Ribera au Petit Palais – Ténébres et Lumière

Exposition temporaire jusqu’au 23 février 2025

Saint Jérôme et l’ange

Jose Ribera (1591 -1652) est né en Espagne, il arrive à Rome en 1605 juste avant la fuite du Caravage en 1606, en 1616 Ribera part à Naples. 

Plus sombre et plus féroce que le Caravage, sa peinture est présentée comme « ténébrisme et extrême férocité du réalisme ».

Allégorie des cinq sens : l’odorat

La présentation du Petit Palais adopte l’ordre chronologique, avec les premières salles de sa production romaine puis napolitaine. On entre dans la première salle tendue de rouge où sont accrochés de grands portraits de philosophes, mendiant et deux tableaux des Allégories des cinq sens. 

Un philosophe

Le philosophe ci-dessus est un  modèle que le peintre fera souvent figurer dans ses compositions : avec son crâne chauve, rond, ses oreilles décollées. Je m’amuse à le chercher et à le retrouver au cours de l’exposition.

Une autre série est celle des Apostolados, les Apôtres, même format, même posture sur un fond le plus souvent très sombre avec un éclairage oblique.

Saint Barthélémy (je retrouve le chauve)

De grands tableaux sur des thèmes religieux sont très construits, éclairage clair-obscur caravagesque

Le Reniement de Pierre

le Reniement de Pierre me fait penser à un  tableau de Caravage à Saint Louis des Français.

Jésus et les docteurs

A côté des grands tableaux religieux, une série de portraits des Apôtres, un cycle des saints martyrs  et des Philosophes. Les grands penseurs sont représentés en haillons témoignant peut-être de la richesse intérieure contrastant avec l’aspect extérieur.

Esope

Ribera s’intéresse aux marges de la société, prend pour modèle la plèbe napolitaine, une gitane, les scugnizzi de Naples.

Le pied-bot

 

Grand tableau en pied d’un couple de barbus, l’un d’eux est une femme allaitant un enfant. Cette femme a vraiment existé. Un autre tableau très marquant est l’enfant au pied-bot. Goût pour les infirmités, les monstruosités.

martyre de Saint Bartélémy

Ribera fut aussi un virtuose de la gravure. Certaines caricatures témoignent aussi du goût du burlesque, qui annonce Goya. Certaines études de martyres ont été croquées sur place s’inspirant  des tortures de l‘Inquisition active à Naples, alors espagnole. Un monsieur dans l’exposition a montré bruyamment sa réprobation, Non! d’après lui « l’Inquisition ne torturait pas, ne mettait pas à mort ». Saint Barthélemy après être crucifié est même dépecé, un tableau  représente l’arrachement de la peau. 

Apollo, et Marsyas

La plupart des tableaux illustrent des sujets religieux mais le peintre ne s’est pas interdit les grandes compositions mythologiques. Le supplice de Marsyas grimaçant s’apparente aux souffrances des martyrs. le Silène ivre est aussi monstrueux.

Certains tableaux sont plus clairs, plus souriants, colorés. Deux grands paysages dans les bleus sont agrestes, paisibles, de minuscules pêcheurs tirent des filets, un homme allume un feu… Décidemment, le peindre a plusieurs cordes à son arc!

C’est donc une bien belle et riche exposition. En introduction, un podcast de RadioFrance : des Midis de Culture

 

 

La chine des Tang- une dynastie cosmopolite (7ème-10ème S.) Musée Guimet

Exposition temporaire jusqu’au 3 mars 2025

De la Chine des Tang j’ai  des souvenirs de lectures anciennes de la série des enquêtes du juge Ti de Robert Van Gulik,.

Palefrenier et cheval

La dynastie Tang (618 -907) marque une époque de prospérité, de calme. marchands et commerçants circulaient librement. Les prisons étaient vides. Une population de 50 millions d’habitants se répartissait sur un territoire allant de la Chine orientale à l’Asie Centrale.

Deux cavaliers poterie vernisssée

Les chevaux sont très présents dans l’exposition, chevaux indispensables dans les conquêtes militaires. En 665, 700.000 chevaux étaient élevés dans les fermes d’Etat. Rapides et puissants, ils étaient originaires d’Asie Centrale, de la vallée de Ferghana (actuel Ouzbékistan).

Joueuses de polo

Même les dames montaient à cheval, certaines étaient même joueuses de polo. L’exposition montrant la mode féminine avec de jolies statuettes en céramique montre qu’elles ne dédaignaient pas le costume masculin avec un caftan et des bottes.

Cavalière

Ces céramiques donnent une représentation très vivante de la vie à l’époque des Tang. Fan des tanagras grecs, je suis conquise par ces statuettes chinoises.

