Saghmosavank – Hovanannavank – Aragats

CARNET ARMÉNIEN

Aragats Martiros Saryan

Saghmosavank est un monastère célèbre, donc connu du GPS. Malgré tout, on réussit à s’embrouiller dans les bretelles d’accès à la voie rapide. Occasion de traverser une nouvelle fois Ashtarak et d’assister à la cérémonie du 9 mais au Monument aux Morts. En France, le 8 mai est occasion de ponts, vacances, week end, tout le monde a oublié la Seconde Guerre Mondiale. Pas les Arméniens. A Yerevan on se presse au Parc de la Victoire pour assister à la parade.

saghmosavank

Le monastère de Saghmosavank ou monastère des Psaumes (13ème) est situé à l’écart sur le rebord du canyon du Kassakh qui a creusé au moins 6 gradins dans les coulées empilées.

U n panneau raconte :

« Selon la tradition Saint Grégoire, après l’adoption du christianisme en 301, construisit une petite église dans la vallée du Kassakh dont on ne sait plus rien…. »

«  ….quand la partie orientale de l’Arménie fut libérée des Turcs par les princes Zakarian, ces derniers récompensèrent les nobles en leur distribuant des terres. Les princes Vatuchian reçurent une grande partie de l’Aragats et reconstruisirent Saghmovarank… »

L’église date de 1215, le Gavit de 1235, la bibliothèque 1255.

L’ensemble est construit en belle pierre brune contenant des inclusions noires. On entre par une belle porte surmontée de motifs pentagonaux et d’étoiles à cinq branches. Au dessus dans un arc ogival le pavage est plus simple de losanges formant des fleurs à 4 pétales.. Le gavit est grand soutenu par d’épaisses colonnes. Dans l’église, le curé coiffé d’une toque blanche, enveloppé de satin blanc, dit la messe, aidé par deux enfants de  chœur en rouge,  des jeunes hommes, à grand renfort d’encens. L’assistance est clairsemée : un seul homme. Nous ne faisons qu’un passage discret. Dans le gavit une petite porte fait communiquer avec une église beaucoup plus petite. Une guide montre à un groupe allemand avec sa lampe de poche les anges sculptés sur un arc du chœur invisibles dans la pénombre. Elle dirige le faisceau lumineux sur les fresques très colorées : un évêque – Saint Grégoire ? –

le canyon du Kassakh

A la sortie du village la cérémonie du 9 mai réunit une assistance plus conséquente que la messe. Les enfants des écoles sont venus avec des ballons de baudruche, accompagnés par les mères.

Comme il ne pleut pas et même que les nuages se séparent, nous continuons la route vers le nord espérant apercevoir les sommets enneigés de l’Aragats. Sur la gauche de la route M3 ; des lettres géantes accompagnées de statues et sur la haut de la colline une croix métallique moderne en fer, forment le Monument aux lettres arméniennes. Ce n’est pas bien beau, mais c’est un témoignage de l’attachement des Arméniens à leur alphabet si original, à leur culture millénaire liée à cette écriture.

monument des lettres arméniennes

Le plafond nuageux est remonté un peu, laissant entrevoir les névés et une ligne de crêtes dont il faudra se contenter. Je chercherai les Souvenirs Arméniens d’Ossip Mandelstamm qui célèbrent ces paysages et l’Aragats.

Hovanannavank

Hovanannavank est aussi construit sur le rebord du canyon du Kassagh. Il est entouré de fortifications.

tympan d’hovanavank

Comme à Saghasmosavank, le porche est ciselé de frises à entrelacs et de motifs orientalisants.
Le Gavit est étonnamment éclairé et aéré : sa coupole est soutenu par des colonnettes et non pas par un tambour plein. Il sert aussi de clocher : 5 cloches sont suspendues. Les murs sont également percés d’ouvertures en arcades vers l’extérieur.

Au dessus de la porte le tympan est sculpté : de part et d’autres du Christ deux groupes de personnages. A la droite du Christ, les Vierges Sages, bénies, (Kaplanian p.96) brandissent bien haut un bâton, à sa gauche, les Vierges Folles s’en iraient la tête basse….l’auteur note toutefois « l’ennui c’est qu’il semblerait que ce soient des hommes et qu’ils portent tous des auréoles… »  L’interprétation reste donc énigmatique.

L’église fleure bon l’encens, elle est de bonnes dimensions.

