment où avoir du boulot n’est plus allé de soi. »

Revendication identitaire?

Les Antillais et les Noirs américains partageaient une même expérience minoritaire et une part d’histoire
commune, mais la France et les États-Unis ne modelaient pas du tout les individus de la même façon. Il y avait indéniablement moins de violence à subir en France mais en revanche, les Antillais n’avaient aucun modèle auquel s’identifier. Quel héros

[…]
Faute de mieux, ils se choisissaient des modèles outre-Atlantique : aux ambiguïtés de la France, ils préféraient le rutilant rêve américain, […]Pourtant, ils sentaient bien que l’illusion était grossière : les Antilles françaises, si proches géographiquement de
l’Amérique, en étaient fondamentalement différentes. L’Amérique de cinéma n’avait rien à voir avec
l’Amérique réelle. Et la France demeurait leur terre, où miroitait une réussite sociale inatteignable.

J’ai oublié mes réticences du début, je suis entrée dans ce roman qui ne m’a pas lâchée.

Sucre noir – Miguel Bonnefoy

LITTERATURE CARAÏBE / VENEZUELA

Le roman commence par une histoire de Pirates des Caraïbes : le célèbre capitaine Henry Morgan s’est échoué vers 1670 avec un butin qui a excité la convoitise des chercheurs de trésor . 

Incipit : 

« Le jour se leva sur un navire naufragé, planté sur la cime des arbres, au milieu d’une forêt. C’était un trois-mâts de dix-huit canons, à voiles carrées, dont la poupe s’était enfoncée dans un manguier à plusieurs mètres de hauteur. À tribord, des fruits pendaient entre les cordages. À bâbord, d’épaisses broussailles recouvraient la coque. »

[…]

 » trois siècles plus tard, un village s’installa là où le bateau avait disparu »

Un couple et sa fille unique, Serena, cultivait la canne, la coupait et écrasait les tiges dans leur moulin quand arriva un jeune homme, Severo Brancamonte, chercheur d’or et de trésors avec une collection de cartes minières, de dessins d’orpailleurs, d’images d’anciennes expéditions….

« Dans le secret de sa quête, il célébrait la mémoire e tous ces hommes qui avaient marché en s’enfonçant dans le limon des fleuves, qui avaient pataugé dans les marais de l’arrière-pays et qui, le ventre creux, se blessaient la plante des pieds avec des têtes de diamants »

Serena et Severo finirent par abandonner la recherche du trésor pour développer la plantation, distiller le rhum…L’auteur raconte très joliment le travail de la canne, la distillation. De retour de Guadeloupe, je poursuis le voyage, un peu plus loin, au Venezuela sans être vraiment dépaysée. 

« C’était encore l’époque des cultures sur brûlis. On brûlait les champs pour chasser le serpent et se débarrasser des feuilles, ce qui donnait aux premières cuvées un goût de canne brûlée qui les rendaient uniques dans la région. »

J’ai beaucoup aimé ce court roman, très poétique, un peu dans la veine du baroque sud américain. Hors du temps, seuls quelques détails trahissent le XXème siècle : une radio qui transmet les messages des villageois, et plus tard la découverte du pétrole.

« L’ancienne économie basée sur le maïs, la cassave, le coton, le tabac, se vit bientôt remplacée par une industrie pétrolière. »

De peur de spoiler, je ne vous raconterai pas la suite de l’histoire. A vous de la découvrir. Elle en vaut la peine, vous ferez un beau voyage!

L’île Sous la Mer – Isabel Allende

LIRE POUR LES CARAÏBES – HAÏTI

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Grande fresque historique (624 pages)  qui se déroule à Saint-Domingue de 1770 à 1793 jusqu’à la guerre civile puis à La Louisiane 1793 – 1810.

« Danse, Zarité, danse, car un esclave qui danse est libre… aussi longtemps qu’il danse », me disait-il. Moi, j’ai toujours dansé. »

Deux récits s’entremêlent, celui de Zarité , l’esclave mulâtre, et celui de son maître, Toulouse Valmorain qui débarque de Paris pour prendre la succession de son père à l’Habitation Saint Lazare – une plantation sucrière. 