Cheval hennissant

La capitale Chang’an comptait 1 million d’habitants et sa densité dépassait celle de Byzance . Construite selon un plan régulier, les 110 quartiers se répartissaient de chaque côté d’une large artère. Deux marchés irriguaient la ville en marchandises provenant de tout l’Empire mais aussi de Corée, Japon, Perse et Indes. La Route de la Soie entretenait les échanges avec Byzance. 

Chamelier et chameau

Cette ville cosmopolite se trouvait à La Croisée des pensées et des religions : Confucianisme et Taoisme y étaient les plus répandues avec le Bouddhisme

Gardien du temple : chimère

D’autres cultes étaient pratiqués comme le Zoroastrisme, le Manichéisme. Il y avait une église chrétienne de nestoriens. 

Musiciennes et danseuses

La vie culturelle était raffinée, avec musiciens, comédiens, magiciens. l’exposition présente des services pour l’alcool, ou la vaisselle pour le Service du Thé

Service à thé miniature

C’était aussi un monde très lettré, on a dénombré 50.000 poèmes qui ont été calligraphiés. Les artisans travaillaient des matériaux précieux rares comme l’argent, le lapis-lazuli, le jade, le verre venait de Byzance.

On a représenté les étrangers dans cette ville cosmopolite, les marchands sogdiens de la route de la Soie, les étrangers au nez pas du tout asiatique comme le personnages ci-dessus, même un personnage à la peau noire…

Musicien sur son chameau

 

Revoir le Pierrot de Watteau au Louvre

Pierrot intitulé autrefois Gilles, fut  peint par Watteau (1684-1721) découvert en 1826,dans la collection de Vivant-Denon, entra au Louvre en 1869. 

Le tableau a fait l’objet d’une restauration et cette exposition le présente nettoyé, agrandi, accompagné de commentaires, de vidéos et de tableaux soit peints par Watteau soit traitant du sujet de la comédie italienne au XVIIIème siècle ou plus tard.

Pierrot et le Théâtre comique

Arlequin Empereur de la Lune – Gillot

Deux troupes officielles officiaient à Paris : La Comédie Française dont le personnage-vedette était Crispin, valet manipulateur et La Comédie Italienne avec Arlequin et Pierrot. La Comédie Italienne fut interdite par les édits de 1697 et de 1716 : elle avait déplu par des plaisanteries ayant offensé les élites. Des comédies privées jouaient un répertoire burlesque pendant les foires sur des tréteaux en extérieur et dans des parades. 

Le tombeau de maître Arlequin soldat gourmand – Gillot

Watteau originaire de Valencienne vint à Paris en 1702 et, en collaboration avec Claude Gillot était spécialisé dans les représentations du théâtre à l’italienne.

Watteau et la conception de Pierrot

Watteau : Pierrot

On a supposé sans preuve que la toile avait servi d’enseigne dans un café tenu par un ancien acteur spécialiste du rôle de Pierrot. 

la postérité de Pierrot

Après 1721 un nouveau personnage triomphe dans les parades devant les salles de théâtres : Gilles, valet grossier.

Arlequin et Pierrot Derain

Evolution du personnage de Pierrot 

Un acteur de génie Debureau joua une pantomime au Théâtre des funambules avec une tenue blanche, campant un sombre Pierrot repris par Sarah Bernhardt 

Sarah Bernhard dans Pierrot l’assassin – Photo Nadar

Au XXème siècle

Picasso, Derain, Juan Gris ont peint leurs Pierrot. J’ai bien aimé celui d’Alberola

Le clown d’Albérola

On assiste aussi à la projection d’une séquence des Enfants du Paradis qui s’est inspiré de Debureau

Au Palais de la Porte Dorée : Chaque vie est une histoire

Exposition temporaire jusqu’au 9 février

Dans le Bonheur… Diadji Diop (époxy)

Le Palais de la Porte Dorée fut construit à l’occasion de lExposition Coloniale de 1931. Il a été transformé en Musée Permanent des Colonies, puis en Musée de la France d’Outremer jusqu’en 1960. Les collections ethnographiques furent transférées en 2003 au Musée du Quai Branly. l’actuel Musée de l’émigration, ouvert au public dès 2007 ne fut inauguré officiellement que 7 ans plus tard après des controverses par le Président Hollande en 2014. 

Le bâtiment de Laprade avec le bas-relief de la façade d’Alfred Janniot – tapisserie de pierre –  les fresques de la Salle du Forum de Ducos de la Haille, le Salon des Laques forment un ensemble Art Déco remarquable et classé.