Chercher un coin pique-nique dans la campagne par ce jour humide n’est pas facile. Dans les alentours, la campagne est assez urbanisée. Les chemins défoncés sont remplis d’eau après la pluie. On mange donc dans la voiture au petit village d’Ushi : les restes de pastrami acheté à Gümri, du beurek de Gohav, des pâtes de fruits. Rangement de la voiture qu’il faudra rendre propre dans quelques heures.

Ashtarak : église abricot et église rouge

CARNET ARMÉNIE

Ashtarak : l’église rouge par Martiros Saryan

Au petit déjeuner,:fromage blanc et de la crème aigre avec du miel.

Il fait encore gris, la pluie a cessé. La première traversée d’Ashtarak n’a pas été passionnante : barres roses soviétiques, magasins sans intérêt. Nous n’avons pas trouvé le centre-ville. La route passe entre des immeubles et des maisons carrées dans leurs jardins. L’église Karmravor (église rouge) est située derrière notre gite !

Le pont d’Ashatarak dessin de Martiros Saryan

Perché sur un plateau basaltique, au dessus du canyon de Kassakh, se dresse une petite église accessible par de nombreuses marches. La vue est merveilleuse sur le canyon ; la rivière gonflée par la pluie, est enjambée par un vieux pont de pierre. Mais la description ne correspond pas à celle de nos guides. Je suis à l’église abricot et pas à l’église rouge, coiffée de tuiles, que j’aperçois au loin. Tout le creux du canyon est occupé par un petit parc avec des bancs et des tables sous abri, des balançoires et des pelouses. De grands saules cachent le pont. En m’approchant je découvre que le pont a trois arches dissymétriques. Une route bien dégradée gravit une rampe raide. L’église rouge est toute petite. Sa coupole de vieilles tuiles lui donne l’air des églises byzantines.

église abricot

Le ciel s’est dégagé, la lumière est plus agréable qu’hier.

Arouch et arrivée à Ashtarak

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le caravansérail d’Arouch

Le GPS nous renvoie à Talin pour retrouver M1. Epuisée par les routes défoncées, la conductrice est ravie de trouver un axe principal. Repassant par le même itinéraire, nous trouvons le caravansérail bien en ruine, indéchiffrable.

La M1 est bien roulante.

Arouch église et palais des Mamikonian

Dernier arrêt (hors programme) à Arouch signalé par des panneaux. Non loin de la route nous voyons un caravansérail à trois arches au toit à double-pente (panneaux d’explications multilingues). L’église fléchée, paraît intacte. On a remonté les fenêtres vitrées, je ne sais pourquoi, la coupole effondrée laisse un trou béant vers le ciel, par lequel il pleut.

Ici aussi, il y a des panneaux qui décrivent  les structures : église Saint Grégoire (660-700) et palais (661-685) attribué à Grigor Mamikonian. Ici, je retrouve Vardam Mamikonia(388-391) et la bataille d’Avaïr, où les Mamikonians alliés à Rome combattirent contre les Perses, représentés sur la place de Gümri . Certains Mamikonians furent empereurs byzantins. Je me promène avec joie dans le palais fleuri de coquelicots et de moutarde jaune et découvre les grands chapiteaux.

vardam mamikonian

Nous arrivons tôt à Ashtarak. Encore une preuve de la gentillesse des Arméniens vis-à-vis des étrangers : le GPS ignore l’adresse de nos logeurs. Google-map nous a été bien utile mais nous avons dépassé la rue. Je m’adresse à un chauffeur de taxi en attente à la station< ; Très aimable, il se lance dans un long discours en russe, d’où il ressort qu’il faut faire demi-tour et tourner à gauche. On tourne trop tôt et repassons devant les taxis, le chauffeur démarre son véhicule et nous fait signe de le suivre. Quand on propose de payer la course il repart avec un grand sourire.

Nous logeons dans une maison cubique en pierre beige à étage, derrière de hauts murs qui enclosent un grand jardin. Un garçon d’une douzaine d’années, parfaitement anglophone vient à notre rencontre, aide à monter nos valises, propose du thé, allume la télé (très grand écran) et nous apporte même son ordinateur. Sa grand-mère est présente mais elle ne parle que le russe.

Notre chambre est vaste mais vide hormis 2 lits, une armoire et deux chaises les murs gris n’ont pas été peints (ni plâtrés). La salle d’eau est carrelée de neuf C’est très simple mais suffisant.

