Vallée de Hvita, Snorri et les sagas

CARNET ISLANDAIS

le temps change vite en Islande

Départ sous le soleil par un froid vif, les crêtes sont enneigées, une belle journée se prépare.

100 km sur la route circulaire qui monte sur un plateau venteux où les rafales se déchaînent : un voyant s’allume dans la voiture : 3° C risque de verglas ! La neige couvre les sommets. Les nuages s’accumulent. Quand nous passons devant le cône imposant d’un volcan, la pluie se met à tomber dru. Impossible de sortir pour consulter les panneaux. Le volcan restera non identifié.

La route 50 suit la rivière Hvita. Entre averses et éclaircies nous traversons un paysage agricole et des champs de lave couverte de mousse épaisse. Stoïques, les chevaux islandais subissent les caprices de la météo.

Deildartunguvher

source chaude

C’est la source chaude la plus puissante d’Islande (débit 180 L/sec) qui alimente le chauffage de la région et les serres. Elle sort de roches rougies dont la couleur contraste avec le tapis de mousses vertes qui la surplombe. La vapeur se répand sous les gouttes d’une pluie bien fraîche et elle ne suffit pas à nous réchauffer. Un spa luxueux est construit à proximité.

Reykolt

Arrivée par ka 518. Reykolt est un village aux maisons dispersées mais où un grand clocher marque le centre. Le haut clocher de ciment ne surmonte pas l’église traditionnelle beaucoup plus petite en bois, éclipsée par le campanile de ciment, mais le Musée Snorrastofa – centre de recherche dédié à Snorri Sturlusson (1179 – 1241) l’auteur de nombreuses sagas, de l’Edda qui est aussi un traité de poésie, de l’histoire des Rois de Norvège et qui est présenté comme le plus grand écrivain du 13ème siècle, presque un équivalent d’Homère. Depuis deux semaines, je tourne autour des héros des sagas sans en avoir lu une seule. Nous sommes passées dans le pays de Grettir, de Njall-le-brûlé, d’Egill ou d’Olaf. Mais par quelle saga commencer ? Les sagas racontent la colonisation de l’Islande par les Vikings ce sont des récits littéraires écrits deux siècles après les faits historiques (un peu comme Homère et la Guerre de Troie). A l’époque de la Colonisation, les Vikings étaient encore païens tandis que Snorri est un homme cultivé, latinisant (comme tout européen chrétien du 13ème siècle), connaissant les textes antiques. Snorri était un diplomate qui a voyagé d’Islande en Norvège. Une reproduction montre Snorri à Thingvellir où il a exercé la fonction de secrétaire de séance de l’Althing, le Parlement. Je sors du musée avec la résolution de lire au moins une saga.

Snorri à Thingvellir

Visite à la petite église (rénovée au 19ème siècle), simple, sobre comme toutes les églises luthériennes : un tableau derrière l’autel, une chaire à prêcher en bois. L’objet le plus précieux est un mignon harmonium.

La pluie recommence à tomber d’abondance, je renonce à aller voir le bassin de Snorri (vestige archéologique).

20 km plus loin, sur la 518, sous des nuages menaçants, nous trouvons les deux chutes d’eau Hraunfossar et Barnafoss, deux cheminements relient les deux cascades, une promenade agréable

Hraunfossar ne ressemble pas aux cascades puissantes et hautes et impressionnantes comme Dettyfoss ; d’un mur de basalte, se déploient des dizaines de cascatelles sortant de la falaise entre mousses et buissons, se rejoignant, divergeant pour rebondir en rapides dans le lit de la rivière bouillonnante.

Barnafoss s’écoule entre des rochers aux formes fantastiques, arche et bassin.

Un arc en ciel décore le ciel au-dessus de Hraunfossar. La photo serait merveilleuse si tout le monde n’avait pas eu la même idée simultanément : faire un selfie, une chinoise en rose, une chinoise en rouge, des indiennes…le monde entier aura sa photo d’arc de triomphe sauf moi qui voudrait la cascade toute seule.

serre chauffée à la géothermie

Devant la serre des tomates de Deildartunguvher, un foodtruck vend des hot-dogs ou des fish&chips à consommer sur des grandes tables à l’intérieur de la serre. Je suis surprise par l’abondance des tomates à différents stade de maturation et par les variétés de la tomate cerise en grappe à la grosse tomate.  Elles poussent en pleine terre, des bâches en plastiques permettent de cueillir les fruits. De fins tuyaux irriguent en goutte à goutte. Les plant s’accrochent à des fils verticaux et sont taillés avec soin,

Borganes : Settlement Center

Le dépliant promet une visite en 15 langues et deux expositions. J’ai craint quelque musée interactif avec écrans et réalité virtuelle, pas du tout ! Les audioguides sonorisent une déambulation devant des vitrines où des objets réels voisinent avec des personnages en bois ou en pâte Fimo et des cartes en relief. De l’artisanal, du brut, du naïf qui raconte une histoire ou plutôt deux, celle des premiers colons au 9ème siècle et la saga d’Egill.