Amalia Laurent – A l’usage des fantômes

Cependant toutes ces œuvres à la gloire de la Colonisation, de l’extractivisme sont difficiles à regarder aujourd’hui à l’heure de la Décolonisation. Le Palais a offert à 13 artistes de construire une promenade poétique en revisitant le monument par un regard critique. 

Le nageur rouge… « Dans le Bonheur«  CLIC qui accueille les visiteurs émergeant des buissons dans un crawl puissant, donne le ton. Sa couleur rouge transcende les couleurs de peau, il peut évoquer aussi l’émigration par la mer, dans les pirogues – l’artiste Djadji Diop est sénégalais. 

A l’usage des fantômes

Masquant l’entrée de la Salle du  Forum, Amalia Laurent, a suspendu un immense voilage teinté qui joue les effets de transparence et de lumière, l’œuvre, A l’usage des fantômes dansée sur la musique d’un gamelan javanais, se place à la limite du réel et des mondes parallèles. On devine, déformées les fresques, couleurs illisibles. Les fresques vantant l’action des colonisateurs et l’extraction coloniale des richesses de la natures se trouvent atténuées, brouillées par le voile. Il ne s’&git pas de détruire ou de faire disparaître l’héritage d’une période historique douloureuse mais d’ajouter un élément…

Kokou Ferdinand Makouvia (Togo)Aze zz Ame Are

Fantômes encore! L’artiste togolais, Kokou Ferdinand Makouvia, assailli d’étranges vibrations provenant d’une foule emprisonnée dans le Palais a inventé un rituel de purification pour apaiser ces présences. Il a confectionné d’étranges vases d’argile, cousus de fils de cuivre, dans lesquels des tubes sont destinés à recueillir les messages des visiteurs. Au pied des sculptures sont répandues des feuilles de Kpatima. Les messages sont brûlés, leurs cendres recueillies sont utilisées pour faire l’encre a disposition des visiteurs suivants….

Aung Ko House Project

Myanmar House Project de l’artiste birman Aung Ko

La maison-patchwork a été cousue par les visiteurs qui peuvent y trouver refuge. Une vidéo projetée montre la construction de maisons de bambous sur un fleuve, avec le transport fluvial des cannes puis la construction. La maison s’ouvre sur l’installation du togolais. 

La déambulation se poursuit entre des installations recyclant du matériel de bureau parlant, installation sonores de paroles d’enfants commentant les sculptures de la façade.

Teresa Fernandez-Pello

Teresa Fernandez-Pello a imaginé un mur électronique encadrant le grand To’o Mata des Îles des Marquises. Le dépliant du Musée a soutitré cette installation « se souvenir »

Rikrit Tiravanija et Vivien Zhang : Invasives

Une salle est tapissée de motifs phylogénétiques comme l’arbre de Ernst Haeckel.  Invasives , les plantes, un autre aspect de la migration.

Rive Droite

A l’étage, l’exposition est beaucoup plus fournie. Diverses œuvres évoquent plutôt des histoires personnelles de migrants, d’exils, d’errance ou de solitudes. Tableaux comme Rive Droite hyper-réaliste ou gravures, photos. Dans le Studio Rex des photos tentent de donner une présence et sortir de l’ombre ces hommes et ces femmes souvent sans-papiers, sans-droits

10 ans de Solitude – Assaf Shoshan

 

 

 

Barbara Chase-Riboud au Palais de Tokyo et au Louvre et Porte Dorée

Exposition temporaire

Quand un nœud est dénoué, un dieu est libéré

Barbara Chase-Riboud

Barbara Chase-Riboud est à l’honneur cette année à ParisSon œuvre se déploie dans huit musées parisiens prestigieux, dont Le Louvre, Orsay, le Quai Branly…

Ses sculptures trouvent leur place parmi toutes les installations du Palais de TokyoSes sculptures noires, colonnes doubles ou stèles, s’alignent dans une pièce noire . Sur les cimaises, des tableaux blancs, textiles. Fils noués qui accompagnent les grandes colonnes  noires et lisses. Ces bronzes rendent honneur aux femmes noires et aux luttes pour les droits civiques. 

Prise au dépourvu je n’ai rien compris à cette installation monumentale.

En revanche, j’ai beaucoup aimé, dans la petite salle attenante, l’écoute  de ses poèmes lus en anglais avec texte bilingue projetés sur l’écran From Memphis and Peking.  Textes évoquant les voyages à travers le monde, des villes, peut-être adressées à son mari la photographe Marc Riboud. 

Barbara Chase-Riboud est l’auteure de La Virginienne qui relate l’histoire d’amour de l’esclave Sally Hemings et de Thomas Jefferson, 3ème Président des Etats Unis.