S’il avait fait soleil nous aurions été ravies de profiter du jardin. Il pleut. Nous nous sentons un peu abandonnées. Nous dînons seules à 7h30. La table est garnie des salades habituelles, herbes, fromage, lavach en plus d’un saladier rempli de dolmas toutes chaudes. La dame apporte un pichet de boisson au sirop d’abricot « fait maison », puis du thé.

Arménie-ouest de Gümri à Yereruik, Aragatsavan, Talin, Dashtabem

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sous la pluie, le long de la frontière turque, dans le brouillard….

 

Gohav a sorti du four 4 magnifiques beureks dorés. Nous en emporterons un pour le voyage.

Nous faisons nos petits sandwichs roulés, mélangeons fromage blanc, crème aigre et cerises en bavardant. Deux jours, et nous nous sentons en famille. Nous avons tant à nous dire….

Adieux : nous promettons de nous écrire, se revoir, peut être…

Il pleut. Nous quittons Gümri par une petite route qui longe un lac entre Turquie et Arménie. Un peu plus loin nous apercevons le lac derrière les barbelés. La vue serait magnifique s’il y avait un  rayon de soleil. Sous les nuages gris l’eau est d’argent. ON arrive à des collines caillouteuses.

Un écriteau invite à jeter un coup d’œil à la ville d’Ani – en Turquie – 8km de très mauvaise piste. Nous renonçons après quelques minutes. De loin en loin, des miradors surveillent la frontière. Un berger vêtu d’une longue cape garde ses bêtes. Il fait un temps iralandais dans ces verts pâturages.

yereruik très ancienne basilique

La route d’Anipemza conduit à Yereruik où se trouve la basilique Saint Jean Baptiste du 5ème siècle. Notre documentation dit qu’ »elle ressemble aux basiliques syriennes illustrant la transition entre l’architecture romaine et l’art arménien »

Juché sur un piédestal aux marches hautes, ce grand bâtiment clair a un plan rectangulaire tout simple. Sa décoration est très fine et aussi très simple : bouquets de fleurs stylisés, croix et rosaces, chapiteaux aux feuilles d’acanthe.

Yereruyk : grande simplicité du décor

Au débouché de la route principale, un campement de nomades s’est installé avec deux grandes tentes, les moutons, un âne et un camion. Nous rencontrerons par la suite plusieurs très gros troupeaux avançant sur la route, entourant la voiture comme une marée laineuse – têtes noires, laine marron.

le campement des bergers nomades

Le paysage change : on traverse des vergers d’abricotiers. Aragatsavan est un gros bourg avec une gare, des petites maisons, des potagers à l’ombre des abricotiers mais aussi des HLM et une usine désaffectée. La route est de plus en plus défoncée. On circule à 10km/h. le GPS nous ordonne de quitter cette mauvaise route pour une autre, pire encore. Il y a tant de trous qu’on se retrouve plus souvent à l’arrêt qu’en marche. Cette petite route ne traverse pas un village. La conduite est épuisante.

cathédrale de Talin sous la pluie

On arrive par surprise à Talin grosse bourgade qu’i n’a même pas de station-service digne de ce nom, juste une pompe qui ne vend pas de premium. La cathédrale se trouve à l’écart près du cimetière. Aucune information disponible sur place. Le Petit Futé décrit la façade ornée d’arcatures en pierre orange et grise et les vastes espaces intérieurs. Kaplanian souligne la lumière inhabituelle qui arrive par la coupole décapitée par le séisme de 1840. C’est le domaine des oiseaux. Sous la pluie, le jacassement des pies est plutôt sinistre. Je filme les fines frises qui bordent les ouvertures.

le donjon de Dashtabem

Route vers le sud : nous passons sans le voir devant le caravansérail très ruiné et atteignons la forteresse de Dashtabem (10ème – 19ème ). Elle est entourée par un mur d’enceinte en grosses pierres irrégulières avec des tours d’angles et se voit bien de la route. On passe sous un porche décoré avec des animaux fantastiques. Le donjon est étrange, rectangulaire à l’origine, en forme de croix, avec 4 tours qui dépassent.  Haut de trois étages, il est construit en pierres oranges très finement découpées, très lisses. Construction futuriste ? Un médaillon en arabe ou en persan témoigne de l’ancienneté de l’édifice. A l’arrière, une grue rouillée raconte qu’il a été restauré autrefois. Autour du donjon un chantier de fouilles archéologique a creusé de dangereuses tranchées qu’il faut éviter. Evidemment aucun panneau ne renseigne le visiteur. Kaplanian p140 m’informe que « l’inscription au dessus de l’entrée est en arabe et que le bâtisseur appartenait à une famille Shahaddide règnant sur Ani pour le compte des Seldjoukides en 1174 »

