CARNET BULGARE

La route, de Sofia à Glojené
Nous quittons Sofia par l’autoroute A2, en direction de Varna et de Ruse(nord-est). Dans la plaine thrace, les blés sont mûrs et les tournesols en fleur. L’autoroute traverse ensuite des montagnes chevelues couvertes d’épaisses forêts, passe sur des ponts spectaculaires et des tunnels. Nous la quittons pour piqueniquer sur les bords d’un lac à Pravetz (golf et village de vacances).
Yablanitsa, fin de l’autoroute. Le GPS nous envoie sur une petite route de campagne vers le village de Glojéné. Un écriteau bleu en cyrillique indique le monastère. On revient donc en arrière pour emprunter une mince bande de ciment qui grimpe raide dans la montagne.
Le monastère, sur son piton rocheux

Le monastère, perché en haut d’un piton rocheux, apparaît de temps en temps dans les feuillages. Au détour d’une clairière, enfin, on le découvre.
De loin, on voit surtout l’étage de planches de bois noirci dépassant sur son soubassement de pierres sèches. Sur une plateforme, on a installé de grandes tables de bois où les visiteurs boivent à toute heure de la soupe dans des bols de céramique marron aux motifs beige et noirs formant une sorte d’écossais ressemblant à la céramique des potiers d’Horezou en Roumanie. En face, dans la salle du restaurant on regarde le Tour de France (pas très monacal).

Le portail arrondi est surmonté d’une sculpture de bois avec un écusson à l’effigie de Saint Georges, on passe par une sorte de tunnel aux dalles inégales pour arriver au cloître : c’est là que nous logerons dans un bâtiment crépi de blanc aux portes et poutres noircies, au toit de lauzes. L’église est en ciment blanc. Un autre bâtiment à étage surmonte une fontaine de grosses pierres. Des marmites anciennes sont suspendues à un vaisselier de poutres noires. Deux petits musées sont consacrés à la Révolution bulgare : on montre la cachette d’un des héros Levski dans l’autre sa cellule décorée de couvertures bariolées vertes et rouge avec le tableau d’un vieux pope occupé à des travaux d’aiguille. Je remarque le poêle. Autant il fait chaud l’été, autant l’hiver doit être rigoureux.

Notre chambre, en pointe comme la proue d’un navire, a ses fenêtres équipées de double vitrage. Murs blancs, un grand lit, armoire, table et chaises en pin clair verni. Le plafond est de lattes foncées montées en arêtes de poisson, une vraie œuvre d’art. Tapis et kilims recouvrant le sol, dans des tons bleus et roses, apportent une touche chaleureuse. La douche est rudimentaire (on éclabousse les WC), le lavabo minuscule. On ne s’attendait pas du confort dans un monastère !
Nous passons l’après midi sur le pic rocheux, à dessiner, écrire et surtout étudier la nouvelle carte et y transcrire l’itinéraire. Le GPS, programmé par Balkania, nous guidera, mais nous voulons une vue d’ensemble;
19h30, dîner d’un bol de soupe du Monastère : haricots blancs assaisonnés de persil frais, délicieuse, de kebab (allongé comme une saucisse) salade de pommes de terre aux oignons et un e merveille : le yaourt bulgare de buffle aux myrtilles, épais, crémeux, ressemblant plus à du fromage qu’à nos yaourts français.
On se couche tôt à Glojéné : à 20h30, les grilles sont fermées. Nous sommes les seules touristes. Le monastère ne compte qu’un moine, jeune aux longs cheveux pas bien contenus par le petit chignon réglementaire et aux voiles noirs. L’hébergement et la restauration sont tenus par trois femmes assez jeunes, dont deux parlent français, et un homme en short qui a passé son temps à regarder le sport à la télévision.
Après avoir trié les photos sur la vieille télé de notre chambre, je tente une promenade vespérale qui sera bien courte : le tour du promontoire rocheux. Je m’attarde au jardin où mûrissent de belles tomates et rangées de haricots. On se couche tôt, assommées de chaleur et de nouveauté.
La nuit a été fraîche en montagne, les étoiles innombrables. Le silence seulement rompu par les cloches d’un troupeau au loin. Les chauve-souris ont voleté dans le ravin.. Pas d’office nocturne, ni de chants d’église comme j l’avais fantasmé. Le jour m’a éveillée vers 6h. Je me suis habillée en vitesse pour assister au lever du soleil derrière l’église. La grosse boule rouge s’est élevée derrière les crêtes chevelues. Dès que le soleil a commencé à chauffer, je suis retournée dans le cloître.
Assise sur les marches de l’église cadenassée, je fais l’inventaire des curiosités : hémérocalles et œillets d’Inde forment une bordure autour du parvis de grandes dalles de marne gris clair (les mêmes que les lauzes). Le muret est en roche beige caverneuse – dolomite ou tuf calcaire ? -. Le cloître est construit autour de la plateforme rocheuse légèrement bombée, chiendent et chicorée en fleurs bleues en tapissent le tour. Deux petits thuyas, deux buissons de roses jaunes et un petit pêcher poussent d part et d’autres des marches. Avec des pierres grises irrégulières, on a délimité une bordure fleurie de soucis fanés, géraniums sauvages et lys défleuris. Un noisetier et un aulne ont poussé tous seuls. Des poteries ressemblant à des amphores sont disposées à chaque coin. Des piliers de bois foncé soutiennent la galerie.
Petit déjeuner complet au monastère : deux fromages différents kachkaval jaune sans beaucoup de goût et siréné ressemblant à de la féta, un œuf, des tranches de saucisson, de la confiture de myrtille et du miel.
A l’orée de la forêt, le troupeau de vaches nous barre la route. Sur le mince ruban de ciment qui rejoint la route, on ne rencontre personne, et c’est tant mieux. A l’entrée du village de Glojéné, le monastère sur son piton rocheux se voit bien. Une raide chaussée y conduit. C’est par là que le GPS comptait nous faire monter !



