Casque sur la tête, ipod au revers de ma veste je regarde le drakkar dans la vitrine avec famille, esclave et bétail, prêt pour la traversée de Norvège en Islande, pour éviter de charger l’embarcation on n’avait emporté que des petits animaux, des agneaux et des veaux…le narrateur raconte le destin de chacun des personnages. Il est extraordinaire que les premiers colons soient connus par leur nom qui se retrouvent dans la toponymie islandaise. L’île n’était pas une lande déserte mais couverte d’épaisses forêts. Les colons devaient remonter le cours des rivières.

L’autre récit : la Saga d’Egill  est l’œuvre de Snorri. Egill déjà enfant avait un caractère impossible, désobéissant à ses parents, violent jusqu’au meurtre gratuit. Il a navigué jusqu’n Norvège et en Angleterre. Histoire de meurtres, de jalousies, de rancune et même de sorcellerie. Cette saga est un roman d’aventure. Les sculptures en bois grossier ne sont pas toutes très jolies mais elles s’accordent avec le caractère grossier et violent du personnage et me touchent bien plus que les images virtuelles de 1238 .

ciel du soir

L’hôtel Hafnarfjall se trouve 4 km après la sortie de Borganes, passé le pont près d’une plage. L’accueil est chaleureux. On nous a réservé une « cabine » , cube en bois but sur une estrade de planches vitrée sur un côté. Le parquet est en pin blond ; les meubles raffinés : une table bistro foncée, un confortable canapé de cuir noir et une table basse en bois flotté. Cuisine équipée et complète ; nous dînons au coucher du soleil. Le ciel prend des teintes extraordinaires de rose, orange, violet au-dessus de la mer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

sur la route 1 d’Egilstadir vers Dettyfoss

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Modrudalur : ferme de tourbe

Sur la route circulaire

Mon cahier sur les genoux, je note les variations de paysage  : la lande brune avec des bruyères, des myrtilles brunies, automnale, qui alterne avec des prairies cultivées. La route suit le lit d’une rivière puis monte sur le plateau. Une petite fille blonde, grimpée sur le toit herbu de la bergerie, joue avec les moutons. Le plateau Jökuldalsheid (500 – 600m) couvert de champs de lave, des petits cônes s’alignent dans le brouillard. A la fin de l’âge glaciaire, le glacier a laissé des moraines. L’action des glaciations et des glaciers récents se fait sentir. Volcanisme et glaciers, deux constantes de l’Islande agissent conjointement ou séparément et compliquent les interprétations quand le glacier a laissé des moraines entre les crêtes « vieilles » d’un million d’années. Comme la géologie de l’Islande est neuve !

Modradolur

Dans ce désert quasi-lunaire, une belle piste conduit à la ferme Modrudalur – la ferme « la plus isolée » selon le roadbook, « la plus haute » dans les plateaux selon les panneaux. C’est plutôt un village qu’une ferme avec plusieurs maisons en tourbe aux pignons pointus, des bâtiments agricoles, une église.

On a installé un restaurant dans une maison de tourbe : une excellente soupe d’agneau est bien réchauffante ; j’aurais pu commander une soupe au lait et à la mousse, ou des gaufres. Contrairement à la soupe à l’agneau de Geirland qui était du bouillon clair celle-ci est riche en légumes chou, carottes, céréales. Il y a aussi un magasin qui vend surtout des lainages tricotés ou tissés et un petit musée du volcanisme.

En sortant du restaurant nous croisons des femmes qui portent des gâteaux ainsi que le pasteur qui est une femme. Un bébé pleure. Peut-être un baptême ? On achète une écharpe verte mousseuse.

les cairns

La route 1 est bordée par de grands cairns érigés au temps où il n’y avait pas de route. Un panneau raconte que les habitants de Hölsfjoll étaient appelés « les montagnards ». Pour acheter ce dont ils avaient besoin ils devaient traverser les montagnes pour se rendre sur la côte Nord au port . Dès 1928, il y avait une liaison postale et la construction de la route fut entreprise en 1930 mais la route actuelle n’existe que depuis 1996.

paysage volcanique

Jusqu’au 16ème siècle, cette région était couverte de végétation. Les éruptions sous le glacier Votnajökull en 1477 puis en 1794 ont rendu la contrée déserte.