Le GPS nous renvoie à Talin pour retrouver M1. Epuisée par els routes défoncées, la conductrice est ravie de trouver un axe principal. Repassant par le même itinéraire, nous trouvons le caravansérail bien en ruine, indéchiffrable.

monastère de Marmachen

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Le monastère de Marmachen dans le creux du vallon

 Le monastère de Marmachen se trouve à une quinzaine de km de Gümri vers le Nord Ouest tout près de la frontière turque. La route traverse des zones de ruines et à  proximité du site un dépotoir, sacs en plastique volants et gravats. La route devient une piste pleine de trous qui descend en lacets.

Nous avions imaginé un  monastère perché sur une colline comme les autres vus précédemment. Marmachen est niché dans un creux. Marmachen se mérite. La descente sur la route défoncée en épingles à cheveux est une épreuve. Mieux vaut finir à pied. Tout à coup, les coupoles émergent d’une floraison blanche et rose. A l’arrière, un petit canyon, un ruisseau qui a créé en aval un petit lac, plus loin paissent des troupeaux dans une prairie vert vif. Un coin de paradis après l’enfer du séisme. Deux églises : une grande et une petite qui se ressemblent ; un mur circulaire comme une tholos, à l’intérieur, comme à Garni : une église à plan cruciforme très ruinée.

Marmachen avant l’orage

Des noirs nuées d’orage s’accumulent. Les bergers à grands cris rassemblent leurs troupeaux. Le vent se lève. J’avais envie de dessiner. Nous avons juste le temps de rentrer en voiture ; une grosse goutte s’écrase sur le pare-brise. C’est l’averse, courte mais drue. Quand nous atteignons la ville la pluie a cessé.

Le monastère d’Haghpat sous le soleil

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le monastère d’Haghpat

La lumière très belle du matin nous invite à retourner au monastère d’Haghpat. Nous découvrons la grande fontaine (1256) toujours en fonction. Il y a même un miroir pour y faire un brin de toilette. Le fronton triangulaire est soutenu par des colonnes trapues aux chapiteaux carrés formant de belles arcades.

On entre d’abord dans le Gavit avec ses 4 très grosses colonnes. L’église Saint Néchan (Saint Signe)  fut bâtie de 976 à 991 par les frères Sembat et Gurgen, fils de la reine Khosrovanouch. Le dôme fut l’œuvre de l’architecte Tiridate d’Ani qui avait réparé celui de Sainte Sophie de Constantinople. Un balcon spécial est réservé à la famille Kiourykian. Ce matin, la lumière est superbe pour admirer les fresques du 13ème  : un Christ Pantocrator qui ressemble à celui des églises byzantines, domine dans la coupole au dessus du chœur. Dans les autres fresques on devine une Cène.

A côté de la grande, la petite église Sourb Astvatsatine est très mignonne.

Le Khatchkar où figure le Christ en croix est tout à fait exceptionnel. De plus il est coloré au rouge de cochenille. Cette cochenille aurait été très recherchée dans les cours égyptiennes à Constantinople et en Europe.

Dans la bibliothèque, les jarres enterrées m’avaient intriguée. Les panneaux officiels donnent une autre explication : dans ces jarres étaient entreposés du vin et des produits laitiers. L’atmosphère humide était favorable à la conservation des manuscrits et de la nourriture ; A chaque invasion, les moines cachaient les manuscrits précieux dans des cavernes. Au 13ème siècle les Mongols torturèrent les frères pour connaître les cachettes. Mais les moines ne donnèrent pas les « perles aux cochons ».

Dans le Gavit d’Hamzasp (1257) se réunissait l’assemblée des moines. Deux puits de lumière (erdik) éclairaient le refectoire. Le sol du Gavit est pavé de pierres tombales qui littéralement mettaient les puissants de la famille Kourikyan à nos pieds.

De Dilijan à Odzun

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le petit car jaune avec sa bouteille de gaz

Départ tardif. Les employés de Paradise Hotel n’arrivent qu’à 9h et le petit déjeuner est servi à 9h15. Un énorme 4×4 nous bloque dans le parking. Le chauffeur arrive, sans se presser, colosse russe à la mesure de sa machine.