« Vous avez la chance de ne pas être un planteur, dit Valmorain. Je n’aime pas l’esclavage, je vous l’assure, et
j’aime encore moins vivre ici, mais il faut bien que quelqu’un dirige les colonies pour que vous puissiez sucrer votre café et fumer un cigare. En France, on profite de nos produits, mais personne ne veut savoir comment on les obtient. »

L’auteure Isabel Allende est chilienne, le livre est donc traduit de l’Espagnol ce qui me change de la littérature caraïbe que j’ai lue jusqu’à présent : Chamoiseau, Maryse Condé ou Simone Schwartz Bart dont le style intégrait les influences créoles. Lecture plus fluide, mais moins dépaysante. Saint Domingue était à moitié espagnole et la Louisiane colonie espagnole, une partie du roman se déroule à Cuba.

Décentrement aussi de l’action, L’île sous la mer met en scène les planteurs, les  Grands Blancs, les autorités militaires, et toute une bourgeoisie urbaine avec les cocottes qui apparaît beaucoup plus marginalement dans les romans précédemment cités où narrateurs et personnages principaux étaient plutôt des esclaves, des noirs, et des gens très simples. 

Roman historique et aussi roman d’amour : les histoires d’amour occupent une grande place dans le récit. Amour maternel surtout: Zarité met au monde deux enfants dont le maître est le père, elle élève le fils de son maître et de sa femme décédée comme ses propres enfants. Relations entre le maître et l’esclave, achetée à 9 ans, violée à 11….Amour de Zarité pour un esclave qui s’enfuira et deviendra lieutenant de Toussaint Louverture. . A propos de Toussaint Louverture, j’aurais aimé en savoir plus!

j’ai aussi bien aimé les personnages du médecin, le docteur Parmentier, et de Tante Rose, la guérisseuse de Saint Lazare, détentrice d’un savoir ancestral, et aussi de pouvoirs occultes.

« Depuis le seuil, Tante Rose a vu le Baron Samedi et un frisson l’a secouée, mais elle n’a pas reculé. Elle l’a
salué par une révérence, en agitant l’asson avec son cliquetis d’osselets, et lui a demandé la permission de
s’approcher du lit. Le loa des cimetières et des croisements de chemins, avec sa tête blême de mort et son chapeau noir, s’est écarté, l’invitant à s’approcher de doña Eugenia ; celle-ci respirait comme un poisson,
trempée, les yeux rougis par la terreur, luttant contre son corps qui faisait du mieux qu’il pouvait pour libérer le bébé, tandis qu’elle le retenait en serrant avec force. Tante Rose lui a mis l’un de ses colliers de graines et de
coquillages autour du cou et elle lui a dit quelques mots de réconfort, que j’ai répétés en espagnol. Puis elle s’est
tournée vers le Baron. »

La deuxième partie du livre se déroule en Louisiane, une plantation sucrière, des esclaves…Tous les personnages, ou presque vont se retrouver. la Louisiane devient française, pour peu de temps, puis américaine…

Une lecture plaisante et instructive.

 

Le conteur, la nuit et le panier – Patrick Chamoiseau

LITTERATURE CARAIBES(MARTINIQUE)

CYRILLE

envoyez les tibwa

Donnez les tanbouyé

Croisez-moi les huit

Décroisez-moi les huit Pantalon !

quatre premiers, en avant

La ritournelle tout de suite

Saluez les dames et envoyez pour la promenade

Allez !…

Cette la-ronde ouverte ici, que j’imagine couronnée de flambeaux, animée de tambours, dansante ainsi que le
veut le quadrille, est pour moi l’espace de transmission non d’une ordonnance ou d’une vérité, mais d’une
expérience encore en train d’aller, l’onde questionnante d’une pratique d’écriture.

Patrick Chamoiseau nous entraîne dans une la-ronde une veillées traditionnelle pour nous révéler le mystère de la création littéraire. Et ce mystère remonte au temps des conteurs, des tambours et des danseurs. C’est donc une lecture envoûtante à la recherche de la langue, de l’écriture et de la beauté. Lecture poétique, politique, philosophique. 