Plus je recherche, plus Barbara Chase-Riboud m’intrigue. Deux podcasts ont occupé ma matinée de marche en forêt. Le premier des Midis de Culture est centré sur l’exposition actuelle

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-midis-de-culture/barbara-chase-riboud-artiste-plasticienne-70-ans-de-creation-enfin-celebres-1268651

et le second, d‘Affaires culturelles est plus ancien.

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/affaires-culturelles/barbara-chase-riboud-est-l-invitee-d-affaires-culturelles-6002190

Cette rencontre sur YouTube permet de mieux la connaître

Barbara Chase Riboud au Louvre

Et comme la personnalité de cette artiste m’a beaucoup intéressée, je me suis précipitée au Louvre pour voir 3 autres œuvres.

Colonne d’or sous la Pyramide du Louvre

En majesté, sous la Pyramide s’élève fièrement la colonne dorée. Mise en évidence dans un emplacement d’honneur,  voire…La pyramide est beaucoup plus grande qu’on ne l’imagine. Vue du dessous, elle est presque invisible. D’ailleurs, je suis passée sans la voir à ma visite précédente au Louvre. Il existe bien un escalier qui permettrait de l’approcher, interdit aux visiteurs. Trop loin pour pouvoir vraiment apprécier le travail du bronze à la cire perdue.

La Cape de Cléopâtre

Barbara Chase Riboud a visité dans sa jeunesse l’Egypte et ce voyage a beaucoup compté pour elle. La Cape de Cléopâtre est exposée dans le Département des Antiquités Egyptiennes. Pour parvenir à la statue, il faut parcourir toutes les salles et c’est un véritable plaisir de redécouvrir les statues, objets, instruments de musique…Tout à côté du plafond astronomique de Dendara. 

Découverte entre les granites sculptés: la Cape de Cléopâtre

Le lit de Cléopâtre se trouve dans la Salle des Caryatides dans le département des Antiquités Grecques. Il me faut donc retourner sur mes pas, retraverser les salles égyptiennes, descendre de nombreuses marches, en remonter autant parcours initiatique? 

Salle des Caryatides

Le lit de Cléopâtre est aussi constitué de plaquettes carrées de bronze mais elles sont mats. Ces sculptures sont accompagnées par les vers tirés de l’Opéra Portrait of a Nude Woman as Cleopatra, publié en 1987.

Lit de Cléopâtre

Non loin de là,  l’Hermaphrodite est couché sur son lit de marbre.

hermaphrodite endormi

Barbara Chase Riboud dans le Salon des Laques au Palais de la Porte Dorée

Le salon des Laques du palais de la Porte Dorée

j’ai continué ma poursuite des sculptures de Barbara Chase Riboud

Alors que j’avais été déçue de la mise en scène au Louvre, ici les sculptures Zanzibar noir et Zanzibar doré sont mises en majesté.

Zanzibar noir rehaussé de soie rouge
Zanzibar doré dans le Salon des Laques

les deux stèles s’accordent parfaitement avec les laques noires et les panneaux dorés, les œuvres se répondent.

Il reste encore cinq musées pour découvrir le reste de l’exposition. Je visiterai sans doute Orsay, Le Musée Guimet, le Quai Branly d’ici la mi-janvier mais cela fera l’objet d’un autre billet!

Myriam Minhidou – Praesentia au Palais de Tokyo

Exposition temporaire jusqu’au 5 janvier 2025

Myriam Minhidou est une plasticienne franco-gabonaise que j’ai découverte récemment au Musée du Quai Branly CLIC . J’avais été impressionnée par l’exposition Ilimb l’essence du deuil : le « serpent » musical qui réagissait au passage du visiteur, les larmes de sel sculptées, les instruments traditionnels m’avaient parlé.

Services

J’étais donc impatiente de voir plus d’œuvres dans les grandes salles du Palais de Tokyo. J’ai été désarçonnée par la diversité de la présentation.

 Objets, rituels, présence du corps de l’âme et de la mémoire dans notre relation au monde sans cesse déséquilibrée

peut-on lire sur la feuille de présentation.

Aer bulla

Je suis perdue dans des notions étranges comme la « Transsudation » ou les « mondes subtils » ou « Dechoukaj »

les vidéos m’ont mise très mal-à-l’aise Folie et La robe envolée

Je suis ressortie avec un  sentiment très mitigé, avec l’impression d’avoir raté cette rencontre.