La route M8 suit un vallon boisé.  Nous retrouvons les écriteaux de la route de la Soie. Dans la région de Lori, nous traversons des alpages, prairies où vaches et chevaux paissent en liberté, non loin il reste quelques névés.

Vanadzor est une grande ville, la 3ème d’Arménie. Tours et barres roses sont bien rouillées. Les bus roulent avec des grandes bouteilles de gaz comprimé sur le toit.

La route M6 de Vanadzor à Tumanian est enserrée dans une vallée très étroite entre la rivière tumultueuse Pambak et la voie ferrée qui court sur d’impressionnants ponts ferroviaires repeints en rouge. Quelques cafés, deux hôtels, pas un village. Le revêtement de la route est crevé de nids de poules. La route tortille. On n’avance pas bien que les distances soient courtes. J’ai hâte d’arriver quelque part. Depuis Vanadzor affleure du granite plus ou moins altéré. Une énorme coulée de basalte, juste avant Toumanyan modèle le paysage. La route la franchit par trois tunnels. Les prismes se superposent. Plusieurs coulées s’empilent- volcanisme spectaculaire !

Odzun

La rivière Debed a creusé une vallée très étroite entre des versants à pic. Les villages sont construits sur le plateau. La route « serpentine » (selon Jack) monte en lacets serrés au village d’Odzun.

Odzun église

Nous trouvons une église très ancienne (580) très grande massive, avec une grande coupole. Nous avons peu le loisir de l’admirer : en restauration, elle est entourée d’un échafaudage métallique. Les tailleurs de pierre découpent des dalles à la scie circulaire dans une poussière et un bruit désagréable. Nous parcourons d’un regard distrait les anges du décor et les ornements végétaux de feuille de vigne et de grappe de raisin autour du porche. Des fleurs bleues poussent sur ls murs de la galerie extérieure à arcade le long de la  nef.

la stèle d’Odzun

Un monument énigmatique : la stèle d’Odzun (7ème siècle) est posée sur un piédestal de six marches très hautes. La stèle rectangulaire est percée de deux fenêtres allongées où sont suspendues deux colonnes de roche verte au grain très fin gravées. Selon nos guides y figurerait la conversion de Tiridate. Je n’ai pas reconnu le roi avec sa tête de sanglier comme sur la miniature du Matanadaran.

Goshavank -Aghavnarank- Haghartsin : monastères près de Dilijan

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Goshavank

 

Le GPS reconnait Goshavank : 6.3km sur « Monsieur 4» comme s’obstine à énoncer la voix synthétique féminine. Tournez à droite sur la route sans nom qui monte sous de beaux piliers de grès.

J’en profite pour une promenade matinale sur le bord du ruisseau. Le village de Goshavank est très petit. Un parking pour les visiteurs est occupé par les marchandes d’herbes et de souvenirs et un  B&B.

Le monastère, fondé en 1188 prit le nom de son fondateur à la mort de celui-ci. Mekhitar Gosh (1130-1213) fut un chroniqueur, un fabuliste. Les explications des panneaux sont très précises mais il n’est pas facile de se repérer sur les plans Car deux églises s’appellent Grégoire : Grégoire l’Illuminateur et saint Grégoire. Il y a en plus une église dédiée à la virge et une Bibliothèque construite sur deux étages qui fut détruite par un incendie au cours de l’invasion des Mongols au 13èmer siècle. On prétend que les traces noires de l’incendie sont encore visibles (plutôt la suie des cierges !).

Selon le Petit Futé :

– « Juriste, Mkhitar Gosh a rendu hommage aux textes de loi des trois confessions (chrétienne, juive et musulmane) ainsi qu’aux textes bouddhistes en réservant des niches dans les murs de l’église principale. Il s’agissait en même temps de protéger le lieu des razzias musulmanes »

Cherchant les niches, je découvre des nids d’hirondelles un peu partout dans les coupoles. Les murs sont gravés de textes arméniens indéchiffrables pour nous mais hommage appuyés à l’écriture arménienne ? On admire la variété du décor, dentelle de pierre autour du porche de Saint Grégoire, colonnes torsadées, motifs à chevrons, à diamants, stalactites, étoiles de David, entrelacs végétaux…

En face, sur la colline, un clocheton : l’église saint George et le tombeau de Gosh. J’y monte pour faire la photo de Goshavank.