« Dans une colonie, il existe toujours une langue dominée et une langue dominante. Pour moi, la langue dominée (langue maternelle, langue matricielle), fut la langue créole. Elle est apparue dans la plantation esclavagiste, c’est-à-dire dans la surexploitation des écosystèmes naturels, la déshumanisation ontologique des captifs africains, le racisme institutionnel et les attentats permanents du colonialisme. La langue dominante, le français, me fut enseignée, assénée, à l’école. Par elle, je découvris la lecture, l’écriture, la littérature, l’idée du Vrai, celles du Beau, du Juste, un ordre du monde ciselé par les seules valeurs du colonisateur. La langue dominante n’était donc déjà plus une simple langue. C’était une arme. »

[…]
« Là aussi, le discours colonial faisait de la notion d’identité une arme de destruction massive. Cultures, langues, nations et civilisations des colonialistes occidentaux étaient devenues des absolus dressés contre la diversité du monde, considérée comme répugnante. Dans leurs luttes de libération, les colonisés allaient conserver cette survalorisation identitaire afin de produire un contre-discours tout aussi vertical. »

Recherche de l’émotion esthétique, de la beauté.

« Vivre aux Antilles revient à être plongé dans des calamités potentielles : cyclones, tremblements de terre,
éruptions volcaniques… »

[…]
« Moi, travaillé par mes cyclones et mes tremblements de terre, je trouvai précieuse cette notion de catastrophe. Je pris plaisir à ruminer ce moment qui introduit la création, durant lequel l’artiste vide la page, vide la toile, vide la pierre ou le marbre, vide son instrument, et se crée en lui-même les conditions d’une expression irremplaçable et singulière. »

[…]
« L’artiste est appelé, tel un élu, par les « surgissements-de-la-Beauté » qui persistent dans les longs sillons du Beau. Il est habité par leur magie persistante ; il passera toute sa vie à tenter d’en produire lui-même. L’artiste investi de cette sorte s’élance alors vers l’inconnu, je veux dire : vers les bouleversements inépuisables qu’offre l’acte de création. »

J’ai beaucoup aimé les « surgissement-de-la beauté »  et la « catastrophe existentielle ». 

J’ai aussi aimé le rôle du conteur et l’apprentissage du disciple. Le conteur à la base de la littérature écrite.

 

« Pour qu’une métamorphose se produise quand le vieux-nègre esclave se transformait en maître-de-la-Parole, il fallait un bouleversement qui vide la page : efface, dans son humanité remise en « devenir », la moindre survivance de l’esclave. Il fallait un « moment-catastrophe ».

[…]
L’état poétique est donc la condition sine qua non d’un moment-catastrophe. »

Dans la dernière partie, l’énigme du panier est plus ardue avec des références littéraires que je ne maîtrise pas . Chamoiseau se réfère aux traditions, aux conteurs mais c’est aussi un grand lecteur  qui peut invoquer Deleuze, Joyce, Faulkner et bien d’autres. Il fait une lecture très érudite de Césaire et de Glissant ainsi que d’autres auteurs que je ne connais pas. Il revient sur l’écriture de ses œuvres. j’ai retrouvé Texaco et cela m’a donné envie de lire d’autres livres . Quand il m’a un peu perdue avec l’érudition, je l’ai retrouvé avec joie quand il raconte les traces des Amérindiens:

Pour lui, être transformé en « panier » signifiait pour le conteur de jour se voir transformé en un simple contenu, une vacuité ambulante, un quelque chose d’insignifiant
.

le panier apparaît en finale dans bien des contes amérindiens.

Je me souviens de celui où une Amérindienne, fuyant son mari volage, s’embarque dans un grand panier, fabriqué par elle-même, décoré par elle-même, qui l’emporte sur un lac bourré de monstres. Grâce aux motifs de serpents et autres signes à sortilèges qui l’ornementent, les monstres du lac échouent à capturer la fugitive. Le panier semble vraiment la protéger.

je remercie laboucheàoreilles de m’avoir signalé ce livre, son avis ICI. Sa lecture est assez différente de la mienne. Elle s’est plus attachée à montrer l’acte d’écriture, le rôle de la main. Comme je rentre des Antilles j’ai été plus sensible au contexte géographique et culturel.

 

Retour à La Pointe des Châteaux et à la Porte d’Enfer

GUADELOUPE

Grosses vagues sur la Pointe des Châteaux

Où aller le dimanche pour éviter la foule ? Les belles plages des Raisins Clairs, Bois Jolan et Saint Anne seront à proscrire. Nous en avons fait l’expérience dimanche dernier : les Guadeloupéens viennent en famille nombreuses, 10, 12, voir plus, avec des grandes tables, marmites, hamacs et sono,  les parkings sont complets.

