Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants – Mathias Enard

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Joli objet que j’ai convoité plusieurs semaines,la collection ACTES SUD est toujours séduisante!

Et quel titre! Une citation de Kipling mais aussi sorte de refrain qui revient au cours de la narration:

 

« je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l’amour ; au vide, ils répondent en construisant des chateaux et des temples. Ils s’accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards ; chacunfait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage. On les conquiert en leur parlant de batailles, de rois d’éléphants et d’êtres merveilleux…. »

Certes, l’argument est mince et court le récit.

Du 17 avril à la saint Jean 1506, quelques semaines, Michel-Ange, à la demande du sultan Bajazet se rend à Constantinople pour jeter un  pont sur la Corne d’Or. L’épisode est véridique, comme l’est aussi son  projet et celui de Leonard de Vinci qui a été refusé par le Sultan. Mathias Enard nous livre donc un roman  poétique très bien documenté.

C’est un roman d’amour aussi, des amours troubles et inachevées, passion du poète pour Michel-Ange sans retour. Trouble de Michel-Ange pour l’androgyne chanteur ou chanteuse andalous(e), amour inabouti. Sensualité, ivresse, désirs non-dits.

L’artiste visite Constantinople, Sainte Sophie l’impressionne, il  relève les plans de la coupole dont il s’inspirera pour Saint Pierre de Rome. Aux parfums byzantins de la Ville, se mêlent ceux de Grenade, tombée il y a peu.

Intrigues, menaces sourdes. Est-ce le pape Jules II qui a armé le bras qui menace le sculpteur? ou est-ce la jalousie? Le Sultan honorera-t-il ses promesses : il a attiré l’artiste en faisant miroiter une fortune et voilà qu’il cède un village perdu en Bosnie comme tout salaire des plans et des maquettes que Michel-ange lui a présentés:

« Turcs ou romains, les puissants nous avilissent »

Plus que de batailles, et d’éléphants, le roman chante l’ivresse, la poésie, l’amour mais aussi les manipulations des princes.

« Frôlement historique », annonce le 4ème de couverture, j’aurais aimé toutefois que Mathias Enard approfondisse plus son sujet, donne plus à voir d’Istanbul, sentir les épices.

Le Voyage en Grèce – H. Duchêne – Bouquins (iles ioniennes)

Voyager pour Lire/Lire pour Voyager

Lectures ioniennes

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Le gros « Bouquins » m’a déjà accompagnée pendant de longues semaines au cours de nos vacances en Grèce continentale, dans le Dodécanèse et dans la Mer Egée. Pour un livre broché, sa couverture a drôlement bien résisté aux épreuves de l’empaquetage des valises, de la plage et de divers mauvais traitements. Lourd à emporter en voyage? Ses 1140 pages promettent de belles lectures, son index géographique, ses cartes, ses biographies et son glossaires sont tout aussi utiles!Le Voyage en Grèce et l’Odyssée ont presque suffi pour un mois!

Céphalonie, Ithaque, Corfou après Venise, j’étais partie avec des a-priori vénitiens, je pensais trouver des chevaliers, des Croisés, des Capitaines, la Bataille de Lépante….j’imaginais aussi des images antiques. Et bien pas du tout! la bibliographie m’a réservé une surprise : je me suis trouvée propulsée au début du 19ème siècle avec Chateaubriand, Lord Byron avec son Journal de Céphalonie et de fil en aiguille j’ai lu des auteurs que je ne connaissais pas comme Trelawny dans les Derniers jours de Shelley et Byron, Emerson…Et voilà que je découvre les guerres d’indépendance grecque dans un contexte géopolitique que j’ignorais. Je savais les îles ioniennes vénitiennes mais j’ignorais que cette domination ait pris fin avec l’épopèe napoléonienne et qu’ensuite elles furent l’enjeu de l’équilibre des puissances françaises, britanniques  mais aussi russe et turques… et cet éclairage m’a offert d’autres prespectives de lectures!