 

Tituba – Qui pour nous protéger? au Palais de Tokyo

Exposition temporaire jusqu’au 5 janvier 2025

 

 

Tituba est l’héroïne du roman de Maryse Condé : Moi Tituba, sorcière noire de Salem (CLIC)

Cette exposition collective expose les livres de Maryse Condé . Onze artistes sont invitée, entre France, Caraïbes, Grande Bretagne et Etats Unis :

 Naudline Pierre, Abigail Lucien, Rhea Dillon, Miryam Charles, Monika Emmanuelle Kazi, Naomi Lulendo, Inès Di Folco Jemni, Liz Johnson Artur, Tanoa Sasraku, Claire Zaniolo, Massabielle Brun
Il sera question de deuil, de rituels, de sorcellerie peut être, de femmes caribéennes sûrement. 
Tituba qui pour nous protéger, Naudline Pierre (USA)

j’ai beaucoup aimé la vidéo (10’33) de Myriam Charles d’origine haïtienne, vivant à Montréal, à la mémoire d’une jeune fille assassinée. L’écran est troué d’un cercle dans lequel s’impriment des images plus intimes : la chambre de la jeune fille alors qu’hors cadres on voit des images de nature tropicale. Une marche funèbre est chantée en créole « Pakité m’égaré »

Liz Johnson Artur expose des photographies des manifestations à Londres de Black Life Matters

Installation étrange de parpaings émaillés construisant murs et barrières dans la pièce. Une armoire couchée en biais contient de la vaisselle en cristal cassée.

Naomi Lulendo présente 3 photographie au fond presque noir, clair obscur : Potomitan, Nuit Noire, Ombre portée (impossible à photographier avec mon téléphone. 

Le montage photographique de Claire Zaniolo montre des images de Guadeloupe. 

Massabielle Brun

Un ensemble, un peu étrange, envoûtant.


 

Figures – Malala Andrialavidrazana – Palais de Tokyo

Exposition temporaire jusqu’au 5 janvier 2025

Figures : fresque entière

Malala Andrialavidrazana est une artiste franco-malgache, architecte de formation. 

Figures est une fresque de 58 m x5 m conçue exprès pour la grande verrière du Palais de Tokyo. Elle est réalisée par collages numériques à partir de de 2000 sources d’images : cartes d’Atlas anciens, billets de banque  principalement. D’ailleurs, le titre Figures se comprend au sens anglophone de « chiffres », des montants des billets qui circulent. Figure, c’est aussi le visage d’un personnage emblématique comme Mobutu et son léopard qui symbolise aussi la ruse et l’autorité dans la culture swahilie. 

Mobutu, le léopard et l’idole pop

Dans le collage ci-dessus, le léopard zaïrois saute sur l’idole pop.

Cartes de géographie et bateaux qui relient les continents, qui ont transporté les esclaves, tout cela évoque une circulation mondiale, une mondialisation des marchandises et des personnes. Tous les personnages de la fresque sont en mouvement.

mondialisation

Ponts et barrages relient les continent. On imagine des univers africains, d’autres asiatiques. Et toujours  personnages et animaux bougent, nagent rament. Figures peut aussi évoquer les personnages célèbres comme Charlot, Cadet Roussel, La Semeuse et son bonnet phrygien et même Ramsès II sur son char, arlequin qui symbolise la fourberie, les navigateurs européens dont les « découvertes » sont synonymes de pillages, exploitation, esclavage et extractivisme.

Ramsès sur son char mais que vient donc faire l’orignal et la moto?

En cherchant bien, je découvrirai Nelson Mandela (billet de banque) , la frise de l’Evolution, une tortue tractée….

La semeuse

On pourrait rester des heures à détailler les personnages, à imaginer des circulations. Une dame me montre une minuscule souris sur une balançoire. Pour mieux identifier personnages et symboles trois écrans interactifs donnent des explications. Chacun se promène à sa guise.

Je suis étonnée par le nombre d’enfants très attentifs, d’adolescents de jeunes adultes. L’ambiance est très décontractée et ne ressemble pas à celle des expositions de l’Orangerie, Orsay ou le Luxembourg. Il y a aussi beaucoup plus d’espace.

 

Olga de Amaral – Fondation Cartier

Exposition temporaire jusqu’au  16 mars 2025

Olga de Amaral est une artiste textile colombienne née en 1932 à Bogota. Elle a étudié à l’Académie des Arts de Cambrook (Michigan) qui s’inscrit dans le mouvement Arts and Crafts et dans l’école du Bauhaus apportant une attention particulière au design et aux arts déco. Traditionnellement les femmes étaient orientées vers les textiles (comme Anni Albers ou Sophi Taeuber avant elle). Avec son mari Jim Amaral, ils fondent une entreprise de textiles décoratifs Telas Amaral.