Peut-être aurons nous plus de chance avec les sites touristiques ? Nous retournons à la Pointe des Châteaux pour faire, en entier, le sentier côtier à partir de l’Anse à la Gourde. Dominique retrouve sa place ombragée à la Gourde. Je suis le chemin balisé souvent à couvert dans la forêt sèche avec de courtes échappées sur le bord de mer. Le sentier est bien tracé, balisé en jaune et le plus souvent facile. De courts passages rocheux sur un calcaire récifal érodé formant des lames coupantes me font préférer les chaussures fermées aux sandales. Je retrouve le pré avec les bœufs tranquilles derrière le parking de Man Michel et suis déjà à mi-parcours. La suite est à plat sur un chemin sableux dans une dune couverte de buissons vert vif. Après la pluie, les escargots sont de sortie, pensais-je. Je vois un puis deux puis trois, puis plein de coquillages coniques se promener. Ce ne sont pas des mollusques mais des bernard-l’hermite ! A main droite, un étang peu profond frangé de blanc qui n’est pas du sel mais de l’écume, c’est la Grande Saline, à main gauche, l’océan, tranquille comme un étang, l’anse ouverte est protégée par la barrière de corail qui arrête les vagues. J’arrive à la route bien encombrée de voitures sur des centaines de mètres. Un autocar bouche la boucle si bien que c’est la foire d’empoigne pour faire demi-tour, pire pour se garer. Dernière photo de la pointe et des rochers avec de belles vagues et nous partons à la recherche d’une plage tranquille pour se baigner. Sur le côté nord, vers l’Anse à la Gourde, les vagues sont trop fortes. Nous essayons donc le côté sud, à l’ombre de la forêt domaniale du littoral. J’y découvre un autre sentier balisé en jaune allant de la Pointe des Châteaux à Saint François.

Kahouanne, à l’arrière d’un restaurant chic se trouve une très jolie plage de sable blanc enchâssée dans une crique rocheuse. Jolie image, mais baignade risquée entre vagues et rochers. Plus loin, sur la route, il suffit de voir les voitures garées pour deviner qu’il y a une plage. L’Anse Kahouanne est une succession de petites plages avec des bassins d’eau tranquille. Dans la première, un jeune couple assis derrière un rocher, attend la vague qui les éclaboussera, jolie vision, je déparerais à côté d’eux. Bassin suivant : au bord de l’eau sur le sable on a installé des lits de plage, chaises et serviettes. Une femme est assise reposant sur une frite de mousse rose, son mari debout derrière elle. Il y aurait un peu de place, mais cela ne vaut pas le déshabillage/rhabillage acrobatique au bord de la route.

Anse Loquet : la plage de sable est plus grande, l’eau y est parfaitement calme et semble assez profonde pour nager. Une dizaine de Canadiens monopolisent l’endroit le plus agréable où l’eau est turquoise entre les petites buttes où poussent les posidonies et les rochers qui raclent les genoux. Les Canadiens sont assis dans de véritables fauteuils flottants : accoudoirs et dossiers gonflables, un filet pour le siège. Ils papotent, je les contourne et subis des conversations peu discrètes sur leurs affaires à Montréal ou à Trois-Rivières. Baignade délassante et rafraîchissante après ma promenade au soleil.

habitation Zevallos

Pique-nique loin de l’agitation touristique au parking de la Porte d’Enfer que l’on trouve facilement en quittant la route du Moule après l’Habitation Zevallos. Pour profiter des vagues il faut descendre un escalier de marches faciles et suivre le sentier. le spectacle est grandiose . Les vagues puissantes explosent contre l’îlet en un feu d’artifice éblouissant. L’eau mousseuse contourne le rocher, deux vagues vont à la rencontre l’une de l’autre, se heurtent, la surface de l’eau est blanche d’une mousse tourbillonnante. La gerbe d’écume dépasse l’îlot tantôt à droite, tantôt à gauche. La vague qui a gardé assez d’énergie va s’enfoncer ensuite dans une sorte de fjord, percuter le creux en un bruit sourd. De l’autre côté un rocher plat dégouline comme une fontaine. Je reste longtemps fascinée à filmer.

Porte d’Enfer

Du parking, un autre sentier côtier parcourt le rebord du plateau, passe âr un petit bois, monte sur un cap qui domine l’anse puis s’arrête brusquement sans que je puisse découvrir l’Anse Salabouelle – spot de surf.

 

Texaco – Patrick Chamoiseau

MARTINIQUE

.

