Berat : citadelle et quartiers modernes

CARNETS DES BALKANS/ ALBANIE 

Mangalem et la mosquée des célibataires

pigeons

Dans le jardin, notre hôte élève entre 20 à 30 pigeons « modèle cowboy » blancs et bruns qui ont la particularité d’avoir de longues plumes sous les pattes là où les oiseaux ont ordinairement des écailles. Pigeons de race et de collection. « il ne sont pas voyageurs » a-t-il précisé. Ils font sans doute des concours .Il vient de les soigner. De temps en temps il vient avec un autre colombophile, prélève un pigeon qu’il emballe dans un journal enroulé. On ne l’a jamais vu les libérer pour voler. Cet élevage me fait penser au roman Hakawati de Rabih Allameddine que j’ai lu cet hiver et au vieil homme de Madaba (Jordanie) pigeons perché sur sa terrasse, qui sifflait les pigeons en vol.

modèle cow boy!

Avec le lever du jour les pigeons m’ont éveillée. Je me suis installée pour écrire sur le rebord du muret. Tout à coup j’ai senti quelque chose sur mon pied : la tête de la grosse tortue curieuse. Une autre petite est venue visiter mes tongs bleues. Elles sont étonnamment rapides. Les tortues sont endémiques , il y a peu nous avons arrêté la voiture pour en aider une à traverser la route.

transport du ciment

Vers 7 heures, les sabots d’un âne ont résonné dans la ruelle en pente à nombreuses reprises. Il remonte le ciment qu’on gâche en bas de la rue dans des caisses en plastique pour répare une maison plus haut. De nombreuses maisons de Mangalem sont ainsi restaurées et converties en chambres d’hôtes. Notre propriétaire en possède plusieurs dans la rue.

8heures, il vient nous chercher pour le petit déjeuner. . Au petit déjeuner, il y a du melon délicieux et un gâteau genre Forêt Noire que je mange plus par politesse que par goût. Je retrouve le groupe des français qui étaient à la Mosquée du roi. Ce matin ils vont visiter la Citadelle, j’aimerais me joindre à eux pour profiter des commentaires du guide. Ce ne sera pas possible annonce le guide, ils montent en voiture. Pas de problème je comptais bien faire la promenade à pied ! A 9h, je monte un bon kilomètre sur une rue pavée de galets bien glissants ; pour la montée je ne peine pas ,  il fait encore une température agréable .

Histoire de Berat

La citadelle est entourée de hauts remparts byzantins  protégeant la ville .Les  empereurs byzantins furent  vaincus par les Croisés en 1204.  Michel Commène II  Doukas , despote d’Epire (1230-1268) entra en conflit avec Manfred de Sicile et lui céda Corfou puis il s’’allia avec ce dernier et Villehardouin pour combattre les byzantins Michel et Jean Paléologue. . Les catholiques notamment les Anjou vouaient contrôler la Via Egnatia allant de Dürres  à Constantinople. En  1417, elle fut occupée par les Ottomans. Après la défaite de Skanderbeg au siècle suivant (siège de Berat en 1455) , Berat  ne fut plus jamais assiégée. En 1808, Ali Pacha s’en empara par la ruse et le poison.

A la différence des citadelles visitées pendant notre voyage : Kruja, Prizren, Kotor ou Shkoder, qui étaient en ruine, la citadelle de Berat est habitée : les rues  sont tranquilles, des maisons ont des jardins, des arbres fruitiers (en ce moment les abricots sont mûrs), de beaux porches arrondis en pierre calcaire soigneusement taillés, des murs blancs parfois chaulés.  Les marchandes ont étalé des nappes de dentelles et de la lingerie ancienne brodée, beaux vêtements qui ne déparent pas.

Musée Onufri .

Musée Onufri

Le Musée Onufri est installé dans l’Eglise de la Dormition de Sainte Marie, es-cathédrale orthodoxe, construite au 13ème mais remaniée en 1797. Le mobilier, iconostase et chaire sont en bois travaillé et doré avec le plus grand soin. J’ai retrouvé le groupe des français et leur guide ; il fait remarquer les animaux sculptés, les fleurs et les fruits qui racontent les légendes. A l’apoque on savait déchiffrer les symboles. L’iconostase porte des icônes dont deux d’Onufri, le célèbre peintre d’icônes du 16ème siècle. Onufri fut un des premiers à avoir signé ses icônes. On sait qu’il faut prêtre à Elbasan mais son lieu de naissance, sa mort sont un mystère. On lui attribue des icônes aussi bien en Albanie qu’en Grèce, en Macédoine jusqu’en Roumanie. Il est célèbre pour son « rouge onufri » et pour avoir introduit le rose dans les icônes.