Dans les années 1960 Olga de Amaral expérimente nombreuses techniques de tissages. Elle incorpore à la laine du lin du coton mais aussi du crin de cheval et même de l’or ou du plastique. Elle expose en 1967 à La Biennale internationale de tapisserie à Lausanne. 

Riscos en sombra

Elle souhaite que ses œuvres soient détachées des murs pour être appréhendées comme des sculptures autour desquelles on peut circuler plutôt que des tapisseries garnissant les murs. A cette occasion, une médiatrice (passionnante) évoque la « querelle de Lausanne » opposant les cartonniers et les tenants de l’art textile plus moderne CLICUn autre médiateur, toujours à propos de la biennale de Lausanne fait allusion à l’aspect genré de la tapisserie qu’on associe à un art féminin. Cette visite à la Fondation Cartier a été passionnante grâce aux commentaires très nombreux des médiateurs. De nombreuses visites guidées sont également proposées.

Brumas

La petite salle du rez-de-chaussée est occupée par les Brumas qui sont des installations suspendues d’environ (190x90cm) en lin, gesso(apprêt) , peinture acrylique et papier japonais.  Ce sont des représentation de la pluie fine colorées de motifs géométriques. La série des brumas a déjà été exposée à la Fondation Cartier en 2018 dans l’exposition Géométrie du Sud CLIC que j’avais beaucoup appréciée. Les Brumas jouent sur le volume et sont vraiment à la limite de ce qu’on imaginerait qualifier de tapisserie. 

brumas

la Grande salle est occupée par des tapisseries monumentales Muro en rojos et Gran muro qui sont des assemblages de sorte de tuiles tissées évoquant les murs de briques ou même les feuilles mortes. 

Gran muro

On les a présentées avec de gros rochers d’ardoise pour souligner le lien avec le paysage. Le titre de la section de l’exposition est Tisser le paysage. D’autres oeuvres sont faites de bandes tissées entrelacées ou reliées entre elles enroulées figurant les lianes de la forêt ou même des falaises escarpées

Lianas

Ces bandes jouent avec la lumière, j’ai pensé à Soulages à cause de cela. strates de textile, lianes…

Cenit patchwork doré

D’autre inspirations viennent de l’Or des Indiens précolombiens comme l’or des autels baroques des églises. Utilisant d’autres techniques, de bandelettes plus fines pouvant être dorées à la feuille d’or, elle compose des panneaux somptueux : plutôt rouge d’un côté dorés de l’autre

Cenit (côté doré)

Elle joue aussi avec les traditions précolombiennes, les nœuds qui étaient un véritable code,

En gris e rozado

Traditions mystérieuses qui garderont sans doute leurs secrets.

Olga de Amaral ne s’interdit aucune matière, ni même la matière plastique, la feuille d’argent ou le palladium…

paisage de calicanto

La dernière salle  ressemble à un sanctuaire avec ces stèles dorées d’un côté noires de l’autre  : le coton tissé est recouvert d’une épaisse couche de gesso doré ou revêtu de peinture acrylique. La série des Estelas comporte 70 pièces qui évoquent des mégalithes et des sites archéologiques précolombiens.

Estelas

 

J’en suis sortie éblouie

 

 

 

 

 

 

 

 

Balade autour du Périf de la Porte de Champerret à Issy-les-Moulineaux avec le voyage Métropolitain

 TOUR DU BOULEVARD PERIPHERIQUE AVEC LE VOYAGE METROPOLITAIN (4)

le Chalet des iles au Bois de Boulogne

De la Porte de Champerret à la Porte de Saint Cloud, le Périphérique va contourner les Beaux Quartiers. En creux, occulté ou même enterré, il court sous le Lac Supérieur en toute discrétion, sous le Jardin des Poètes à la Porte d’Auteuil, nous allons randonner sans être incommodés ni par le bruit ni par la circulation. 

Poème mythique de Jimenez Deredia -Costa Rica

Le Rendez-vous est Porte de Champerret devant le café La Chope rendez-vous confortable. En face, le terminus des autobus est abrité sous un auvent sobre. Pour la première étape, l’introduction et les repérages sur la carte, le groupe s’installe confortablement dans le Square de l’Amérique Latine orné de nombreuses statues : Francisco Miranda(1760-1816) – militaire à la destinée romanesque que je découvre ici.

Francisco de Miranda – Place de l’Amérique Latine Porte de Champerret

En demi -cercle, 7 bustes d’autres hommes célèbres sud-américain dont je ne connais que José Marti (Cuba).

Retour sur l’histoire des fortifications de Thiers.  La zone inconstructible, dans l’Ouest parisien,  est dédiée à des activités de distraction : vestige de la boite de la Main jaune où fut tourné le film La Boum, a gardé son enseigne. de l’autre côté du Périf se trouve l’Espace Champerret qui accueil des salons et des évènements divers. 