Texaco a été lauréat du Prix Goncourt 1992 – gros roman de 432 pages qui vous engloutissent dans une lecture passionnante mais touffue, lente, parfois laborieuse (tiens, la narratrice s’appelle Marie-Sophie Laborieux, coïncidence?). Lecture compliquée par le mélange de français littéraire, de vocabulaire oral de la Martinique avec parfois des expressions créoles. Comme j’avais envie de tout comprendre dans ce voyage littéraire j’ai souvent arrêté la lecture pour chercher les mots que je ne comprenais pas. 

Lecture compliquée aussi par l’intervention de plusieurs narrateurs : Marie-Sophie Laborieux, dans ses cahiers transcrit les paroles de son père Esternome, qui, lui-même rappelle les souvenirs des générations précédentes. Intervient aussi un urbaniste rédigeant des rapports…

Texaco est un quartier, bidonville, favela, de Fort-de France installé sur le terrain de la Compagnie Pétrolière Texaco et fondée par Marie-Sophie Laborieux. 

 

 

 

Le titre Texaco qui fait du quartier un personnage à part entière, s’intègre dans une focale « architecturale » . Les repères chronologiques mis en avant par l’auteur sont  des modes de construction : « TEMPS DE CARBET ET D’AJOUPAS  « les Indiens Arawaks vivaient dans des huttes, après 1680, au « TEMPS DE PAILLE » les esclaves africains étaient dans des cases couvertes de paille autour des habitations des colons, « TEMPS BOIS-CAISSE » correspond à l’effondrement du système des habitations  tandis que les cases construites en débris de caisses s’élèvent autour des grandes usines à sucre. « TEMPS FIBROCIMENT » correspond à la construction de Texaco et précède le « TEMPS BETON ».

Chamoiseau a donc rythmé la saga par l’édification des cases. L’histoire commence au Temps de Paille  du temps de l’esclavage, de 1823 où le grand père – empoisonneur fut mis au cachot tandis que la grand-mère était blanchisseuse. Le  père, Esternome,  naquit dans l’habitation et passa son enfance dans la Grand-case. Ayant sauvé la vie du Béké, il gagna la liberté de savane. La première partie du livre raconte comment Esternome s’est affranchi, comment il a quitté la campagne, est « descendu vers l’En-ville » où il est devenu charpentier sous la conduite du maître charpentier Théodorus.

« Durant les semaines qui suivirent, la petite troupe marcha marcha marcha, répara quatre indigoteries, marcha marcha, mit d’aplomb deux caféières, marcha marcha, et un et-caetera de cases à marchandises, à bestioles ou à nègres. Théodorus devant, ses deux aides derrière, mon papa au milieu, ils affrontaient les mornes boueux, les ravines glissantes, escaladaient les éboulis de terre rouge et la bouleverse des arbres tombés. Mon Esternome qui n’avait jamais dépassé les zones de son habitation, découvrit le pays : une terre jamais plate, dressée en verdure vierge, enchantée d’oiseaux-chants et des siffles de bêtes-longues. »

Un des évènements les plus marquants de l’époque fut en 1848 : l’Abolition de l’Esclavage

« En fait, Sophie ma Marie, moi-même qui l’ai reçue, je sais que Liberté ne se donne pas, ne doit pas se donner. La liberté donnée ne libère pas ton âme »

Esternome tomba amoureux. mais je ne vais pas vous raconter tout le livre….Avec Ninon, il a essayé de se construire un paradis, un jardin au flanc d’un morne…

« Soufrière a pété, Soufrière a pété »

la catastrophe, la destruction de Saint Pierre le 8 mai 1902 l’exode vers Fort de France va marquer une nouvelle époque, Estenome a tout perdu, sa Ninon, son paradis sur le morne, et pourtant un nouveau départ: une nouvelle compagne lui donne une fille Sophie-Marie.

Nous allons suivre les aventures de la petite fille dans le Quartier des Misérables, la survie en vendant des fritures dans la rue. Orpheline, il ne lui restait plus qu’à faire la bonne avec plus ou moins de bonheur. Intelligente, elle a tiré profit de l’environnement, des musiciens de son premier maître, a appris à coudre chez la suivante, puis à lire et écrire. Son plus grand trésor fut quatre volumes qu’elle emporta :  Montaigne, Rabelais, Alice de Lewis Caroll et les Fables de La Fontaine. Lectrice, mais aussi scribe de l’histoire de son père et de ses ancêtres esclave. C’est elle qui a fondé Texaco, qui en est devenue l’écrivain public, l’animatrice jusqu’à aller trouver Césaire

« Mais Césaire, noir comme nous-mêmes nous ramena dans la politique. Il vint vers nous, comme Sévère, au
Quartier des Misérables, à Trenelle, à Rive-Droite, au Morne Abélard, à Sainte-Thérèse. Il n’avait pas peur
d’avancer dans la boue, et de le voir venir nous exaltait. »

Au  nom de l’hygiène, de la modernité, Texaco sera-t-il détruit pour caser ses habitants dans des Hachélèmes?