Ithaque avec Homère, certes mais aussi avec Schliemann , les passages de son journal sont extrêment pittoresques. Chance ou bluff? A sa descente de barque, Schliemann trouve un meunier qui lui loue son âne et qui lui raconte l’Odyssée à sa manière. Avec l’aide du meunier et d’autres habitants l’archéologue trouve le palais d’Ulysse, identifie le port de Phorkys et les divers lieux homérique. qaund on pense qu’un siècle et demi plus tard les spécialistes discutent encore pour identifier l’île actuelle d’Ithaque et l’Ithaque homérique?

Moins de surprise au 20ème siècle : Durrell, bien sûr, Lacarrière, Kazantzaki.

C’est l’Ithaque de Cavafy qui conclue le volume : ce poème m’a poursuivie, je le cherchais depuis si longtemps et il arrive juste à point, à Ithaque!

Lecture pour Venise -Jean DIWO : Les chevaux de Saint Marc, Une épopée romanesque entre Orient et Occident

Lire pour voyager, voyager pour lire : préparer un voyage à Venise

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Une semaine avant le départ pour  Venise, ce livre, soldé à  Intermarché, me faisait un clin d’œil. De lecture facile, il a occupé les deux siestes du week-end sous le lilas.

Je n’ai pourtant aucune sympathie pour les Croisés. Les  Francs de la 4ème Croisade  guerroyèrent à Zara (Zadar)  pour le compte du Doge de Venise Enrico Dandolo, prirent Constantinople d’abord pour y installer un empereur légitime  acquis à la cause de Venise et du Pape. Les exploits des chevaliers en tournoi ou au combat m’ennuient, leurs amours ne me touchent que moyennement.

 Geoffroy de Villehardouin échappe à cette règle, en tant que chroniqueur. Je l’ai déjà « rencontré » plusieurs fois au cours de nos voyages, à Monemvassia ou à Githyo dans de petits musées où ses écrits étaient cités. J’aimerais pouvoir le lire.

L’histoire commence à Lagny, à quelques kilomètres d’ici. Le tournoyeur Guillaume d’Amiens rencontre Marie, la fille d’un drapier. Ensemble, ils entendent le prédicateur Foulques qui prêche la croisade. Pour l’amour de sa dame, Guillaume se croise,  part à Venise, de là en Dalmatie puis à Corfou. C’est notre voyage ! Je supporterai donc les récits chevaleresques ! A proximité de Corfou, sur un ilot le « vaisseau d’Ulysse » il fait la connaissance d’Angelo, le neveu du Doge, architecte que le Doge Dandolo vieux et aveugle emmène pour emporter les trésors de Byzance à Venise. Le trésor convoité, justement les chevaux de l’Hippodrome qui deviendront les chevaux de Saint Marc. Les nefs feront escale à Ithaque où nous irons,  et à Andros que nous avons longée au mois de mai. J’ai toujours du plaisir à peupler en imagination des lieux connus. Au retour, Guillaume se mariera à Chios – au monastère que nous avons visité peut- être ?

L’armée croisée se disloquera dans d’interminables batailles et intrigues à Constantinople. Luttes de l’Empereur latin pour gouverner un territoire grec hostile, rivalité entre les barons pour des fiefs orientaux…Je suis un peu déçue, l’auteur s’attache à ses héros et nous fait bien peu de description de la ville, de ses palais et de ses magnificences. Il ne suffit pas d’écrire que la ville recèle des trésors, il aurait fallu nous les montrer mieux ! S’attacher avec plus de pittoresque à l’étiquette byzantine…Je me suis ennuyée à Constantinople dans le roman alors que les fresques roumaines racontant le siège de la ville m’avaient bien amusée.

une semaine plus tard, sur la place Saint Marc je n’ai d’yeux que pour eux, ils sont encore plus beaux que je ne l’imaginais. Au Palais Ducal  d’immenses ttableaux racontent la bataille de Zarra, le siège de Constantinople et je remrcie l’auteur de m’avoir servi de guide!