Un Drive Au bout du Champ qui propose des produits locaux divers, en face un potager est coincé sur le bord du périf, avec de très belles rangées de cardons et artichauts. Jardin exigu. 

La Promenade Bernard Lafay très agréable, nous conduit à la Porte des Ternes. La Porte Maillot annoncée de loin par la tout de l’Hôtel Hyatt dominant le Palais des Congrès. Ces constructions modernes occultent deux épisodes historiques : La Révolte (1750) rappelée par une Route de la Révolte . La Chapelle de la Compassion fut édifiée après le décès du fils de Louis Philippe (1842): le prince Ferdinand-Philippe d’Orléans, dont les chevaux de sa calèches se sont emballés effrayés par un tas de pierre qui barrait la route. Cette chapelle, Porte des Ternesa été déplacée lors de la construction du périphérique. Au passage du groupe – nous sommes particulièrement nombreux – on vient nous l’ouvrir. Je ne suis pas spécialement intéressée par les églises du XIXème siècle, porche roman, vitraux colorés. 

Au passage, vers la Porte Maillot, nous empruntons l’Avenue de Salonique ;  je remarque qu’on a conservé la dénomination Salonique remplacée maintenant par la Thessalonique grecque.

Verdissement de la Porte Maillot

J’ai toujours connu la Porte Maillot en chantier et encombrée de circulation de voitures et autocars. je constate avec plaisir qu’elle a été verdie et qu’à l’occasion des Jeux Olympiques on a planté des prairies fleuries avec les logos olympiques et paralympiques. La Porte Maillot est un jalon sur l‘Axe Historique qui part du Louvre par la Place de la Concorde, les Champs Elysées, l’Arc de Triomphe et qui maintenant conduit à la Défense. Dans les années 30 deux concours architecturaux furent organisés pour baliser cette Voie Triomphale prévue pour aboutir à la Croix de Noailles dans la Forêt de Saint Germain-en-Laie . Auguste Perret proposait une rangée de maisons-tours de 200 m de haut, d’autres architectes ont dessiné des pyramides mexicaines(Persitz) . La guerre en 1939 a mis fin aux aménagements. 

Monument Emile Levassor à la Porte Maillot (1907)

Kitchissime, le monument à la gloire de l’automobile! Emile Levassor au volant de sa Panhard semble sortir du bas-relief à grande vitesse.  Près de ce grand carrefour toujours embouteillé, à deux pas du périf, il a trouvé un emplacement idéal!

De l’autre côté du Périphérique, nous trouvons le Bois de Boulogne et suivons les rails du chemin de fer qui conduit au Jardin d’Acclimatation à travers bois. Sous des pins gigantesques, dans une clairière, Jens immobilise le groupe en un cercle pour les présentations traditionnelles et pour commenter le territoire que nous venons de traverser. Il rappelle la vocation de divertissement de cette Zone. A la Porte Maillot, sur l’emplacement du Palais des Congrès, se trouvait un LunaPark inspiré du parc d’attraction de  Coney Island et le Vélodrome Buffalo. les grandes métropoles entretenaient une véritable compétition dans le domaine des foires internationales et des parcs d’attraction. Hyde park et Crystal Palace ont inspiré le Bois de Boulogne et les Serres d’Auteuil. 

Le Jardin d’Acclimatation répond à un objectif double : divertir avec des attractions et un zoo. L’acclimatation est d’abord celle des plantes exotiques venant de toutes les parties de l’Empire colonial ainsi que les animaux exotiques. Plus sombre face de l' »acclimatation « : les zoos humains avec des reconstitutions de la vie coloniale en Afrique et en Asie, vie quotidienne et scènes de chasse. J’avais pris connaissance de telles horreurs dans l’exposition coloniale dans le livre de David Diop : l’Attraction Universelle .  J‘ignorais que ces zoos humains étaient des spectacles permanents. Il semble même qu’ils aient perduré jusqu’à la fin du XXème siècle. Le Vélodrome Buffalo conduit par Buffalo Bill n’était pas exempt des mêmes reproches. Les entrées du Jardin d’Acclimatation rénovées et élégantes en ferronnerie verte sont masquées par des colonnes horribles. Un grand chantier avec un échafaudage important et plusieurs étages d’Algeco empilés masque la Fondation Vuitton. Une nouvelle attraction est en construction  : des montagnes russes doivent remplacer le Dragon chinois. 