« L’urbaniste occidental voit dans Texaco une tumeur à l’ordre urbain. Incohérente. Insalubre. Une contestation
active. Une menace. On lui dénie toute valeur architecturale ou sociale. Le discours politique est là-dessus négateur. En clair, c’est un problème. Mais raser, c’est renvoyer le problème ailleurs, ou pire : ne pas l’envisager.
Non, il nous faut congédier l’Occident et réapprendre à lire : réapprendre à inventer la ville. L’urbaniste ici-là,
doit se penser créole avant même »

Anse Bertrand – musée archéologique du Moule

GUADELOUPE

la belle plage de sable de l’Anse Bertrand

La tranquille D120 traverse le pays de la canne. Le voyage est un enchantement. Les moulins dépassent les champs qui ondulent. Les Guadeloupéens n’aiment pas beaucoup ces moulins symbole de l’esclavage et du dur travail dans les sucreries. Au Parc de Damencourt du Moule, un poème les qualifie de « pustules ». Ils sont pourtant bien entretenus. Même s’ils ne sont plus utilisés aucun ne semble tomber en ruine.

L’Anse Bertrand est un gros bourg (3800 habitants). Une grande église en ciment domine la grande place. Le front de mer est bordé de restaurants sympathiques ; le port de pêche se trouve à l’écart, dans un canal creusé dans la mangrove. Il est minuscule, cinq ou six barques à moteur, deux tas de filets et un beau restaurant vert.

 

La Plage de la Chapelle se trouve à l’autre extrémité du village, derrière le cimetière où nous arrivons par erreur. Grandes tombes carrelées, les cimetières marins ont beaucoup d’allure. La longue plage de sable clair est bordée de cocotiers et de raisiniers. Elle est protégée par al barrière de corail qui amortit les grandes vagues. Son eau limpide passe de bleu turquoise à vert très foncé. Pour se baigner il faut choisir les bassins turquoise. Certains nageurs équipés de masque et tuba traquent les poissons dans le vert. Ne pas oublier les chaussons : les vagues charrient des pierres et des morceaux de corail coupants. Toute aussi plaisante que la baignade, la promenade pieds nus dans le sable blanc. Je passe la matinée en alternant promenade et nage.

Déjeuner au Ti-Madras qui a une terrasse surplombant la plage et qui joue avec les couleurs du madras : tables rouges, chaises jaunes ou vertes, toile cirée madras. Beaucoup de choix à la carte, même des langoustes grillées. Je commande du poisson et Dominique du boudin qui se révèle être fait de poisson. Le tout est servi avec du riz, des crudités et des accras. Assiette très bien garnie, prix raisonnable.

Nous retournons à la Pointe de la Grande Vigie traversant la forêt sèche très odorante. Arrêt à la Porte d’Enfer et au Trou Madame Coco.

Juste avant l’entrée du Moule nous visitons le Musée archéologique :

Le Musée Edgar Clerc rassemble les objets archéologiques amérindiens trouvés sur le site de Morel à la Plage de l’Autre Bord, parc archéologique juste en dessous de notre gîte et à l’Anse de la Gourde. Les objets les plus étonnants sont les adornos (ornements): éléments incisés apposés aux récipients en poterie et pouvant servir d’anses ; originaux aussi ces objets à trois pointes en pierre ou en coquillage.

Diverses époques ont livré des témoignages : de la Préhistoire au site de Morel, du VIème au XIVème  à l’Anse de la Gourde avec des sculptures des adornos mais aussi des objets usuels, platines pour cuire le manioc, fuseaux pour le coton, parures de coquillages…

Les musées préhistoriques sont parfois rébarbatifs mais celui-ci est très bien logé et agréable à visiter.