Aghavnarank

Aghavnarank n’est pas à notre programme. Nous le découvrons sur le plan de Dilijan offert par l’hôtel. Le village est tout près de la route. Après il faut abandonner la voiture et poursuivre à pied. « Niet machine ! » un jeune homme nous parle en russe comme si on comprenait, je comprends que le monastère est à 1km. Je pars donc sans mon sac, sans eau, sans téléphone et remonte la rue qui traverse le village. Les maisons sont construites dans de beaux jardins. Partout la literie, couettes et oreillers prennent le soleil sur les barrières de bois ou aux fenêtres. Une Lada bleue me dépasse. Elle ne craint pas les grosses pierres et se gare au bout du village. Je demande si je suis bien sur le chemin du monastère dans mon russe simplifié « manastir davaï ! »Quelques centaines de mètres plus loin, la route est barrée. La barrière est cadenassée « RESERVE DE DILIJAN ». il faut un permis pour entrer. Je rebrousse chemin et retrouve le monsieur de la Lada avec son épouse., étonnés que je sois déjà de retour. La dame – en chaussons – me fait signe de la suivre. Elle me parle en arménien, si on contourne le grillage il ne m’arrivera rien. On passe donc par des broussailles piquantes et des orties. Il y a un passage dans le grillage. Au retour il suffit de se glisser entre les barreaux. Ainsi accompagnée, je me dois d’aller au bout. La Réserve est un arboretum. Les arbres sont étiquetés en latin. Je reconnais Taxus baccata, l’if, le hêtre… Des flèches rouges balisent le chemin. Je dois grimper une bonne demi-heure passer deux fois le ruisseau sur des passerelles de planches (impossible de passer à gué). Enfin, les ruines apparaissent. Il ne reste qu’une tour, la coupole a été décapitée. Les explications en français sont illisibles. Je redescends d’un bon pas. Pas trop vite pour ne pas butter contre une pierre (je ne peux pas me permettre le luxe de me blesser dans cette réserve ou je suis sans permis et sans téléphone). Une bonne heure plus tard, je suis de retour. Ce n’était pas 1kilomètre mais 1 heure qu’il fallait comprendre !

La télécommande ne veut plus ouvrir la Kia. Qu’importe puisque nous avons la clé ! Nous n’avions pas prévu qu’elle déclencherait l’alarme. Nous traversons le village toutes sirènes hurlantes. Notre passage à Aghavnarank ne sera pas passé inaperçu !

Monastère d’Haghartsin

Le monastère d’Hagharstin n’est pas du tout au village du même nom situé sur la route mais à 7km dans la montagne. Facile puisque le GPS le connait ! La forêt est très équipée en coin pique-nique. Tout le long de la route, des auvents avec tables et bancs certains rustiques en bois d’autres en élégant fer forgé, barbecue pour les brochettes, sont occupés par des familles ou des pêcheurs. Ici aussi les vaches vont et viennent librement et s’invitent au déjeuner. Œufs durs (du buffet de l’hôtel) et fruits secs en plaques fines qui ressemblent à du cuir, achetés à Gueghart. A 15 heures nous arrivons au monastère. Trois grands cars nous ont précédées.  Les visiteurs sont arméniens et russes.

Ce qui m’étonne tout d’abord, c’est que le monastère est blanc. Ensuite, ses dimensions sont hors de proportions des petites églises que nous avons visitées.  Enfin, il paraît tout neuf. Des tailleurs de pierre terminent le pavement en dalles blanches de comblanchien qui prendront peut être une patine beige avec le temps. De nombreuses constructions ont été rénovées avec un tuf plus clair que la pierre d’origine. Colonnes et arcs ont été remontés. Il faut être attentif pour retrouver les fragments d’origine. Les toits de tuiles rouges sur le réfectoire choquent un peu. Non loin de là on a construit un grand bâtiment tout neuf.

Ici, aucune explication. Les panneaux multilingues « sous le contrôle de l’épiscopat d’Etchmiadzine » n’ont pas cours ici.
Je prends le Kaplanian et bizarrement je ne reconnais pas grand-chose. Où est le linteau représentant la Vierge ? Pourquoi rien sur les inscriptions qui occupent toute la surface du porche du Gavit de l’église Saint Grégoire ?

La modernité du réfectoire détonne. On l’a meublé de tables rondes. Troncs et branches de bois brut ont été découpés, des bûches servent de sièges.