Une anecdote amusante :le cairn des évêques. En 1166, l’Islande était divisée en deux diocèses ; l’évêque de Skatholt et l’évêque de Holar sont entrés en conflit à cause d’un fermier qui avait fait don de sa ferme aux deux évêques ; pendant que les deux ecclésiastiques négociaient les frontières leur suite construisit deux cairns ;

coulée de lave

Nous passons sur un pont suspendu en ciment un torrent tumultueux, puis une coulée énorme, le sol paraît pavé de dallées énormes arrondies à la surface bombée mais très lisse. Des feuillages orange et dorés se détachent sur la lave noire.

Dettyfoss

Dettyfoss

Un détour sur le champ de lave noire jusqu’aux chutes de Dettyfoss, l’une des plus puissantes d’Islande. Le parking est très en retrait, il faut marcher un bon kilomètre sur des coulées basaltiques spectaculaires à la surface lisse avec des boursouflures, un peu comme la croûte d’un pain ; des prismes forment des marches. Dettyfoss se devine à la vapeur qui monte avant même qu’on ne la découvre. Sa rumeur couvre les conversations des touristes. L’humidité est si marquée que les photographes doivent protéger leur matériel. La rivière charrie des eaux grises chargés de débris des roches arrachés sur son passage moins haute lais plus large. Plus loin sur la même rivière, Selfoss, que je contemple de loin c’est la 4ème cascade de la journée

 

Hengifoss & Litlanesfoss, deux cascades près du Lac d’Egilsstadir

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Litlanesfoss et ses prismes

Nous suivons, vers le sud, la rive ouest du lac d’Egilsstadir, Lagarfljot sur la route 931 qui traverse des bois de mélèzes, sapins, peupliers et bouleaux ; mélèzes et bouleaux ont déjà leur tenue automnale. Sous le soleil du matin nous prenons conscience de l’arrivée prématurée de l’automne. Peut-être est-ce normal en Islande après les journées interminables d’été qui ont donné leur comptant de lumière aux végétaux ? Le reboisement date du 20ème siècle et se poursuit encore. La forêt s’étale sur les deux rives du lac qui, sous le soleil du matin, prend un reflet doré.

Hengifoss et Litlanesfoss

Hengifoss

Ces chutes se trouvent a l’extrémité sud du lac ; on ne peut pas louper le grand parking en face du pont. Un escalier de bois permet de monter rapidement, puis on a disposé des planches. Le sentier est bien encadré entre deux cordelettes qu’il ne faut surtout pas franchir, même pour photographier les petites gentianes bleues. La première cascade Litlanesfoss s’élance d’une barre de basalte où les prismes se bousculent en éventail et semblent jaillir en gerbe, le plus bel exemple d’orgues ! Il faut continuer à grimper pour atteindre le cirque de Hengifoss haute cascade dont l’intérêt principal réside dans l’encaissant : alternance de coulées basaltiques noires séparées par des niveaux oxydés rouges ; le rm -600ouge provient de l’altération des scories en argile plus tendre ; les niveaux rouges, en creux soulignent les bancs noirs. A la fin de la grimpette, le sentier boueux devient très glissant. Je me retient aux cordelettes pour garder l’équilibre (protection bien illusoire qui donne confiance).

Sur la route circulaire

Mon cahier sur les genoux, je note les variations de paysage la lande brune avec des bruyères, des myrtilles brunies, automnale, qui alterne avec des prairies cultivées. On suit le lit d’une rivière puis la route monte sur le plateau. Une petite fille blonde, grimpée sur le toit herbu de la bergerie, joue avec les moutons. La route monte sur un plateau Jökuldalsheid (500 – 600m) couvert de champs de lave, des petits cônes s’alignent dans le brouillard. Ala fin de l’âge glaciaire le glacier a laissé des moraines. L’action des glaciations et des glaciers récents se fait sentir. Volcanisme e glaciers, deux constantes de l’Islande agissent conjointement ou séparément et compliquent les interprétations quand le glacier a laissé des moraines entre les crêtes « vieilles » d’un million d’années. Comme la géologie de l’Islande est neuve !