A l’occasion, Jens nous parle de la Fête à Neu-Neu (Neu pour Neuilly) qui remonte à 1815 sur la demande d’un abbé pour fêter la Saint Jean Baptiste et qui a perduré jusqu’en 1935, déplacée alors puisqu’elle se tenait sur l’emplacement de L’Axe triomphal de la Porte Maillot. 

La navette qui mène au chalet des îles

Nous traversons le Bois de Boulogne sous un beau soleil et longeons le Lac Supérieur. La Canotière est gratuite pour les porteurs de Pass Navigo . 

Sur les bancs en cercle de la Cascade nous  écoutons un rapide historique du Bois de Boulogne construit sur les fortifications de Thiers. A l’époque d’Haussmann Paris était dépourvus d’espaces verts. Alphand aménagea au Second Empire les Buttes Chaumont,(1867), à la suite le parc Montsouris les Bois de Vincennes et de Boulogne ainsi que les Serres d’Auteuil. Parcs aménagés « à l’anglaise » sur le modèle de Hyde Park et de Crystal Palace privilégiant la création de tableaux imitant les milieux naturels plutôt que de grands perspectives. La cascade en est un parfait exemple. L’eau des lacs provient de la Seine, pompée par la Pompe d’Auteuil. Le périphérique a été enterré à la Porte de la Muette pour ne pas gâcher l’ensemble. 

En haut les ultra-riches /en bas les sans abris

La construction d’un centre d’hébergement d’urgence pour les sans-abris a causé un scandale retentissant que nous raconte avec talent et humour Monique Pinçon-Charlotsociologue au CNRS qui a étudié avec son mari les Ultra-riches, et co-auteur de la bande dessinée Panique dans le XVIème

Monique Pinçon et son  mari ont étudié les Très-riches comme d’autres anthropologues ou sociologues les Indiens du Brésil ou les papous d’Océanie. Ils ont assisté à la manifestation de 1500 riches à l’Université Paris-Dauphine toute proche le 14 mars 2016. Furieux, ils protestaient contre le projet de construction d’un centre d’hébergement d’urgence pour les sans-abris. Cette BD est actuellement épuisée mais disponible sous format numérique et au Théâtre Essaion une pièce l’a mise en scène.

Malgré les protestations, le Centre a bien été construit.  Pendant la construction plusieurs incendies se sont déclarés. Pour ne pas nuire à la vue , le bâtiment est très discret, à l’ombre d’une rangée d’arbres, revêtu de bois. Il s’ouvre côté périphérique, pas de vis-à-vis gênant avec le voisinage. Seules les poubelles – bien rangées – témoignent de l’occupation du centre.

De la Porte de la Muette, nous découvrons l’hippodrome d’Auteuil et avons même la surprise d’assister derrière une grille à l’arrivée d’une course. 

Ginko et magnolias

Les Serres d’Auteuil méritent une halte. Dans un cadre soigné aux couleurs d’automne l’or des gingkos, l’orange des érables contraste avec le vert soutenu des magnolias. Rivales de Crystal Palace, les serres sont de belle taille – on peut seulement regretter que la modernisation de Roland Garros ait empiété sur leur territoire. 

orchidées

Orchidées, bégonias bromélies ou cactées. C’est un plaisir d’y flâner. Les serres sont ouvertes au public sauf celles des orchidées et celles des bégonias qui doivent être surveillées.

Porte de Saint cloud – Stade jean Bouin.

Après la vocation de parc d’attraction, celle de promenades, vient le sport : équitation, tennis, sports chics mais aussi football et rugby.

La piscine Molitor que j’ai fréquentée lycéenne, piscine découverte l’été/patinoire l’hiver a été remise en service après abandon par un hôtel de luxe qui a conservé le style Art Déco (la piscine est classée) et quelques graphs de sa période Street Art. 70 artistes de Street Art ont décoré les cabines, on peut visiter cette exposition mais elle n’est pas à notre programme. On passe à côté de la Rolls que Cantona a offert à la fondation de l’Abbé Pierre. 

Le stade Jean Bouin est enserré dans une résille élégante de Rudy Riciotti, l’architecte qui a réalisé celle du MUCEM .

Boulogne : maison Le Corbusier

Grand style pour cet immeuble signé Le Corbusier, la colonne semble porter l’élégante construction. Grande baies vitrées, pavés de verre : la lumière et l’air s’invitent. 

Parc des Princes et périf

Nous enjambons le périf  et traversons Boulogne pour arriver au Point du Jour joli nom évoquant le départ au point du jour pour une partie de chasse. 

Ile Saint Germain Dubuffet

Fin du voyage dans l’île Saint Germain les gardiens du parc nous laissent quelques minutes pour un arrêt-photo : il est 17 heures. Petite balade pour finir au bord de Seine avec les péniches.