Monastère de Tatev

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le monastère dans la splendeur des pommiers en fleurs

Wings of Tatev Tramway :

Une route excellente mène à la gare du téléphérique très moderne, restaurant panoramique en verre. Le Téléphérique « le plus long du monde, inscrit au livre des records » passe au dessus du canyon du Vorotan (5.7km, 320m) évitant ainsi une piste en lacets impressionnante et pas recommandée pour le châssis de notre berline. 4000dram aller-retour (3000dram aller seul). Nos compagnons sont deux arméniens amoureux et équipés lui d’un i-pad, elle d’un i-phone, francophones et endimanchés : lui costume en velours, elle robe rose collante. On immortalise leur voyage avec l’i-pad mais le canyon sera flou.

le canyon de Vorotan et la piste en lacets vue du téléphérique

Nous cherchons sans le trouver le Pont de Satan au dessus du Vorotan. Le voyage dure un quart d’heure. Vu du télécabine, le monastère de Tatev est accroché sur la falaise, nid d’aigle. A pied, il surgit derrière un verger de pommiers en fleur. Splendeur du printemps ! Deux poivrières se détachent sur les alpages, une grande et une petite, couvertes d’un toit en accordéon. Un sentier de pas japonais dans l’herbe mène au monastère enclos d’un haut mur.

Monastère de Tatev

Le monastère vu du téléphérique

Construit au 9ème siècle (895). Kaplanian p125 narre la jolie histoire de Ter Hovannes, second évêque de Tatev qui, enfant ayant perdu les poules de sa marâtre, se réfugia au monastère… La cathédrale Pierre et Paul est imposante, malheureusement précédée  d’un porche 19ème siècle qui jure avec l’ensemble. Le tambour de la coupole est finement décoré. L’intérieur est très dépouillé.

tombe de Grégoire de Tatev

 De nombreux panneaux multilingues commentent la visite et racontent l’histoire mouvementée du monastère qui connut son époque de gloire entre le 11ème siècle et le 14ème quand l’université réunit jusqu’à 500 personnes, philosophes, musiciens, peintres, calligraphes et miniaturistes. En plus des nombreux séismes qui l’ont frappé, des invasions et des pillages seldjoukides, plusieurs révoltes de paysans eurent lieue au 10ème siècle protestant contre les décrets des religieux. En 915 les paysans renversèrent le myrrhe et tuèrent le clergé. En 1003, le roi de Siounie démolit Tsourabend en représailles à l’assassinat de l’évêque du monastère. Au 11ème siècle apparut également une secte hérétique des Tondrakian réclamant l’abolition de l’Eglise, l’égalité des classes et des sexes. Les plus radicaux niaient l’existence après la mort, professaient l’athéisme et la guerre des classes (selon les panneaux).

En plus de la grande église Pierre et Paul, il y a deux petites églises, la chapelle Notre-Dame, Sorb Astvadzadzine, la petite église Saint Grégoire (1295), et la tombe de Grégoire de Tatev(1340-1411).

L’église Astvadzadzine est très mignonne. En entrant je suis étonnée de la hauteur de sa coupole, au moins trois fois la longueur de la nef. Très grande simplicité de l’intérieur tandis que les murs extérieurs sont couverts d’inscriptions gravées.

Nous visitons en détail les installations monastiques, la résidence de l’évêque (attention marches très hautes), avec de nombreuses niches dans les murs – placards ou bibliothèque ? – et une très belle vue sur le canyon. Le réfectoire des moines, la boulangerie avec le four (tonir) (grand jarre pour cuire le pain arménien ou lavach . il y avait également un scriptorium, un matenadaran  une auberge pour les pèlerins, des bains médiévaux et une fontaine. L’édifice le plus étrange est le Gavazan : colonne oscillante cerclée de bandes métallique. Deux hypothèses sont évoquées la première serait la détection des séismes on raconte aussi qu’elle fit fuir les guerriers seldjoukides qui l’auraient prise pour une colonne diabolique…

la colonne oscillante – sismographe ou diabolique?

A l’écart du monastère, le moulin à huile a été restauré. Le pressoir de pierre est très bien conservé ainsi que les grosses vis et autres accessoires. Une exposition de très belles illustrations présente les plantes arméniennes oléagineuses : sésame, chanvre, moutarde, tournesol pavot mais également colza,ricin, camelina sativa ( ?), lallemantia, ces deux dernières que j’ignorais totalement.