 

 

nos visiteurs de la Ti-case

GUADELOUPE

Les matinées, comme les soirées, sont très agréables sur le balcon de la Ti-Case, installée sur un banc à la table bleue. Le long du mur blanc, la bordure d’aloès, en pleine floraison, attire les oiseaux : un colibri qui vibre de fleur en fleur, un petit sucrier jaune et noir. J’ai énormément de plaisir à les surveiller : étrangement je ne vois ni abeille ni papillon.

Cherchez le sucrier

Les fourmis minuscules nous contraignent à enfermer tout au réfrigérateur, le sucre, le pain. Il y a fort peu de mouches et pas de moustiques. Seul insecte notable : une grosse blatte qui sort pendant le dîner, parcourt les poutres sous le toit en tôle à toute vitesse, arrivée à l’extrémité du tasseau, elle s’envole puis recommence. On nous avait prévenues contre les scolopendres, les seules bêtes venimeuses de Guadeloupe, secouer serviettes et chaussures mais elle ne se sont pas manifestées.

Notre visiteur du soir : un petit gecko qui s’installe dans l’abat-jour de papier japonais et qui chasse de minuscules proies attirées par l’ampoule.

Port Louis et Petit Canal

GUADELOUPE

Promenade dans la mangrove

Port Louis

La Plage du Souffleur à Port Louis, en limite de la mangrove est très agréable, ombragée sous de grands arbres colonisés par d’innombrables bromélias. Près du bourg de Port Louis, il y a un grand parking payant et des restaurants de plages divers. Plus loin, de l’autre côté du cimetière, la plage est beaucoup moins fréquentée. Nous déjeunons sous un carbet d’un très gros avocat et de thon fumé.

Bomélias

Un sentier de découverte entre dans la mangrove, il commence par des planches dans les palétuviers. En cette saison de Carême (c’uest ainsi que se nomme la saison sèche en Guadeloupe) il n’y a que très peu d’eau. Le sentier bordé de grosses pierres serpente entre les arbustes ressemblant à des acacias et d’autres petits arbres porteurs de bromélias. Aucun repère dans cette forêt touffue, ni le soleil ni la ligne du rivage. Quand je retrouve le chemin de planches je ne me rends pas compte tout de suite que je ne suis pas revenue au départ, cette fois-ci il y a de l’eau. J’arrive sur une belle allée blanche au bord de la mer. Une jolie promenade.

Avant de quitter la Plage du Souffleur je la parcours les pieds dans l’eau sur le sable doré bordé de cocotiers. Une vague plus puissante que les autres me trempe jusqu’au short.

L’église de Port Louis

Port Louis est une petite ville avec sa belle église jaune et son clocher de bois. L’intérieur de la nef est lambrissé de bois précieux comme la coque d’un bateau, les bancs sont assortis. Suivant le rivage, nous parvenons au port de pêche mais la halle aux poissons, signalée par nos guides comme témoignage de l’architecture 1920, est en réfection. La Mairie est pimpante crépie de jaune pâle avec ses volets verts et une frise de briques. Des colonnes ressemblant à des sucreries soutiennent une loggia. A Port Louis aussi, le Street Art est à l’honneur. De petites affichettes présentent les graffeurs.

Petit Canal

la belle Mairie jaune de Petit Canal

Nous aurions mieux fait de ne pas traîner à Port Louis, le Musée de la Vie d’Antan ferme à notre arrivée. (Le vendredi à 14h45) A côté du Musée, la Mairie jaune d’or est originale avec son clocheton et son mur ajouré. Un escalier monumental jaune, lui aussi, conduit au monument aux Morts.

Les Marches des Esclaves

C’est un tout autre escalier qui nous a attirées à Petit-Canal : les Marches de l’Esclavage. 54 marches en pierre de taille conduisent à l’esplanade où étaient vendus les esclaves à leur descente de bateau. A chaque palier, une plaque rappelle les ethnies des arrivants : Yorubas, Peuls, Congos…Au sommet des marches : un petit monument portant une grosse colonne cannelée, étrange pain de sucre, un seul mot LIBERTE, 1848.

En bas des marches le Gwoka – gros tambour caraïbe, rappelle les origines africaines. Le canal creusé qui a servi de port aux navires négriers a donné son nom au bourg. Au XIXème siècle, un autre canal fut creusé pour les gabares sucrières.

Le figuier étrangleur va faire disparaître la prison

Dernière station de notre « Parcours de l’Esclavage » la prison de Petit Canal, ruinée, dévorée par un figuier maudit (figuier étrangleur). L’arbre englobe les murs à la manière de ceux d’Angkor. Revanche de la nature !