Je n’aurais pas osé à aller derrières l’iconostase, le guide y entraine les touristes pour montrer les fresques encre visibles. Elles avaient été badigeonnées à la chaux. Un nettoyage les rend visibles ; C’est là qu’en 1965, à la période où les communistes détruisaient les églises , on découvrit derrière l’autel deux « codex » copie de la Bible sur des cahiers manuscrits écrits en lettres d’or. Par chance, les destructeurs prirent  conscience de la valeur de leur découverte. Ils sont maintenant conservés à Tirana.

Dans le bâtiment annexe les icones sont  commentées soit avec un QR code (encore eût- il fallu que la wifi soit disponible) soit sur des fiches plastifiées. J’ai recopié pour els icones que j’ai préférée :

Saint Jean Baptiste

 La Présentation du Christ au Temple (n°9 le rouge  du manteau splendide et roses caractéristiques d’Onufri, mouvement des membres et plis déjà observés au Musée de Korçe ;  dans la merveilleuse Déisis, le Christ porte une tunique rose et la Vierge, un riche manteau rouge. On voit aussi plusieurs représentations de Saint Jean Baptiste portant sa tête.  J’ai beaucoup aimé une Annonciation (n°21) et la Nativité de la Vierge (19) ainsi que les 40 martyrs de Sébaste où le ciel doré est gravé de 40 couronnes. .

minaret de la mosquée rouge

Je poursuis ma promenade dans la citadelle, en flânant plutôt qu’en visitant systématiquement. Au sommet de l’acropole je trouve logiquement la citerne, comme les châteaux d’eau modernes sont perchés / Une sorte d’esplanade porte les restes de bâtiments et les ruines de la Mosquée blanche dont le minaret est cassé, un peu plus loin les restes de la Mosquée rouge,. Sous l’Acropole, la petite église de la sainte Trinité 13ème 14ème est fermée,. Je descends le long des remparts et trouve une grande tête de Constantin sur une place à proximité de l’Eglise Constantin et Hélène (1639) fermée elle aussi) .

Sainte Trinité

Le Musée Ethnographique se trouve à mi-chemin, il occupe une belle maison ottomane, comme tous les musée ethnographique il contient de beaux costumes, des outils des artisans : ferronnerie, menuiserie, et à l’étage on a reconstitué le çardak balcon ouvert avec un coin élevés servant d’habitation d’été, on y travaillait aussi, on tissait. 3 fenêtres orientées au nord, rafraîchissaient  l’air.

Dans la soirée, je me promène dans  Bérat, passe le pont Goriça, le vieux pont de pierre 1777, 130 et 9 arches.  Un panneau rappelle qu’Evleya Celebi y fait référence, par la suite j’ai cherché mais pas trouvé, mon édition est lacunaire.  Passé le pont, j’arpente le quai du côté de Griça. Un cheval blanc est attaché, des chèvres paissent, atmosphère très paisible. J’entre dans l’Eglise Saint Spiridon (1864) son porche s’ouvre sur une galerie à 9 arcades. A l’intérieur la basilique est vaste avec ses 3 nefs. Comme à la mosquée, il y a à l’étage une galerie pour les femmes. Dans la cour poussent des aubergines ;

J’ai retrouvé la famille française qui est arrivée cet après midi à l’hôtel avec leur guide francophone très sympathique. Il nous montre au sommet de la montagne le nom ENVER toujours là.  Je lui dis que ces inscriptions géantes me rappellent un film albanais que j’ai vu autrefois où un instituteur faisait écrire des slogans dans la montagne ; Le guide connait ce film c’est Slogans (2001) : on peut encore le visionner sur Youtube en cherchant Parullat :

Il me reste encore à explorer les monuments de la ville moderne : la Mosquée des Plombs (16ème siècle) également citée par Evleya Celebi qui a fait la liste des monuments d’Ahmet Bey. L’intérieur est très sobre, je remarque un beau Minbar de bois ainsi que la galerie des femmes au moucharabieh ondulant et un vitrail éclairant avec des rayons rouge/bleu/jaune et vert.

L’église Saint Dimitri qui est en face de la mosquée, est toute neuve avec une belle iconostase et un  lustre impressionnant à l’aplomb de la rosace marquetée au sol. Très grande du dehors, l’intérieur paraît plutôt intime.

Je fais un détour avant de rentrer à la Mosquée des Célibataires qui est juste sous le jardin. Je fais des photos des fresques extérieures, mais encore une fois impossible de rentrer. Curieusement,  sous cette mosquée il y a un magasin d’habillement tout à fait profane.

Avatar de Inconnu

Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

Une réflexion sur « Berat : citadelle et quartiers modernes »

  1. Onufri est connu en Roumanie, mais comme: « Onofrei »… et chez nous, « le çardak » est:
    « cerdac »…etles saints: Sfantul Spiridon, Sfantul Dimitrie (ou:Dumitru)

    J’aime

Laisser un commentaire