Sur la route de Novarank

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coquelicot et Ararat

 

La route M2 est maintenant à 2 voies, la chaussée a quelques trous, rien de très gênant. Sur la droite, dans  des bassins rectangulaire,  pisciculture : on vend le poisson vivant sur le bord de la route. Les cigognes sont nombreuses.  Nous approchons de Nakhijevan. Iran n‘est pas loin, la zone turque  large que de quelques kilomètres seulement.

Les coquelicots et diplotaxis colorent le sol en faisant un grand parterre rouge à traits jaunes. Je découvre aussi un mini coquelicot violet. Nous prenons nos derniers clichés de l’Ararat à Yeraskhavan.

E117, se dirige plein Est à travers une chaîne de montagnes rougeâtres très découpées. Plusieurs villages sont bâtis de maisons basses aux toits couleur de paille fort agréable à l’œil (tôle peinte ou asbest ?). Au col le GPS annonce 1799m. Arrêt apéro près d’une fontaine : apéro au yaourt liquide salé qui ressemble à l’ayran turc. On passe un autre col Tukh Manuk (1795m) puis la route suit une rivière où l’eau est très abondante et le courant très fort. Au printemps les montagnes sont d’un beau vert vif sur les crêtes rouges. De loin nous découvrons d’autres sommets enneigés. – peut être les montagnes au nord de Jermuk qui dépassent 3000m ?Nous dépassons le village d’Areni où les vignerons proposent sur le bord de la route la production locale : du vin rouge conditionné dans des bouteilles en plastique taille maxi. Le plastique nous rebute.

le canyon de Novarank

La route de Novarank s’engage dans un étroit canyon entre de très hautes parois criblées de grottes où l’on signale toutes sortes d’oiseaux, condors, « oiseau charogneux », rapaces et chauves-souris. Évidemment les oiseaux en liberté ne sont pas là pour attendre les touristes et nous n’en voyons aucun.

Aujourd’hui la circulation est intense sur cette petite route. Le 1er Mai est jour de pique-nique. Les familles arméniennes arrivent à bord de vieilles Lada, le toit chargé de sarments ou de brindilles, le coffre plein de couvertures et de victuailles. Alors que je photographie le monastère, une famille m’appelle. Ils sont une dizaine assis sur une couverture, deux adolescentes parlent anglais, ils mangent des kebabs toutes sortes de boulettes et des dolmas. J’aurais volontiers partagé leur repas ;

Novarank

Il y a un monde fou à l’entrée.

Je fais connaissance avec un nouveau personnage : l’architecte Momik(1260-1330) miniaturiste, sculpteur architecte qui construisit au 14ème siècle (1333) la très belle églises Sourb Astavatsadine : église-mausolée à deux étages avec un curieux escalier double menant au second niveau.

Les sculptures sont très fines. La pierre claire, de couleur crème se prête à toutes les fantaisie du sculpteur. Sur le tympan la Vierge à l’Enfant se trouve entre les archanges Gabriel et Michael. Les décors ressemblent plus à ceux des églises européennes qu’à ceux des églises arméniennes plus anciennes que nous avons vues. La délicatesse des sculptures, l’allure étrange de ces marches encadrant l’entrée sont très pittoresques mais la foule est très agaçante. Chacun veut se faire tirer le portrait debout devant l’entrée de l’église à l’étage. Un homme brandit une poignée de cierges qu’il compte allumer. Il pose pour la photo. Sans compter ceux qui ont gravi avec peine l’escalier et qui, pris de vertige, sont coincés à la descente !Nous ne nous attardons pas devant les khatchkars pourtant magnifiques ni dans le Gavit où nous ne trouvons ni la scène de chasse, ni la pierre tombale au lion du baron Sarkis que je comptais photographier pour montrer à notre voisine Madame Sarkis.

Au bord du ruisseau nous avions remarqué un restaurant où l’on déjeune au bord de l’eau sous des tentes en tunnel de toile bleue. Dès que le garçon apporte la carte nous comprenons que nous avons choisi un endroit luxueux, spécialisé dans le poisson (très cher). Nous commandons donc du poulet (pas cher) accompagné d’une garniture. Expérience gastronomique décevante : le poulet est dur, la garniture, des frites. Le spectacle est dans la salle : une tablée de colosses est installée devant une table chargée de victuailles, un nombre impressionnant de bouteilles de limonades et jus de fruit s’aligne sur la table. Nous n’avions pas  vu tout d’abord les petits verres discrets et la bouteille de vodka dans le seau à champagne qu’on a renouvelée plusieurs fois. Le Russes boivent et mangent en proportion. Repas pantagruélique !