JUMELAGE CRÉTEIL/POBE

J’ai eu du mal à m’endormir dans le vrombissement des ventilateurs et l’excitation des retrouvailles.
8h, heure française, 7h au Bénin, je pars vérifier que l’océan est toujours là. Les rouleaux, les petits crabes…la mer monte. Une vague mousseuse plus forte que les autres vient noyer le bas de mon boubou. Je remonte sur le sable sec.
Au petit déjeuner (une demi papaye au citron vert, omelette, fromage, confiture…) Moronikê me donne la carte SIM du téléphone de Parfaite que mon mobile débloqué accepte sans histoire. Laure, Stéphanie et Damien émergent plus tard. Moronikê a convoqué Thierry pour 10H30
L’orage
Le ciel s’assombrit et de grosses gouttes s’écrasent sur le pare-brise. Des éclairs déchirent le ciel. A l’entrée de Cotonou, il pleut si fort qu’on a relevé les vitres, réduisant ainsi notre champ de vision. De grandes pancartes, sur le bord du Chemin des Pêches, annonçent des projets immobiliers et la construction de 3 complexes hôteliers.
Pour les trois jeunes collègues, tout est neuf.
Damien pose les questions de Candide :
– « Pourquoi cette annonce : courant à vendre ? »
– « Les gens organisent des fêtes sur la plage, des mariages….Ils louent les paillotes. Les gens qui ont l’électricité posent de grands câbles qui traversent la route. » Explique Thierry.
Ecobank est bondé à la veille du long week end pascal. Nous faisons une longue queue tandis que des cordes tombent à l’extérieur. Au moins dans l’agence bancaire nous sommes à l’abri.
Centre Artisanal

Sous la pluie, la visite du grand marché Dantokpa est impossible. Thierry nous conduit au Centre Artisanal, imitation d’un village de cases où des marchands proposent des souvenirs. L’an passé, nous avions jeté un simple coup d’œil aux étalages, fatiguées par la visite de Cotonou et la chaleur. C’est donc une découverte pour moi aussi. Nous sommes les seuls touristes. Les vendeurs nous accaparent et nous invitent à l’intérieur des petites boutiques sombres. Je sors l’appareil photo, au moins ici, lieu touristique, on ne nous interdira pas de photographier, pensais-je naïvement.
je prends un coup de vieux!

Pendant que Stéphanie achète un masque, je compose des natures mortes. Dans la boutique de bijoux, Laure et Steph marchandent comme de vrais pros des colliers. Une vieille femme avec de grosses lunettes mange avec ses doigts du riz et de la sauce dans une bassine émaillée. Elle envoie sa fille chercher de l’eau pour se rincer les doigts. En attendant elle montre à Laure la coupelle où elle range sa monnaie et la laisse se servir. La fille ne revient pas . Laure a payé 1500CFA .A ce prix, je peux bien faire une première folie ! Le collier qui me plait est trop court, la dame a le même plus long mais ne peut pas le sortir avec ses mains sales. Elle se confie :
– « Tes filles sont bien élevées, pas comme la mienne qui a disparu et qui m’a laissée comme cela, sans eau pour me laver les mains ! ».
J’ai pris subitement un coup de vieux et gagné deux filles. Cette dame me dit qu’elle a 54 ans, elle est plus jeune que moi. Pendant tout le voyage on va m’appeler Maman et tous les Béninois seront persuadés que Laure et Stéphanie sont mes filles. Comme elles ont déjà acheté deux colliers la dame me fera un bon prix sans que j’aie besoin de marchander.

Damien cherche un masque. J’en profite pour photographier une magnifique sculpture aussi haute que moi représentant un Calao. Cet oiseau me fascine, l’objet ancien est magnifique. Pas question de l’acheter :
« il est trop encombrant pour voyager », j’explique au marchand.
–« j’ai son petit frère ! » rétorque –t-il brandissant un petit calao qui me tenterait bien.
Je suis devenue beaucoup plus sensible aux sculptures africaines depuis ma visite au Musée Branly et à l’exposition des marionnettes Bozos dans le Marais. Je prends un réel plaisir à regarder les objets. Les animaux m’attirent beaucoup. les masques sculptés dans du bois poli ou vernis, moins. Ceux qui ont l’air ancien et qui ont beaucoup voyagé m’intéressent mais le vendeur n’indique jamais la provenance : Burkina ? Mali ? Sénégal ? J’aimerais qu’il me raconte l’histoire de l’objet. Je reconnais aussi les masques béninois, Guédelé, les divinités du panthéon vaudou, ainsi que des bronzes intéressants représentant la cour d’un roi abrité sous un vaste parasol. Je photographie et provoque la colère des marchands.
» Vous photographiez et vous n’achetez rien ! »
Et me voici encore privée de photo !
stratégie

Chaque vendeur veut nous faire entrer dans l’échoppe. J’ai éprouvé une tactique d’évitement polie et souriante au Maroc. La stratégie est différente à Cotonou qu’à Marrakech. Les touristes sont beaucoup moins nombreux, ils sont même très rares. Chaque vendeur s’acharne à faire affaire et très vite, il est donc beaucoup plus entreprenant et devient carrément agressif quand il s’aperçoit qu’il ne vendra rien. Rapidement la visite me fatigue. Je fais mine de chercher « mes filles » tout le monde les a vues cela me permet d’éluder les visites dans les boutiques qui vendent des objets qui ne m’intéressent pas.
Je me souviens avoir lu ce récit dans VN! L’anecdote sur la méprise et ton coup de vieux m’avait bien fait rire!
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